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I. « Culture locale » : qu’est-ce à dire ?

I.2. Cadre théorique

I.2.1. Des concepts

Au cœur problématique de mon travail de recherche, la notion de « culture locale » convoque de manière complexe trois concepts principaux, à savoir : le territoire, la culture et l’identité. Il convient donc à présent de rappeler la définition que je retiens pour chacun d’entre eux.

I.2.1.1. Territoire et local

Je viens de présenter, dans le chapitre premier, le cadre géographique dans lequel s’inscrit mon terrain. J’ai justifié mon choix en regard d’un projet d’identification éventuelle d’éléments culturels localisés relativement originaux et représentés auprès des populations comme autant de traits et de caractères spécifiques. Il est

dès lors nécessaire de préciser quelle conception de l’espace j’adopte pour travailler

à l’échelle locale.

Le territoire

Le terme de « territoire » occupe une place centrale dans les débats contemporains. Cependant, comme les mots « culture » ou « local », la forte occurrence du terme est inversement proportionnelle à sa précision, de sorte qu’il comporte de nombreuses acceptions. Il est donc indispensable de définir le « territoire », fil conducteur reliant tous les autres termes clés de mon travail.

Territoire et espace

Omniprésente dans la vie quotidienne, la notion de « territoire » désigne d’abord une

forme particulière de découpage de l’espace plus ou moins institutionnalisée. Le Dictionnaire de la langue française Littré définit le territoire comme « Étendue de

terre qui dépend d'un empire, d'une province, d'une ville, d'une juridiction ». Pour

autant, cette même notion est polysémique et peut être utilisée de façon plus spécifique en fonction des disciplines, des contextes ou des locuteurs.

Dès lors, il convient de définir les concepts essentiels dans lesquels le territoire plonge ses racines sémantiques, des concepts territoriaux incontournables dans la

réalisation de mon travail de géographie sociale : l’espace social, l’espace de vie et

l’espace vécu, la territorialité. Projection des rapports sociaux sur l’espace géographique, tel peut être défini le concept d’ « espace social » qui peut par ailleurs constituer (dans un second sens du terme) l’interférence entre rapports sociaux (de parenté, d’amitié, de production …) et rapports spatiaux (déplacements, fréquentations réelles ou imaginaires de l’espace, réactions affectives ou fonctionnelles aux lieux …). « Cette acception de l’espace social engendre des

organisations spatiales génériques : celles de la localité ou de la région, celles des espaces rural, urbain, périurbain » (DI MEO G., 1998). Espace d’usage correspondant à l’étendue sur laquelle les hommes se déplacent, l’ « espace de

vie », quant à lui, correspond à l’aire des pratiques spatiales d’un individu. Composé

d’une mosaïque de lieux (lieu de résidence, lieu de travail, lieu de loisirs …) qui sont reliés entre eux par les déplacements de chacun(e), il représente l’expérience concrète que ce dernier a de l’étendue. Enfin, le concept d’ « espace vécu », introduit en France par A. FREMONT dans son ouvrage La Région, espace vécu en 1976, exprime la relation existentielle, forcément subjective, que l’individu socialisé établit avec la terre et avec ses lieux. Sa connaissance passe par l’écoute des acteurs, par la prise en compte de leurs pratiques, de leurs représentations et de leurs imaginaires spatiaux. (DI MEO G., 1999). Ces catégories d’espaces une fois définies montrent la complexité du concept de « territoire » dont elles sont constitutives et leur prise en compte permet de mieux appréhender la richesse et la diversité des réalités géographiques, qu’elles soient individuelles ou collectives.

