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Chapitre quatre

Dans le document BOUTONS ET DENTELLE PENELOPE SKY (Page 49-57)

Pearl

Dix filles ont été mises aux enchères ce soir-là.

Dans la salle se trouvait une mer de tables éclairées aux chandelles. Des hommes y étaient assis, portant des complets gri és et des masques de carnaval qui rendaient tous les participants anonymes. Mais il faisait tellement sombre que ce déguisement n’était pas nécessaire.

Des serveuses se pavanaient d’une table à l’autre, vêtues uniquement de strings noirs. Les hommes glissaient des billets dans la ficelle autour de leur taille, puis leur tapaient les fesses lorsqu’elles s’éloignaient.

Putain, comment ai-je atterri ici ?

Les autres femmes étaient d’une beauté époustouflante.

On aurait dit des mannequins, du genre qu’on ne voyait qu’à la télé. Beaucoup d’entre elles semblaient terrifiées, à en croire leurs doigts et genoux tremblants. Mais une femme en particulier semblait excitée, comme si elle avait attendu ce moment toute sa vie.

Il y a tellement de degrés d’abjection.

Je portais une courte robe rose corail serrée à la taille, un collier de perles, et mes cheveux étaient élégamment mis en plis. La dernière fois où j’avais été aussi chic, c’était au bal de fin d’année.

Une par une, les filles ont été vendues. Chacune pour un million de dollars ou plus.

Un million de dollars.

C’était absurde.

Les esclaves valaient tant que ça  ? Quelqu’un allait-il vraiment payer une telle somme pour m’avoir  ? Quelqu’un allait-il vraiment empocher un million de dollars pour ma vie ?

Quelle horreur.

Quand mon tour est venu, je suis montée sur la scène, où j’ai attendu mon sort. Le maître de cérémonie allait dresser la liste de mes atouts, comme il l’avait fait avec les autres.

J’étais curieuse de voir ce qu’il dirait, car je n’en avais aucun.

Je ne serais pas soumise. Je me battrais chaque jour jusqu’à ce que je sois libre, ou morte. Je ne m’abaisserais à aucune faveur sexuelle répugnante. Chaque jour serait plus pénible que le précédent. Je serais la pire esclave qu’on n’ait jamais eue. S’il voulait survivre, mon maître allait devoir ne dormir que d’un œil.

– Hostile, dure à cuire, fougueuse, annonça le maître de cérémonie. Avec un score de combat de dix.

Un murmure collectif d’approbation a empli la pièce. Il y a même eu quelques si ements.

Qu’est-ce que ça veut dire  ? C’est bon signe  ? C’est mauvais signe ?

Si personne ne m’achetait, me laisseraient-ils partir ? Ou peut-être qu’ils me tueraient ?

–  Deux partenaires, ajouta-t-il, lisant le morceau de papier dans sa main. Ingénieure. Expérience sexuelle limitée.

Je n’étais pas vierge. Alors non, mon expérience sexuelle n’était pas limitée. Mais je n’allais pas argumenter, car cela n’avait aucune importance.

– Les mises sont maintenant ouvertes.

Il est retourné au podium, où il s’est mis à animer la vente. Il a annoncé la mise initiale, et les enchères ont vite monté tandis que les hommes surenchérissaient en nombre.

J’ai été particulièrement dégoûtée en voyant l’un d’eux, qui avait déjà acheté une femme, miser sur moi. Avait-il vraiment besoin de deux esclaves ?

L’enchère a continué de monter jusqu’à ce qu’elle atteigne un million.

Putain de bordel de merde.

Plutôt que de ralentir, le prix a monté de plus en plus vite.

Plus il augmentait et plus la testostérone était palpable dans la salle. Quelqu’un ici allait se faire une véritable fortune grâce à ma sou rance. Il gagnerait encore plus d’argent qu’il n’en avait besoin —  et je paierais cette dette jusqu’à ma mort.

– Vous me dégoûtez tous autant que vous êtes, bande de pervers.

Je n’ai pas pu m’empêcher d’exprimer mon mépris. Peu m’importait qu’on me punisse d’avoir ouvert la bouche.

J’étais un être humain, mais on me traitait comme du bétail.

Un des hommes qui participait à l’enchère s’est levé, brandissant son numéro. 

– Trois millions de dollars.

Merde, qu’est-ce que j’ai fait ?

Les autres hommes se sont tournés vers lui en silence.

Personne n’a renchéri sur sa mise. Ils ont tous baissé leur numéro.

Le vainqueur a souri.

–  Trois millions de dollars pour la petite garce au sang chaud, s’exclama le maître de cérémonie avant de donner un grand coup de maillet sur le pupitre. Trois millions pour le gentleman au fond. Félicitations. Cette beauté est à vous.

Comme si j’étais suspecte dans une enquête criminelle, on m’a menottée et assise sur la banquette arrière d’une voiture noire aux vitres teintées. Je portais toujours ma robe et mes perles. Mes talons hauts me faisaient mal aux pieds, mais je savais qu’un inconfort bien pire m’attendait.

Le chau eur s’est assis au volant, attendant que son client nous rejoigne.

Je n’avais pas vu son visage, mais cela importait peu. Dès qu’il avait lancé son o re de façon aussi arrogante, j’avais su qu’il était un monstre impitoyable. Si je le suppliais de me laisser partir, il refuserait. Si je l’implorais de ne pas me faire de mal, il m’ignorerait.

Espérons que j’aie tort.

