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Après avoir parlé de la tonalité pastorale du discours d'ouverture de Jean XXIII, nous pouvons maintenant nous intéresser aux répercussions de celle-ci dans les textes du concile. Nous le ferons par le biais d'une analyse de l'emploi du terme « pastoral » dans les textes conciliaires eux-mêmes. H s'agit de voir comment cette nouvelle manière d'enseigner et de parler s'est exprimée dans le contenu des textes. De fait, les auteurs25 qui ont fait des propositions de type synchronique sur l'herméneutique théologique de Vatican II ont perçu dans l'ensemble des textes conciliaires un corpus cohérent, que l'on peut lire de manière transversale, en y trouvant des thèmes récurrents. Cependant, bien peu ont entrepris de manière systématique une étude approfondie du langage de ce corpus. C'est ce que nous proposons de faire en posant notre regard sur le lexique pastoral des textes conciliaires. Évidemment, il ne s'agit pas de prendre les mots de manière « isolée » comme le dit Congar , mais de trouver dans les mots les traces d'une nouveauté du concile que l'on peut qualifier de «pastoral ». Nous croyons que le choix des mots est à lui seul riche d'enseignements et son étude pourra certainement aider à mieux définir la nouveauté de Vatican II par rapport aux conciles précédents.

Une recherche réalisée à partir de la synopse produite par le Centre de Traitement

Électronique des Documents (CÉTÉDOC) 7 nous permet de constater qu'un lexique pastoral est

présent dans les documents conciliaires. Nous présentons dans un premier temps un tableau sur l'emploi du terme « pastoral » dans les documents de Vatican II , pour ensuite y aller d'une

24 Voir la section intitulée « Dieu a tant aimé le monde » du Message du concile à tous les hommes, 20 octobre 1962. 25 Voir la section 2.6 du premier chapitre de ce mémoire, intitulé « Une lecture synchronique des textes », p. 25-26. 26 Y. Congar, « L'Église en cartes. À propos du traitement informatique des textes de Vatican I », dans Le concile de

Vatican ll. Son Église peuple de Dieu et corps du Christ, Paris, Beauchesne, 1984, p. 74.

27 Voir les études du CÉTÉDOC et les divers indices verborum produits par ce centre, en particulier le Thesaurus.

Philippe Delahaye, Michel Gueret, Paul Tombeur (dirs), Concilium Vaticanum 11, Louvain, Publication du CETEDOC, 1974,978 pages.

analyse plus précise et détaillée des textes. Ensuite, nous reprendrons quelques extraits des documents significatifs sur la question.

Tableau 7 : Utilisation du terme « pastoral » dans les textes de Vatican II

Textes Nombre de mention

Christus Dominus (charge pastorale des évêques) 35

Ad gentes (l'activité missionnaire de lÉglise) 20

Presbyterorum Ordinis (ministère et la vie des

prêtres) 19

Optatam Totius (formation des prêtres) 17

Sacrosanctum Concilium (Liturgie) 11

Lumen Gentium (l'Eglise) 10

Apostolicam Actuositatem (l'apostolat des laies) 5

Inter Mirifica (les moyens de communication

sociale) 3

Orientalium Ecclesiarum (les Eglises orientales

catholiques) 2

Gaudium et Spes (lEglise dans le monde de ce

temps) 2

Perfectae Caritatis (la vie consacrée) 2

Dei Verbum (Révélation divine) 1

Unitatis Redintegratio (œcuménisme) 1

Total 127

Comme nous pouvons le constater, le terme « pastoral » est employé à cent vingt-sept reprises dans les textes du concile Vatican TL. Ce nombre de mentions est significatif et marque un changement dans le type de langage utilisé par rapport aux conciles précédents29. Le document

conciliaire à l'intérieur duquel le terme est le plus souvent employé est Christus Dominus (la charge pastorale des évêques). Cela n'est pas surprenant puisque le discours de Jean XXffl affirmait déjà une nouvelle direction à propos de la fonction fondamentalement pastorale du magistère ecclésial. Le deuxième document qui emploie davantage le terme « pastoral » est Ad gentes (l'activité missionnaire de l'Église), avec vingt mentions. D faut noter ici que certains

