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Dans ce chapitre, nous avons présenté une méthode de modélisation statistique de la forme des sillons corticaux. Celle-ci repose sur un apprentissage de la variabilité morpholo-gique inter-individuelle. Nous avons opté pour une représentation paramétrique des formes permettant de bien prendre en compte la topographie profonde du cortex cérébral. Nous avons ensuite défini un repère intrinsèque à la forme sillon, nous plaçant ainsi dans un cadre d’étude local, propre à la forme d’intérêt, et cohérent pour l’analyse statistique.

Les expérimentations ont été menées sur une base de 18 sujets. Nous nous sommes attachés à sélectionner les instances participant à l’apprentissage selon un critère objectif. Le choix du seuil demeure en revanche tout à fait empirique et la décision conditionnelle à un examen visuel. Les résultats obtenus montrent un comportement satisfaisant du modèle en termes de compacité et de capacité de généralisation. Il semble également se comporter assez correctement en termes de spécificité, les formes générées paraissant plausibles (avec une réserve tout de même pour le cas du sillon postcentral).

Cependant, compte tenu de l’importante dimensionalité des données et du faible nombre d’échantillons disponibles pour les expérimentations, les qualités du modèle ne peuvent être définitivement entérinées. Une validation du modèle, mettant en jeu des bases de données expérimentales beaucoup plus larges, est nécessaire.

Malgré ces limitations, la modélisation statistique proposée ouvre plusieurs applications intéressantes comme nous le verrons dans la seconde partie de ce document.

Chapitre 3

Modélisation statistique des relations

géométriques d’un couple de sillons

corticaux

3.1 Introduction

Ce chapitre s’inscrit dans la continuité du chapitre précédent et poursuit l’analyse de la variabilité anatomique sulcale inter-individuelle. Nous nous intéressons ici à la modélisation statistique, pour un hémisphère, d’un ensemble de sillons principaux et en particulier des relations entre sillons au sein de cet ensemble. Nous considérons des relations de nature géométrique : il s’agit d’appréhender, par le biais d’un modèle probabiliste, la façon dont ces sillons principaux sont positionnés et orientés les uns par rapport aux autres. Notons que dans ce contexte l’aspect forme n’est pas traité. En effet, nous considérons différents types de variabilité et décomposons la variabilité anatomique sulcale inter-individuelle en d’un côté les aspects de forme, et de l’autre les aspects de position et d’orientation.

L’aspect forme a été modélisé par le modèle statistique présenté au chapitre 2 qui traite de la forme d’un sillon particulier sans prendre en compte les possibles influences des autres sillons. Nous proposons maintenant d’aborder ces interactions, mais seulement d’un point de vue (( position, orientation )). Cela suppose que nous émettions l’hypothèse que les aspects forme/position et orientation sont décorrélés et donc analysables séparément, et aussi que les interactions entre sillons se jouent au niveau de la position et de l’orientation, et non de la forme. Ces hypothèses sont certainement réductrices mais elles permettent d’aborder l’analyse de la variabilité sulcale inter-individuelle de façon hiérarchique.

Nous modélisons donc la variabilité anatomique sulcale inter-individuelle en plusieurs niveaux de décomposition :

1. la variabilité de la forme d’un sillon ;

2. la variabilité des interactions entre sillons en termes d’orientation et de position ; 3. la variabilité de l’ensemble de sillons, également en termes d’orientation et de position. Le niveau 1 a été étudié au chapitre précédent ; le niveau 2 fait l’objet de ce chapitre. Il consiste à mesurer la variabilité de la position et de l’orientation d’un ensemble de sillons les uns par rapport aux autres, c’est-à-dire la variabilité de leurs positions et orientations relatives. Cela implique de définir une référence intrinsèque à cet ensemble de sillons, afin

94 3.2 Éléments d’état de l’art

de l’affranchir d’une dépendance par rapport au cerveau. Le niveau 3 consiste à mesurer la variabilité de la position et de l’orientation d’un ensemble de sillons au sein du cerveau. Cela implique de déterminer une référence extrinsèque permettant d’ancrer l’ensemble dans le cerveau.

Pour modéliser un ensemble d’objets ainsi que les relations entre ces objets, une struc-ture de graphe apparaît nastruc-turellement être appropriée. Usuellement, les nœuds représentent les objets et les arcs indiquent une interaction directe et privilégiée entre deux nœuds ad-jacents et décrivent leur relation. Dans la section suivante, nous citons quelques travaux proposant des graphes modélisant un ensemble de sillons, la plupart d’entre eux étant dé-diés à l’étiquetage automatique des sillons corticaux. Si nous pouvons également envisager une telle application, notre travail s’inscrit avant tout dans le contexte de la constitution d’atlas probabilistes et vise en premier lieu à l’observation et à la caractérisation de la variabilité sulcale inter-individuelle, précisément ici en termes de position et d’orientation relatives. Dans la section 3.3, nous présentons le graphe de relations inter-sillons que nous proposons. Celui-ci n’est pas entièrement traité dans ce travail, qui est restreint à l’ana-lyse d’un couple. Nous exposons l’approche proposée pour la modélisation statistique des relations géométriques entre deux sillons, en termes de position et d’orientation relatives. Cette modélisation est basée sur un apprentissage de la variabilité. Nous définissons tout d’abord une représentation appropriée des données au travers d’un vecteur d’observation afin de constituer la population d’apprentissage que nous notons P. Nous analysons ensuite ces observations au moyen d’une analyse statistique multidimensionnelle et présentons les résultats obtenus. Avant de clore ce chapitre, nous disons quelques mots sur l’extension de la méthode à l’analyse complète du graphe et illustrons la modélisation de niveau 3 évoquée ci-dessus. Enfin, en guise de perspective, nous abordons l’aspect étiquetage automatique des sillons qui peut être vu comme une application de la modélisation statistique proposée.

