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B. Le secteur concerné

1. Le chèque

a) L’utilisation du chèque en France

22. Le livre Ier du code monétaire et financier, consacré à la monnaie, distingue entre la monnaie fiduciaire – composée de la monnaie métallique et des billets de banque – et la monnaie scripturale, dont les principaux instruments sont le chèque, la carte de paiement, le virement, la lettre de change et le billet à ordre.

23. Le chèque est un moyen de paiement très utilisé en France : en 2007, plus de 3,6 milliards de chèques ont été échangés, ce qui représente, en volume, 23,6 % des paiements scripturaux réalisés en France. A ce titre, la France constitue une exception européenne et représentait à elle seule 78 % du total des chèques échangés en 2006 dans la zone euro2.

24. L'usage du chèque ne cesse de reculer en France, principalement au profit de la carte bancaire : alors qu’il représentait 70 % des paiements en 1984, ce chiffre n’était plus que de 50 % en 1996, 37 % en 2000 et 26 % en 2006. Sa disparition à moyen terme n’est toutefois pas acquise, puisque les utilisateurs continuent de le préférer à la carte pour les paiements de montant élevé : selon les données de la Banque de France, le montant moyen du chèque était de 555 euros en 2005, plus de dix fois supérieur au montant moyen des achats par carte bancaire qui était de 50 euros.

b) L’émission et la remise de chèques en France

25. Les moyens de paiements scripturaux tels que le chèque permettent le transfert de fonds tenus dans des comptes par des établissements de crédit ou des institutions assimilées à la suite de la remise d'un ordre de paiement.

2 Source : Banque de France

26. Le système quadripartite propre au chèque met en rapport quatre acteurs selon le schéma suivant :

Le chèque: un système de paiement quadripartite

Banque tirée

Banque remettante

Payeur

Bénéficiaire du paiement

Paiement

Système de compensation

27. En France, la mise à disposition et la gestion des moyens de paiement relèvent du monopole bancaire et sont en principe réservées aux établissements de crédit, en vertu des dispositions des articles L. 311-1 et L. 511-5 du code monétaire et financier. Le statut d’établissement de crédit est subordonné à l’obtention d’un agrément accordé par le Comité des établissements de crédit et des entreprises d’investissement (CECEI) – fusionné au sein de l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP) le 9 mars 2010 – et impose le respect d’une réglementation contraignante, sous le contrôle de la Commission bancaire.

28. Il existait 775 établissements de crédit agréés en France au 31 décembre 20073. Ces établissements de crédit ne sont cependant pas tous actifs sur le marché des moyens de paiement, qui est principalement occupé par les grandes enseignes bancaires dotées de réseaux d’agences.

29. L’émission du chèque est réglementée afin notamment de protéger les consommateurs face aux établissements de crédit. L'article L. 131-71 du code monétaire et financier impose ainsi aux banques de mettre « les formules de chèques (...) gratuitement à la disposition du titulaire du compte ». Dans le cadre du droit au compte, les établissements de crédit ont l’obligation de fournir à leurs clients deux chèques de banque par mois (article D. 312-5 du code monétaire et financier). Enfin, les frais bancaires sont encadrés en cas d’incidents de paiement.

30. Au contraire, la remise de chèques n’est pas, en dehors de la contrainte du monopole bancaire, soumise à des contraintes réglementaires spécifiques. Les banques opèrent une distinction au sein de la catégorie des remettants, selon que ceux-ci remettent des chèques régulièrement et en grand nombre ou sur une base épisodique et en faibles quantités. En effet, si les consommateurs ne sont pas facturés directement, les « grands remettants » le sont, soit sur la base d'un prix global (cas des petits et moyens commerçants) soit à l'acte (cas des très grands remettants comme les entreprises de la grande distribution qui manipulent, au niveau national, des volumes de chèques allant de quelques millions à près de 100 millions de chèques par an).

3 Rapport annuel 2007 du CECEI

c) Les modalités de rémunération des services relatifs à l’utilisation et à la remise de chèques

31. De manière générale, les banques recherchent la rentabilité globale des services qu’elles proposent au niveau de chaque client et non pas service par service. Dans le cadre de cette relation globale, tous les flux de paiement (cartes bancaires, chèques, espèces etc.), les crédits, les placements ou encore la gestion du compte peuvent être pris en compte par la banque afin de déterminer le prix des services bancaires qui seront effectivement facturés à un client donné. Un service peut dès lors être proposé à un prix impliquant une perte si un autre poste permet de couvrir cette perte.

