• Aucun résultat trouvé

V. Etude de la relation diversité/productivité de communautés microalgales sous

V.3.2 Comparaison des rendements en monoculture et en communauté

Dans cette partie nous nous intéressons aux relations entre la diversité et l’efficacité de différents processus physiologiques, à savoir l’absorption des ressources et l’assimilation de ces ressources pour la photosynthèse, la production d’hydrates de carbone, d’azote total et de carbone organique et la production de biomasse.

V.3.2.1 Effets spécifiques de la mise en communauté

Le rendement spécifique a été calculé pour les biovolumes totaux afin de savoir si une espèce donnée a, pour une condition donnée, un biovolume total plus grand en communauté qu’en monoculture. Hormis Hr et Ske dans la condition N-lim et Hr et Pg dans le témoin de la Comm6, toutes les espèces présentaient des rendements inférieurs à -1, mettant en évidence des rendements de biomasse spécifique plus faibles en communauté qu’en monoculture quelle que soit la condition (Fig.V-5). Les conditions abiotiques étant les mêmes qu’en monoculture cette observation traduit la présence de compétition entre les différentes espèces et la présence d’un effet de sélection plutôt que de complémentarité.

Fig. V-5: rendement spécifique du biovolume total Chez Db (rond), Ske (croix), Hr (triangle) et Pg (carré) dans les communautés à 6, 4 et 3 espèces dans les conditions P-lim (gris clair), N-lim (gris foncé) et témoin (noir). -1 représente la valeur seuil à partir de laquelle le rendement de l’espèce en communauté équivaut à celui en monoculture

158

Ske montrait les rendements spécifiques les plus hauts dans toutes les communautés et semblait la moins impactée par les relations biotiques interspécifiques. Par ailleurs, hormis dans la communauté à 4 espèces ou Db présentait des rendements spécifiques autour de -2, Db était fortement affectée par la présence des autres espèces dans les comm3 et 6 (Fig.V-5). Enfin, Hr présentait un sur-rendement du biovolume total dans la condition N-lim et le témoin de la Comm6. Cependant, cette espèce ne représentait jamais plus de 3% du biovolume total des communautés mettant alors en évidence la faible productivité de Hr.

V.3.2.2 Etude comparative de l’absorption de la ressource. Les communautés

surpassent elles les monocultures ?

Trois ressources principales au développement des microalgues ont été suivies dans nos expérimentations: l’azote inorganique dissous (DIN), le phosphore inorganique dissous (DIP) et la lumière.

Concernant le DIN et le DIP les rendements étaient majoritairement supérieurs à 1 (Fig.V-6) indiquant un sur-rendement et donc une meilleure absorption de ces ressources par les communautés. La Comm4 se démarquait en présentant des rendements très élevées, allant jusque 3,6 pour le DIP et 45,5 pour le DIN (Fig.V-6). Ces fortes valeurs coïncidaient avec la forte proportion de Db dans cette expérimentation (Fig.V-1). Des sous-rendements ont néanmoins été observés. Le premier était constaté dans la condition P-lim dans la Comm6 pour l’absorption de DIP et le deuxième dans la condition N-lim dans la Comm3 pour l’absorption de DIN (Fig.V-6). En cas de limitation, l’absorption de ressource limitante était moindre dans la communauté que dans la monoculture pour ces deux expérimentations. Enfin, il n’existe aucune relation significative entre l’indice de Shannon et ces deux rendements. Les deux ressources limitantes, à savoir le DIN et le DIP, sont globalement plus absorbées dans les communautés que dans les monocultures.

159

Fig. V-6: rendement de l’absorption de DIN (a) et DIP (b) dans les conditions limitées en DIN (N-lim, gris foncé), en DIP (P-lim, gris clair) et témoin (Control, noir) pour les Comm6 (carré), Comm4 (triangle) et Comm3 (rond). 1 représente la valeur seuil à partir de laquelle le rendement de l’espèce en communauté équivaut à celui en monoculture.

Concernant l’absorption de lumière, nous disposons de deux paramètres : le coefficient d’absorption spécifique de la chlorophylle a (a*) et, le taux de transfert d’électrons sous une lumière de 110 µmol photons.m².s-1 (ETR110). Tout d’abord, nos résultats mettent en évidence l’absence de relation significative entre la diversité spécifique (indice de Shannon) et les valeurs de rendement pour a* et ETR110 (Fig.V-7). Ensuite, un sur-rendement était très largement observé sur le a* avec seulement un sous-rendement pour ce paramètre dans la condition limitée en DIP de la Comm6 (Fig.V-7) ; cette même condition présentait un sous-rendement sur l’utilisation du DIP (Fig.V-6). Les sous-rendements pour ETR110 montraient globalement la même tendance que pour le a*, mais davantage de conditions présentaient des sous-rendements modérés (0.83<yield<1) excepté pour un témoin dans la Comm6. Comme observé sur le rendement de l’utilisation de DIN et de DIP, la Comm4 présente les rendements les plus forts et ne présente que des sur-rendements dans toutes les conditions (Fig.V-7).

160

Fig. V-7: rendements du coefficient d’absorption spécifique de la chlorophylle a (a, a*) et du taux de transfert d’électrons (b, ETR110) dans les conditions limitées en DIN (gris foncé), en DIP (gris clair) et témoin (noir) pour les Comm6 (carré), Comm4 (triangle) et Comm3 (rond). Le a* était exprimé en mg Chla.l-1 et ETR110 en µmol e-.mg Chla-1.s-1 pour les cultures mono et plurispécifiques. 1 représente la valeur seuil à partir de laquelle le rendement de l’espèce en communauté équivaut à celui en monoculture.