29 Cela apparaîtra plus clairement dans la dernière section de ce chapitre intitulée « Regard sur les conciles

auteurs font souvent référence à Gaudium et spes (l'Église dans le monde de ce temps) pour parler du caractère pastoral du concile30. Ces auteurs font le hen explicitement lorsqu'il s'agit de caractériser le concile. Or, selon ce schéma, le terme « pastoral » est employé seulement deux fois dans Gaudium et spes. Même s'il ne s'agit pas de minimiser sa dimension pastorale et sa nouveauté dans l'histoire des conciles, bien au contraire, le document se situe loin derrière lorsqu'il s'agit d'analyser l'utilisation du terme «pastoral » dans les textes de Vatican LL. Les autres textes qui utilisent le plus souvent ce lexique pastoral sont Presbyterorum Ordinis (ministère et la vie des prêtres), avec dix-neuf mentions, Optatam Totius (formation des prêtres), dix-sept mentions, Sacrosanctum Concilium (Liturgie), onze mentions et Lumen Gentium (l'Église), dix mentions. Comme nous pouvons le constater, le terme « pastoral » apparaît le plus souvent dans les décrets du concile, et non dans les Constitutions ou les déclarations. En effet, les quatre documents de Vatican U qui contiennent le plus grand nombre de mentions du terme « pastoral » sont des décrets, dont nous allons analyser les contenus dans les prochaines pages. D ne s'agit pas ici de déployer une théologie de l'ensemble des textes que nous étudierons31, mais plutôt d'analyser l'utilisation du terme « pastoral » dans les textes conciliaires.

Par souci de précision dans notre analyse, nous constatons également que les documents du concile Vatican II font mention à plusieurs reprises du terme «pasteur». Bien que nous n'analyserons pas en détail l'utilisation de ce terme, nous présentons un tableau qui en présente la répartition dans les textes conciliaires. Le terme est utilisé comme suit :

30 Nous mentionnons entre autre Joseph Ratzinger, « L'Église et le monde. À propos de la question de la réception

du deuxième concile du Vatican », Les Principes de la théologie catholique : Esquisse et matériaux, coll. « Croire et savoir », Paris, Téqui, 1985, p. 423-440 ; Walter Kasper, « Le Défi de Vatican U qui demeure : à propos de l'herméneutique des affirmations du Concile », La théologie et l'Église, coll. « Cogitatio Fidei », no 158, Paris, Cerf, 1990, p. 411^423 ; H.J. Pottmeyer, « Vers une nouvelle phase de réception de Vatican U. Vingt ans d'herméneutique conciliaire », dans G. Alberigo et J.-P. Jossua, J. Komonchak (dirs), La réception de Vatican 11, coll. « Cogitatio Fidei », no 254, Paris, Cerf, 1985, p. 58-64.

31 Sur la théologie de l'ensemble des textes conciliaires, nous mentionnons l'excellent commentaire publié sous la

direction d'Yves Congar dans la collection « Unam Sanctam », Vatican II. Textes, traductions et commentaires. (Voir en particulier celui sur la charge pastorale des évêques : Ibid, coll. « Unam Sanctam », no 74, Cerf, 1969, 466 pages.) Plus récemment : Cf., Matthew L. Lamb et Matthew Levering, Vatican II. Renewal Within Tradition, Oxford, Oxford University, 2008,462 pages.

