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5.3 Retour sur le lien micro /méso

5.3.3 Choix de la friction

Nous pouvons donc maintenant déterminer la fonction d’autocorrélation des vitesses d’ions dans le potentiel effectif issu des simulations de dynamique moléculaire. Le seul paramètre libre est la friction γ. Celle-ci correspond en principe à la limite aux temps courts de la fonction d’autocorrélation des vitesses par la relation (5.41). Le meilleur choix de la friction est alors γ= 5 ps−1, comme on peut le voir sur la figure 5.15. Cependant, pour cette friction Z(t) relaxe trop vite vers 0, et l’on n’observe pas le minimum prononcé (Z(t) ∼ −0, 6 Å2/ps) pour t ∼ 0, 45 ps de la dynamique moléculaire. Une friction plus faible (γ = 1 ps−1) permet d’atteindre cette valeur,

F. 5.14: Fonction d’autocorrélation des vitesses Z(t) obtenues par Lattice Fokker-Planck (lignes) et dynamique de Langevin (◦), dans le potentiel modèle (5.7) avec βVs= 1, pour une friction γ = 10 (ligne continue), 5 (pointillés) et 1 ps−1(tirets).

mais seulement après t ∼ 0, 8 ps (voir la figure 5.15). Les valeurs intermédiaires de la friction permettent de réaliser un compromis, mais l’on ne peut complètement reproduire le résultat de dynamique moléculaire avec le potentiel effectif, quelle que soit la valeur de la friction.

5.3.4 Discussion

Le fait qu’aucune friction ne permette de reproduire exactement le Z(t) de la dynamique mo-léculaire, lorsque l’on fait des simulations mésoscopiques dans le potentiel effectif issue de ces dernières peut paraître décevant. Cependant il ne remet pas en cause l’approche adoptée au cours de ce chapitre pour faire le lien avec un modèle de diffusion-réaction (et la constante de partage Kd). On peut d’ailleurs remarquer que l’accord entre niveau moléculaire et mésoscopique, s’il n’est pas quantitatif, est au moins qualitatif : on a le bon comportement aux temps courts (5.41) et passage par un minimum négatif. Il n’est pas surprenant qu’un modèle si simple ne permette pas de reproduire toutes les propriétés du système réel. On peut par contre se demander quelles voies d’amélioration s’offrent à nous pour décrire le système au niveau mésoscopique de façon plus réaliste.

Une première limitation possible consiste à avoir supposé une séparation complète d’échelles de temps entre le solvant et les ions. Si cette hypothèse est justifiée dans le cas des colloïdes, elle ne l’est peut-être pas parfaitement dans le cas des ions. Cependant le Cs+ est bien plus lourd que l’eau, et nous avons pu vérifier que la fonction d’autocorrélation des vitesses de l’eau décroît de l’ordre de 5 fois plus vite que celle du Cs+. On peut donc conclure qu’à l’échelle de la relaxation des vitesses de l’ion, celles des molécules d’eau est très rapide, comme nous l’avions supposé. Par ailleurs, le même problème persiste pour la simulation (à la fois par dy-namique moléculaire et simulations mésoscopiques) d’un ion avec les mêmes paramètres de

5.3. RETOUR SUR LE LIEN MICRO/MÉSO 163

F. 5.15: Fonction d’autocorrélation des vitesses Z(t) obtenue par dynamique moléculaire (ligne conti-nue), et et par Lattice Fokker-Planck dans le potentiel effectif issu des simulations de dynamique molé-culaire (figure 5.12), pour des frictions γ= 5 (pointillés), 2 (tirets) et 1 ps−1(pointillés-tirets).

Lennard-Jones que le césium, mais une masse dix fois plus grande, ce qui assure une séparation d’échelles de temps d’un facteur 50 environ (résultat non illustrés ici). On peut donc exclure le problème de la séparation d’échelle de temps (en tout cas pour l’ion césium).

On pourrait par ailleurs complexifier la description en utilisant une friction dépendant de la position (donc du potentiel), éventuellement anisotrope. Cependant nous ne disposerions pas de moyen de calibrer ces paramètres supplémentaires, ce qui limite l’intérêt d’une telle approche.

