• Aucun résultat trouvé

3. PREMIÈRE ÉTUDE DE CAS: CENTRALE DE L’EASTMAIN-1-A ET DÉRIVATION RUPERT

3.4. Collecte du STA

Cette section vise à analyser dans l’étude d’impact Eastmain-1-A-Rupert les composantes retenues à l’étape de la collecte du STA, définies au chapitre 2. Elles se déclinent comme suit : la

70

détermination des éléments du STA nécessaires à l’étude, le choix des informateurs, la méthode de collecte du STA et le processus de validation des informations issues de cette collecte.

Selon un participant aux entrevues, la planification de l’étude d’impact Eastmain-1-A-Rupert par le promoteur ne semble pas avoir donné lieu à une réflexion préalable sur la démarche à entreprendre quant à la collecte et à l’utilisation du STA dans le cadre de la réalisation de l’étude d’impact (entrevue). Toutefois, certains éléments du STA ont été traités dans l’étude d’impact et trois d’entre eux ont été retenus pour l’analyse. L’utilisation du territoire par les Cris constitue le premier élément du STA. Celle-ci a en effet fait l’objet d’une méthodologie détaillée et d’une étude systématique. L’utilisation du territoire n’est toutefois pas qualifiée dans l’étude d’impact comme étant un aspect du STA. Le deuxième élément du STA est relatif à l’ichtyofaune, et enfin le troisième est lié à l’évaluation de la bathymétrie de la rivière Rupert. Ces deux derniers sujets d’étude n’ont pas fait l’objet d’une méthodologie détaillée dans l’étude d’impact.

3.4.1. Utilisation du territoire

L’utilisation du territoire n’est pas définie dans le rapport d’étude d’impact comme étant un aspect du STA, tout comme dans les directives d’ailleurs. Ces dernières mentionnent toutefois la nécessité de documenter cette thématique. L’analyse du traitement de ce thème dans l’étude d’impact a été retenue ici, car plusieurs auteurs spécialistes du STA définissent l’utilisation du territoire comme étant un aspect du STA (Berkes, 2002; Fedirechuk et autres, 2008; Usher, 2000). L’utilisation du territoire a été documentée pour l’étude d’impact Eastmain-1-A-Rupert par le biais d’entrevues semi-dirigées réalisées auprès des maîtres de trappage et de plusieurs utilisateurs du territoire (Hydro-Québec Production, 2004). Les entrevues ont porté sur les 36 terrains de trappage touchés par le projet, et ce, dans les six communautés cries concernées par le projet. Les grilles d’entrevues préliminaires et les protocoles d’enquête ont fait l’objet de discussions au sein du Comité Boumhounan et le formulaire de consentement utilisé a été élaboré en collaboration avec l’ARC (ibid.). Avant chacune des entrevues, un coordonnateur local rencontrait le maître de trappage et lui présentait les objectifs de l’entrevue, le formulaire de consentement, ainsi que la grille d’entrevue employée. Le nombre de personnes participant aux entrevues était limité au maître de trappage et à cinq personnes de son choix (utilisateurs réguliers du terrain de trappage ou membres de sa famille) (ibid.). Les entrevues avaient lieu au domicile du maître de trappage ou

71

dans un local de la communauté, en anglais ou en cri, auquel cas le représentant du Comité Boumhounan ou un membre de la communauté servait d’interprète (ibid.). Les entrevues étaient réalisées par le promoteur et enregistrées sur bande audio, pour autant que l’informateur donne son accord (ibid.). Les informations à caractère géographique fournies par le participant étaient reportées sur une carte. Certains utilisateurs préféraient ne pas indiquer précisément certaines aires de trappe et de chasse et d’autres ont demandé à ce que certaines données ne soient pas cartographiées (ibid.). Les enregistrements étaient ensuite transcrits et synthétisés. Les synthèses préliminaires des entrevues et les cartes d’inventaires étaient remises aux maîtres de trappage, puis une deuxième série de rencontres avait lieu, dont l’objectif était de valider et de compléter les informations recueillies (ibid.). Les synthèses d’entrevues et les cartes étaient ensuite revues à la lumière des commentaires des participants aux entrevues (ibid.).

