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Les systèmes composés de nanoparticules de métal magnétique noyées dans une matrice d’oxyde isolante non magnétique présentent des propriétés physiques très intéressantes tant pour la recherche fondamentale que pour les applications industrielles. Dans ces systèmes, les propriétés de transport électronique dépendant du spin sont fortement couplées aux propriétés magnétiques. L’obtention d’un taux de magnétorésistance notable dans ces systèmes nécessite le contrôle de la structure du métal, de l’oxyde et de leur interface ainsi que de la morpholo- gie correspondant à la forme, la taille et à l’organisation des particules. Il se dégage la nécessité d’élaborer des nanoparticules répondant à plusieurs critères. (1) Bien calibrées, sans présence notamment de petites particules (super)paramagnétiques. (2) Entièrement métalliques, sans pré- sence d’un oxyde du métal à l’interface avec la matrice d’oxyde. (3) Ferromagnétiques, avec un taux de polarisation et une aimantation à saturation importants, et, si possible, anisotropes avec des axes faciles d’aimantation distribués dans toutes les directions d’une particule à l’autre. (4) Disposées en monocouches séparées par la matrice d’oxyde et à l’intérieur desquelles elles sont placées dans une situation favorable à un désordre magnétique maximal au champ coercitif (qui peut être nul). Il faut aussi obtenir une matrice : (1) isolante, hauteur et largeur de barrière conve- nable, sans impuretés et (2) permettant la formation et la croissance des nanoparticules.

Méthodes d’élaboration et de

caractérisation

Nous présentons dans ce chapitre la méthode d’élaboration des multicouches discontinues et les techniques qui ont été employées pour les caractériser, les mesures magnétiques macro- scopiques, puis les techniques de caractérisation structurale. Les techniques de caractérisation de l’ordre local, spectroscopie d’absorption X et Mössbauer, et de l’ordre à plus grande distance, diffusion et diffraction des rayons X, seront décrites.

Nous décrivons tout d’abord la pulvérisation cathodique et le protocole de recuit thermique utilisés pour synthétiser les multicouches discontinues (MD) (§ 3.1.1). Les deux protocoles de mesures magnétiques qui ont été employées pour étudier le comportement magnétique des MD en fonction du champ magnétique appliqué et de la température seront ensuite exposés (§ 3.2). Nous poursuivrons le chapitre par la présentation de la spectroscopie d’absorption X qui permet de sonder l’état électronique et l’ordre local structural d’un élement atomique sélectionné (§3.3). Nous avons mené des expériences de diffusion aux petits angles en incidence rasante (GISAXS) pour étudier la morphologie des couches métalliques granulaires (§3.4). Dans cette section, nous traiterons également des expériences de diffraction et de réflectivité menées. Enfin, nous expo- serons la spectroscopie Mössbauer qui permet de décrire l’environnement magnétique local (qui dépend de l’environnement atomique local) autour des atomes de fer dans les MD Fe/ZrO (§

3.6).

3.1 Elaboration de multicouches discontinues métal-oxyde

L’élaboration de petits objets aux propriétés originales requiert un soin particulier. La petite dimension des objets les rend plus sensible aux paramètres d’élaboration Cela se traduit par un certain manque de reproductibilité comparé à l’élaboration d’un matériau massif aux propriétés moyennées sur une plus large échelle. Nous donnerons un rapide descriptif du procédé de pul- vérisation cathodique utilisé dans ce travail. Plus de détails sont donnés dans [Giac 98,Meve 97,

Cowa 95].

D’autres méthodes d’élaboration de nanoparticules sont possibles. Elles sont semblables à celles utilisées pour déposer des films minces [Chopra]. Les méthodes d’élaboration peuvent suivre deux voies distinctes.

La voie physique consiste à arracher de la matière par pulvérisation (bombardement io- 43

nique), par évaporation d’une source (chauffage d’un filament ou d’un creuset, ablation laser, bombardement électronique), ou jet d’agrégats neutres ou ionisés, suivi d’une condensation sur un substrat. A partir de deux sources, la phase d’arrachage qui précède le dépôt sur un substrat peut être simultanée (co-déposition) ou alternée. L’arrachage peut aussi s’effectuer sur une seule cible contenant les éléments en proportion désirée.

La voie chimique consiste à former le matériau à la surface du substrat par réaction chimique (oxydation, réduction, nitruration...) à partir de phases liquides (électrodéposition, sol-gel, col- loïdes, micelles) ou gazeuses (Chemical Vapor Deposition).

