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2.4 Application à la viscohyperélasticité

2.4.3 Comportements des constituants

2.4.3.1 Viscohyperélasticité de la matrice

Pour décrire le comportement du liant élastomérique, on utilise une approche thermo-dynamique à variable interne. Cette dernière est formulée dans un cadre Lagrangien d'une part pour s'aranchir de tout problème d'objectivité (problème caractéristique des grandes déformations : voir annexe A), d'autre part par souci de simplicité puisque l'approche mor-phologique est formulée dans ce même cadre. Le modèle retenu est proche dans sa structure de celui de Trumel et al. [TDFL01], lui-même inspiré des travaux de Simo [SIM87] et de leurs dérivés [GS92, RG97].

Les variables d'état considérées sont :

 E : tenseur des déformations de Green-Lagrange (voir annexe A)

 γ : variable interne tensorielle homogène à une déformation, traduisant l'état de re-laxation de la matrice. Lorsque cette dernière est parfaitement relaxée, γ est nul. Notons que γ est ici de nature non cinématique (i.e. elle ne nécessite pas de dé-composition multiplicative du gradient de transformation local), contrairement aux variables internes des modèles de [SIM87, GS92, RG97]. Ce choix sera justié plus loin (paragraphe 2.4.4).

On postule ensuite l'existence d'un potentiel thermodynamique w, énergie libre par unité de volume initial, somme d'une part réversible ne dépendant que de E et d'une part visqueuse ne dépendant que de γ :

w(E, γ) = w(r)(E) + w(v)(γ) (2.6) De même, on suppose la décomposition additive de la contrainte de Piola-Kirchho 2 notée s:

s = s(r)+ s(v) (2.7) Les parties réversible et visqueuse de s, traduisant respectivement les parts à l'équilibre et hors équilibre de la réponse, sont données par :

s(r) = ∂w (r)(E) ∂E ; s (v) = ∂w (v)(γ) ∂γ (2.8)

Part réversible du comportement

s(r) caractérise l'élasticité caoutchoutique de la matrice. Elle dérive de l'énergie instanta-nément récupérable w(r). Cette contrainte réversible est modélisée par l'intermédiaire des lois de comportements hyperélastiques elles-même dénies à partir de densités d'énergie de déformation.

Lors de ses travaux, Guiot [GUI05] a fait une étude des diérents modèles hyperélastiques existant et son choix s'est arrêté sur une loi de type Mooney-Rivlin compressible (avec une loi pression hydrostatique/variation de volume linéaire). Il convient de rappeler que le choix de ce modèle d'hyperélasticité a résulté d'un compromis entre performances et simplicité puisque l'objectif était à l'époque de pousser les développements analytiques re-latifs à la résolution de (2.5) le plus loin possible. Ayant aujourd'hui recours au numérique, nous pourrions considérer une loi de comportement plus performante, notamment en ce qui concerne la part volumique de la réponse dont la linéarité n'est pas satisfaisante. Cepen-dant, nous n'envisageons pas un tel enrichissement dans cette partie puisqu'il ne s'agit pas de représenter au mieux le comportement d'un composite énergétique, mais uniquement de montrer l'aptitude de l'approche morphologique à traiter le problème viscohyperélastique. Nous travaillerons donc avec la densité de déformation suivante, somme d'une énergie de déformation de type Mooney-Rivlin et d'un terme de prise en compte de la compressibilité :

w(r)= C10(I1− 3) + C01(I2− 3) + K

2(J − 1)

2 (2.9) avec :

 I1 = I1J−2/3, I2 = I2J−4/3 : invariants modiés (les invariants classiques étant donnés par : I1 = tr(C), I2 = 12((trC)2− trC2)et I3 = detC = J2)

