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Une dernière méthode de classification, correspondant aussi à la plus utilisée, se réfère à la composition du nanosystème :

1) les nanosystèmes organiques, à base de polymères ou de lipides ;

2) les nanosystèmes inorganiques, majoritairement constitués de composés métalliques.

1.2.4.1 Nanosystèmes organiques

Les nanosystèmes polymériques

Dans la plupart des cas, ces nanosystèmes sont composés de molécules ou blocks amphiphiles polymériques. Leurs avantages potentiels sont la présence d’une composition chimique plus précise, une multivalence de surface adaptée et la création d'une architecture tridimensionnelle définie soit par une macromolécule hydrosoluble synthétique, soit par création d’une nouvelle structure supramoléculaire [106, 107, 121]. Ces nanosystèmes sont souvent composés d'un noyau dans lequel le médicament est solubilisé et d’une couronne ou coquille qui protège le médicament de la dégradation et ce qui permet l’obtention de leur architecture finale. Les principaux représentants de cette classe sont les nanosphères (A), les micelles (B) et les dendrimères (C) (Figure 8).

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Figure 8 : Représentation de nanosystèmes à base de polymères, (A) nanosphères, (B) micelles polymériques et (C) dendrimères.

Nanosphères

Ces nanosystèmes sont structurés en deux phases : un noyaux sphérique dans lequel le médicament est physiquement et uniformément dispersé, lui-même entouré d'une enveloppe ou d'un revêtement extérieur [122]. Le noyau est constitué de polymères compacts biocompatibles ou de polyacides tels que l’acide polylactique (PLA) ou l’acide polylactique-co-glycolique (PLGA) [123]. Ce noyau est biodégradable et conduit à des éléments inoffensifs après hydrolyse afin d'éviter l'accumulation de particules ou de molécules toxiques dans l’organisme. L'optimisation de l'utilisation de ces polymères conduit à différents types de propriétés d'encapsulation et de cinétiques de libération [124].

Micelles polymériques

Les micelles polymériques ont un diamètre allant de 10 à 100 nm et sont caractérisées par une structure noyau-enveloppe, formée par l'auto-assemblage de copolymères séquencés amphiphiles dans un environnement aqueux. Le noyau interne est souvent composé de chaînes hydrophobes typiquement composées de polycaprolactone ou d'acide poly-(acide lactique) (PLA) qui créent un espace approprié pour la solubilisation de médicaments lipophiles [125]. En outre, ce noyau interne est entouré d'une couronne composée de blocs hydrophiles. Ceux-ci deviennent très solubles dans l'eau et adoptent une apparence "déployée" qui conduit à divers types de possibilités de conformation [118].

Dendrimères

Les dendrimères sont des macromolécules globulaires de taille monodisperse avec des structures fortement ramifiées. Il existe deux types de structures de base : la première est la structure globulaire avec un noyau central à partir duquel les branches rayonnent. Le deuxième type n'a pas de noyau central et se compose simplement d'une série de polymères fortement ramifiés d'une taille d'environ

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10 nm [111, 126]. Les dendrimères sont des nanosystèmes formés par des unités multiples avec des branches terminales fonctionnalisables. Ils peuvent incorporer divers types de composés soit par l'intermédiaire des groupes terminaux pouvant être fonctionnalisés, soit par encapsulation au sein de la cavité centrale, qui est composée de multiples monomères parfaitement ramifiés, généralement de polyaminoamine [111].

1.2.4.2 Les nanosystèmes à base de lipides

Liposomes

Les premiers liposomes ont été découverts dans les années 1960 [127] afin d’améliorer l'accumulation sélective du composés d’intérêt dans les tissus et les sites cellulaires souhaités [87, 128]. Ils correspondent à des vésicules sphériques artificielles biologiquement inertes et faiblement immunogènes. Ils sont formés par une ou plusieurs bicouches lipidiques concentriques composées de molécules amphiphiles qui s’auto-assemblent en milieu aqueux. Les liposomes peuvent être composés de phospholipides naturels ou synthétiques, permettant d’encapsuler des composés polaires dans le compartiment aqueux et apolaires dans la bicouche lipidique (Figure 9).

Figure 9: Liposomes unilamellaires [129]

Ils sont facilement formés à partir de molécules amphiphiles (le plus couramment des phospholipides). Ils sont non toxiques, non immunogènes, naturels et biodégradables [85, 87, 130]. Le Doxil®, premier liposome approuvé par la FDA en 1995, est un liposome pégylé encapsulant de la doxorubicine [131, 132].

