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2. Le front et les spécificités de la Première Guerre mondiale

2.1. Les soldats du conflit

2.1.4. Le cauchemar des tranchées

2.1.4.1. Structure générale des tranchées [5] [53]

Allemands et Français s'enterrent dans un réseau de tranchées étiré sur plus de 700 km du nord de la France jusqu'à la Suisse. Symbole d'un immobilisme stratégique et tactique de quatre années plus connu sous le nom de « guerre de position », les tranchées constituent le cadre des combats de millions d'hommes durant la Grande Guerre.

Les tranchées constituent un ensemble de lignes creusées dans la terre et reliées entre elles par un système de travées. Elles sont profondes (2 mètres environ). Elles sont creusées à même la terre mais peuvent être consolidées avec des planches de bois et de sacs de sable ou de terre. Elles constituent la meilleure zone de défense pour les soldats, à l'abri des tirs ennemis. Elles sont aussi de bonnes zones offensives dans la mesure où les soldats pouvaient à tout moment mitrailler l'ennemi.

L'organisation d'un secteur du front présente une succession de lignes fortifiées (les tranchées) parallèles les unes aux autres et reliées entre elles par des boyaux de communication perpendiculaires.

La première position est composée de la tranchée de tir ou de première ligne, derrière laquelle se trouvent des tranchées de soutien et de réserve.

Les tranchées de tir sont au contact d'un no man's land face à l'ennemi dont la taille pouvait varier de 20 m à 1 km. Généralement parsemé de pièges et de trous d'obus, jonché de cadavres, il était parcouru par différents dispositifs comme des barbelés empêchant des déplacements de troupes. Il était organisé de telle manière à gêner et même empêcher l'avancée de l'ennemi.

Le tracé de la tranchée de tir est rarement rectiligne, mais plutôt en zigzag et interrompu de pare-éclats ou de chicanes afin d'éviter les tirs d'enfilade et de freiner les infiltrations ennemies. Dans les parois de la tranchée, les hommes ont creusé des abris qu'ils surnomment « cagnas », « gourbis » ou « guitounes ». Profonde de deux mètres environ, la tranchée de tir dispose de banquettes surélevées pour les observateurs ou pour les tireurs abrités derrière un parapet renforcé de sacs de terre.

A 500 mètres en retrait de la première ligne, les tranchées de réserve ou deuxième ligne servent de soutien ou de repli lors des coups durs ou de réservoirs des troupes de renforts. On y trouve également des abris plus profonds et solides pour les soldats , des postes de secours et de commandement.

Entre les deux lignes, les boyaux de communication, permettant les déplacements, étaient volontairement plus étroits et plus sinueux pour faciliter la défense.

On rencontrait parfois une troisième ligne. Puis, les boyaux partaient jusqu'à la position protégée (batteries d'artillerie et services de logistiques militaires).

Figure 6 : Reconstitution d'une tranchée de la Première Guerre mondiale (AFP - P. Deré/D. Mayer, lm/pld) [21]

Figure 7 : Carte postale montrant des soldats français dans une tranchée pendant la Première Guerre mondiale (Historial de Péronne/AFP) [39]

2.1.4.2. Conditions de vie dans les tranchées [127] [128]

Les soldats sont constamment exposés à l'artillerie et aux attaques ennemies. Parfois, les obus ennemis, dans un bruit assourdissant, ensevelissent vivants les hommes des tranchées sous des tonnes de gravats. Les paysages tout autour des tranchées sont dévastés par les ruines et les débris d'obus. La progression sur le no man's land est très difficile voir impossible sous les attaques ennemies. En plus des combats, les soldats doivent assurer diverses tâches relatives à l'espionnage de l'ennemi et à la surveillance de nuit (corvées nocturnes).

Après deux semaines sur le front, les soldats sont autorisés à souffler en étant mutés en deuxième ligne ou bien dans des camps d’entraînement près du front. Ils ont le droit également à 12 jours de permission dans l'année.

Les conditions sont apocalyptiques. Les soldats vivent constamment dans la peur et dans un niveau de stress extrême. Ils sont à bout nerveusement, fatigués et épuisés.

Ils restent des mois entiers sans pouvoir se laver. L'eau est rarement potable et l'alimentation par ration est souvent de très mauvaise qualité. Ils vivent au contact des cadavres, des rats, mouches, moustiques, poux, teignes et autres vermines, sans oublier l'humidité et le terrible froid d'hiver.

Le terrain est propice au développement de maladies parasitaires comme la gale, les mycoses, et surtout de maladies infectieuses telles que la tuberculose, le tétanos et le typhus. Le froid et l'humidité seront à l'origine de nombreuses maladies pulmonaires et de gelures. Nous relèverons également de nombreuses intoxications alimentaires entraînant des troubles digestifs.

Malgré tout, le développement des épidémies sera quasi inexistant grâce au travail des équipes sanitaires .

Figure 8 : Carte postale montrant des soldats français dans une tranchée à Tracy-le-Val pendant la Première Guerre mondiale (Historial de Péronne/AFP - Str) [39]

Figure 9 : Photographie, 1914-1918. © J.-L. Charmet ; Scène de tranchée [11]

2.1.4.3. Les mutineries [53]

Le terme de « mutinerie » désigne différentes formes de désobéissance collective et de contestation de la guerre en 1914-1918. Ces événements qui surviennent dans presque toutes les nations belligérantes, à des degrés divers et à des moments différents, constituent un enjeu considérable.

En 1917, les conditions toujours plus difficiles, la peur et la fatigue toujours croissantes, le moral de plus en plus bas, mènent à des mutineries.

Les nombreuses révoltes des soldats et les mutineries seront punies par les états-majors (condamnations à mort de 500 soldats). Les condamnés sont souvent tirés au sort au sein d'un régiment qui n'a pas montré assez de volonté au combat ou qui a refusé d'obéir aux ordres de la hiérarchie.

C'est sans doute l'esprit de cohésion, d'équipe, et de camaraderie qui a permis aux Poilus de tenir le coup dans l'enfer des tranchées.

Figure 11 : Les fusillés de la Grande Guerre (selon une étude du Service historique de l'armée de terre) (Shat) [58]