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1. Le trouble déficitaire de l’attention

1.3. Les étiologies possibles de l’hyperactivité

1.3.5. Les causes environnementales

Le développement du TDAH est lié à la combinaison de plusieurs facteurs dans laquelle l'environnement socio familial ainsi que le mode de vie prennent une place à part entière.

1.3.5.1.

Les facteurs parentaux

Sans surprise, un enfant évoluant dans un contexte familial perturbé présente plus de risques de développer des troubles de comportement et de conduite. Plusieurs études ont mis en évidence un lien entre des critères appelés "indicateurs d'adversité" tels que des discordes maritales importantes, une classe sociale basse, une famille nombreuse, une criminalité paternelle, des troubles mentaux maternels, des problèmes d'addiction des parents, un placement en foyer, et le risque de développer un TDAH et des comorbidités psychiatriques, cognitives ou encore psychosociales [14].

Gardons cependant en tête que dans certaines situations, le contexte familial n'est pas une cause du TDAH mais en devient une conséquence tant la gestion d'un enfant hyperactif au quotidien peut être difficile pour la famille et son harmonie.

Notons enfin que, le TDAH semblant être soumis à une héritabilité non négligeable, ceci pourrait donc biaiser l'influence réelle du contexte socio familial sur l'apparition du TDAH.

1.3.5.2.

Le mode de vie – L'impact de l’alimentation

Le terme environnement est un terme général incluant le mode de vie et l'alimentation. Il est admis que la qualité de cette dernière a une influence marquée sur notre santé. Cette constatation a bien entendu conduit à suspecter son implication dans le développement du TDAH.

Une déficience en zinc serait notamment retrouvée chez certains enfants souffrant de TDAH et particulièrement pour la forme inattentionnelle. Une étude de l'université de Téhéran en Iran a en effet montré qu'une supplémentation en zinc lors d'un traitement par méthylphénidate améliorerait les résultats du traitement médicamenteux. Cependant, ce pays est suspecté d'avoir une déficience endémique en zinc. C'est pourquoi, de plus amples études sont à mener pour appuyer ces résultats [28].

Un autre point important de l'alimentation est la consommation d'acides gras oméga 3, issus notamment des poissons gras. Leur consommation est désormais bien connue pour réduire le risque de maladies cardio-vasculaires mais également pour favoriser la fluidité des membranes cellulaires [40]. Dans le cadre du TDAH, plusieurs études ont montré une amélioration du score du TDAH selon l'échelle de Conners (échelle d'évaluation comportementale) lors de supplémentations en acides gras oméga 3 (acide eicosapentaénoïque EPA et acide docohexaénoïque DHA) et en oméga 6 (acide linoléique) allant de 3 à 6 mois. Ainsi, des améliorations ont pu être observées sur les scores de lecture et de comportement [41].

Enfin, la fonction thyroïdienne pourrait jouer un rôle dans le TDAH. Une étude italienne a mis en relief une déficience en iode chez les mères d'enfants souffrant de TDAH. Il a été montré que les mères présentaient une hypothyroxinémie lors du premier trimestre de grossesse. Ces taux bas de thyroxine (hormone thyroïdienne T4) dans le sang sont dus à une déficience en iode et engendrent

une réduction importante du taux de tri-iodothyronine (hormone thyroïdienne T3) cellulaire disponible pour le développement cérébral du foetus [42].

De plus, le TDAH a été mis en corrélation avec le syndrome de résistance aux hormones thyroïdiennes (SRHT). Cette maladie est causée par une mutation du récepteur thyroïdien β et induit une diminution de réponse des tissus aux hormones thyroïdiennes. Une étude de l'université de Chicago a montré que la prévalence d'anomalies thyroïdiennes est plus élevée chez la population TDAH que dans la population normale (5,4% contre <1%). De même, la prévalence de TDAH dans la population souffrant de SRHT a été retrouvée à 46% [43]. Certains spécialistes recommandent donc aujourd'hui d'analyser la fonction thyroïdienne des enfants présentant un TDAH

1.3.5.3.

La toxicologie

L'exposition de l'enfant pendant la grossesse, mais aussi pendant la petite enfance, à certaines substances contribuerait au développement d'un TDAH.

1.3.5.3.1. Le plomb

L'une des substances les plus étudiées pour son implication dans le TDAH est le plomb. Différentes études ont mis en évidence une corrélation entre le taux sanguin de plomb et le développement de TDAH, même dans les pays avec des taux faibles d'exposition au plomb comme les USA ou l'Europe de l'ouest [28].Joel Nigg, chercheur en psychologie à l'université de l'Oregon, a ainsi montré un lien entre le plomb et le sous-type mixte du TDAH, aucun lien significatif n'étant retrouvé pour le sous-type inattentif. Nigg évoque le fait que le plomb perturberait le circuit dopaminergique neuronal en se liant à des récepteurs du striatum et du cortex frontal ainsi qu'en perturbant la formation des synapses. Diverses études prouvent qu'il n'existe plus de niveau "sécuritaire" pour l'exposition au plomb, des symptômes étant retrouvés avec des taux jugés comme faibles (< 10 µg/dl). Les auteurs estiment donc nécessaire de limiter au maximum l'exposition des jeunes enfants au plomb, substances pouvant être retrouvées dans les jouets, les cosmétiques, les produits de nettoyage, ou encore dans les vieilles maisons (peintures, canalisations)[44].