Une autre hypothèse que nous avons faite ici est de négliger toutes les interactions entre ions. Il serait possible de revenir sur cette hypothèse, en calculant le potentiel d’interaction de paires v(r) à partir de la fonction de distribution radiales :

v(r) = −kBTln gC sC s(r)+ v0. (5.42) On pourrait alors les inclure directement dans une dynamique de Langevin, ou dans le champ moyen au niveau Fokker-Planck. C’est sans doute la piste principale à explorer pour améliorer le résultat sur la fonction d’autocorrélation des vitesses. Cependant, si les corrélations entre ions sont fortes, elles peuvent influer sur la distribution d’équilibre, et il faudra déterminer simultanément le potentiel effectif à un corps et le potentiel de paires pour obtenir la bonne densité d’équilibre.

Résumé du chapitre

Nous avons montré qu’il était possible de faire le lien entre la dynamique microsco-pique des ions (soit au niveau atomique avec la dynamique moléculaire, soit au ni-veau mésoscopique à solvant continu) et un modèle simplifié de diffusion/réaction semblable à celui introduit de manière opérationnelle pour traduire la réduction de la mobilité des ions par leurs interactions avec les surfaces. Toutes les caractéristiques de ce modèle, à la fois thermodynamiques (Kd) et dynamiques (constantes cinétiques d’adsorption et désorption) ont été étudiées en fonction des interactions des ions avec les surfaces (ou de façon équivalente de la température).

La comparaison des résultats de Lattice Fokker-Planck pour la mobilité apparente avec ceux de trois approximations (traitement perturbatif, approximation quasi-bidimensionnelle et approximation du chemin de diffusion) nous a permis de justifier la nécessité d’utiliser cette méthode numérique pour obtenir des résultats exacts.

L’influence des interactions avec la surface dans le cadre du modèle mésoscopique a été établie en utilisant un potentiel effectif simplifié et une valeur raisonnable de la fric-tion. Dans la dernière partie de ce chapitre, nous sommes revenus sur cette description en incluant le potentiel effectif issu des simulations de dynamique moléculaire (DM), et en essayant de calibrer la friction pour reproduire la fonction d’autocorrélation des vitesses obtenue par DM.

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Chapitre 6

Échange et exclusion en bordure de

feuillet : simulations moléculaires et

implications pour le transport

macroscopique

Sommaire

6.1 Introduction . . . 166 6.1.1 Porosités multiples et transport macroscopique . . . 166 6.1.2 Description de l’échange et de l’exclusion . . . 167 6.2 Système d’étude . . . 169 6.2.1 Système et champ de force . . . 169 6.2.2 Détail des simulations . . . 172 6.2.3 Observation des trajectoires . . . 173 6.3 Coordonnée de réaction . . . 174 6.3.1 Potentiel de force moyenne et coordonnée de réaction . . . 174 6.3.2 Coordonnées géométriques . . . 176 6.3.3 Coordonnée de solvatation . . . 177 6.3.4 Choix de la coordonnée de réaction . . . 180 6.4 Potentiel de force moyenne . . . 182 6.4.1 Profils de densité . . . 182 6.4.2 Méthodes de calcul . . . 184 6.4.3 Résultats et discussion . . . 186 6.5 Tenseur de diffusion . . . 190 6.5.1 Méthode . . . 190 6.5.2 Résultats et discussion . . . 191 6.6 Implications pour le transport macroscopique . . . 193 6.6.1 Discussion . . . 193 6.6.2 Perspectives . . . 193

La diffusion de l’eau et des ions à travers une argile compactée implique, selon la charge des espèces, la porosité interfoliaire et les porosités extraparticulaires. Une description globale nécessite donc la mise en cohérence du transport à travers ces différentes porosités : pour l’eau et les cations, il est admis que toute la porosité est accessible, tandis que les anions sont exclus à la fois de la surface externe des particules, mais aussi de la porosité interfoliaire, du fait de la charge négative des feuillets. Cependant les informations expérimentales conduisant à ces conclusions (de bon sens) sont en général indirectes, et les modèles de transport actuels traitent la transition entre interfoliaire et porosité extraparticuliaire de manière très simplifiée, quand ils ne la négligent pas complètement. Dans ce chapitre, nous montrons que les simulations molécu-laires permettent d’obtenir une description précise de cette transition à l’interface particule/pore, qui se traduit par l’échange pour l’eau et les cations, et par l’exclusion pour les anions.

6.1 Introduction