aussi
ne
trouve-t-on pas cette fièvre au-delà dedouze
à quinzecents mètres au-dessusdu
niveau de lamer;
il semble,comme
l'ajudi-cieusement
remarqué M. deHumboldt,
qu'ily
ait là
une
sortedelimiteou
debarrièrequ'elle(1) Danslerapport publiépar la Sociétémédicale de la Nouvelle-Orléans, sur l'épidémie de 1819, et dontj'étais un des rapporteurs,il estdit que la cha-leur jointe à l'humidité,sont lesprincipalescausesde
la Fièvre Jaune, ce qui implique contradiction avec ce queje viens d'avancer; alors en effet j'avais cette opinion comme lesautres,maisl'expérienceet le rai-sonnementm'ont,jel'avoue,déterminéà la modifier,
ainsiqu'onvient delevoir.
5*
68 ESSAI SUR LA FIEVRE JAUNE
nepeut franchir(î). »Sansdoute,
que
lorsquela température est abaissée à
un
certain de-gré, la fièvrejaune ne semontre
pas, mais jene
puis admettreque
les environs de lamer
ou d'ungrand
fleuve , soient les seuls lieuxoù
elle puisse paraître. Je suis per-suadé, avecM. Devèze, que
partoutoù une
chaleur intense unie àun
foyer d'infection , existera pendantun
certain temps,la fièvre jaune se développera , si les individus qui habitent ces endroits sont aptes à lacon-tracter.
Pourquoi donc
, m'objectera-t-on , tantd'auteurs s'accordent-ils àrépéter qu'on ne l'observejamais loin delamer?
M. L.Va-lentindit,dans son TraitédelaFièvreJaune:
«
On
s'estassuréque
les différens endroitsoù
la fièvre jaune a régné, etqui par leur
éloi-onement
n'ontaucune communication
avecla
mer,
étaient environnés de substancesen putréfaction, etd'eaux stagnantes dont lelitresserré par la sécheresse avait laissé ,
en
partie , la superficie de la terre à
décou-vert.(2). »
(1)Page 108.
(2)Pages 74 et75.
d1amÉr[que. 69
Avant
dedire cela,ilcitequelques endroits très-éloignés de la mer,où
la fièvrejaune a étéobservée.M.
Pariset, dans ses Observations sur la fièvre jaune, parle d'uncantonde la Suisse, loin de toutemer, où
elle se manifesta, ily a soixante àquatre-vingts ans.Voilà
donc deux
autoritésqui contredi set l'opinion généralement admise qu'on n'ob-servejamais lafièvreloin delamer;
j'ajoute-raique
je suis convaincuque
jusqu'à présent lesrecherchesà cetégardontgénéralementété très-inexactes.Peut-êtren'a-t-onpasencorevu
d'épidémie dans ces endroits, parcequ'ils'ytrouvait
peu
d'habitansnon
acclimatés dansle
même temps
,etconséquemment
suscep-tibles d'avoir la fièvrejaune.Des
cas spo-radiques peuvent bien avoir été confondus avec d'autres maladies, sisurtout ils ont étéobservés par des
médecins
qui ne connais-saient pasla fièvrejaune.Le remuement
dusol,dans leslieux réunis-sant d'ailleurs les conditions nécessaires, est considéré avec raison ,comme
une autre cause très-énergique. M. Ballyditque
: «La
côte maritime de'l'
Amérique
qui n'est pas70 ESSAI SUR LA FIEVRE JAUNE
défrichéeest malsaine; elle Test encore plus
au moment où Ton
exploite le terrainpour
la première fois
On
avu
des villages entiers anéantis par la fièvre jaune parce qu'on remuaitune
terre vierge dans leur voisinage :chaque coup
dehoyau
, en dé-chirant son sein, ouvrait.uneissue fataleaux effluves pestiférés (1). »A
laNouvelle-Orléans,on
n'avait, dit-on, jamais observé la fièvre jaune avant 1796;jusqu'à cette
époque,
la ville,peu
étendue,était entourée d'arbres qui par leur
om-brage empêchaient laputréfaction des eaux danslesquelles leurs pieds étaientplongés ,
etquiabsorbaientd'ailleursen grandepartie,
comme on
saitque
c'estleur propriété, lesmiasmes
délétères.Le baron
espagnol de Carondelet, alorsgouverneur
delaLouisiane,fitdans cetemps
exécuter destravaux considérables, dont les principaux furent:1°.
La
construction d'un canal dedeux
milles de longueur, qui porte encore son
nom
,etse termine àlaNouvelle-Orléans parun
bassinpouvantcontenirun grand nombre
(1)Page
342-DAMERIQUE. fi depetitsnavires de 25à100tonneaux,creusé précisément dans le lieu
où
étaient situés les anciens cimetières , et parl'autre extrémité dansune
petiterivièrequisejettedansle lac Pontchartrain;i".
