• Aucun résultat trouvé

II.2 Propagation de la TDSE

II.2.4 Code de dynamique électronique corrélée

a) Corrélations électroniques : l’hypothèse des canaux d’ionisation couplés

Dans le code MOLBIT décrit dans la partie précédente, seule la dynamique vibronique sur une PEC était réalisée. Pourtant dans de nombreux systèmes moléculaires (comme N2 par exemple [18]), divers états électroniques se retrouvent proche en énergie pour certaines géométries. Cette proximité peut engendrer (comme vu en chapitre I) des corrélations entre les états adiabatiques du système, la dynamique sur les différentes courbes étant dorénavant couplées. Dans ce contexte, il devenait nécessaire de tenir compte de ces couplages par notre code. L’approximation de l’unique électron actif posant des problèmes non négligeables dans le but de reproduire des phénomènes de couplages multi-électroniques, il a fallu trouver une astuce pour les inclure. Repartant du modèle précédent, il est possible de suivre la dynamique nucléaire sur une courbe d’énergie potentielle de l’ion Ea+(R) (ou d’un état excité convergeant vers cet état), les couplages entre états vibrationnels étant pris en compte. Par deux simulations distinctes, il est donc possible de suivre la dynamique sur deux surfaces Ea+(R) et Eb+(R) de façon indépendante. La matrice d’un hamiltonien dans la base consituée par les deux canaux d’ionisation (|Ψa(t)i, |Ψb(t)i) décrivant ces deux dynamiques indépendamment peut se mettre sous la forme :

ˆHa(x, R,t) 0 0 Hˆb(x, R,t)

!

(II.54)

Si maintenant on ajoute un terme de couplage supplémentaire ˆVc(dont la forme reste à définir) entre ces deux surfaces, il devient possible de coupler les deux canaux d’ionisation entre eux. On autorise ainsi les échanges de population et d’énergie entre ces deux surfaces, ce qui va de par le fait modifier leur dynamique respective.

La forme de ce potentiel de couplage peut être adaptée phénomènologiquement afin de dé-crire les phénomènes d’intérêt. Pour exemple, on peut considérer deux courbes “diabatiques” Ea+(R) et Eb+(R) qui se croisent pour une géométrie Rc donnée, et peuvent induire une dyna-mique corrélée au voisinage de ce point . Cette situation est illustrée figureII.8.

Comme vu précédemment, ces deux états ne possèdent pas la même symétrie ou résultent de la représentation diabatique. Ils sont liés par un terme de couplage potentiel dont la forme peut être approchée par un développement de Taylor autour de Rc:

Vc(R) = Vc(Rc) +  D Φdiaa ∂ ˆHelab ∂ R Φdiab E R=Rc · (R − Rc) + Vc(2)(R − Rc)2+ ... (II.55) où ˆHelabreprésente l’hamiltonien électronique dans la base des états diabatiques. Le dévelop-pement à l’ordre 1 donne, dans l’hypothèse que ˆHelab varie de façon douce en fonction de R, par exemple une fonction en cloche (de type gaussienne ou lorentzienne), ou bien encore une fonction avec un noeud en R = Rc. Dans tous les cas, une forme simple peut être trouvée pour

ˆ

Vc dans le but de reproduire la dynamique de croisement évité entre ces deux états.

De la même manière, dans un système atomique (voir chapitreI), un état autoionisant peut se trouver isoénergétique avec une voie d’ionisation directe, résultant en un profil de Fano sur le spectre de photoélectron. Ce phénomène peut être modélisé par notre approche de canaux

Ener gie nucléaire (eV) Distance internucléaire R (Å) 0 5 10 30 35 40 45 0.8 1.2 1.6 2 2.4 Ea+(R) Eb+(R) Vc(R) Rc

Figure II.8 – Courbes d’énergie potentielle du système modèle A décrit dans le chapitreIII. L’état fondamental du neutre est représenté en noir, les deux états ioniques en bleu et rouge respectivement.

