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b. Modèles théoriques

1.2.3.3. Comportement sous cisaillement

D kTe 72 R F = ⎟ ⎠ ⎞ ⎜ ⎝ ⎛ πΓ

Avec Rg le rayon de giration de la chaîne en solvant θ et Γ , la densité de greffage, le nombre de chaînes par unité d’aire. Γ peut être relié à la distance s entre les points d’ancrage selon la relation : 12

s

= Γ

Nous avons donc vu que la compression de polymères greffés sur une surface induisait une force répulsive d’origine osmotique, voyons maintenant comment les films de polymères se comportent sous cisaillement.

1.2.3.3. Comportement sous cisaillement

Plusieurs études rapportent les propriétés de très bon lubrifiant de films de polymères greffés sur une surface. Quel est le mécanisme mis en jeu et dans quelles conditions cette affirmation est – elle vérifiée?

Klein60 a étudié le comportement d’un film de brosses de polystyrène chimiquement greffées sur une surface de mica dans du toluène (bon solvant). Pour des compressions relativement importantes, ce système présente des forces de friction très faibles (coefficient de friction inférieur à 0,001). A très forte compression, ils observent une augmentation de la force de friction. Ces résultats peuvent être expliqués qualitativement par deux contributions d’origine visqueuse : la première est due au frottement des molécules de solvant entre les films de polymère lorsqu’ils sont en mouvement, il n’est pas spécifique des films de polymères et

intervient quand les surfaces ne sont pas sous forte compression. La seconde contribution intervient aux plus faibles séparations et concerne l’interpénétration des brosses de polymère. En effet lorsque les brosses s’interpénètrent (avec une épaisseur d’interpénétration δ), il y a frottement entre les monomères de chaque brosse ce qui augmente la force de friction. L’interpénétration des brosses est fortement dépendante de la charge de compression. Aux faibles compressions, la profondeur d’interpénétration est faible ( pour des brosses73), ainsi que la friction mesurée. Le glissement se fait au niveau d’une couche relativement fluide à l’interface entre les brosses, d’autant plus que les brosses de polymère en bon solvant sont très hydratées. Selon Klein, il se forme d’ailleurs comme une « gaine d’hydratation » à l’interface74.

3 / 1 ≈ D δ

Au contraire, aux fortes compressions, les deux brosses sont plus fortement interpénétrées, ce qui induit une augmentation du frottement.

Plusieurs paramètres peuvent influencer les propriétés de friction des films de polymère. La qualité du solvant notamment joue un rôle important. Une étude61 menée sur du PS-PVP greffé sur une surface de mica en bon et en mauvais solvant montre que les forces de friction sont plus importantes dans le cas du mauvais solvant. Granick75 attribue ce phénomène à une interpénétration plus importante des chaînes (car les interactions interchaînes sont favorisées), ce qui conduit à un enchevêtrement accru entrainant plus de dissipation et des forces de friction plus importantes.

La friction des polymères dépend aussi de la vitesse de cisaillement, Schorr61 a montré qu’une couche de PS-PVP avait un comportement newtonien à vitesse faible ou modérée puisque la force de friction dépendait linéairement de la vitesse. Par contre, il observe pour des compressions importantes, une transition vers une dépendance non linéaire à haute vitesse, attestant d’un comportement rhéofluidifiant, c'est-à-dire que la viscosité effective diminue avec le taux de cisaillement comme nous le verrons au chapitre suivant. Nous pouvons expliquer cela qualitativement de la manière suivante :

• A faible vitesse, une chaîne cisaillée au-delà de sa longueur linéaire est extraite lentement de la couche opposée, elle relaxe et a le temps par la suite de se réinterpéneter avant d’être à nouveau étirée.

• A plus grande vitesse, une chaîne extraite plus rapidement n’a plus le temps de retrouver sa position d’équilibre avant de s’interpénétrer de nouveau et son interpénétration n’est que partielle. La dissipation est alors moins importante, c’est pourquoi la courbe dévie de la droite.76,77 (Figure I-51)

Figure I-51 : Force de friction en fonction de la vitesse pour un polymère en bon solvant pour différentes compressions (D correspond à la séparation entre les surfaces elle diminue avec la compression)62

Le comportement de bon lubrifiant des polymères greffés est d’autant plus vrai avec les polyélectrolytes. Dans leurs études 78,79, Raviv et al montrent que la présence de brosses de polyéléctrolytes greffées par un bloc hydrophobe sur deux surfaces de mica rendues hydrophobes donne des forces de friction très faibles, à peine détectables par la technique du SFA-nanotribomètre. Cet effet est attribué à la résistance à l’interpénétration des chaînes, due à la répulsion osmotique entre les deux couches de polyélectrolytes que nous avons décrite au paragraphe précédent. Cette lubrification exceptionnelle est vérifiée en-dessous d’une charge normale critique au-delà de laquelle la friction devient très importante car le système devient adhésif, (Figure I-52).

Figure I-52 : Trace de friction (A) et Forces de frottement (B) entre des surfaces de mica rendues hydrophobes par du STAI recouvertes de PMMA-b-PSGMMA. Le polymère est adsorbé par le bloc hydrophobe PMMA79.

Sur la figure I-52, les traces A et E montrent les déplacements allers et retours imposés aux surfaces et les traces B et G les forces de friction mesurée. Elles sont indétectables tant que la séparation entre les surfaces reste élevée (taux de compression des films au repos inférieurs à 3,5). La figure B montre l’évolution de la force de friction en fonction de la force normale. Tant que la compression est faible, la force de friction est négligeable ; à partir d’une compression critique, elle augmente fortement. Les auteurs attribuent cette augmentation à un endommagement de la couche lubrifiante avec l’expulsion du polyélectrolyte suite à un manque de cohésion.

Dans notre travail de thèse, nous utiliserons des polymères greffés car les polymères adsorbés présentent un cas particulier. En effet, avec les systèmes adsorbés, la lubrification est moins bonne qu’avec les films greffés. Contrairement aux systèmes greffés, le profil de densité d’un film adsorbé sur un mur n’est pas homogène dans l’épaisseur, le film est très peu dense dans la zone distale ce qui favorise l’interpénétration des chaînes. La figure I-53 montre un tel profil selon le modèle auto-similaire de De Gennes80.

Figure I-53 : Profil de densité, φ d’un polymère adsorbé sur un mur en fonction de l’épaisseur, z81

Des mécanismes de pontage entrent aussi en jeu82,83 dans les propriétés limites de lubrification des films adsorbés. Le pontage correspond à une interaction attractive entre les surfaces, il a une origine principalement entropique et correspond au fait que les chaînes de polymère aient dépassé la mi-distance entre les surfaces, elles ont alors la possibilité d’adopter un large nombre de conformations de faible énergie puisqu’elles subissent une attraction de la part des deux surfaces. Elles n’ont pas besoin d’être liées directement sur chacune des surfaces pour engendrer cet effet. Les deux surfaces deviennent alors adhésives, ce qui augmente la force de friction.

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Nous avons donc vu que les polymères greffés, neutres ou chargés présentaient de bonnes propriétés de lubrification quand ils étaient en bon solvant principalement car les chaînes de polymères s’interpénètrent peu.

Les deux éléments composant le premier système que nous avons étudié dans cette thèse ont été décrits indépendamment. Voyons maintenant comment ils se comportent lorsqu’ils sont associés. Il existe plusieurs possibilités de les associer, cependant peu d’études se sont intéressées aux propriétés de lubrification de ces films mixtes.