En effet, pour l’individu, les espaces objectifs créés par les structures politiques et

dont il s’inspire. Leurs représentations sont en retrait de cette objectivation de l’espace. Un mode de gestion personnelle des rapports spatiaux est effectivement à l’œuvre dans l’articulation que chacun construit entre ses pratiques et ses représentations de l’espace, mais aussi ces formes objectives que produisent les systèmes politiques et ou économiques. H. Lefebvre explique dans son ouvrage La

Production de l’espace : « l’espace social n’est pas une chose parmi les choses, un produit quelconque parmi les produits : il enveloppe les choses produites. Il résulte d’une suite et d’un ensemble d’opérations, et ne peut se réduire à un simple objet. »

(LEFEBVRE H., 1974) Il importe alors d’aller au-delà de l’espace que contribuent à produire les forces de l’Etat et du marché, un espace étranger aux formes habitées et pratiquées, dissocié de l’historicité et de la spontanéité, pour appréhender l’espace dans sa totalité et sous ses différentes facettes. La tension entre les territorialités du monde des vécus, des pratiques, d’une part, et du monde des formes politiques et administratives, d’autre part, amène donc au concept de « territoire ». Concept géographique à part entière, le territoire est une clé de mon travail de recherche. Il est à replacer dans un contexte théorique, celui d’une théorie dialectique entre idéel

et matériel, pratique et représentation. « Portion d’espace contrôlée et appropriée, y

compris symboliquement, par une société donnée » (DI MEO G., 2003), le territoire

constitue un espace enrichi par le sens que les sociétés lui confèrent et sur lequel elles agissent, qu’elles contrôlent et qu’elles construisent, c’est de « l’espace informé ». Reprenons ici la définition qu’en donne C. RAFFESTIN : « Le territoire est une

réordination de l’espace dont l’ordre est à chercher dans les systèmes informationnels dont dispose l’homme en tant qu’il appartient à une culture. Le territoire peut être considéré comme de l’espace informé par la sémiosphère. » (in

AURIAC F. et BRUNET R., 1986).

Résultat d’une construction sociale et culturelle, le territoire permet d’insister conjointement sur la dimension objective et subjective de l’espace. D’une part, tout

territoire est une portion plus ou moins vaste de l’espace terrestre, il possède à ce

titre des caractéristiques particulières et la société attribue différents usages à son sol lui donnant une physionomie singulière, faite de diversité.

D’autre part, le territoire a également une dimension subjective qui renvoie à l’expérience individuelle, sensible, affective de l’espace. Celle-ci résulte, comme l’observe G. DI MEO, des « pratiques individuelles, des cheminements et des

itinéraires personnels, de ces fourmillements du quotidien qui produisent des bassins de vie et d’action » (in CIATTONI, A. (dir.), 2005). En référence à cette

dimension subjective du territoire, citons le géographe Louis POIRIER, écrivain sous

le pseudonyme de Julien GRACQ, qui écrit dans son livre La forme d’une ville,

consacré à Nantes : « Je ne cherche pas ici à faire le portait d’une ville. Je l’ai modelé selon le contour de mes rêveries intimes, je lui ai prêté chair et vie selon la loi du désir plutôt que selon celle de l’objectivité. » Nous comprenons par cet

exemple combien le territoire (de la ville) se caractérise non seulement par la matérialité (de son bâti), mais aussi par le fait qu’il naisse de l’ensemble des images individuelles, des expériences collectives. En conséquence, le territoire participe de trois ordres distincts. D’une part, il s’inscrit dans l’ordre de la matérialité, d’autre part, il relève de la psyché individuelle et enfin, il participe de l’ordre idéel des représentations collectives, sociales et culturelles (DI MEO G., 2001 b). Le jeu des mobilités contribue au remodelage constant de ces trois ordres constitutifs du territoire.

Territoire et Territorialité

Il est important de définir un autre concept qui dévoile la manière dont ces trois dimensions s’articulent : la territorialité12

. En effet, le territoire constitue un

« agencement de ressources matérielles et symboliques capable de structurer les conditions pratiques de l’existence d’un individu ou d’un collectif social et d’informer en retour cet individu et ce collectif de sa propre identité » (DEBARBIEUX B., 2003).

