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Approches pour palier au biais de transactions intérimaires

3. Revue de littérature sur le biais de transactions intérimaires

3.4. Approches pour palier au biais de transactions intérimaires

Les études évaluant la performance des gestionnaires avec des données mensuelles sont largement répandues. En revanche, celles utilisant des données quotidiennes sont peu nombreuses. La faible disponibilité des données sur les fonds est le principal élément qui a contribué à l’utilisation des données à fréquence plus faible. Or la performance évaluée à l'aide des données mensuelles peut être biaisée quand le gestionnaire transige à une fréquence plus élevée que mensuelle. Quelques études ont donc évalué la performance des fonds mutuels en utilisant des données quotidiennes afin de la comparer à celle obtenue avec des données mensuelles. L'étude de Busse (2001) évalue la performance de 230 fonds d'actions sur la période 1985-1995. Il applique la même méthodologie que celle de Brown et al. (1996). Toutefois, il utilise des données quotidiennes au lieu de mensuelles pour faire l'analyse. Ses résultats montrent que la performance mesurée par des rendements quotidiens est totalement différente de celle mesurée par des rendements mensuels. Ils suggèrent aussi que les rendements quotidiens fournissent un meilleur pouvoir explicatif. Par ailleurs, l'étude rejette l'hypothèse tournoi et ne démontre aucune évidence que les perdants augmentent leur risque davantage que les gagnants. Elle révèle également que la proportion des fonds mutuels qui montrent une aptitude à synchroniser leurs investissements s’avère plus élevée avec des rendements quotidiens qu’avec des rendements mensuels. Cette divergence de résultat est attribuable au biais dans la volatilité mensuelle des rendements dû à l'autocorrélation présente dans les rendements quotidiens qui affecte les tests basés sur les rendements mensuels. Busse (2001) explique que les fonds des gestionnaires formés d'actions de petites capitalisations sont, en général, à l'origine de cette autocorrélation. Enfin, l'auteur critique l'hypothèse selon laquelle les rendements des fonds mutuels sont indépendants en coupe transversale.

19 Bollen et Busse (2004), en utilisant une approche inconditionnelle, montrent qu'il est possible de détecter de la persistance dans la performance des meilleurs fonds quand on l'évalue avec des données quotidiennes, ce qui suggère que la performance passée est utile pour prédire la performance future. Dans un contexte conditionnel, Coggins et al. (2009) assument que le bêta et le risque spécifique des portefeuilles sont des fonctions de l'information publique agrégée dans les termes d'erreur passés et évaluent la performance avec des données quotidiennes à l'aide d'une paramétrisation GARCH bivariée. Il ressort de leur étude que les mesures de performance de type GARCH sont généralement plus significatives que les autres mesures. Ces mesures réduisent, également, le nombre de performances extrêmes comparativement aux mesures inconditionnelles quotidiennes. Dans le but de tester la pertinence de l'utilisation des données quotidiennes, Hardy (2003) compare les résultats obtenus avec des rendements mensuels avec ceux obtenus à l'aide des rendements quotidiens. Pour son analyse, il choisit un fonds diversifié ayant modifié de façon conséquente et rapide sa pondération en investissant massivement dans le secteur de l'énergie. Les résultats révèlent que ce changement dans le style de gestion est plus rapidement incorporé par les données quotidiennes que par les données mensuelles. Hardy estime aussi que les changements fréquents opérés sur la composition des fonds affectent la relation risque/rendement, et par conséquent biaisent les mesures mensuelles, ce qui rend l'utilisation des données journalières plus efficace.

Quoique peu nombreuses, il existe dans la littérature des études qui ne militent pas en faveur de l'utilisation des données quotidiennes. En effet, Rekenthaler et al. (2006) avancent que les gestionnaires qui changent fréquemment de style de gestion nuisent à l'estimation puisque leurs rendements quotidiens contiennent trop de bruit. Dans le même ordre d'idées, Scholes et Willams (1977) montrent que le recours aux données journalières sur des fonds ayant eu peu de changements dans leur composition risque de causer des biais tant sur la variance que sur la corrélation entre les actifs. Les auteurs croient que la meilleure façon d'amoindrir ce biais est d'utiliser une fréquence pour les rendements compatible avec celle des décisions des gestionnaires, ce qui est difficile voire impossible en pratique.

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3.4.2. Approche basée sur les pondérations du portefeuille

Ferson et Khang (2002) estiment que dans un contexte où les rendements espérés varient dans le temps et où les gestionnaires transigent entre les dates d'observation du rendement, les mesures de performance basées sur le rendement versus un portefeuille de référence semblent caduques. Les transactions intérimaires biaisent ces mesures même si l'approche considérée est conditionnelle. Pour remédier au biais, ils proposent une approche basée sur les pondérations du portefeuille. À la suite de Cornell (1979), Grinblatt et Titman (1993) furent les premiers à adopter une mesure basée sur les pondérations. Ainsi, un gestionnaire disposant d'une information privée est en position d'identifier les titres qui sont surévalués ou sous-évalués. Toutes choses étant égales par ailleurs, ce gestionnaire peut en profiter en modifiant les pondérations de son portefeuille et choisissant d'investir davantage dans les titres sous-évalués et de diminuer sa pondération dans ceux qui sont jugés surévalués. La covariance entre le changement dans les pondérations du portefeuille et les rendements anormaux subséquents des titres peut donc être utilisée pour mesurer la performance. Ferson et Khang (2002) utilisent l'approche basée sur les pondérations mais dans un cadre conditionnel, ce que les études antérieures n'ont pas fait. Pour illustrer cette nouvelle mesure, les auteurs étudient les fonds de pension d'actions américains entre 1988-1994. L'approche basée sur les pondérations est mieux adaptée pour contrôler le biais de transactions intérimaires que les mesures basées sur le rendement-risque même si elles sont conditionnelles. Ces dernières mesures font face à un bais potentiel si le gestionnaire peut transiger entre les dates d'observations. L'incorporation de l'information publique dans la mesure permet de contrôler pour les transactions intérimaires. De plus, utiliser une mesure basée sur les pondérations avec des variables de conditionnement donne une meilleure précision que son équivalente inconditionnelle. Utilisant des données sur les fonds de pension, les auteurs arrivent à la conclusion que les résultats avec les deux méthodes sont différents. En effet, ils trouvent une performance anormale positive avec les mesures classiques basées sur le rendement-risque, alors qu'avec l'approche conditionnelle basée sur les pondérations, la performance est neutre.