Tableau 8 : Utilisation du terme « pasteur » dans les textes du concile Vatican II

Textes Nombre de mentions

Lumen Gentium (l'Église) 38

Presbyterorum Ordinis (ministère et la vie des

prêtres) 17

Christus Dominus (charge pastorale des évêques) 16

Sacrosanctum Concilium (Liturgie) 9

Apostolicam Actuositatem (l'apostolat des laies) 9

Gaudium et Spes (l'Église dans le monde de ce temps) 6

Unitatis Redintegratio (oecuménisme) 5

Ad gentes (l'activité missionnaire de l'Église) 4

Optatam Totius (formation des prêtres) 3

Dei Verbum (Révélation divine) 3

Gravissimum Educationis (l'éducation catholique) 3

Nota Praevia 2

Inter Mirifïca (les moyens de communication sociale) 2

Perfectae Caritatis (la vie consacrée) 1

Total 118

Pas de mention: - Orientalium Ecclesiarum (les Églises orientales catholiques) - Nostra Aetate (l'Église et les religions non-chrétiennes) - Dignitatis Humanae (la liberté religieuse)

Le terme « pasteur » est employé le plus souvent dans les documents Lumen Gentium (l'Église), avec trente-huit mentions, Presbyterorum Ordinis (ministère et la vie des prêtres), dix- sept mentions et Christus Dominus (charge pastorale des évêques), seize mentions. La principale différence avec le tableau précédent concerne le document sur l'Église. En effet, celui-ci arrive au premier rang lorsqu'il s'agit de l'utilisation du terme « pasteur », comparativement au sixième rang pour ce qui est de l'emploi du terme « pastoral ». Cette situation peut se comprendre entre autre par la connotation biblique du terme, qui est souvent utilisé dans le texte pour symboliser le

rôle du prêtre dans sa communauté, le ministère ordonné, etc32. Le deuxième changement

important concerne les textes sur l'activité missionnaire de l'Église et la formation des prêtres,

32 Nous ne faisons que donner quelques exemples de l'utilisation du terme dans Lumen Gentium : « Dieu avait

annoncé qu'il serait lui-même le pasteur... » (LG 6), « le Christ a fixé, en un seul troupeau et sous un seul Pasteur... » (LG 15), «Jésus Christ, Pasteur éternel... » (LG 18), «Les Évêques assumèrent [...] et dirigèrent à la place de Dieu le troupeau dont ils étaient les pasteurs... » (LG 20), etc.

qui se situent plus bas dans le tableau. Après ces constats trop rapides, nous pouvons maintenant revenir à notre analyse principale, ce qui nous permettra de mieux saisir comment le terme « pastoral » est définit dans les textes de Vatican LL.

2.1. Le terme « pastoral » dans Christus Dominus

Après avoir démontré la nouveauté du langage utilisé dans les textes de Vatican LL, nous pouvons analyser l'utilisation du terme « pastoral » dans les textes conciliaires eux-mêmes33.

Nous commençons par le document sur la charge pastorale des évêques (Christus Dominusf4,

qui contient le plus grand nombre de mentions du terme.

Tableau 9 : Définition du terme « pastoral » dans Christus Dominus (la charge pastorale des évêques)

Définition Nombre de mentions

Charge des évêques 10

Travail* 4

Méthodes d'action 2

Charge des prêtres 2

Ministère (tâches à accomplir) 2

Nature des "œuvres d'apostolat" Service de sociologie Ministère des prêtres

Visite de l'évêque Caractère des questions

Ministère de l'évêque

Conseil (groupe présidé par l'évêque) Action des prêtres

Sollicitude des évêques Charge des curés Gouvernement de l'Église Charge des religieux (ses)

33 Pour ce faire, nous utiliserons la traduction française des textes de Vatican U, que nous trouvons dans Giuseppe

Alberigo (dir), Les conciles œcuméniques, vol. 2, Paris, Cerf, 1994, p. 817-1135..

34 Pour une histoire de la rédaction du document, nous verrons : Gilles Routhier, « La fonction pastorale des évêques

et le gouvernement des diocèses », dans G. Alberigo (dir), Histoire du concile Vatican H, Tome V, Paris, Les Éditions du Cerf, 2005, p. 226-230.