Certains sites touchés par le projet et fréquentés par les utilisateurs du territoire ont fait l’objet d’entrevues spécifiques. Ce fut le cas, par exemple, de l’utilisation des rives de la rivière Rupert à Waskaganish, des baies de Rupert et Boatswain, ainsi que de l’embouchure de la Grande Rivière (ibid.). Des entrevues ont eu lieu avec des représentants de la communauté de Waskaganish en vue de documenter l’utilisation des rives de la rivière Rupert. L’utilisation des baies de Rupert et Boatswain a aussi été documentée par deux résidents de la communauté de Waskaganish. Ceux-ci ont réalisé une quarantaine d’entrevues auprès de maîtres de trappage et de membres de la communauté (ibid.). Enfin, des entrevues de groupe ont eu lieu avec des membres de la communauté de Chisasibi afin de collecter de l’information concernant l’utilisation de l’embouchure de la Grande Rivière (ibid.). Une démarche de validation des informations recueillies a ensuite été entreprise à l’exemple de celle précitée, menée sur les 36 terrains de trappage touchés par le projet (ibid.).

L’application du cadre théorique à l’utilisation du territoire montre qu’une méthode rigoureuse et structurée de collecte du STA a été entreprise. En effet, la planification de la collecte a largement impliqué les membres cris du Comité Boumhounan qui se sont assuré que les maîtres de trappage soient bien informés des modalités des entrevues réalisées et en aient bien compris les objectifs. Les participants aux entrevues étaient choisis sur la base de leur connaissance des terrains de trappage, en l’occurrence les maîtres de trappage qui avaient le choix d’inviter d’autres

72

participants. Finalement, l’étape de la collecte d’informations relative à l’utilisation du territoire prévoyait deux séries de rencontres, intégrant ainsi un processus de validation des informations. 3.4.2. Ichtyofaune

Les éléments du STA relatifs à l’ichtyofaune présentés dans l’étude d’impact Eastmain-1-A-Rupert s’attachaient à documenter, d’une part, la localisation des frayères sur la rivière Rupert, et d’autre part, le nombre de prises quotidiennes de cisco sur le site de Smokey Hill, une espèce particulièrement valorisée.

La localisation des sites de fraie sur la rivière Rupert et dans le secteur des biefs a été documentée auprès des maîtres de trappage à la demande des biologistes (entrevue). Compte tenu du fait que la saison de la fraie est courte et que les longueurs linéaires de rivières et les superficies à caractériser étaient très importantes dans une zone d’étude peu connue du promoteur, les biologistes se sont tournés vers le Comité Boumhounan afin d’obtenir des informations relatives au STA en vue de dresser un premier portrait du secteur d’étude (entrevue). Ainsi, les membres cris du Comité Boumhounan ont consulté les maîtres de trappage et reporté sur des cartes au 1 : 50 000 la localisation des sites de fraie et l’identification des différentes espèces dans certains secteurs de rivière Rupert et dans les biefs (entrevue). Ces informations ont ensuite été utilisées pour planifier l’inventaire scientifique des frayères (Hydro-Québec Production, 2004).

De plus, le nombre de prises quotidiennes de cisco par les Cris sur le site de Smokey Hill a été documenté à la demande d’un maître de trappage de Waskaganish. Cette espèce faisait l’objet d’une pêche traditionnelle sur le site valorisé de Smokey Hill. Une résidente de la communauté de Waskaganish, à l’aide d’une grille d’entrevue, a ainsi effectué un relevé des prises réalisées sur une durée de 23 jours et auprès de 27 groupes de pêcheurs (ibid.).

3.4.3. Hauts-fonds de la rivière Rupert

Des ateliers de travail ont été réalisés au sujet des hauts-fonds de la rivière Rupert avec les maîtres de trappage de Nemaska et de Waskaganish. Ces rencontres, auxquelles ont participé les représentants cris du Comité Boumhounan, des spécialistes d’Hydro-Québec et des membres de l’ARC, ont permis d’affiner les connaissances de la bathymétrie de la rivière acquises à partir des orthophotographies (ibid.). Ainsi, les connaissances des utilisateurs du territoire concernant les

73

hauts-fonds de la rivière Rupert ont été mises à profit et ont permis de préciser la simulation de l’exondation du lit de la rivière Rupert (ibid.; entrevue).

L’approche méthodologique utilisée en vue de documenter la localisation des frayères et les hauts-fonds de la rivière Rupert n’a pas été systématique. La méthodologie est peu détaillée dans l’étude d’impact et la collecte de ces éléments du STA ne semble pas avoir été planifiée avant le début des études associées à l’étude d’impact. Cette collecte du STA semble plutôt avoir répondu à un besoin qui est apparu au cours de la réalisation de l’étude d’impact.