Cette sensibilité au plomb pourrait être due à une mutation génétique, c'est ce que révèle une étude menée également par le professeur Nigg en janvier 2016. Cette étude montre une

corrélation entre une mutation génétique appelée HFE C282Y, retrouvée chez 10% des enfants américains, et le développement d'un TDAH avec une faible exposition au plomb [45].

1.3.5.3.2. Le tabac et l'alcool

L'exposition du foetus au tabac et à l'alcool est également un facteur très étudié. Une publication de 2002 a par exemple montré que les personnes présentant un TDAH étaient respectivement 2,5 fois et 2,1 fois plus susceptibles d'avoir été exposées au tabac et à l'alcool pendant la vie foetale que les sujets témoins [46].

Des études chez l'animal ont montré que la nicotine pendant la grossesse était significativement liée à une hyperkinésie et un faible poids de naissance [15].

Le rôle de l'exposition in utero à l'alcool dans le développement du TDAH est moins significatif que celui du tabac. Cependant, il existe une corrélation génétique significative entre le risque de dépendance à l'alcool et la vulnérabilité de développer un TDAH [28]. De même, des signes d'inattention et d'agitation motrice peuvent être reliés aux TCAF (Troubles Causés par l'Alcoolisation Foetale)[47].

1.3.5.3.3. Le bisphénol A

Le bisphénol A est fréquemment pointé du doigt en terme de toxicologie. Ce composé chimique de synthèse est un perturbateur endocrinien retrouvé dans différents objets de la vie quotidienne tels que les contenants alimentaires ou encore certaines encres [48].

De nombreuses études menées sur les animaux ont prouvé que l'exposition précoce au bisphénol A conduisait à de l'anxiété et de l'hyperactivité [49]. Ceci serait dû à l'interaction du bisphénol A avec le système dopaminergique. Il a été démontré que le bisphénol diminue de moitié l'expression du gène codant pour les récepteurs à la dopamine D4, notamment à cause d'une réduction de l'activité tyrosine-hydroxylase du cerveau [50].

1.3.5.3.4. Les colorants alimentaires

Les colorants et les additifs alimentaires sont également mis en cause dans l'apparition du TDAH. Un rapport de 2007 de la célèbre revue scientifique The Lancet, a prouvé l'évidence d'un effet délétère de ceux-ci sur le comportement des enfants. Le rapport conclut que les colorants alimentaires étant superficiels, ils peuvent donc être supprimés. En revanche, l'implication du benzoate de sodium dans le TDAH semble être plus problématique, ce composant étant important à la conservation des aliments [51].

Récemment, une polémique autour du Doliprane® suspension buvable à base d'azorubine (colorant E122, rouge-arôme fraise) a émergé. Celui-ci serait accusé d'être cancérigène et de favoriser l'hyperactivité des enfants. Un rapport de Sanofi, laboratoire commercialisant le Doliprane®, a immédiatement été publié pour démentir cette accusation en prônant le fait que ce colorant est autorisé au sein de l'Union Européenne dans les industries pharmaceutiques et agro-alimentaires, et que, selon le CIRC (Centre International de Recherche sur le Cancer), l'azorubine serait inclassable quant à sa cancérogénicité. Sanofi conclut également par le fait qu'une dose maximale journalière de Doliprane® contient 1/100e de la dose journalière alimentaire acceptable pour l'E122 [52].

1.3.5.3.5. Le paracétamol

Tout récemment, en juillet 2016, une étude espagnole a pointé du doigt l'implication de l'utilisation du paracétamol pendant la grossesse dans le possible développement de TDAH chez les enfants. Il semblerait que les enfants exposés in utero, et particulièrement les garçons, développeraient davantage de troubles autistiques et de signes d'hyperactivité. Les chercheurs estiment que le paracétamol pourrait agir comme un perturbateur endocrinien affectant les fonctions testiculaires et la production d'androgènes et ainsi perturberait le développement foetal du cerveau des jeunes garçons [53].

Ce lien avait déjà était mis en cause par diverses études et relayé par les médias en 2014. Un article paru dans le "Bulletin des médecins suisses" en octobre 2015 appelait cependant à nuancer ces résultats et rappelait que le paracétamol reste l'antalgique de première intention lors de la grossesse [54]. De plus amples études concernant cette iatrogénie doivent donc être menées.

Figure 1 : Tableau des étiologies génétiques et acquises du TDAH [28]