Nous renvoyant dans le camp du sujet social, la territorialité nous ramène « à sa

logique personnelle, à son espace vécu tissé de rapports intimes, réels ou imaginaires avec les lieux, rapports enrichis par ses expériences, par ses apprentissages sociaux [celles et ceux du sujet]» (DI MEO G., 2001 a). La

territorialité constitue une tension entre pratiques et vécus d’une part, et, d’autre part, les formes objectivées et structurantes de l’espace politiquement, socialement construit (le territoire au sens des sciences politiques). En effet, les déplacements que réalisent les individus dans leur vie quotidienne sont structurants, ils favorisent les contacts et la création de réseaux de sociabilité, d’affinités autour de leurs

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« On entend par territorialité la relation sociale et culturelle que des sociétés données ont noué avec

activités familiales, de travail ou de loisirs. Une « géographie tranquille du quotidien » structurant des familiarités qui engendrent des représentations territoriales se met en place. Il ne s’agit donc pas d’un simple espace, au sens d’ « espace géographique », « étendue terrestre utilisée et aménagée par les sociétés en vue de leur reproduction » (BRUNET R., FERRAS R. et THERY H., 1992). Cette pratique de l’espace met effectivement en évidence une certaine familiarité, nous sommes en présence de réalités sociales spatialisées, faites de rapports, de pratiques, de sensations et de représentations. C’est pourquoi je préfère au concept d’ « espace géographique » celui de « territoire », « espace approprié avec sentiment ou conscience de son

appropriation. » (Ibid.). La notion de « territorialité » permet effectivement de

réintroduire le sujet, l’acteur, ses pratiques et représentations que l’analyse quantitative et fonctionnelle de l’espace fait perdre de vue (OZOUF-MARIGNIER, M.-V., 2009). Elle permet aussi de comprendre les désaccords sur les limites, sur la géométrie des territoires vécus selon des territorialités individuelles forcément diverses, voire divergentes.

Travaillant sur un territoire local, nous verrons combien ces jeux combinés, combinant proximité et affinités font, entre les habitants, réseau. Par ailleurs, les formes territoriales d’appartenance évoluent sous l’effet de la mondialisation, de la généralisation et de la valorisation des formes de mobilité et de la possibilité d’être « ici et ailleurs », offertes par la puissance des moyens de communication. Pour autant, comme le souligne C. DUCOURNAU, « la mobilité ne constitue pas une

entrave à la construction de liens socio-spatiaux signifiants, par le biais desquels se forge un sentiment d’appartenance à un ensemble cohérent de lieux, à un territoire. »

(in DI MEO G. (dir.), 2001 b). Loin d’effacer ce sentiment d’appartenance, nous

verrons comment les pratiques et les déplacements des individus renforcent ce territoire à forte charge d’idéologie, au sens où la définit G. DI MEO : « Nous

entendons par idéologie l’ensemble des représentations mentales, des idées et des concepts, des images, des mythes et des discours, des symboles collectifs partagés, à une époque et dans un territoire donnés, par des groupes sociaux ou ethniques développant un minimum de sentiment identitaire » (DI MEO G., 2001 a). Une

Comme je viens de le montrer, nous pouvons considérer à l’instar de G. DI MEO que « la vertu essentielle du concept de territoire réside sans doute dans la globalité et

dans la complexité de son contenu sémantique, dans le fait que sa construction en un lieu ou ensemble de lieux donnés mobilise tous les registres de la vie humaine et sociale, combine les dimensions concrètes, matérielles, celles des objets et des espaces, celles des pratiques et des expériences sociales du quotidien avec les dimensions idéelles des représentations (idées, images, symboles, souvenirs) et des pouvoirs. » (DI MEO G., 1998). Au cœur de « l’espace mobile et fluide du monde

mondialisé » (RETAILLE D., 2005), le concept de territoire qui sous-entend une

indifférence scalaire (même si tout territoire correspond à une échelle géographique particulière) permet de dépasser les différentes échelles dans une approche mêlant

aussi deux dimensions essentielles : le matériel et l’idéel. Par nature multiscalaire, le

territoire se repère effectivement à différentes échelles de l’espace géographique, de l’aire des entités plurinationales au champ de la localité, du global au local. Cadre de

mon analyse, le territoire permet de considérer à la fois l’espace politique décrété et

l’espace pratiqué, vécu et représenté tout en tenant compte de la tension entre ces deux espaces gérée par chacun (territorialité) en fonction de ses conditions spécifiques d’existence. Espace approprié en fonction d’interactions complexes entre le vécu individuel et l’expérience sociale, le territoire est aussi « temps cristallisé » à travers les lieux de mémoires comme le souligne M Marié (in BAILLY A., FERRAS R., 1997). En effet, les pratiques tant sociales que spatiales, mais aussi l’univers idéel des représentations et de la mémoire collective participent à la construction du territoire local.