V.3.2.3 Utilisation de la ressource. La présence de plusieurs espèces favorise t’elle la productivité de la communauté?

Plusieurs paramètres peuvent rendre compte de l’assimilation de la ressource absorbée. Nous nous consacrerons à la formation de carbone organique et d’azote total (respectivement POC et PON), à la quantité d’hydrates de carbone particulaires et dissous ainsi qu’à la production de biomasse (biovolume total).

Les communautés produisaient moins d’hydrates de carbone que les monocultures, un sous-rendement a en effet été constaté pour toutes les expérimentations pour les hydrates de carbone dissous (Fig.V-8a). Ces effets étaient variables en fonction de la communauté et de la limitation en sels nutritifs, la Comm4 par exemple présentait des rendements allant jusque 0,89 dans la condition P-lim.

b a

161

En ce qui concerne les hydrates de carbone particulaires, des rendements plus élevés que ceux observés pour les hydrates de carbone dissous, étaient constatés même si les communautés produisaient moins que les monocultures ; excepté pour la condition N-lim dans la comm6 qui présentait un faible sur-rendement (Fig.V-8b). Les hydrates de carbone particulaires représentent une partie du contenu en carbone organique particulaire (POC). L’étude de ce POC met en évidence la diminution du contenu en carbone organique dans les communautés par rapport aux monocultures dans la Comm6 (rendements<1), qui présentait les rendements les plus faibles. La Comm4 et la Comm6 présentaient des rendements plus variables, allant de 0,48 (sous-rendement) à 1,26 (sur-rendement) (Fig.V-8c).

La quantité d’azote total (PON) montrait des résultats un peu différents. En effet, dans la Comm4 la quantité de PON était plus forte dans les communautés que les monocultures (rendement >1). Par ailleurs la Comm3 montre des rendements compris entre 0,86 et 1,22, correspondant principalement à un sous-rendement sauf pour un point dans N-lim. Enfin, comme observé sur le POC, la Comm6 présentait les rendements les plus faibles, compris entre 0,51 et 0,82 (Fig.V-8d).

Fig. V-8:rendement du contenu en hydrates de carbone dissous (a) et particulaires (b), et en carbone organique particulaire (c) et en azote organique total (d) dans les conditions limitées en DIN (gris foncé), en DIP (gris clair) et témoin (noir) pour les Comm6 (carré), Comm4 (triangle) et Comm3 (rond). La quantité d’hydrates de carbone était exprimée en µgEq glc. cell-1, le POC et le PON en µg C.cell-1 et µg N.cell-1 pour les cultures mono et plurispécifiques. 1 représente la valeur seuil à partir de laquelle le rendement de l’espèce en communauté équivaut à celui en monoculture

a b

d c

162

Les ressources sont absorbées et assimilées par le phytoplancton pour la production de biomasse. Malgré une meilleure absorption de ces ressources, la production de biomasse, ici exprimée en biovolume total, était globalement inférieure en communauté qu’en monoculture. En effet, dans toutes les communautés des rendements compris entre 0.15 et 0.55 étaient observés dans les conditions limitées en sels nutritifs (Fig.V-9). Les témoins montraient également des rendements moins élevés en communauté dans les Comm4 et Comm3, malgré des valeurs plus fortes qu’en condition limitées. Seule la Comm6 possède, dans le témoin, des biovolumes totaux supérieurs en communautés qu’en monoculture (Fig.8). Il n’existait aucune relation significative entre les différents paramètres de productivité observés et l’indice de diversité de Shannon (Fig.8 et Fig.9).

Fig. V-9:rendement du biovolume total dans les conditions limitées en DIN (gris foncé), en DIP (gris clair) et témoin (noir) pour les Comm6 (carré), Comm4 (triangle) et Comm3 (rond). Le biovolume total était exprimé en µm3.l-1 pour les cultures mono et plurispécifiques. 1 représente la valeur seuil à partir de laquelle le rendement de l’espèce en communauté équivaut à celui en monoculture

163

V.4 Discussion

Les trois communautés réalisées montrent des résultats contrastés. Tout d’abord bien que trois espèces soient principalement présentes dans les communautés, les proportions de chacune de ces espèces diffèrent en fonction de l’expérimentation. En effet, dans la Comm4 une co-dominance de Ske et Db est observée alors que Db n’est présente qu’en faible proportion dans les deux autres communautés. Dans l’ensemble, la concentration en sels nutritifs a eu un effet structurant sur les communautés (Comm3 et 6) et a aussi influencé la productivité de ces cultures plurispécifiques. Aucun lien clair n’est observé entre la productivité et l’indice de diversité, que ce soit sur des paramètres de stock (Hydrates de carbone, Carbone et Azote organique, biovolume totaux, abondance cellulaire) ou de flux (photosynthèse).

Afin d’appréhender l’ensemble des réponses observées dans toute leur complexité nous traiterons d’abord de la structure de chacune des communautés en fonction des conditions expérimentales. Puis nous aborderons, en lien avec la composition des communautés et les conditions expérimentales, les rendements de chacune des communautés en comparaison des monocultures.