3.2 Éléments d’état de l’art

Certains travaux sur la modélisation d’ensembles de sillons, voire des relations entre sillons, ont déjà été proposés. Nous en donnons un bref aperçu dans cette section.

Comme nous l’avons exposé au chapitre précédent, Caunce et al. [Caunce 99], [Caunce 01] construisent un modèle statistique d’un ensemble de sillons corticaux, basé sur une re-présentation par leurs traces externes. Cependant, dans ces travaux, la variabilité inter-individuelle des relations au sein de l’ensemble des sillons considéré n’est pas explicitement étudiée. Dans [Lohmann 00], Lohmann et al. proposent une modélisation statistique des positions d’un ensemble de sillons corticaux. La position d’un sillon est définie par les centres de gravité des bassins sulcaux le représentant. Après alignement de la base d’ap-prentissage dans l’espace stéréotaxique et normalisation par la taille, un modèle de type (( Point Distribution Model )) [Cootes 95b] des positions est dérivé. C’est donc la variabilité en position d’un ensemble de sillons qui est étudiée, et les relations entre sillons ne sont pas explicitement modélisées.

Une façon d’intégrer ces interactions et ainsi de modéliser la variabilité corticale de façon plus complète est de modéliser le cortex par un graphe dans lequel les nœuds représentent les sillons et les arcs les interactions entre ces sillons [Lohmann 98], [LeGoualher 98], [LeGoualher 99], [Mangin 95a], [Mangin 95b], [Rivière 00], [Royackkers 99].

Lohmann et al., s’appuyant toujours sur une représentation des sillons corticaux par bassins sulcaux, proposent une structure de graphe pour modéliser également les relations spatiales entre sillons dans [Lohmann 98]. Ayant préalablement recalé les données dans un repère basé sur les commissures antérieure et postérieure (CA et CP), les auteurs définissent les nœuds du graphe comme les positions des bassins sulcaux, positions représentées par les centroïdes de ces mêmes bassins, et les arcs comme les relations entre sillons. Trois relations sont proposées. Les deux premières sont (( antérieur/postérieur )) et (( supérieur/inférieur )) et définissent ainsi qualitativement les positions relatives des sillons considérés. La troi-sième est un paramètre de connectivité entre bassins sulcaux. Le graphe obtenu est alors exploité dans une procédure de (( graph matching )) [Ballard 82] pour réaliser l’étiquetage automatique des sillons.

Royackkers et al. présentent une étude de la variabilité corticale au travers d’un graphe dans [Royackkers 99] avec également pour objectif, à terme, de réaliser la reconnaissance automatique des sillons. Le graphe de la topographie corticale qu’ils proposent est un graphe complet, i.e. un graphe dans lequel tous les nœuds sont reliés deux à deux. Ces derniers représentent les sillons corticaux, modélisés ici par leur trace externe. Des attri-buts supplémentaires leur sont associés : chaque sillon est caractérisé par des paramètres de profondeur, par des paramètres de position qui sont les points extrêmes de la courbe représentant le sillon, son centre de gravité et son point médian, et par des paramètres de continuité, de longueur et d’orientation. Les relations entre sillons considérés sont modéli-sées par les arcs. Elles décrivent la position et l’orientation relatives de deux sillons ainsi que leur connectivité. La position relative est définie par la distance et le vecteur entre deux points homologues parmi ceux caractérisant la position, tandis que l’orientation relative de deux sillons est définie comme le produit scalaire des deux vecteurs principaux norma-lisés des sillons considérés. Remarquons que cette définition ne définit pas complètement une orientation relative mais indique plutôt un (( degré de parallélisme )) entre les deux sillons considérés. Le troisième paramètre caractérisant les relations entre deux sillons est la connectivité. Elle est définie par la donnée du (( plus fort )) point de contact entre deux courbes. Les auteurs construisent alors un modèle statistique de ce graphe. Une population d’apprentissage est constituée. La mise en correspondance est réalisée en recalant les sujets de la base d’apprentissage vers un sujet cible par une transformation non linéaire et après normalisation dans le référentiel de Talairach1. Des statistiques d’ordre 1 et 2 sont alors calculées sur différentes caractéristiques du graphe, telle que la longueur d’un sillon par exemple.

Une description très fine du réseau cortical au moyen d’un graphe est proposée dans [Mangin 95a], [Mangin 95c], [Rivière 00]. Les sillons étant représentés dans ces travaux par un ensemble de surfaces élémentaires, chaque nœud du graphe correspond à une telle surface. Les attributs associés à un nœud sont nombreux : liste des voxels composant la surface élémentaire, liste des voxels de fonds, liste des voxels de branches, boîte englobante, profondeurs minimale et maximale, taille, etc. Les arcs décrivent les relations entre nœuds adjacents. Les auteurs distinguent différents types de relations : jonction topologique, pli de passage, externe, corticale, corticale pure. Les attributs associés aux arcs varient en fonction du type de relation considérée. Notons que dans ces travaux, tous les attributs sont décrits dans le repère de Talairach. Ce graphe est dédié à l’étiquetage automatique

1. Ces travaux étant dédiés à l’étiquetage automatique des sillons corticaux, le sujet cible a été choisi comme étant le sujet à étiqueter.