Au moment où certains pensent la « fin des territoires » (BADIE B., 1995) et d’autres

évoquent la multiplication des entités territoriales, l’image d’un « encombrement

territorial » (RENARD J., 2000), la notion complexe de territoire permet de réconcilier

la différenciation des individus et leur association, l’ancrage et la mobilité, les

singularités locales et la mise en réseau13. Ceci amène à penser la superposition des

réseaux et des territoires à la manière de M. Castells : « Ce qui caractérise la

nouvelle structure sociale, la société en réseaux, c’est que la plupart des processus dominants, ceux qui concentrent le pouvoir, le capital et l’information, sont organisés

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Défini par B. Badie comme « un lien informel, faiblement institutionnalisé, plus ou moins administré,

qui contrôle et organise les comportements sociaux hors de tout support et de toute contrainte de nature territoriale » (1994).

dans l’espace des flux. Mais la plupart des expériences humaines restent locales et ce qui fait sens pour les êtres humains le demeure aussi.» (CASTELLS M., 1999).

Le local

Le local, au sens d’espace et de société localisés, apparaît nécessairement limité

dans ses dimensions par celles du monde de la vie quotidienne et par la co-présence des individus. Le local est bien entendu de nature territoriale. Certes il n’est pas aisé de circonscrire le local, de le définir clairement, mais cette difficulté est à dépasser du fait de l’intérêt que présente cet objet géographique. Ce monde de la vie

quotidienne est effectivement lui-même fondateur du rapport au monde de l’individu,

mais également du rapport à l’autre, de la construction commune de sens qui fait le

lien social. J’ai donc choisi de partir de ce « cadre spatial » pour étudier un complexe

culturel assez touffu fait de pratiques, de manifestations, de représentations …

Considérant à la manière de l’ethnométhodologie que la vie quotidienne constitue le

niveau social primordial. Cette étude du quotidien met en évidence des espaces de vie différents allant d’un fort ancrage sédentaire pour certains individus à une grande mobilité pour d’autres. Je peux tout d’abord me référer à la première étude que j’ai réalisée et qui est à replacer dans un contexte rural, compte tenu du cadre spatial donné et repéré auquel je m’attachais, à savoir la Chalosse, « région de collines,

entre le Gave de Pau et l’Adour. Pays de polyculture et d’élevage» comme la définit

le dictionnaire (Le Petit Larousse Illustré, 1998). Cette remarque n’est pas neutre

dans la mesure où j’ai constater, lors de mon enquête, que la ruralité et les moindres

densités qui l’accompagnent semblent favoriser l’enfermement d’un « ici » relativement endogène, intériorisé, clos. A l’inverse, la ville se caractériserait par un « ici » plus large, plus générique. A juste titre, D. Crozat remarque que « dans le rural

plus qu’un cadre spatial, le village désigne une communauté spatialisée qui entretient des relations privilégiées (…) » (in AUGUSTIN J-P., LEFEBVRE A., 2004).

Bien que j’intègre Dax et son agglomération à ma zone d’étude, ces remarques sont

toujours applicables dans un contexte départemental rural.

Pour autant, l’étude des pratiques spatiales et des espaces de vie des familles enquêtées livre quelques indications supplémentaires qui donnent une métrique de ce « local » (Croquis 1). Les observations réalisées tout d’abord en Chalosse ont

d’ailleurs été confortées, par la suite, à l’échelle de l’arrondissement de Dax. Effectivement, une géographie du quotidien faite des déplacements ordinaires des individus et une appropriation symbolique et personnelle de l’espace se dessinent dans un univers de proximité dont le rayon n’excède pas une trentaine de kilomètres (une quinzaine le plus souvent) autour de la maison, comme l’illustre le document

cartographique ci-dessous, indiquant les éléments de l’espace de vie d’une famille

