• Aucun résultat trouvé

Au cours de ce chapitre, nous avons pr´esent´e la glace comme un mat´eriau au comporte-ment viscoplastique tr`es anisotrope qui se d´eforme essentiellement par glissement des dislo-cations basales. Cette anisotropie trouve son origine dans la structure cristallographique du cristal de glace pour laquelle les dislocations basales sont ´energ´etiquement beaucoup moins d´efavorables que les autres, grˆace `a la dissociation possible dans ces plans. La glace poss`ede ´egalement des similitudes avec certains semi-conducteurs tels que le silicium ou le germa-nium, tant au niveau de la cristallographie que du comportement m´ecanique.

Les observations r´ealis´ees en topographie X r´ev`elent que ce mat´eriau poss`ede une faible densit´e de dislocations initiale (ρ ≈ 108m−2) et laissent entendre que la multiplication des dislocations basales est d´ependante d’un m´ecanisme faisant intervenir des dislocations non basales sans pour autant expliciter le processus limitant la plasticit´e de la glace.

Nous avons ´egalement vu que la mobilit´e des dislocations individuelles ne pouvait expliquer la vitesse de d´eformation macroscopique, sugg´erant que les interactions entre les dislocations sont `a l’origine de m´ecanismes ou d’une organisation collective des dislocations de laquelle ´emerge le comportement moyen observ´e `a grande ´echelle. La plasticit´e de la glace est, comme celle de la plupart des mat´eriaux, h´et´erog`ene dans le temps et dans l’espace et pr´esente des caract´eristiques d’invariance d’´echelle. La mod´elisation de la d´eformation plastique en vue de la pr´ediction ou de la compr´ehension de propri´et´es m´ecaniques doit donc prendre en compte l’existence d’interactions `a longue distance entre les dislocations.

Dans ce contexte, les objectifs du travail pr´esent´e dans la suite de ce m´emoire consisteront d’une part `a tenter d’expliciter les m´ecanismes `a l’origine de la plasticit´e du monocristal de glace (chapitre III) et d’autre part `a d´eterminer dans quelle mesure et de quelle mani`ere ils permettent l’´emergence d’un comportement collectif des dislocations (chapitreIV) et quelles sont les caract´eristiques des h´et´erog´en´eit´es de d´eformation qui en r´esultent. Cette r´eflexion sera men´ee dans un cadre g´en´eral potentiellement applicable `a d’autres mat´eriaux cristallins, sur la base d’exp´eriences et de simulations num´eriques.

Ce qu’il faut retenir du chapitre II

.

La glace est un mat´eriau tr`es anisotrope : le glissement basal est

pr´epond´erant

.

Forte dissociation suppos´ee dans les syst`emes basaux (≈24nm) mais

pas dans les autres syst`emes.

.

Fluage : ˙γ ∝ τ

2

.

La densit´e de dislocations `a l’issue de la croissance est faible :

ρ ≈ 10

6

`a 10

8

m

−2

.

v

d

∝ τ exp

kTQ



.

Les dislocations non-basales jouent un rˆole dans la multiplication des

dislocations basales

.

La plasticit´e est fortement h´et´erog`ene dans le temps et dans l’espace

Mod´elisation de la plasticit´e du

monocristal de glace

Dans le chapitre pr´ec´edent, nous avons pr´esent´e la glace comme un mat´eriau exhibant une tr`es forte anisotropie viscoplastique, caract´eris´ee par le glissement quasi exclusif de dislo-cations basales. Quels sont les m´ecanismes ´el´ementaires responsables de ce fluage tr`es aniso-trope ? D’autres syst`emes de glissement participent-ils `a la d´eformation ? L’´etude pr´esent´ee dans ce chapitre a pour but d’apporter des ´el´ements de r´eponse `a ces questions, sur la base d’exp´eriences et de simulations num´eriques, les deux aspects se r´ev´elant ˆetre d’une in-dispensable compl´ementarit´e. En effet, l’approche exp´erimentale permet de r´ev´eler, `a une ´echelle d’observation macroscopique le r´esultat de m´ecanismes microscopiques complexes. Les exp´eriences permettent ainsi de mettre en ´evidence certaines caract´eristiques du com-portement m´ecanique (stades de fluage, validit´e de la loi de fluage, effet du vieillissement ou de la taille des ´echantillons) ou encore d’estimer certains param`etres physiques (´energies d’activation). L’ensemble de ces faits permet d’´emettre des hypoth`eses quant `a leur origine `

a l’´echelle inf´erieure, c’est `a dire le comportement des dislocations et leurs interactions. Les simulations num´eriques sont alors indispensables pour valider ces conjectures. Le retour vers l’exp´erience est ensuite parfois n´ecessaire pour approfondir les interpr´etations propos´ees. Ce chapitre s’organise de la fa¸con suivante : apr`es avoir justifi´e et pr´esent´e la sollicita-tion en torsion, nous pr´esenterons la m´ethode exp´erimentale utilis´ee puis les principales caract´eristiques du fluage de la glace monocristalline. Nous verrons ensuite les apports de deux diff´erents mod`eles de dynamique des dislocations :

d Ceux d’un mod`ele 3D de dynamique des dislocations discr`etes (DDD) (section III.4 page 67) qui permet, comme son nom l’indique, une description discr`ete des disloca-tions et offre notamment la possibilit´e d’´etudier les m´ecanismes ´el´ementaires de multi-plication des dislocations ainsi que leurs interactions. Le temps de calcul ´etant fonction du nombre de dislocations simul´ees, ce mod`ele sera par cons´equent utilis´e pour simu-ler les m´ecanismes ´el´ementaires au sein de volumes r´eduits (nous aurons notamment

recours `a des configurations simplifi´ees) et pour des temps simul´es courts (inf´erieurs `a la minute).

d Ceux d’un mod`ele dit de m´ecanique des champs de dislocations (FDM pour “Field Dislocation Dynamics”) (section III.5 page 92) qui d´ecrit les dislocations de mani`ere continue grˆace `a des ´equations constitutives ph´enom´enologiques d´efinissant leur com-portement et leurs interactions. Ce mod`ele permettra des analyses et interpr´etations `a une ´echelle sup´erieure `a celle concern´ee par la DDD, tout en restant `a l’´echelle du mono-cristal. Dans cette partie, la confrontation entre r´esultats exp´erimentaux et num´eriques permettra d’aborder la plasticit´e de la glace d’une mani`ere non conventionnelle grˆace `

a l’´etude de comportements singuliers en torsion simple et inverse ainsi qu’au cours et `

a l’issue de phases de vieillissement, mais aussi grˆace `a la mise en ´evidence d’effets de taille des ´echantillon.