• Aucun résultat trouvé

Concepts et enjeux de l'externalisation dans le cas du Commissariat

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 181-184)

Section 1 : Terrain d'étude et analyse descriptive

1. Service du Commissariat des Armées (SCA)

1.1. Concepts et enjeux de l'externalisation dans le cas du Commissariat

Avant de sombrer dans des notions purement techniques, il serait intéressant de revenir sur l'origine des pratiques de l'externalisation tentées par le passé. La richesse historique de cette institution permet, sans équivoque, une expertise tant sur le plan opérationnel que sur celui de la technique. Cela n'a pas empêché plusieurs tentatives de réaliser par tiers des activités qui rentrent pleinement dans le champ de ses compétences, comme la restauration collective.

Nous avons, tout au long de nos travaux de recherche, côtoyer des commissaires des armées.

Cette expérience nous a amené à des connaissances profondes du service. Des externalisations ont été menées par le commissariat depuis les années 80.

1.1.1. Histoire des externalisations opérées par le Commissariat

L’externalisation ne date pas d’aujourd’hui. La direction de l’intendance, qui est l’ancêtre du commissariat, a externalisé des fonctions qui faisaient parties de son cœur de métier, notamment

40 INSTRUCTION N° 2595/DEF/SGA/MA du 26 mars 2013 relative au processus ministériel de suivi des démarches de rationalisation optimisée du fonctionnement en régie ou d'externalisation.

181

l’habillement. Aujourd’hui, le commissariat ne confectionne plus les habits des militaires, des entreprises privées ont en la charge. Plusieurs expériences ont été, par ailleurs, menées, notamment, l’externalisation de la restauration. Il s’agit d’expériences dans un contexte de sous-traitance pour cette fonction. Des unités ont été prises comme projets pilotes, afin de tester la pertinence des projets, dans un but de les généraliser « Nous avons externalisé des activités telles que la restauration de l'administration et même des corps de troupe, nous avons externalisé les activités nettoyage et même des expériences dans le gardiennage ». Ces opérations d’externalisations ont été menées sous un angle de recherche de réduction de coûts, mais nous observons qu’il n’en est pas tout à fait ainsi, comme nous l’affirme un de nos contacts au sein du ministère « Et puis les choses ont évolué et nous avons créé plusieurs PPP qui se sont avérés plus efficaces pour nous, puisque ça nous a permis de nous dégager en grande partie d'activités qui finalement pesaient sur nous. Nous avons ainsi gagné en qualité, en performance et en compétences. ». La qualité est au cœur des préoccupations.

Une autre expérience foireuse était celle d’externaliser le gardiennage de l’ancien siège du ministère de la Défense « On a eu, je vais vous citer un cas intéressant, c'est le cas de l'externalisation du gardiennage de l'îlot Saint-Germain. ». Le gardiennage, jusque-là assuré par la gendarmerie nationale, a été confié à une société de sécurité. Ce projet a été un vrai désastre, car les freins culturels n’ont pas été pris en compte. Les militaires se sont vus protégés et contrôlés par des civils, souvent pas bien formés. Ceci a été une mauvaise expérience pour l’ensemble du ministère. Ce souvenir est resté ancré dans les mémoires, nous citons « Ici oui, c'est quand même, pour les gendarmes qui étaient chargés de cette surveillance, je le pense, je ne suis pas gendarme, mais je le pense que c'était un motif de fierté, parce que quand même garder le saint des saints, bon, c'est, et puis le faire aussi correctement parce que il y avait pas euh ! Il n'y avait pas de grief à l'encontre des gendarmes, euh ! Je suppose que c'était quand même encore une fois un motif de, de fierté ». Ce projet, nous dit-on a été mal réfléchi dès le départ.

Par ailleurs, un projet phare de l’externalisation concerne le siège du ministère. Par un PPP, dans sa forme de contrat de partenariat, le pentagone à la française a été construit à Ballard. Le projet a été lancé par un financement de plus d’un milliard d’euros. « Et donc, il y a eu une activité assez intense liée à ces projets, puisqu'il y avait également le projet Ballard dans lequel nous sommes, qui est fait en contrat de PPP et qui maintenant est en cours de finalisation ».

Ce projet a été livré, mais nous ne l’aborderons pas ici.