de Pomarez (F n°23).14 Myriam (43 ans) habite ce bourg chalossais depuis 23 ans avec Jean-Jacques (51 ans), son époux qui y a toujours vécu. Leur espace de vie s’organise essentiellement à l’échelle de la commune et du canton, mais le travail de Myriam nécessite qu’elle se rende quotidiennement à Dax où elle en profite également pour réaliser les courses alimentaires du foyer « au retour du boulot » (F n°23). Dax constitue une ville où l’ensemble de la famille aime venir par ailleurs chaque année pour ses fêtes au mois d’août. Effectivement, M. Lussault invitant à

aborder « le Monde pour ce qu’il est : un nouveau mode de spatialisation des

sociétés humaines » (LUSSAULT M., 2013), même dans un contexte rural

chalossais, la centralité urbaine joue son rôle (ici la ville de Dax). Comme le souligne l’auteur : « Habiter, compte tenu de l’ampleur prise par l’urbanisation, c’est se trouver

toujours en liens mobilitaires avec au moins un pôle urbain ; de plus en plus souvent, les espaces et leurs habitants sont multipolarisés, ces derniers devant jouer avec les différents lieux d’attraction qui les orientent. » (LUSSAULT M., 2013).

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Nous choisissons de faire référence aux familles rencontrées dans le cadre de notre « Enquête sur la vie quotidienne » en utilisant le numéro de l’entretien réalisé à la suite de la lettre F.

Croquis 1 : Eléments de l'espace de vie d'une famille de Pomarez

Source : Enquête sur la vie quotidienne, 2005-2006

Ainsi je considère, tout comme le rappelle G. Di Méo, que le local « constitue la

meilleure échelle d’observation du rapport essentiel que les individus organisés en société nouent avec l’espace. » (1991 a).

Le local, objet d’analyse

Longtemps considéré comme le symbole du conservatisme social, de la rémanence des traditions, le local est aujourd’hui perçu autrement, de sorte que se crée une légitimité nouvelle du local comme objet d’analyse. « On se plaît à reconnaître de

soulignait A. Mabileau (1993). Dès lors, le local, véritable laboratoire d’expérimentation permettant d’appréhender la totalité et la simultanéité du fait social lié à l’habitation (par exemple), offre l’avantage de fournir la dimension du quotidien et l’expérience de la proximité, une proximité plus ou moins fluctuante au gré des trajectoires et mobilités des individus. Le local semble par conséquent présenter,

dans la société actuelle, un niveau d’analyse sans doute pertinent, même à l’heure

de la mondialisation, dans un espace de plus en plus mobile. D’une part, la

connaissance et la pratique du terrain qu’il suppose constitue un atout indispensable pour le chercheur. Le local sécrète des formes particulières de sociabilité qui s’inscrivent dans un espace chargé de sens, signifié. D’autre part, ce niveau d’analyse est aujourd’hui enrichi par une approche dialectique (local / global) faisant

de ce « cadre spatial » un espace ouvert sur le national, le global… Le local en tant

que « domaine scientifique » se caractérise par sa nature exogène au sens où « son

existence (ou présumée telle) résulte du dialogue entre le national [ou le global,

pourrions-nous ajouter] et le local » proprement dit (MABILEAU A. (dir.), 1993). Espace sans frontière bien nette en dehors du sentiment élémentaire de rupture et de discontinuité spatiale qu’il provoque ou qui l’engendre, tel se dessine le territoire local vécu, porteur de représentations identitaires. Sa consistance territoriale, ses rapports à la territorialité de chacun de ses protagonistes sont frappants.

Le local, forme socio-spatiale

« Par une sorte de paradoxe, le local, qui se donne comme ancrage, comme

stabilité, se trouve, au point de rencontre d’un réseau d’idées et de définition flou et instable » (BOURDIN A., 2000). Le local constitue ainsi une forme sociale qui

organise un niveau d’intégration des actions et des acteurs, des groupes et des échanges et qui est caractérisée par le rapport privilégié avec un lieu15 ; ce dernier variant dans son intensité et son contenu, voire dans l’extension même du lieu. Ajoutons cependant que la nature du rapport social à l’espace local doit être conçue au travers d’un décryptage des relations dialectiques qui se nouent entre la sphère

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Le Petit Larousse 2010 définit le « lieu » comme la « partie circonscrite de l’espace où se situe une