La principale difficulté rencontrée lors du développement des liposomes réside dans leur stabilité qui dépend du ratio principe actif / lipide. Idéalement, ce ratio doit être élevé, mais augmenter ce rapport diminue la stabilité des liposomes en milieux aqueux. En général, les liposomes sont lyophilisés pour être conservés sous la forme de poudre, puis solubilisés juste avant utilisation. En

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plus des problèmes de stabilité menant à la fuite de principes actifs, les liposomes présentent d’autres inconvénients tels que de faibles taux de chargement en principes actifs lipophiles et le besoin d’utiliser un solvant organique pour leur préparation [129].

Les conjugués médicament-lipides

Les conjugués médicament-lipides ont également été développés dans les années 1990 afin d'obtenir une meilleure charge de médicament pour les composés lipophiles [133, 134]. Cependant, de nos jours, ces systèmes sont principalement utilisés pour l'administration de médicaments hydrophobes possédant une faible hydrosolubilité limitant ainsi leur utilisation [135, 136]. Ils sont conçus en liant le médicament à une fraction lipidique par formation de sel ou par liaison covalente qui conduit au complexe médicament-lipide. Pour générer ces nouveaux composés, la liaison de diverses chaînes lipidiques peut être utilisée. Au cours du développement de ces composés, des chaînes lipidiques de types terpéniques ont pu être utilisées [137-139]. Parmi ces terpènes, l'utilisation du squalène a été largement décrite [137, 140, 141]. Le squalène, triterpène précurseur du cholestérol, est un hydrocarbure biocompatible largement répandu dans la nature et couramment utilisé comme excipient dans de nombreuses préparations pharmaceutiques [137, 142]. Lorsque le squalène est lié par liaison covalente à des composés hydrophiles tels que des agents alkylants, des antibiotiques ou des analogues nucléosidiques, le composé obtenu acquiert la propriété de s'auto-assembler spontanément dans des milieux aqueux pour former des structures nanométriques [89, 143-147]. La conjugaison par greffage chimique du squalène conduit à une augmentation de l'entrée cellulaire du composé grâce à la propriété intrinsèque de la molécule d’auto-assemblage sous la forme de nanoparticules (NPs). Basées sur cette technologie, des NPs de monophosphate de squalènoyl didésoxycytidine testées sur des cellules HIV-1 ont montré une augmentation d’un facteur 2 de l'activité anti-HIV in vitro de la molécule mère. De manière plus intéressante, des NPs d'adénosine squalène ont fourni une neuroprotection après un accident vasculaire cérébral engendrant une lésion de la moelle épinière [148]. De plus, la pégylation de ces NPs de squalène a montré une protection contre la dégradation et l'élimination rapide du plasma [149-151].

Les nanoparticules lipidiques

Les NPs lipidiques font fréquemment référence aux NPs lipidiques solides ou nanocapsules lipidiques solides (SLN), et ont été découvertes dans les années 1990 par séchage par pulvérisation et congélation de « micropellets » lipidiques suivi de leur caractérisation par microscopie électronique [152]. Les SLN sont des systèmes colloïdaux de délivrance de médicaments composés de lipides, d’eau et d’émulsifiants. Les lipides qui les constituent ont la particularité d’être solides à température ambiante et liquide à la température physiologique ce qui a pour but d’empêcher une libération immédiate du composé actif, rendant ainsi difficile sa diffusion à la surface [153]. De plus,

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les lipides utilisés pour former le SLN présentent une faible toxicité aiguë et chronique [154]. Elles permettent d’encapsuler une grande variété de principes actifs, hydrophiles ou hydrophobes, ainsi que des peptides ou des protéines [109, 155]. Les avantages les plus importants des SLN par rapport aux autres nanosystèmes à base de lipides sont la libération contrôlée du médicament et la stabilité physique des préparations. Cependant, elles présentent encore certaines limitations telles que la charge limitée de médicament et l'expulsion du médicament pendant le stockage. Dans la plupart des études, les SLN sont administrées par voie intraveineuse avec des résultats probants mais elles peuvent également être un système de délivrance de médicaments par voie orale très prometteur, puisque cette voie d’administration permet d’éviter l’effet de premier passage et mène à une diffusion lente et continue du principe actif [156].Une des formulations ayant connu un succès commercial est la Mucosolvan retard capsule® permettant la vectorisation de l’ambroxol au sein de nanocapsules lipidiques dans le cadre du traitement de toux et bronchites chroniques [153]. Le principal inconvénient des SLN concerne leur faible taux de chargement en principe actif. Celui-ci dépend fortement de la pureté des lipides utilisés pour la formulation et de l’étape de cristallisation. De plus, une fois les SLN obtenues, les principes actifs peuvent être expulsés de la maille lors du stockage des NPs.

Au sein de ce groupe, nous trouvons aussi les nanocapsules lipidiques (NCLs) qui font référence à des nanocapsules composés de lipides liquides et qui correspondent à une nouvelle technologie mis au point au sein de l’unité de « micro et nanomedecines translationnelles» (MINT, U1066) de l’Université d’Angers dirigée par le professeur Patrick Saulnier et dont la présentation se fera plus tard.

