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Chapitre 3 : Les composants acousto-optiques pour l’analyse

I. Les composants AO pour la polarimétrie

L’utilisation des composantes acousto-optiques pour l’analyse de la polarimétrie se com-prend intuitivement par l’emploi de cristaux biréfringents qui offre la possibilité de décom-poser une source lumineuse non polarisée en deux faisceaux orthogonalement polarisés. Cela fait des AOTFs des séparateurs de polarisation « naturels ».

I.1. Principe

Avec les AOTFs il est possible d’obtenir une mesure de faisceaux polarisés linéairement. Cependant, nous ne réalisons pas une lecture complète de la polarisation de la source : cela ne permet pas en particulier de retrouver les 4 paramètres de Stokes I, Q, U et V (Annexe B, équation (Annexe B.4)). Une mesure de l’intensité des faisceaux diffractés nous permet d’ob-tenir seulement les paramètres I et Q, étant donné qu’on aura accès seulement aux valeurs des intensités des deux composantes. Mais sans obtenir U et V on ne peut pas faire la diffé-rence entre une lumière totalement non polarisée et une lumière polarisée linéairement à 45°, ou encore une onde polarisée circulairement [132]. Ce phénomène est illustré Figure 3.1.

Figure 3.1 : Exemple de cas de faisceaux lumineux de différentes polarisations (un polarisé, l’autre non) où l’observation est identique après passage dans l’AOTF.

Cependant il n’est pas forcément nécessaire d’avoir les 4 coefficients de Stokes pour extraire une information utile sur la polarisation dans un certain nombre de cas, en particulier si le but est de détecter un objet et de le différencier du reste de la scène observée et que la mesure des polarisations linéaires et orthogonales donne des résultats différents.

Deux catégories de système de mesure de polarimétrie sont possibles avec un AOTF [172] : dans un cas on utilise l’AOTF seul et les deux faisceaux diffractés sont mesurés

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en sortie de celui-ci, dans le second cas on place en amont un composant pour sélectionner la polarisation en entrée de l’AOTF et on peut alors ne mesurer qu’un faisceau diffracté.

La partie suivante présente un état de l’art des différentes possibilités de système com-portant un AOTF pour analyser la polarisation d’une source.

I.2. Les différents systèmes développés

Un AOTF seul ne va permettre que de mesurer les intensités sur deux plans de polari-sation orthogonaux. On obtient alors les mesures horizontales et verticales, et donc seule-ment les deux premiers paramètres de Stokes (𝐼 et 𝑄) [132].

Une solution a été proposée pour améliorer la capacité à déterminer la polarisation, elle consiste à faire tourner selon l’axe optique le système complet sur lui-même (AOTF + ca-méra) et de se servir de l’AOTF comme d’un polariseur. Ceci permet d’avoir 4 positions de lecture de polarisation linéaire (0°, 45°, 90° et 135°) et donc de déterminer le dégrée de po-larisation linéaire (DOLP) de la source [121]. Avec un tel système on détermine seulement les trois premiers paramètres de Stokes (𝐼, 𝑄 et 𝑈). L’identification de la polarisation circulaire n’est toujours pas possible. Notons aussi que ce système est potentiellement moins précis et moins robuste avec l’ajout de parties mécaniques.

Une autre solution pour retrouver les quatre directions de polarisation linéaire (0°, 45°, 90° et 135°) est d’avoir deux AOTFs identiques en parallèle qui donnent chacun les ordres +1 et -1 et qui sont tournés de 45° l’un par rapport à l’autre (selon l’axe optique) [81]. Ce-pendant ce système nécessite deux AOTFs identiques (avec les mêmes caractéristiques).

Si un AOTF seul ne permet pas la lecture complète de la polarisation et si la rotation de l’AOTF ajoute de l’imprécision de mesure, il est par ailleurs possible d’ajouter des compo-sants polaricompo-sants au système pour permettre une analyse plus poussée de la polarisation tout en ayant qu’un seul AOTF.

Il est ainsi possible de réaliser une mesure de la polarisation en ajoutant une lame de retard en amont de l’AOTF. Alignée à 45° par rapport à un plan de polarisation de l’AOTF, la lame induit un retard en fonction de son épaisseur et selon la longueur d’onde. En obser-vant la réponse de ce système en fonction de la longueur d’onde, une modulation apparait pour les éléments polarisants observés [121]. Ce système permet à nouveau d’obtenir les 3 trois premiers paramètres de Stokes, cela dit, la mesure spectrale quant à elle nécessite une analyse plus détaillée.

Pour pallier la modulation d’amplitude en fonction de la longueur d’onde, il faut con-trôler le déphasage apporté au faisceau lumineux. Le plus souvent ce sont les LCVRs (liquid cristal variable retarder) qui sont utilisés pour apporter ce déphasage contrôlé. Un LCVR permet de choisir l’angle de la polarisation en fonction de l’orientation des cristaux liquides. Cette orientation est déterminée en fonction de la tension aux bornes de la lame à cristaux liquides, permettant d’avoir plusieurs directions de polarisation disponibles avec un seul com-posant. Ceci a l’avantage de n’ajouter aucune partie mécanique, tout en restant relativement rapide (les LCVRs sont plus lents que les AOTFs). Un exemple de système AOTF + LCVR est présenté Figure 3.2.