Besoins 1

Communauté d'intentions 1

Soin des fidèles 1

Total 35

* Regroupe les expressions "travail pastoral" et "la pastorale" (ex: Ce dialogue porterait surtout sur la pastorale...) CD, 28.

Selon ce tableau, nous constatons une pluralité d'utilisation du terme « pastoral » dans Christus Dominus. Différentes réalités sont désignées par l'emploi de ce terme. Un premier regroupement permet de synthétiser le tableau comme suit :

Tableau 10 : Analyse des définitions du terme « pastoral » dans Christus Dominus (la charge pastorale des évêques)

Définitions Nombre de mentions

Fonctions (ministère, charge des prêtres, évêques) 16 (46 %)

Action (nature, méthodes, pratiques, etc.) 11(31%)

Attitudes (sollicitude, soin des fidèles, etc.) 3 (9 %)

Gouvernement de l'Eglise (gouvernement, Conseil,

etc.) 2 (6 %)

Besoins 2 (6 %)

Autres 1 (2 %)

Total 35 (100 %)

Nous proposons cinq catégories (excluant la catégorie « Autres ») pour regrouper et définir l'utilisation du terme « pastoral » dans le document sur la charge pastorale des évêques. La majorité des utilisations touche à la fonction des évêques et/ou des prêtres (seize mentions), à l'action et aux pratiques (onze mentions), aux attitudes (trois mentions), au gouvernement de l'Église (deux mentions) et aux besoins des personnes (deux mentions). Ce regard embryonnaire sur les textes pose les bases sémantiques pour faire avancer notre compréhension du critère de pastoralité. Jetons maintenant un regard sur le texte lui-même afin d'en analyser quelques extraits.

2.1.1 Analyse théologique du terme «pastoral » dans Christus Dominus

Le texte de Vatican II qui contient le plus grand nombre de mentions du terme « pastoral » est celui sur la charge pastorale des évêques (Christus Dominus). Cette situation n'est pas surprenante puisque cela correspond aux intentions exprimées dans le discours d'ouverture de Jean XXDI sur la fonction pastorale du magistère ecclésial. Cela est explicite dès le début du premier chapitre du décret à propos du rôle de l'évêque à l'égard de l'Église universelle : « L'ordre des évêques qui succède au collège apostolique pour le magistère et le gouvernement pastoral [...] constitue [...] le sujet d'un pouvoir suprême et plénier sur l'Église universelle, pouvoir qui ne peut s'exercer qu'avec le consentement du Pontife romain. » (CD 4)

Selon le tableau no 8, le terme « pastoral » est utilisé le plus souvent dans CD pour définir la charge épiscopale. Le terme apparaît le plus souvent dans le chapitre deux, qui concerne le rapport des évêques à leur Église locale. Le terme « pastoral » y apparaît vingt-cinq fois, en particulier dans la section qui traite des coopérateurs de l'évêque dans sa charge pastorale (quatorze mentions). Cette qualification pastorale de la charge de l'évêque touche à son ministère, son mode de gouvernement dans l'Église, etc. Selon le décret, cette charge comporte trois fonctions : enseigner, sanctifier et gouverner. Celles-ci peuvent s'exprimer à travers les liens de l'évêque avec l'Église universelle, locale et sa coopération au « bien commun de plusieurs Eglises », qui constituent les trois axes majeurs du document . Ce plan fait ressortir l'un des développements les plus importants de Vatican U, à savoir la collégialité épiscopale. C'est donc l'identité de l'évêque qui est en jeu dans cette désignation, puisque le terme « pastoral » touche à l'exercice même de son ministère. Par exemple, cela se manifeste dans le souhait exprimé par les Pères à propos des Légats. Les Pères souhaitent « que, compte tenu de la propre charge pastorale