d’ionisation couplés. En effet, comme illustré figure II.9, les deux canaux sont accessibles à partir de l’état fondamental, et un terme supplémentaire Vc(x) est appliqué pour coupler le tout. Ce terme est considéré (voir l’article originel de Fano [59]) comme indépendant de l’énergie du photoélectron dans la zone d’énergie autour de la résonance. Néanmoins, il dépend de la coordonnée de l’électron x puisque ce couplage n’a d’intérêt physique que dans la zone d’extension spatiale de l’état autoionisant. Dans ce contexte, l’expression de Vc(x) est :

Vc(x) = Ac

κ2p

x2p+ κ2p (II.56)

Pour de grandes valeurs de l’exposant p, cette fonction s’apparente à une fonction fenêtre de largeur 2κ comme illustré figureII.9. Ainsi, il est possible de moduler la forme de ce couplage pour satisfaire au processus étudié.

Toutefois, le couplage entre les deux canaux d’ionisation s’applique entre des états vibro-niques bien défini. En conséquence, aucune considération physique ne permet de considérer que les états fondamentaux (du système neutre) des différents canaux sont couplés lors d’un processus d’autoionisation ou de croisement évité sur les surfaces ioniques. La description de notre modèle se faisant dans le domaine spatial et non énergétique (comme c’est la cas dans les modèles de Time-Dependent Configuration Interaction [93]), il convient d’ajouter une étape de filtrage supplémentaire. A cette fin, deux possibilités ont été implémentées dans le code, la première se débarrassant de la projection de la fonction d’onde sur l’état fondamental, et la seconde impliquant un filtrage en énergie.

40 20 0 -20 -40 -5 0 5 -5 0 5

Coordonnée de l’électron x (ua)

Ener gie de l’électron (eV) Vc Etat fondamental

Figure II.9 – Potentiel d’interaction électron-coeur ionique pour deux voies d’ionisation, à droite la voie d’ionisation directe et à gauche la résonance associée à l’autoionisation. Ces deux voies sont couplées par un terme Vc d’extension spatiale limitée autour de l’origine, et considéré indépendant de l’énergie.

b) Filtrage de la fonction d’onde

En absence de perturbations extérieures, les états propres (Φn)n∈N d’un système ˆH0 sont orthogonaux les uns aux autres. De plus, le champ étant perturbatif, il ne mélange pas énormé-ment les états propres de sorte que cette base peut être conservée pour le développeénormé-ment. La fonction d’onde totale peut donc se mettre sous la forme :

|Ψi(t) =

α ,i cα ,i(t) |Φα ,ii +

α Z dE0gα(E0,t) |Φα ,E0i (II.57)

α court sur le nombre de canaux d’ionisation considérés (deux ici). La fonction possède deux parties distinctes, une partie liée projetée sur les états propres liés de la voie d’ionisation α, et une autre constituée d’un continuum d’état au dessus du seuil. La première approche consiste à retirer la contribution de l’état fondamental à la fonction d’onde. Cette méthode est synthétisée dans le livre de C. Cohen-Tannoudji [38]. Concrétement, on va considérer P1le projecteur sur le sous-espace E1(qui représente l’ensemble des états propres à part l’état fondamental) :

Toutes les fonctions (Φn)n∈Nétant orthogonales les unes aux autres, on peut exprimer la res-triction du potentiel de couplage ˆVcau sous-espace E1:

ˆ

Vc1= P1VˆcP1, (II.59)

ce qui donne lorsqu’on l’applique à la fonction d’onde Ψ(t) : ˆ

Vc1|Ψ(t)i = P1Vˆc1(t)i avec |Ψ1(t)i = P1|Ψ(t)i (II.60) Plus précisemment, la fonction totale peut s’écrire à un temps t donné (non explicité pour plus de lisibilité) :

|Ψi = ca,0a,0i + ca,1a,1i + cb,0b,0i + cb,1b,1i (II.61) La projection de la fonction d’onde sur l’espace E1= {|Ψa,1i, |Ψb,1i} donne :

1i = P1|Ψi = ca,1a,1i + cb,1b,1i (II.62) L’application du potentiel de couplage dans le sous-espace amène à :

