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[49] Ce qui donne au chef le droit de commander, ce n’est pas directement sa capacité, c’est le mandat qu’il a authentiquement reçu. Mais il ne remplira efficacement sa mission de chef pour le bien de la collectivité que s’il développe en lui les qualités qui le rendent digne du titre de chef.

[50] L’exercice du pouvoir est l’épreuve où ceux qui ne possèdent pas les qualités qui font les chefs ne tardent pas à être trouvés trop légers, et donnent à ceux qu’ils ont mission de conduire la terrible tentation de les traiter en usurpateurs.

[51] On reconnaît le vrai chef à ce signe que près de lui on éprouve comme une impression physique de force et de sécurité, et qu’on se sent prêt à le suivre partout où il le demandera. Il nous aurait fait aller avec lui jusqu’au bout du monde, disaient les vieux grognards de Napoléon.

[52] Proche de ses hommes, les aimant autant pour eux-mêmes, êtres de chair et de sang, créés à la ressemblance d’un Dieu auquel Patrick Arbois croyait de toute son âme, que parce qu’ils disposaient, chacun pour sa part, d’une parcelle de la force de la patrie, le jeune officier avait

d’année en année acquis cette expérience humaine faite de bienveillance et de force, de compréhension et de sagesse, de rigidité et de tact hors laquelle il n’est pas de véritable chef (Pierre VARILLON, Feux Masqués, Revue des Deux Mondes du I5 juillet 1944).

[53] La foi en un chef est une conséquence directe de l’admiration et de la confiance qu’il inspire. Mais cette admiration et cette confiance doivent, pour durer, être méritées par les qualités intellectuelles et morales qui font les vrais chefs.

[54] Le vrai chef, c’est celui qu’on admire, qu’on aime et qu’on suit. On l’admire : on a confiance en lui, on connaît sa compétence, ses qualités, sa valeur, on sait qu’avec lui on ne s’égarera pas et qu’on s’en tirera toujours. On l’aime : on a confiance en son désintéressement, en son esprit de service, et on sait que pour lui chacun de ses hommes compte pour quelque chose, ou mieux pour quelqu’un, et c’est pourquoi il peut compter sur chacun. On le suit : sa parole, sa présence, son regard, son souvenir même constituent autant de stimulants. On se sent prêt à se sacrifier avec lui ou même pour lui au service de la cause qu’il représente.

[55] L’exercice du commandement est tout autre chose que le port d’un insigne, le droit au salut de la part de certaines catégories de fonctionnaires, et, en suprême argument, le droit de punir.

Il suppose une extrême activité, un don de soi permanent, le souci de réaliser, le goût des responsabilités, un sincère et profond amour des hommes, une parfaite dignité de vie.

(DE LA PORTE DU THEIL).

[56] Beaucoup de chefs, revêtus d’un commandement (que soulignent leur uniforme ou leurs galons), n’ont point d’autorité. L’efficacité des gestes du vrai chef ne dépend point de son costume. Elle émane de sa personne, de sa chair, de son âme. Ce n’est point avec l’usure de l’habit que disparaît le prestige, mais avec l’usure de l’âme.

[57] Le chef doit être partout moralement présent. Cette présence morale a une vertu que rien ne saurait remplacer.

Même quand il n’est pas là physiquement, on sait qu’il peut venir, et la simple pensée de son arrivée, mieux encore le souvenir que l’on garde de lui ou l’espérance d’un de ses regards suffisent à aider des hommes, non seulement à rester fidèles, mais à se surpasser.

C’est l’homme qui importe dans le chef. Ses qualités d’homme se manifestent à l’occasion des actes les plus

ordinaires de la vie. C’est d’une somme de toutes petites choses que naît l’autorité du chef.

[58] Ce qui fait le chef, c’est la volonté d’agir sur les hommes pour les aider à se valoriser et les entraîner vers des réalisations dont ils puissent être fiers.

[59] Un chef, c’est quelqu’un qui aime ses hommes de la vraie manière : en détectant ce qu’il y a de meilleur en chacun, et en voulant à tout prix les amener à le mettre au service de l’ensemble. Cela ne va pas sans luttes, car la loi de paresse est une loi de nature.

[60] Seul celui qui est ému par la réalité humaine, qui est baigné par l’immensité de la vie est digne d’être un chef. Et c’est par manque de vrais chefs que notre pays s’étiole (Paul BAUDOIN, op. cité)

[61] Un homme satisfait de ce qu’il trouve en lui et autour de lui, un homme sans souci de changement, sans désir de voir le monde autrement qu’il n’est, manque de quelque chose au départ pour devenir un chef : tout au plus pourrait-il être un expéditeur d’affaires courantes.

[62] Être chef, c’est d’abord percevoir par intuition ce qui manque à un groupe humain pour réaliser sa mission. C’est coordonner les efforts de tous dans le même sens. C’est

communiquer à tous l’espérance de vaincre, et faire partager à tous la joie d’avoir vaincu.

[63] Le chef n’est pas un dompteur qui asservit ; il n’est pas un orgueilleux qui humilie ; il n’est pas un habile qui se dérobe. Il est un serviteur pour qui la forme de service est d’assumer sa part de responsabilité et d’aider les autres à assumer la leur.

Un chef doit être plus éveillé que les autres pour être le premier à voir le danger ou la chance ; plus perspicace, pour mieux lire les données de l’action ; plus averti pour Ies bien mettre en place ; plus prompt à la décision pour que l’action se déclenche à point voulu ; plus audacieux dans l’acceptation des risques nécessaires pour entraîner chacun à remplir sa tâche ; plus courageux, pour dominer les timidités environnantes ; plus persévérant, pour vaincre l’usure du temps ou des obstacles ; plus résistant enfin à la solitude en même temps que plus riche de chaleur humaine.