On notera néanmoins que contrairement aux précédents travaux de Guiot, la densité d'éner-gie de déformation est cette fois écrite en invariants modiés de manière à découpler les eets distorsionnels des eets volumiques, ce qui est plus rigoureux. Nous pouvons en ef-fet nous attendre à ce que ces derniers soient eectivement importants compte-tenu du fort taux de charge et des niveaux de pressions attendus, notamment pour des charge-ments compressifs tels que ceux que nous souhaitons modéliser en priorité (voir chapitre 5). Plus généralement, le découplage du potentiel thermodynamique en une part déviatoire et une part volumique vient du fait qu'expérimentalement, les niveaux d'énergie atteints en cisaillement et en dilatation sont très diérents [LEJ06]. De plus, pour des matériaux quasi-incompressibles de telles formulations sont avantageuses sur le plan numérique dans la mesure où l'incompressibilité totale est une contrainte sévère, dicile à traiter [BOU06]. En termes de contraintes de Piola-Kirchho 2 s, on a ainsi :

s(r)IJ = 2[C10I3−1/3δIJ + C01I3−2/3(I1δIJ − CIJ) − (C10

3 I1I3−4/3+2C01

3 I2I3−5/3)I3CIJ−1]

+K(I3− I31/2)CIJ−1 (2.10)

Part visqueuse du comportement

s(v) caractérise la part  hors équilibre  de la réponse ; elle est due aux interactions retardées entre les chaînes moléculaires. L'énergie  bloquée  dont elle dérive, w(v), est entièrement récupérable après relaxation.

Comme dans les travaux de Guiot, on suppose dans la suite que w(v) est une fonction quadratique de γ, ce qui implique que s(v) dépend linéairement de la variable interne γ via le tenseur de rigidité visqueuse L(v) :

w(v) = 1 2γ : L

(v) : γ ; s(v) = L(v) : γ (2.11) Enn, la variable interne γ, qui peut être interprétée comme une déformation élastique retardée, est supposée évoluer selon la loi suivante :

˙ γ + 1

τγ = ˙

E ; γ(t = 0) = 0 (2.12)

τ est un temps de relaxation et ˙E la dérivée temporelle de la partie déviatorique de E. Cette loi suppose donc que les eets visqueux ne dépendent que de la part déviatorique de la déformation, ce qui est expérimentalement justiable. En eet, l'étude du compor-tement des élastomères employés dans les composites énergétiques montre que les temps de relaxation associés à la part volumique de la déformation sont beaucoup plus longs que ceux associés aux déformations déviatoriques : les premiers sont alors souvent  gelés 

(voir [TDFL01, ROG06, FUN07]).

Notons pour nir que le modèle proposé est thermodynamiquement admissible : il assure notamment la positivité de la dissipation viscoélastique d(v) = s(v) : (E − ˙˙ γ). Dans ce qui précède, le potentiel de dissipation n'a pas été introduit. En pratique, ce sont les lois d'évolution que l'on mesure, mais il est vrai que l'expression d'un potentiel de dissipation dont dériverait la loi d'évolution contribuerait à une rigueur certaine du modèle thermo-dynamique présenté.

Le modèle retenu pour décrire la viscohyperélasticité de la matrice peut être critiqué sur plusieurs points :

 Il n'est pas représentatif du caractère non linéaire de la viscoélasticité des élastomères.  L'identication du tenseur de rigidité visqueuse L(v) n'est pas arrêtée.

 La loi d'évolution de la variable interne ne fait intervenir qu'un seul temps de relaxa-tion, ce qui limite sa validité à un domaine de vitesses de déformations restreint. (voir la thèse de Guiot [GUI05] pour plus de détails concernant les deux derniers points). Cependant, nous nous satisferons de ce modèle, en arguant qu'il décrit de manière re-lativement classique des éléments essentiels du comportement des élastomères (grandes déformations, viscoélasticité). La modélisation retenue est par là même susante pour illustrer l'aptitude de l'AM à traiter de manière directe le problème viscohyperélastique.

2.4.3.2 Hyperélasticité des grains

Concernant les grains, an de faciliter le passage à la moyenne, on a choisi de rester dans le formalisme des grandes déformations pour décrire leur comportement, même s'ils sont très peu déformables. On aecte donc aux grains aussi un comportement hyperélastique. Par souci de simplicité, la densité d'énergie des grains wgrains est exprimée à partir de la part réversible du comportement de la matrice (voir (2.9)) et d'un contraste. Autrement dit, on prend :

wgrains = w(r)× contraste (2.13)