ˆ

Vc1i = Vab0a,0i +Vaba,1i +Vba00b,0i +Vbab,1i (II.63) Cette étape peut projeter une partie de la fonction d’onde sur le sous-espace des états fonda-mentaux. Il s’en suit donc une seconde projection de la fonction qui conduit à l’expression de l’opérateur ˆVcrestreint au sous-espace E1:

P1Vˆc1i = Vaba,1i +Vbab,1i (II.64) Une renormalisation de la fonction d’onde est nécessaire de sorte que :

|hP1VˆcΨ1i|2= |hΨ1i|2 ⇐⇒ |Vab|2+ |Vba|2= |ca,1|2+ |cb,1|2= N1 (II.65) Ensuite, la fonction d’onde peut être recombinée pour obtenir :

|Ψi = ca,0a,0i +√Vab

N1a,1i + cb,0b,0i +√Vba

N1b,1i (II.66)

Le même genre de procédure peut être réalisé dans le cas d’un filtre en énergie de |Ψ(t)i. Cette méthode est plus rigoureuse que la précédente car elle assure que le couplage ne s’appli-quera qu’à la partie de la fonction d’onde se trouvant dans la région d’énergie désirée. Néan-moins, elle est plus coûteuse en temps de calcul car l’application du filtre énergétique prend plus de temps que la projection de la fonction d’onde. Le sous espace concerné est cette fois-ci Ew tel que tous les états propres de ce sous-espace possèdent une énergie située dans la fe-nêtre choisie [Ew− γ : Ew+ γ]. Nous verrons quelle forme prend l’opérateur de filtrage dans la suite lorsque nous détaillerons la méthode window permettant de calculer les spectres de photoélectron. Finalement, le propagateur peut s’écrire comme suit :

e−i[ ˆH1(x,t+∆t

2)+ ˆV2(x,R)+ ˆVc(x,R)]∆t = e−i ˆV2∆t4 e−i ˆVc∆t2 e−i ˆV2∆t4 e−i ˆH1∆te−i ˆV2∆t4 e−i ˆVc∆t2 e−i ˆV2∆t4 (II.67) L’algorithme de propagation est détaillé figureII.10.

Ψ(x, R, t) Φ(x, R, t) ˜ Φ1(x, R,t) Ψ(x, R, t + ∆t) e−i ˆH1(x,R,t+∆t/2) ∆t t= t + ∆t Application du propagateur dans la base diagonale

Application du second propagateur par CN Filtrage de la fonction d’onde

Application du propagateur dans la base diagonale

P−1e−i ˆD2 ∆t/4P ˜ Φ(x, R, t) ˜ Φ(x, R, t + ∆t) ˆ P1 e−i ˆVc∆t/2 ˆ P1 P−1e−i ˆD2∆t/4P P−1e−i ˆD2∆t/4P ˆ P1 e−i ˆVc∆t/2 ˆ P1 P−1e−i ˆD2 ∆t/4P

Application du couplage sur la fonction filtrée

Filtrage/recombinaison de la fonction d’onde

Application du propagateur dans la base diagonale

Filtrage de la fonction d’onde

Application du propagateur dans la base diagonale Application du couplage sur la fonction filtrée

Filtrage/recombinaison de la fonction d’onde

Φ1(x, R,t) ζ (x, R, t) ζ (x, R, t + ∆t) ˜ Φ1(x, R,t + ∆t) Φ1(x, R,t + ∆t) Φ(x, R, t + ∆t)

Figure II.10 – Algorithme de résolution de la TDSE dans le modèle MOLBIT avec corrélation. L’hamiltonien est séparé en sept parties de manière à optimiser la propagation

c) Avantages/inconvénients du modèle

Ce modèle est certes plus coûteux en temps de calcul que le cas sans prise en compte des couplages intercanaux, mais il permet de restituer la dynamique corrélée avec une grande efficacité. C’est ce modèle qui est par exemple utilisé afin de sonder les dynamiques d’autoio-nisation dans le chapitreV.