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3.4.3. Approche du facteur d'escompte stochastique

L'approche du facteur d'escompte stochastique (SDF) est une autre méthode permettant d'évaluer la performance des fonds mutuels. Étant donné que l'approche SDF est utilisée pour notre étude, le prochain chapitre la présentera plus en détails. Cette section aborde les principales recherches qui ont fait appel à l'approche SDF pour évaluer la performance, avec une emphase sur l'étude de Ferson et al. (2006) qui montre que l'approche est utile pour palier au biais de transactions intérimaires.

Glosten et Jagannathan (1994) sont les premiers à proposer l'approche SDF pour mesurer la performance. Chen et Knez (1996) utilisent par la suite l'approche SDF pour étudier la performance des fonds mutuels en définissant des mesures admissibles sous les conditions de loi d'un seul prix et d'absence d'arbitrage.

Farnsworth et al. (2002) étudient plusieurs modèles basés sur le SDF dans l'évaluation de la performance des fonds mutuels. L'étude a pour objectif de tester différents modèles pour le SDF afin d'examiner leur impact sur la performance. Pour ce faire, les auteurs construisent des fonds mutuels fictifs où ils contrôlent l'habilité de market timing ou de sélection des titres. Ils arrivent à la conclusion que le choix du SDF n’a pas un impact significatif sur la performance et que la plupart des modèles sont biaisés par le fait qu'ils donnent un alpha faible et négatif alors que la vraie performance est neutre. En ajustant pour ce biais, l'étude montre que les fonds, en moyenne, ont suffisamment d'habilité pour couvrir les frais de transactions engagés.

Dahlquist et Soderlind (1999) mettent en évidence l'importance de l'utilisation du SDF pour évaluer la performance des fonds mutuels suédois. Au moyen de simulations, l'étude examine les propriétés des mesures dans des petits échantillons. Elle considère un SDF avec ou sans l'imposition d'une contrainte de positivité. Elle permet aussi de considérer des portefeuilles de référence avec une stratégie passive ou avec une stratégie dynamique qui dépend de l'information publique disponible. De plus, elle considère l'approche inconditionnelle mais aussi conditionnelle et compare ses résultats avec les mesures moyenne-risque traditionnelles de performance. Pour l'évaluation inconditionnelle, que la stratégie soit passive (pondérations fixes) ou dynamique (pondérations variables selon les

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variables d'état), l'étude ne trouve aucune évidence solide quant à la non neutralité de la performance. La performance des fonds, en moyenne, est positive, toutefois, les auteurs n'arrivent pas à la valider statistiquement. En revanche, quand l'approche conditionnelle est appliquée, pour des stratégies dynamiques, les résultats indiquent que la performance ne demeure pas nulle.

Ferson et al. (2003) sont à l'origine de la première étude évaluant de manière conditionnelle la performance des fonds obligataires américains. Pour rendre la mesure SDF conditionnelle à l'information publique, les auteurs regroupent les observations de rendements selon des caractéristiques dichotomiques de l'état anticipé de l'économie et selon la structure à terme des taux d'intérêts. Parmi les 12 caractéristiques choisies, on trouve le niveau des taux d'intérêt à court terme, la pente de la structure à terme, le taux d'inflation, le taux de change, la liquidité du marché boursier, etc. À l'aide de variables binaires, l'étude segmente les observations selon le niveau de chacune des caractéristiques. Le résultat central de l'étude montre que les fonds de titres à revenus fixes ont des performances ajustées au risque, net des frais de gestion, essentiellement neutres pour la majorité des états de l'économie et que les mesures conditionnelles offrent plus de précision que leur concurrentes inconditionnelles.

L'étude qui a inspiré ce mémoire est celle de Ferson et al. (2006) qui évalue la performance des fonds de titres à revenus fixes à l'aide de l'approche SDF basée sur des modèles en temps continu. Bien que notre mémoire examine la performance des fonds d'actions, l'étude est pertinente étant donné qu'elle tient compte du biais de transactions intérimaires dans l'évaluation de la performance. Les SDFs sont définis à partir des fonctions exponentielles simples des facteurs de la structure à terme des taux d’intérêt. Par ailleurs, l'article décrit la façon dont l'approche SDF est pertinente avec les rendements journaliers pour corriger la performance du biais de transactions intérimaires. Même si les auteurs utilisent des variables d'états pour évaluer la performance, ceci ne suffit pas pour incorporer l'impact des stratégies dynamiques dans l'évaluation. C'est pourquoi les auteurs mettent l'accent sur l'importance du SDF pour évaluer correctement les stratégies dynamiques engagées par les gestionnaires. L'étude montre qu'un taux spot élevé, une forte pente de la structure à terme

23 des taux d'intérêt ou une faible convexité de la structure prédisent des rendements conditionnels espérés élevés.

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