Il ne semblait pas être le genre d’homme à la recherche d’une belle femme à gâter. Il ne semblait pas du genre à vouloir m’exhiber lors de cocktails ni m’acheter des robes et des bijoux hors de prix. Je sentais le mal en lui.

Le mal absolu.

Il m’a enfin rejointe sur la banquette arrière, n’attachant pas sa ceinture de sécurité. Il portait toujours son masque, qui cachait le haut de son visage.

Je regardais droit devant moi, les mains liées derrière le dos. Si au moins je pouvais passer les bras devant moi, j’étranglerais le chau eur. Peut-être qu’il ferait un accident, et qu’on mourrait tous. Ou encore mieux, ils mourraient tous les deux et je m’en sortirais indemne.

Quelle illusion.

Le chau eur a démarré et s’est engagé dans le trafic. Il ne conduisait pas du côté de la route auquel j’étais habituée. Les rues étaient étroites, et la voiture petite. J’ignorais où nous étions exactement, mais je savais que c’était quelque part en Europe.

À environ un kilomètre de notre destination, mon ravisseur a ôté son masque. Ses yeux étaient d’un bleu vif et luisaient au clair de lune. Pendant un instant, ils lui ont donné l’air innocent. Mais dès qu’il a cligné, le mal au fond de son âme a transparu dans son regard. Il me regardait comme si j’étais une proie et lui un chasseur. La tension a empli l’air alors que la peur m’étreignait le cœur.

Il avait des cheveux blonds lissés vers l’arrière qui révélaient son visage rond. Ses lèvres étaient minces, du genre que l’on remarque à peine. Il portait une barbe fournie qui lui donnait l’air d’un bûcheron en plein hiver.

Il me fixait froidement, comme s’il allait bondir sur moi.

J’ai soutenu son regard et juré que je le tuerais s’il essayait de me toucher.

– Ton nom ?

Sa voix était tout aussi cruelle que pendant la vente aux enchères. Rauque, comme du papier émeri frottant contre du béton. Elle m’a éraflé les tympans avant d’entrer dans mon corps. Même ces deux petits mots me semblaient odieux. Ma haine s’est décuplée —  chose que je n’avais pas crue possible.

Je refusais de lui répondre. Je refusais d’obéir. Il allait devoir travailler dur pour obtenir quoi que ce soit de moi

— sans aucune gratification.

Il a ricané et s’est confortablement adossé au siège de cuir.

– Tu me plais. On va bien s’amuser, toi et moi.

S’amuser ? Dès qu’il me mettrait sa bite dans la bouche, je lui arracherais avec les dents.

– Je vais t’appeler ma petite pute.

Il a regardé les immeubles défiler par la fenêtre teintée. Il portait une chemise blanche sous un complet noir, look tout aussi redoutable que le son de sa voix.

–  À moins que tu m’en dises autrement. Et entre nous, j’espère que ça n’arrivera pas.

C’est mal parti. Très mal.

Il a lentement tourné la tête vers moi, attendant la réaction sur mon visage. Il voulait y voir la peur. La terreur.

Mais je refusais de lui donner ce qu’il voulait.

–  Je n’en croyais pas ma chance quand le maître de cérémonie a dit que tu avais un score de combat de dix. Ça me semblait trop beau pour être vrai. Ça n’arrive presque jamais.

J’ignorais encore ce qu’était un score de combat. Était-ce parce que j’avais tué quelqu’un  ? Je n’étais pas

fondamentalement dangereuse. Mais si c’était une question de vie ou de mort, je ferais tout pour survivre.

– Et puis quand tu nous as tous traités de pervers, ricana-t-il doucement, je n’ai jamais été aussi bandé de ma vie.

Je voulais dégueuler.

–  Ma queue s’est dressée dans mon froc. Tu étais sur la scène, une magnifique femme aux traits parfaits dans une robe épatante. Puis quand t’as ouvert la bouche et que t’as dit ce que tu pensais, sans retenue…

Son pantalon a gonflé alors que sa bite durcissait. Il s’est penché vers moi et m’a pressé la cuisse.

Répugnée, j’ai brusquement pivoté les jambes vers la portière pour qu’il lâche prise.

Il devait s’attendre à ce que je réagisse ainsi, car il s’est redressé, ricanant toujours.

– Je vais tellement m’amuser à te briser. Tu me rappelles un étalon sauvage que personne ne peut monter. Tu es un taureau indomptable.

La peur s’est immiscée dans mes veines, circulant dans mon sang. Quand elle a atteint mon cœur, j’ai été momentanément paralysée. Être prisonnière de cet homme allait tester mes limites. Je serais assujettie à tellement de cruauté que je ne m’en sortirais peut-être pas indemne — du moins mentalement. Mais je refusais de céder à la panique.

Je devais continuer à me battre. Tout problème avait une solution ; j’allais en trouver une.

– Quand on arrivera à la maison, je vais te défoncer le cul tellement fort que tu ne pourras pas t’asseoir pendant une semaine. Ce sera ton cadeau de bienvenue.

Il a regardé par la fenêtre à nouveau, comme si ses paroles n’avaient rien de terrifiant.

– Et quand on arrivera à la maison, je vais te tuer. Ce sera ton cadeau d’adieu.

Il s’est tourné vers moi lorsque j’ai prononcé ces mots.

Plutôt que de me punir d’avoir rétorqué, il a souri. D’un air grotesque, comme si ma riposte le rendait encore plus excité à l’idée de me torturer.

– J’aime les défis.

Dans le document BOUTONS ET DENTELLE PENELOPE SKY (Page 49-57)