Des
fortifications entourées de fossés;3°. Enfin,
un
abattis des arbres qui en-vironnaientla ville,jusqu'àune
certaine dis-tance, ce qui mitainsià découvertune
éten-due
considérable de terrainmarécageux
, lequel ,dangereusement
influencé par la chaleur solaire, laissa bientôt dégager enabondance
des effluvespestiférés.Cestravauxetsurtoutle canal, furent pré-cisément achevés en 1796,
comme
les re-gistres de la ville, dans lesquelsj'ai puiséles détails ci-dessus, en fontfoi; et ce fut aussi alors qu'eut lieu la première épidémiede
fièvre jaune
, qui
emporta
d'abord , assu-rent les témoins oculaires,presque tous lesouvriers qui
y
travaillaient.Les résultats funestes
du remuement du
sol, ont été démontrés de
nouveau
dansl'é-pidémie des Natchez en 1819.
M.
le docteur Prouens,praticienfortinstruit,quiyexercela
médecine,
écrivait, à cetégard, à la Société72 ESSAI SUR LA FIEVRE JAUNE
médicale de la Nouvelle-Orléans, donl ilesl
correspondant
,
que
lacause évidentedecette épidémie n'avait pas été l'importation parle fleuve,
comme
le prétendaientles conta-gionistes , puisque la maladie avaitcom-mencé
à semontrer
dans l'endroit le plus éloignédu
port, endroit voisin de fouilles assez considérables pratiquéespeu
aupara-vant dans l'intentionde niveler les rues.D'anciens habitans de
Saint-Domingue
m'ont assuré qu'on connaissait plusieurs exemples analogues arrivés dans cette île,parla
même
cause.On
verra, enlisant plusloin ladescription de l'épidémie de 1822 ,que
les fouilles de terre peuvent être considéréescomme une
des causes qui l'ontdéterminée.Après avoirindiqué plusieurs des princi-pales causes nécessaires
pour donner
nais-sance à la fièvre jaune, parlons de celles qu'on peut appeler individuelles, et qui se rapportent au
tempérament
, à l'âge , au sexe, et au défaut d'acclimatement.Il estconstant
que
les individus pléthori-ques, ainsique
tous les auteurs le disent, sont plus susceptiblesque
lesautresdecon-D'AMÉRIQUE. 73 tracterlamaladie, surtouts'ilsjoignentà cet étatde pléthore la
prédominance du
système sanguin.11estégalementdémontré que
les su-jets faibles,les femmes,lesenfans,etc..quelleque
soit d'ailleurs leur susceptibilité ner-veuse, en sont plus rarement affectés, etque
lorsqu'ils en sont atteints,les
symptômes
se développent chez eux avecbeaucoup moins de
rapiditéetde violenceengénéral,que
chezles premiers.
Cependant M.
Chabert consi-dèrelafièvrejaunecomme
influençant prin-cipalement et primitivement lesystèmener-veux
, et c'est d'après cette idée qu'il lui adonné
lenom
de spasmodico-lipyrienne ,regardantle système nerveux
comme cons-tamment
affectéle premier,etl'inflammation d'unou
plusieurs organes internescomme
toujours secondaire. Voici
comment
ils'ex-prime
à cetégard, dans lapremière notede son ouvrage:« Si
un
éréthisme presque général,un
état de
spasme
particulièrement fixé sur lesmuscles et les organes soumis directement
ou
d'une manièresympathique
àl'empire dela volonté , caractérise (
comme
nous lecroyons)l'invasion de cette maladie;si
ulté-74 ESSAI SUR LA FIEVRE JAUNE
rieurement les extrémités
du malade
de-viennent d'un froid glacial , tandis qu'il est tourmente' par la sensation intérieure d'une ardente chaleur; si l'autopsie cadavériqueoffre toujours
ou
presquetoujours, aux re-cherches de. l'observateur, des tracesmani-festes d'inflammation, dont le siège varie à
l'infini, ( ce qui
prouve que
les accidens qui surviennent, lessymptômes
quiles pré-cèdent ,ne sontpointle résultatd'une phleg-masieprimitive d'unorganeou
d'un appareil déterminé), nous aurons eu raison decroire devoirdonner
à la maladieconnue
sous lenom
de FièvreJaune,une
dénominationplus rationnelle, en adjoignantau mot
spasmo-dique,quinousparaît signalerune
modifica-tionvitale,primitiveetinvariable,cause pro-chaine dela plupart des
phénomènes
qui se fontremarquer pendant
lapremièrepériode, lemot
leipyria, consacré par le père de lamédecine
et par Galienpour
désignerune
fièvre,
accompagnée
del'inflammationd'une partie interne, etdans laquelle le dedansdu
corps est brûlant, tandisque
lesmembres
sont froids (1). »
(i)Pages i3i et i3a.
d'amerique. 75 Analysons
sommairement
cepassage:•« Si
un
ërethisme général,un
étal despasme,
etc., caractérise,comme nous
lecroyons, dit
M.
Chabert, l'invasion de cette maladie.... »Quel
est cet état d'éréihisme, despasme?
C'est le
même
qui existe dans la fièvre ar-dente (1); c'est celuique
détermine toute irritation violente, toute fièvre occasionée parune
inflammation; c'est enfin le résultat nécessairede
ladouleur portée àun
certain degré.« Si, ultérieurement, continue-t-il , les extrémités