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3. Revue de littérature sur le biais de transactions intérimaires

3.5. Conclusion

En résumé, les études se rejoignent pour affirmer qu'en pratique les décisions du gestionnaire actif et les changements dans les valeurs des titres financiers affectent systématiquement la composition et, par conséquent, le risque du portefeuille. Fama (1972) est le premier à avoir souligné le problème des mesures utilisant une seule période quand plusieurs mouvements se font à l'intérieur ou à l'extérieur de la période d'évaluation (entrée ou sortie de fonds des investisseurs et transactions).

Dans un souci de réaliser une bonne performance à la fin de l'année, les gestionnaires en compétition peuvent profiter des failles liées aux mesures de performance pour modifier leur exposition face au risque et ainsi influencer la valeur de leur performance. Ce phénomène appelé l’effet tournoi, exposé initialement par Brown et al. (1996), a fait l'objet de plusieurs études. Les transactions intermédiaires réalisées par le gestionnaire dans le but de modifier le profil risque-rendement du portefeuille biaise les mesures de performance. Afin d'atténuer l'effet de ce comportement sur la performance, les chercheurs ont vu l'intérêt d'utiliser les données quotidiennes et d'appliquer l'approche conditionnelle dans les mesures d'évaluation. Les conclusions sont toutefois mitigées à savoir si ces ajustements donnent une meilleure précision.

Quand la fréquence des décisions d'investissement est plus élevée que la fréquence de calcul des rendements, on est alors dans une situation de transactions intérimaires introduite par Goetzmann et al. (2000) et Ferson et Khang (2002). La mesure basée sur les pondérations du portefeuille ainsi que celle qui utilise l'approche SDF semblent les mieux adaptées pour contrôler la performance de ce biais. Le recours aux données quotidiennes et aux variables d'état est aussi pertinent quand on fait face à ce biais.

En général, la littérature a montré que l'évaluation de la performance n'est pas une tâche facile, et est sensible à la mesure appliquée, aux données utilisées et au style de gestion des investissements. C'est pourquoi plusieurs questions autour de l'évaluation des fonds mutuels demeurent d'actualité. À notre connaissance, notre étude est la première qui a pour

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objectif d'évaluer l'impact des transactions intérimaires sur la performance des fonds mutuels d'actions américaines en proposant une approche SDF basée sur les modèles linéaires à facteurs estimés d'une manière à tenir compte du biais de transactions intérimaires.

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4. Approche du facteur d'escompte stochastique

L'objectif central de l'évaluation de la performance est d'identifier les gestionnaires qui possèdent de l'information ou de l'habilité supérieure aux autres et l'utilisent de façon optimale pour générer une performance anormale. Dans le but de déceler les rendements supérieurs, un modèle d'équilibre est nécessaire pour nous renseigner sur les rendements « normaux » anticipés selon la notion de l'efficience semi-forte des marchés. La théorie moderne de l'évaluation des titres stipule l'existence d'un SDF en mesure d'évaluer l'ensemble des titres sur les marchés financiers. Ce chapitre décrit l'approche SDF, certains modèles SDF d'évaluation d'actifs utilisés par la littérature ainsi que la façon dont la performance est estimée.

4.1. Introduction

4.1.1. Définition du SDF

Le SDF, dénoté 𝑚𝑡+1, possède plusieurs appellations, selon le contexte, soit le facteur d'escompte stochastique, le taux marginal de substitution inter-temporel ou encore le kernel de prix. Selon la notion d'utilité marginale, le SDF mesure la quantité de consommation future que le ménage est prêt à céder pour obtenir une unité supplémentaire de consommation présente sans toutefois détériorer son niveau d'utilité. C'est le taux d'échange entre la consommation future et la consommation présente. Étant donné que le SDF contient tous les éléments nécessaires à l'évaluation des titres, il suffit de spécifier une fonction pour 𝑚𝑡+1 pour évaluer les actifs financiers, et ce sans le besoin de passer par la maximisation de l'espérance d'utilité.

4.1.2. Approche SDF dans l'évaluation des actifs financiers

La forme particulière que prend 𝑚𝑡+1dépend des préférences retenues et de ce que l'on cherche à tester, tel qu'expliqué en détails par Cochrane (2001). Plus fondamentalement, s'il

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existe un ensemble de marché contingent7 et s'il n'y a pas d'opportunité d'arbitrage, un titre

financier vérifie forcément la relation suivante :

𝐸𝑡 (𝑚𝑡+1𝑅𝑡+1) = 1 (1)

où :

𝑅𝑡+1 est le rendement brut (soit 1 + 𝑟𝑡+1); 𝑚𝑡+1est le SDF entre la période t et t + 1;

𝐸𝑡 représente l'espérance du rendement au temps t + 1 en fonction des informations disponibles au temps t.

Les éléments du vecteur 𝑚𝑡+1 𝑅𝑡+1 peuvent être vus comme étant des rendements ajustés pour le risque. Les rendements sont ainsi ajustés pour le risque en les actualisant ou les multipliant par le facteur d'escompte stochastique 𝑚𝑡+1. Donc, l'équation (1) stipule que la valeur présente espérée du rendement obtenu d'un dollar investi est égale à un dollar. L'équation (1) est une relation fondamentale dans l'évaluation des actifs financiers. En finance, presque tous les modèles peuvent être représentés sous forme de 𝑚𝑡+1. On dit que le SDF évalue correctement les actifs si l'équation (1) est satisfaite.