Enfin, une troisième voie correspond aux techniques de jets d’agrégats qui peuvent être cou- plées à une source de matière par voie physique (pulvérisation cathodique par exemple). 3.1.1 Dépôt par pulvérisation cathodique

3.1.1.1 Principe

L’élaboration des multicouches métal-oxyde a été effectuée par pulvérisation cathodique. Cette technique de fabrication de nano-objets est facile à mettre en oeuvre, pour un laboratoire fondamental comme dans l’industrie.

Le principe de la pulvérisation cathodique consiste à arracher les atomes appartenant à une cible portée à un potentiel négatif (cathode). Un gaz argon (chimiquement neutre) est injecté dans un bâti contenant à la fois les cibles et les substrats. Un plasma d’ions Ar et d’électrons est généré par une différence de potentiel continue de quelques centaines de kV entre la cible (cathode) et le substrat (anode), placé directement au-dessus des cibles (incidence normale). En heurtant la cible, l’ion Ar capture un électron puis en ressort neutre. L’entretien du taux d’ioni- sation du plasma est alors possible grâce aux électrons secondaires émis lors du choc en direction du substrat et des atomes de la cible, qui ionisent les atomes d’Ar en les percutant. La pression d’Ar est fixée en fonction de l’écart entre la cible et le substrat et de la vitesse de dépôt désirée, afin de maintenir le plasma par ce mécanisme. La régulation est effectuée sur le courant continu (DC).

Afin d’éviter la contamination de l’échantillon, l’effet magnétron permet de travailler à des pressions plus faibles en favorisant l’ionisation des atomes d’Ar par les électrons secondaires concentrés au niveau de la cible. Le confinement est effectué grâce à un aimant permanent placé derrière la cible. La trajectoire des électrons est alongée en s’enroulant autour des lignes de champ magnétique. La mise au potentiel en continu permet de pulvériser les cibles de métal, mais non celles d’oxyde en raison de l’accumulation des charges positives en surface. La diffi- culté est levée en établissant un potentiel alternatif radiofréquence (RF) : une demi-période sert à compenser les charges positives par des électrons de la cible pendant l’absence du bombarde- ment ionique. La régulation est alors effectuée sur la puissance électrique de la cible.

Les atomes métalliques éjectés de la cible possèdent des énergies cinétiques de quelques dizaines d’eV et subissent plusieurs chocs avant de rencontrer le substrat.

3.1.1.2 Elaboration des multicouches

Avant chaque dépôt, un vide de base de l’ordre de 2 10✞ torr est atteint dans le bâti à l’aide d’une pompe cryogénique. La pression de travail en argon est généralement maintenue

en consigne à ✎ ✗ ✔ ✏ ✞

torr. A cette pression, le plasma est en effet stable et permet de déposer sans difficultés à des vitesses comprises entre 0.5 et 2 Å/s. La température mesurée au niveau des substrats refroidis à l’eau n’excède pas 35☛ C. L’ouverture et fermeture des caches (shutters) au niveau des cibles sont pilotées par un ordinateur sur lequel on peut programmer une séquence de dépôts.

Les multicouches discontinues (MD) ont été élaborées par pulvérisation cathodique alternée d’une cible de Fe ou de Co en courant continu et d’une cible de SiO ou de ZrO en tension RF. Les substrats choisis ont été dans un premier temps des lames de verre pour microscope optique (1x25x15 mm☞

). Les lames sont baignées avant dépôt dans un alcool éthylique anhydre et séchées méticuleusement au pistolet à azote. Dans un second temps, et en majorité, les substrats utilisés ont été des barrettes de Si✁100✂ (0.6x3x26 mm

). Une couche tampon entre 1000 et 2000Å de SiO thermique est formée sur la face dédiée à recevoir le dépôt.

3.1.2 Recuits ex situ

Les recuits thermiques effectués ont été réalisés à l’aide un four commandé par un thermostat Eurotherm. Il est possible de régler les constantes PID pour jouer sur les rampes de chauffage. La procédure de recuit se pratique en plusieurs étapes :

– établissement du vide (après plusieurs injections d’argon) à ✔ ✏ ✞

Torr,

– montée et maintien à 115☛ C pour un dégazage. Durée 10 min ou attente d’une pression redescendue à✔ ✏ ✞

Torr,

– montée à la température de consigne (entre 15 et 45 min)et palier minuté (10, 15 ou 20 minutes selon les cas),

– enfin, simultanément, coupure de l’alimentation du four et ouverture d’une circulation d’azote gazeux pour le refroidissement à température ambiante (☞ 20 min).