182

De même, les missions achats du ministère de la Défense ont été confiées à un établissement public ayant le statut d’EPIC, dénommé UGAP41. Le responsable du service au ministère nous confie ceci : « Je vais introduire nos missions, celles de la mission achat. Voilà, nous avons, et la politique du haut commandement oblige, nous avons ainsi décidé de lancer des opérations d'externalisation d'une partie de nos activités ». Cette externalisation a été plutôt bien vécue, sauf quelques problèmes logistiques. Les agents chargés des achats sont critiques sur des sujets de délais et de conformité des produits réalisés par l’UGAP. Il s’agit d’une simple sous-traitance et non d’un contrat de partenariat qui implique des engagements de part et d’autre.

Nous pouvons citer un autre exemple un peu singulier, celui des maîtres tailleurs. Il s’agit d’une externalisation de la fonction qui a causé un vrai problème de ressource humaine. En effet, le statut de maître tailleur a été instauré dans l’armée française sous Napoléon. Sous le mandat du président Sarkozy, un appel d’offre pour la réalisation des missions jusque-là assurées par les maîtres tailleurs a été lancé. Ce projet n’a pas pris en compte le transfert des actifs humains.

Les personnels ont ainsi vécu une dissolution de leur statut. Par la suite, 19 des 40 maîtres tailleurs qui existent en France ont pu, du fait de leur maîtrise de la fonction, décrocher des marchés à travers tout le pays. Aujourd’hui, ils font le même métier, mais en étant des entreprises privées. Ces entreprises ont le statut de SAS, et se répartissent la réalisation de la fonction par région. La particularité de cette externalisation, c’est que ces entreprises sont implantées à l’intérieur des structures du commissariat au niveau régional. Ce mode de contractualisation ressemble à un bail emphytéotique administratif « BEA » que nous avons vu.

Aujourd’hui, à titre d’exemple, le maître tailleur de la région de Lille génère un chiffre d’affaires d’1,5 M €. Il s’agit de la société « Abilis ».

1.1.2. Concepts

Rationaliser et optimiser la dépense publique à travers une régie rationalisée ou encore, procéder à une démarche d'externalisation, est tout un travail qui est mené en amont, dès les premières intentions. La décision d'externaliser émane du plus haut niveau, en réponse à une proposition de l'instance en charge de la fonction en question. A vrai dire, toutes les fonctions devront être mises en gestion rationalisée, la LOLF en exige la mise en place. Seulement, le ministère entend garder en régie les fonctions non « externalisables » qui sont définies par leurs caractères qui impacteraient les missions fondamentales des armées. Aussi, la non-rentabilité du projet ou l'insignifiance des économies possibles est un autre élément démotivant.

41 Union des Groupements d’Achat Public

183

L'externalisation implique un transfert des actifs, qu'ils soient humains ou matériels. Ainsi, dans le seul cas ou un nombre supérieur ou égal à vingt emplois détruits suite au projet, la fonction sera considérée comme externalisée, sinon il s'agira d'une simple sous-traitance. Il est indispensable, par ailleurs, de prendre en compte et d'intégrer, non seulement, les aspects économiques, budgétaires et financiers dans la démarche de réflexion et d'analyse, mais aussi sociaux et de concurrence. Le ministère attache une importance primordiale quant à la possibilité d'accès des PME aux marchés publics. Cette attention socio-économique est une preuve que la décision d’externaliser dépasse les enclaves budgétaires ; elle vise l’ensemble du tissu économique.

1.1.3. Enjeux

Une forte et rigoureuse réglementation est mise en place, afin d'exclure tout éventuel échec du projet. En l'occurrence, il est question de prendre en considération quatre conditions cumulables. C’est-à-dire que les quatre conditions doivent être remplies en même temps et d’une manière cumulative. Le processus décisionnel de recourir, soit à une régie rationalisée optimisée, qu'ils abrègent par RRo, soit à un prestataire externe, est sujet à débat, suite à une étude socio-économique, une prise en compte du budget, ainsi qu'une nécessité de mettre en place un accompagnement en matière de ressources humaines. Aussi, il va de soi de dire que la faisabilité du projet est conditionnée par l'atteinte de l'objectif principal. Il s’agit de remplir impérativement et à long terme quatre conditions. Une sorte de pérennité du projet est recherchée. La durabilité des résultats attendus doit également être réelle et réalisable, quantifiable et mesurable. Le haut commandement du ministère de la Défense insiste, d'une manière légitime, sur le fait de pouvoir avoir une mainmise sur l'évaluation du projet et de l'activité tout au long du contrat, soit par des analyses comparatives par rapport aux études ayant précédé le lancement du projet et ayant permis la prise de décision, soit par une analyse du résultat. Aussi, des analyses ponctuelles ou de benchmark sont possibles. Quelques principes permettent ceci.

1.2. Piloter la rationalisation de la fonction ou son externalisation

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 181-184)