1.2.4.3 Les nanosystèmes inorganiques

Les NPs à base de silice, les NPs magnétiques guidées, les NPs de métaux nobles ou les nanostructures de carbone [157] constituent la majorité des nanosystèmes inorganiques.

Les nanosystèmes à base de silice

Les nanosystèmes à base de silice sont largement utilisés en raison de la possibilité de moduler leur taille, leur porosité et leur forme, ce qui leur permet d'être utilisés dans les domaines de l’imagerie biomédicale, l'intégration comme agents de contraste d'imagerie ou la délivrance contrôlée de médicaments [158-160]. De nombreuses techniques de préparation sont répertoriées permettant la formulation de nanosystèmes avec une gamme étroite de tailles et une composition presque uniforme [158]. Ces techniques conduisent à de nombreux types de nanosystèmes à base de silice tels que les nanosystèmes basiques de silice ou une architecture plus complexe comme les NPs mésoporeuses, les NPs à coquille centrale ou les NPs gravées. De plus, dans d'autres cas, des formes différentes peuvent être obtenues. Diverses techniques peuvent être utilisées pour synthétiser ces nanosystèmes à base de silice (Figure 10).

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Figure 10 : Liste des techniques courantes utilisées pour synthétiser des nanosystèmes à base de silice [158]

Les nanosystèmes guidés magnétiques

Louis Néel montre en 1949 qu’en dessous d’une certaine taille, les NPs magnétiques entrent dans un état appelé superparamagnétisme [161]. Ce comportement concerne les NPs d’oxyde de fer possédant un diamètre inférieur à 20 nm et les NPs de fer pur. Lorsqu’elles sont soumises à un champ magnétique extérieur, les NPs peuvent émettre une propriété de magnétisme [162]. Ces nanosystèmes d’oxyde de fer superparamagnétiques (SPION, pour « superparamagnetic iron oxide

nanoparticles ») permettent donc de faire un contraste avec les tissus. Pour ces raisons, les SPION

sont utilisées notamment en imagerie par résonance magnétique (IRM). Ils peuvent également être fonctionnalisés par des ligands de ciblage ou être incorporées dans des nanoparticules NPs encapsulant un principe actif, afin de leur apporter un élément d’imagerie [163].

Les « quantum dots », également connus sous le nom de nanocristaux, sont des semi-conducteurs nanométriques qui, en fonction de leur taille, peuvent émettre de la lumière dans toutes les couleurs de l'arc-en-ciel. Ces nanostructures confinent des électrons de bande de conduction, des trous de bande de valence ou des excitons dans les trois directions spatiales. Certains exemples de « quantum dots » sont les nanocristaux semi-conducteurs et les nanocristaux cœur-enveloppe, où il existe une interface entre différents matériaux semi-conducteurs. Ils ont été appliqués en biotechnologie pour le marquage cellulaire et l'imagerie, en particulier dans les études d'imagerie du cancer [164].

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Les nanosystèmes à base de carbone

Nous pouvons également trouver des nanosystèmes à base de carbone tels que les fullerènes et les tubes de carbone. Ils se caractérisent par des molécules potentiellement poreuses à base de carbone, en treillis [165]. Les fullerènes sont de forme sphérique tandis que les tubes de carbone sont cylindriques et de forme allongée. Le diamètre d'un tube de carbone peut être de plusieurs nanomètres mais la longueur peut être beaucoup plus grande, jusqu'à plusieurs micromètres, en fonction de son utilisation prévue. Les nanotubes de carbone ont de nombreuses applications en science des matériaux. Cependant, ils ont également trouvé une utilisation dans le domaine de la biomédecine comme porteurs de vaccins, de médicaments et d'autres molécules [166].

Les nanosystèmes à base de métaux nobles

L’utilisation de l’argent ou de l’or dans l’obtention de nanosystèmes est maintenant bien décrite [167, 168]. Elle remonte au 5e siècle avant J.-C., où les NPs d’or, ou « or colloïdal » étaient utilisées pour donner une couleur rouge aux céramiques et aux verres. C’est au cours du 17e siècle que des solutions d’or colloïdales ont été utilisées pour le traitement de diverses maladies [169].

Ces nanosystèmes à base d’or peuvent avoir un diamètre allant de 2 à 200 nm et sont utilisés pour diverses applications biologiques, en imagerie et en photothérapie [167, 169]. Diverses méthodes de synthèse sont possibles, mais la méthode de synthèse la plus répandue est la réduction d’un sel de tétrachloroaurate par du citrate de sodium dans l’eau à 100°C. Les ligands citrates stabilisent les nanoparticules d’or. Ils sont ensuite facilement remplaçables par des ligands thiolés. Des ligands hydrophiles sont nécessaires pour apporter de la stabilité aux nanosystèmes et éviter leur agrégation [170].