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Lorsque l’on utilise un tel système (comportant un LCVR) on peut alors n’utiliser qu’un seul faisceau diffracté en sortie de l’AOTF [172]. En effet, les systèmes cités précédents de-vaient obligatoirement se trouver dans le cas de diffraction simultanée pour permettre de mesurer les deux polarisations en même temps, dans le cas contraire, deux mesures consé-cutives avec deux fréquences acoustiques différentes sont nécessaires (mais selon la source on perd en précision s’il y a variation temporelle). Dans les systèmes AOTF+LCVR il est possible de choisir les conditions de synchronisme en fonction d’un seul faisceau optique si nécessaire. On peut alors par exemple se trouver dans le cas des tangentes parallèles et obte-nir une grande acceptance angulaire.

Un tel système est plus performant dans certains cas étant donné que la différence entre les polarisations orthogonales obtenues permet un meilleur contraste après traitement des données. Cela est suffisant pour détecter un objet polarisant linéairement la lumière dans un environnement non polarisant par exemple. C’est le cas notamment des objets manufacturés (souvent fabriqués avec des grandes surfaces lisses), comme par exemple les véhicules. S’ils sont camouflés, on peut les détecter au milieu de la végétation [56], [122]. C’est le cas aussi en médecine pour la détection d’anomalies (comme on a vu dans le chapitre 1, on peut utiliser dans la recherche pour le cancer) [85].

Figure 3.2 : Exemple de système AOTF + LVCR pour obtenir les 4 directions de polarisations li-néaires.

Un tel système (AOTF + LCVR) permet uniquement de retrouver les paramètres li-néaires du vecteur de Stokes. Pour obtenir les 4 composants du vecteur de Stokes, un seul LCVR ne suffit pas. En revanche, il a été démontré qu’avec deux LCVRs et un AOTF on peut mesurer totalement le vecteur de Stokes [132].On peut alors avoir 4 images différentes selon les choix des paramètres des LCVRs et pour différentes longueurs d’onde grâce à l’AOTF. Avec ce système, même la polarisation circulaire peut être déterminée et donc le paramètre 𝑉 du vecteur de Stokes. Il est dans certains cas beaucoup plus significatif de pou-voir mesurer les 4 paramètres de Stokes pour être plus précis dans la différenciation de tériaux (par exemple de minéraux [42] ou encore la détection d’objets [56], car certains ma-tériaux (verre, roche…) polarisent la lumière alors que d’autres le font beaucoup moins (vé-gétaux)). Ceci permet par exemple de détecter du camouflage dans le cas d’une faible intensité lumineuse et venir renforcer une analyse spectrale.

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Le Tableau 3-1 résume les différentes méthodes de mesure polarimétrique concernant les AOTFs évoquées ci-dessus. On remarquera que le plus simple reste bien évidemment de n’utiliser qu’un AOTF, seul. En effet, bien qu’on ne puisse lire que deux paramètres de vec-teur de Stokes on obtient quand même une idée de la polarisation de la lumière issue de l’objet observé. Dans certains cas cela est suffisant pour formuler une analyse de la scène. Les systèmes ajoutant les LCVRs sont plus précis en termes de lecture de la polarisation mais sont plus complexes, moins rapides, voient potentiellement leurs bandes spectrales diminuer et sont plus coûteux en énergie. De plus, les mesures sont obligatoirement réalisées les unes après les autres pour obtenir les différentes polarisations, et cela rend les mesures en temps réel moins efficaces.

En outre, dans le cas où la mesure est effectuée en faisant varier les paramètres de la source lumineuse éclairant l’objet observé, l’AOTF permet de donner deux polarisations or-thogonales directement sans ambigüité.

Tableau 3-1 : Comparaison des différents systèmes comportant un AOTF pour la mesure de la polarisation

Système Stokes Avantages Inconvénients

I Q U V AOTF seul x x • Simple • Rapide • Mesures simultanées

• Mesure partielle de la po-larisation

AOTF seul en

rota-tion x x x • Plus de donnée que

AOTF simple • Peu robuste (partie méca-nique)

2 AOTFs (tourné

de 45°) x x x • Plus de donnée que

AOTF simple • Coût

• Nécessite deux AOTFs identiques

AOTF + LCVR

x x x

• Peut avoir une plus grande acceptance angu-laire

• Plus complexe

• Moins rapide (ajout de LCVR)

AOTF + 2

LCVRs x x x x • Mesure du vecteur en en-tier y compris la polarisa-tion circulaire

• Complexe

• Moins rapide (ajout de LCVR)

Selon les besoins et les applications on choisira évidemment le système le plus adapté.