Cette structure du texte permet aussi de penser la responsabilité de l'évêque envers son église diocésaine, mais aussi par rapport à l'Église universelle. C'est ce qu'exprimait récemment George H. Tavard dans un article de 2008: « This structure of the decree implies that the bishop's diocesan responsability is an integral part of his universal co- responsability. Although it is not spelled out in decree, the principal that universal co-responsibility is primary can justify the fact that some bishops can share the universal co-responsibility of all bishops without being also responsible for one particular Church, as is the case with those who work in the offices of the Holy See.» Voir: George H. Tavard, «The Task of a Bishop in his Diocese. Christus Dominus 11-21», dans The Jurist, no 68,2008, p. 370. Sur cette question, voir aussi Massimo Faggioli, «Institution of Episcopal Collegiality-Synodality after Vatican n: the Decree Christus Dominus and the Agenda for Collegiality-Synodality in the 21st Century», dans The Jurist,

vol. 64, no 2, 2004, p. 224-246; Brian Ferme, «The Decree on the Bishops' Pastoral Office in the Church, Christus Dominus», dans Matthew L. Lamb et Matthew Levering, Vatican II. Renewal Within Tradition, Oxford, Oxford University Press, 2008, p. 187-204.

des Évêques, la fonction des Légats du Pontife Romain soit déterminée de façon plus nette.» (CD 9) Cette nouvelle identité, indiquée par la charge « pastorale » des évêques, demande de repenser le rôle de l'évêque dans l'exercice même de ses fonctions.

Comme nous l'avons mentionné, la charge pastorale de l'évêque est d'emblée située dans

une Église locale. Cela constitue un développement important de Vatican H36. « Les Evêques,

[...] ont de soi, dans les diocèses qui leur sont confiés, tout le pouvoir ordinaire, propre et immédiat, requis pour l'exercice de leur charge pastorale, étant sauf toujours et en toutes choses le pouvoir que le Pontife Romain a, en vertu de sa charge, de se réserver des causes ou de les réserver à une autre Autorité. » (CD 8) Dans cet énoncé, c'est une réflexion sur le rôle de l'évêque et ses relations avec l'ensemble du peuple de Dieu que met en valeur le terme « pastoral ». Cela se manifeste particulièrement dans la manière de proposer la doctrine. « Les évêques doivent proposer la doctrine chrétienne d'une façon adaptée aux nécessités du moment, c'est-à-dire en répondant aux difficultés et questions qui angoissent le plus les hommes. » (CD 13) Cette nouvelle manière de présenter la doctrine est en continuité avec le discours inaugural de Jean XXIII. Aussi, une attention doit être portée envers les prêtres : « [...] il leur faut les écouter, entretenir avec eux des relations confiantes et promouvoir ainsi la pastoral d'ensemble du diocèse tout entier. » (CD 16). L'exercice de la charge pastorale des évêques influence donc la manière d'effectuer la « pastorale d'ensemble » du diocèse. Le texte insiste aussi pour que l'annonce de l'Évangile atteigne tous les hommes dans le monde. H y a là un souci de Vatican II qui a mené à la rédaction de la Constitution sur l'Église dans le monde de ce temps. Cette structure de dialogue, liée à la charge pastorale de l'évêque, le situe d'emblée dans sa relation avec les autres (le collège des évêques, le presbyterium, le peuple de Dieu, etc.). Cela est vrai pour certains groupes particuliers. « Il convient d'avoir une sollicitude particulière pour les fidèles qui, en