La version inconditionnelle de cette équation peut s'écrire comme suit : 𝐸(𝑅𝑡+1) = 1

𝐸(𝑚𝑡+1)−

𝐶𝑂𝑉(𝑚𝑡+1, 𝑅𝑡+1)

𝐸(𝑚𝑡+1) (2)

En incluant le rendement 𝑅𝐹𝑡+1 d'un actif sans risque non corrélé avec le SDF, l'équation (1) devient :

𝐸𝑡 (𝑚𝑡+1𝑅𝐹𝑡+1) = 1 => 𝐸(𝑚𝑡+1) = 1 𝐸(𝑅𝐹𝑡+1)

(3) À l'aide des équations (2) et (3), on obtient :

𝐸(𝑅𝑡+1− 𝑅𝐹𝑡+1) = −

𝐶𝑂𝑉(𝑚𝑡+1, 𝑅𝑡+1)

𝐸(𝑚𝑡+1) (4)

7 Les biens contingents existent sous certaines conditions. De façon générale, tous les titres financiers sont des

27 Cette dernière équation montre que la covariance entre le SDF et le rendement de l'actif risqué explique la prime de risque définie comme étant l'écart entre le rendement de l'actif risqué et le taux sans risque. La prime de risque sera élevée quand les deux quantités formant la covariance covarient négativement. L'agent préfère que ses actifs lui rapportent davantage lorsqu'il se retrouve dans une période économique difficile (période de faible consommation, où le SDF est élevé). Autrement, toutes choses étant égales par ailleurs, un actif qui offre des gains supérieurs pendant des périodes de récessions, pendant que les investisseurs consomment peu, est un investissement plus attrayant qu'un actif offrant des gains supérieurs pendant des périodes d'expansion, pendant que les investisseurs consomment beaucoup.

4.1.3. Approche conditionnelle du SDF

Dans un cadre conditionnel, les travaux empiriques sur l'évaluation des actifs financiers utilisent des variables d'information prédéterminées, 𝑍𝑡, qui font partie de l'ensemble de l'information publique. En considérant l'information que détient l'investisseur, l'équation (1) s'écrit désormais comme suit :

𝐸𝑡 (𝑚𝑡+1𝑅𝑡+1| 𝑍𝑡) = 1 (5) où 𝑍𝑡 est l'ensemble d'information disponible à l'investisseur à t = 0.

Selon l'équation (5), il ne doit pas être possible de détecter des anomalies de prix si l'investisseur utilise uniquement l’information 𝑍𝑡. L'approche conditionnelle, en se basant sur l'information publique, permet de fixer le niveau à partir duquel une information est qualifiée de supérieure. Lorsque 𝑍𝑡 est réduit à une constante, on parle dans ce cas d'une mesure inconditionnelle. Avec l'approche inconditionnelle, toute information relative aux rendements futurs est supposée être une information supérieure susceptible de générer une performance anormale.

4.1.4. Capitalisation du SDF

La principale propriété de l’approche SDF qui la rend utile pour palier au biais de transactions intérimaires est qu’il est possible, sous la relation fondamentale d’évaluation,

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de capitaliser les SDFs de sous-périodes pour obtenir un SDF périodique. Ainsi, supposons qu’il existe un SDF 𝑚𝑡,𝑡+∆ qui évalue correctement le rendement 𝑅𝑡,𝑡+∆ entre 𝑡 et 𝑡 + ∆, et un SDF 𝑚𝑡+∆,𝑡+2∆ qui évalue correctement le rendement 𝑅𝑡+∆,𝑡+2∆ entre 𝑡 + ∆ et 𝑡 + 2∆. Selon la loi des anticipations itérées, le SDF 𝑚𝑡,𝑡+2∆= 𝑚𝑡,𝑡+∆𝑚𝑡+∆,𝑡+2∆ évalue correctement le rendement 𝑅𝑡,𝑡+2∆ entre 𝑡 et 𝑡 + 2∆. Si une période peut être divisée en 𝑄 sous-périodes d’une durée de ∆, alors le SDF périodique correspondant aux SDFs sous- périodiques capitalisés 𝑚𝑡+1= 𝑚𝑡,𝑡+𝑄∆= 𝑚𝑡,𝑡+∆× 𝑚𝑡+∆,𝑡+2∆× … × 𝑚𝑡+(𝑄−1)∆,𝑡+𝑄∆ = ∏ 𝑚𝑡+(𝑞−1)∆,𝑡+𝑞∆ 𝑄 𝑞=1 (6)

est en mesure d’évaluer correctement le rendement périodique : 1 = 𝐸(𝑚𝑡+1𝑅𝑡+1) = (∏ 𝑚𝑡+(𝑞−1)∆,𝑡+𝑞∆𝑅𝑡+(𝑞−1)∆,𝑡+𝑞∆ 𝑄 𝑞=1 ) = (∏ 𝑚𝑡+(𝑞−1)∆,𝑡+𝑞∆𝑅𝑡+1 𝑄 𝑞=1 ) (7)

Cette dernière égalité est exploitée dans le cadre de ce mémoire. Nous allons évaluer la performance de fonds mutuels dont uniquement les rendements périodiques mensuels sont disponibles à l’aide de SDFs mensuels obtenus par la capitalisation de SDFs sous- périodiques quotidiens. Comme ces SDFs quotidiens sont évalués à partir de facteurs de risque et de rendements de portefeuilles passifs quotidiens, ils sont théoriquement en mesure de capter les opportunités d’investissements intérimaires des gestionnaires de fonds.

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