32. Par ailleurs, les modes de rémunération des services liés à l’utilisation des moyens de paiement tels que le chèque sont variés et peuvent être combinés entre eux :

- la tarification directe du service de la remise de chèques, par exemple par le moyen de commissions à la transaction facturées aux clients ou de forfaits ;

- le float, qui correspond au produit du placement par la banque et pour son propre compte des sommes disponibles au crédit des comptes courants lesquels ne sont normalement pas rémunérés, le système des dates de valeur venant le cas échéant accroître cette rémunération4 ;

- les commissions de mouvement, appliquées à une clientèle professionnelle, qui correspondent à un prélèvement sur chaque opération au débit réalisée par l’entreprise ou les commissions de recette, plus rares, qui consistent en un prélèvement sur chaque opération au crédit.

33. La rapidité d’un système de paiement influe sur le niveau de la rémunération des banques par le float : un système lent, caractérisé par un délai important entre l’émission de l’ordre de paiement et le débit du compte du client, avantage la banque du payeur, qui bénéficie plus longtemps des sommes disponibles au crédit du compte de son client afin de les placer à son profit. A l’inverse, un système de paiement rapide avantage la banque du bénéficiaire du paiement.

d) Le système de compensation des chèques interbancaires

34. La banque de l’émetteur d’un chèque (le « tireur ») n’étant pas nécessairement la même que la banque du bénéficiaire (le « remettant »)5, un système de règlement interbancaire permet la compensation quotidienne des créances respectives des banques nées de ces paiements.

35. Cette procédure est régie par l’article L. 330-1 du code monétaire et financier, qui dispose que : « Un système de règlements interbancaires (…) s'entend d'une procédure nationale ou internationale organisant les relations entre deux parties au moins, permettant l'exécution à titre habituel, par compensation ou non, de paiements (...) / Le système doit soit avoir été institué par une autorité publique, soit être régi par une convention-cadre

4 La pratique des jours de valeur consiste à décaler la date de débit ou de crédit du compte courant du client par rapport à la date d’opération, afin de tenir compte des délais techniques d’encaissement, et donc de la date effective à laquelle la banque est elle-même débitée ou payée. Lorsque le décalage est supérieur au délai technique d’encaissement, cela constitue un mode de rémunération indirecte pour la banque, qui peut placer les sommes correspondantes à son profit dans l’intervalle.

5 Dans l’hypothèse où la banque tirée n’est pas la banque remettante, le chèque est dit « interbancaire » ; dans le cas contraire, il est dit « intrabancaire ».

respectant les principes généraux d’une convention-cadre de place ou par une convention type ». Dans le cas des chèques, le règlement n° 2001-04 du 29 octobre 2001 du Comité de la réglementation bancaire et financière (CRBF) relatif à la compensation des chèques énonce que « tout établissement assujetti tiré de chèques est tenu de participer, directement ou par l’intermédiaire d’un mandataire, aux opérations de compensation de chèques dans le cadre d’un système de règlement interbancaire au sens de l’article L. 330-1 du code monétaire et financier ».

36. Il existe en France trois systèmes interbancaires de paiement : deux systèmes réservés aux montants élevés, TBF et PNS, et un système spécifique aux paiements de détail, le Système Interbancaire de Télécompensation (SIT). En 2007, le SIT a échangé et compensé 12 439 milliards d'opérations interbancaires, dont 24 % de paiements par chèques, pour un montant de 5 206,95 milliards d'euros6.

37. Interrogé par les services d’instruction, l’administrateur du G-SIT, le groupement d’intérêt économique constitué par les banques pour exploiter le SIT, a estimé à 18 % du nombre total de chèques en France la part des chèques ne transitant pas par le SIT (soit 720 millions de chèques sur les 4,1 milliards de chèques émis en 2004), à savoir essentiellement les chèques intrabancaires (voir aussi site internet de la Banque de France).

e) La sous-traitance de la remise de chèques

38. La sous-traitance des procédures de présentation au paiement des chèques, en principe exclue par le principe du monopole bancaire, est cependant autorisée par une convention professionnelle signée le 9 juillet 2003 en application des dispositions de l’article 7 du règlement 2001-04 du CRBF. La convention prévoit que les sous-traitants doivent être agréés par les banques et agissent sous la responsabilité pleine et entière de ces établissements.

39. Dans son avis n° 03-A-15 en date du 25 juillet 2003 relatif à l’acquisition de la société Atos Investissement par la société Experian Holding France, le Conseil de la concurrence estimait que la sous-traitance représentait en 2002 un volume de 3,3 milliards de chèques sur les 4,5 milliards de chèques émis. Sur ce marché, d’une valeur évaluée à 221 millions d’euros, les cinq premières entreprises détenaient 85 % des parts de marché, les deux premières ayant décidé de fusionner (ce qui a donné lieu à l’avis du Conseil). Le marché de la sous-traitance en matière de chèques est soumis à deux influences contraires que sont le recul de l’utilisation du chèque et l’externalisation croissante par les banques des activités de traitement des chèques.