36 Cette prise en compte de l'Église locale dans les discussions sur la collégialité ouvre une porte intéressante à la

réflexion. En effet, le discours sur la collégialité a longtemps été limité aux relations des évêques entre eux et avec le pape. Nous pensons qu'une réflexion approfondie devrait aussi prendre en considération la relation de l'évêque aux autres acteurs de son Église locale (ses pasteurs, conseil diocésain, etc.). Cette remarque était déjà faite par Gilles Routhier et Myriam Wijlens dans « Introduction », dans The Jurist, vol. 68, no 2, 2008, p. 323-327 : « This discussions had conclued that an approach to collegiality which was limited to a consideration of relations among bishops and between bishops and the pope was theogically deficient. This was because it did not take into account certain significant theological values which were necessary to view the bishop's ministry of presidency in a balanced way by situating him at the intersection of relationship to the local diocesan church which he pastors and the internal synodality of that local church will lead to an impasse. It is necessary then to assume the reality of the local church and, in a balanced discussion of collegiality, envision the communion among the churches and not simply the relationships among the bishops. Besides this approach is suggested by the different parts of Christus Dominus. »

raison de leur situation, ne peuvent bénéficier suffisamment du ministère pastoral et commun des curés, ou en sont totalement privés. » (CD 17) Nous mentionnons ici que c'est le « ministère » qui est qualifié de « pastoral ». Dans cette citation, tous sont intégrés et pris en compte dans cette forme de ministère. L'évêque est situé en relation avec sa communauté, en particulier avec ceux qui ne peuvent bénéficier du « ministère pastoral »37.

La charge pastorale implique une participation de la communauté qui soutient l'évêque dans ses fonctions . «Les diverses méthodes d'apostolats doivent être encouragées. [...] on favorisera, sous la direction de l'Évêque, une étroite et profonde coordination de toutes les œuvres d'apostolats, grâce à quoi toutes les initiatives et institutions, - catéchétiques, missionnaires, charitables, sociales, familiales, scolaires et de quelque autre nature pastorale que ce soit - seront ramenées à une action concordante. » (CD 17) Cette conception communautaire du rôle de l'évêque est certainement une nouveauté du décret . Même dans l'exercice de son autorité, l'évêque n'est pas au-dessus de l'Église mais au milieu d'elle40. En effet, malgré ses fonctions, celui-ci reste d'abord et avant tout un chrétien dans l'Église. C'est dans cette Église universelle et locale que l'évêque peut exercer sa charge pastorale, puisqu'il reçoit tous les 37 Nous mentionnons l'hypothèse assez originale d'Hervé Legrand, qui propose de parler du développement des

Églises locales à partir de la notion d'Églises-sujets. Ainsi, « promouvoir des Églises-sujets, ce n'est pas simplement reprendre l'idée de communauté chrétienne, en terme d'immédiateté et de relations interpersonnelles. C'est au, contraire prendre en compte, en ecclésiologie, la solidarité de tous dans la responsabilité dans une diversité de ministères : la complexité des differentiations culturelles ; les conflits d'ethos à l'intérieur de l'Église locale comme entre elles ; les conflits entre églises inégales par la culture, la richesse économique, le poids de la tradition ; la catholicité n'étant pas la négation de ces diversités mais leur constante négociation afin que l'Église se rassemble "de toute race, langue, peuple et nation autour du trône de l'Agneau." » Voir : Hervé Legrand, « Le développement d'Églises-sujets, à la suite de Vatican n. Fondements théologiques et réflexions institutionnelles », dans G. Alberigo (dir.), Les Églises après Vatican II. Dynamisme et prospective, Paris, Beauchesne, 1980, p. 182.

Le début du chapitre deux de Christus Dominus associe aussi l'évêque à son presbyterium. À partir de cette association, le décret conciliaire définit la notion de diocèse et le rôle de l'évêque à l'intérieur de celui-ci : « Un diocèse est une portion du Peuple de Dieu, confiée à un Évêque pour qu'avec l'aide de son presbyterium il en soit le pasteur: ainsi le diocèse Hé à son pasteur et par lui rassemblé dans le Saint-Esprit grâce à lEvangile et à lEucharistie, constitue une Eglise particulière en laquelle est vraiment présente et agissante l'Eglise du Christ, une, sainte,