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La classification internationale des handicaps (CIH) et évolution de la législation française

Dans le document I. HISTOIRE DE L’AUTISME INFANTILE (Page 82-86)

1. La première version de 1980

Cette classification de l’OMS est fortement inspirée du travail de Philip WOOD, rhumatologue épidémiologiste. Elle est traduite en français en 1988, et remplace le barème des infirmes de guerre pour établir les taux de handicap en France. Elle est établie sur un modèle médical du handicap et distingue trois dimensions59 :

 La déficience correspond à « toute perte de substance ou altération d’une structure ou des fonctions psychologiques, physiologiques ou anatomiques », elle peut être temporaire ou permanente.

 L’incapacité correspond « à toute réduction (résultant d’une déficience) partielle ou totale d’accomplir une activité dans les limites considérées comme normales pour un être humain ».

 Le désavantage social résulte « d’une déficience ou d’une incapacité qui limite ou interdit l’accomplissement d’un rôle social normal (en rapport avec l’âge, le sexe, les facteurs sociaux et culturels) »

Cette conception fondée sur un modèle médical fut critiquée. En effet, elle établit un lien de causalité linéaire de la déficience au désavantage, ce qui semble ne pas correspondre à la réalité du handicap. De plus, elle pose la question de la normalité sociale et l’environnement de la personne n’est à aucun moment pris en considération. Le handicap est perçu comme une particularité, conséquence directe d’une pathologie médicale ou chirurgicale, nécessitant des soins médicaux, amenant à des politiques dites « de santé ».

59 OMS. La classification internationale des Handicaps : déficiences, incapacités, désavantages. 1980.

Traduction française, 1994, édition du CTNERHI.

La France s’inspire de cette classification pour légiférer dans le domaine du handicap, et notamment donner un cadre nosographie à la politique de compensation du handicap, faisant suite à la loi d’orientation en faveur des personnes handicapées 1975. L’arrêté du 9 janvier 1989 reprend les trois axes de WOOD, « le désavantage (traduction française du terme anglo-saxon « handicap ») est clairement envisagé comme la conséquence des incapacités et déficiences ». Cette nouvelle nomenclature a été conçue pour répondre aux besoins de ceux qui travaillent auprès de personnes handicapées. « Par contre, elle n’a pas l’ambition de pouvoir servir de barème pour la détermination et l’évaluation du handicap. En effet, elle ne comporte généralement pas d’indication sur la sévérité du handicap ou son évolutivité ».

Selon cette approche médicale du handicap, l’autisme peut-être pensé selon une causalité linéaire : Autisme déficience du langage incapacité de communication limitations des liens sociaux.

2. La révision de la CIH : la Classification Internationale du Fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF), 2001

Elle se substitue à la CIH dont elle est la révision, et affine sa particularité qui consiste à aborder le handicap comme une interaction entre les potentialités d’un individu et son environnement en précisant le rôle des facteurs environnementaux. La CIF tente de combiner le modèle médical avec un modèle social, dans un modèle « biopsychosocial », s’inspirant de celui des processus de production de handicap (PPH), établie par Patrick FOUGEYROLLAS et ses collègues québécois60.

Les maladies, traumatismes et autres atteintes à l’intégrité et au développement de la personne peuvent causer des déficiences et entraîner des incapacités temporaires ou permanentes de nature stable, progressive ou régressive. Ce sont toutefois les différents obstacles ou facilitateurs rencontrés dans le contexte de vie qui, en interaction avec les incapacités de la personne, pourront perturber ses habitudes de vie, compromettre l’accomplissement de ses activités quotidiennes et de ses rôles sociaux, et la mettre ainsi en

60 Fougeyrollas P. Cloutier R. Bergeron H. Cote J. ST Michel G. Classification québécoise Processus de production du handicap (RIPPH).

situation de pleine participation sociale ou au contraire de handicap. Il s’agit d’un modèle systémique du handicap qui intègre une vision individuelle et environnementale.

Les précédents trois axes d'identification du handicap sont substitués par quatre catégories61:

La structure anatomique (le système nerveux, l’appareil locomoteur...)

La fonction organique (fonction cognitive, sensorielle, digestive etc.)

Au niveau individuel, la déficience est donc décomposée en fonction organique et structure anatomique mis en jeu. Elle reste donc définie comme atteinte d’une fonction ou d’un organe.

Les activités (exécution d’une tâche) et la participation (implication de la personne dans une situation de la vie réelle) sont en rapport avec la dimension sociale, l’activité renvoyant au concept d’incapacité et la participation à celui de désavantage de la CIH.

Les facteurs environnementaux (physique et social) et personnels (âge, sexe, origine sociale, profession) sont des facteurs contextuels représentant le cadre de vie de la personne.

Le fonctionnement d’une personne est constitué par l’interaction complexe entre son état de santé et des facteurs contextuels environnementaux et personnels. Cette interaction est dynamique et spécifique à chaque individu. Le handicap est l’ensemble des éléments négatifs de ces dimensions : déficience, limitation d’activité et restriction de participation. Dans cette approche, le handicap est perçu à la fois comme un attribut de la personne mais aussi comme un problème créé par la société. La société doit donc établir des changements pour permettre l’intégration des personnes handicapées, d’où les politiques dites « sociales ».

La loi française du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ne prend pas en compte cette évolution de la CIH : « constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un trouble de santé

61 OMS. Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé. 2001. CTNERHI.

invalidant ». Elle reprend donc la signification médicale du handicap. Les notions de déficience, d’incapacité et de désavantage permettent de déterminer le taux d’incapacité qui, selon le degré de sévérité (au moins 50%), ouvre des droits à divers avantages et prestations compensatrices. Ce barème est établi par le décret 2007-1574 du 6 novembre 2007, modifiant l’arrêté du 9 janvier 1989. Néanmoins, pour se rapprocher d’une approche biopsychosociale, il est ajouté que « le désavantage résulte de l’interaction entre la personne porteuse de déficience et/ou d’incapacité et son environnement ».

Dans le document I. HISTOIRE DE L’AUTISME INFANTILE (Page 82-86)