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Cas particulier de la peroxydase de raifort

Dans le document Faculté de Pharmacie (Page 81-87)

2. Approche bioélectrochimique

2.5 Amplification enzymatique

2.5.2 Cas particulier de la peroxydase de raifort

2.5.2 Cas particulier de la peroxydase de raifort

La peroxydase de raifort (HRP), comme son nom l’indique est issue du raifort (Armoracia rusticana P.Gaertn., B.Mey. & Scherb) et plus précisément de la racine. Le raifort est une plante vivace de la famille des Brassicaceae, sous-famille des Brassicoideae, aux longues racines charnues, feuilles rugueuses, panicules de fleurs blanches à quatre pétales (Figure 23). Le nom raifort provient du vieux français "raiz" (racine) et "fors" (âcre et piquant). En effet, la racine râpée, utilisée comme condiment, a un gout piquant proche de celui de la moutarde56. La peroxydase de raifort mise en évidence au 19ème siècle est à l’heure actuelle l’une des enzymes la plus utilisée, en raison de son grand turn-over et de la facilité avec laquelle on la combine à des molécules porteuses et à la grande variété de ses substrats. Elle fait partie de la famille des peroxydases végétales et est une oxydoréductase (donneur d’hydrogène, peroxyde oxydoréductase, EC 1.11.1.7) qui catalyse l’oxydation d’une large variété de composés (AH2) en présence de peroxyde d’hydrogène :

Comme toutes les peroxydases, l’HRP transfère de l’hydrogène d’un donneur d’hydrogène vers H2O2. Sa masse moléculaire relative est d’environ 44 kDa. Il existe une trentaine de formes différentes dont l’isoenzyme C de l’HRP qui est la plus abondante57

.

La structure covalente de l’enzyme native a été identifiée par Welinder en 197658. L’HRP est constituée d’un noyau hémique et d’une chaine polypeptidique de 308 résidus d’acides aminés incluant quatre ponts disulfures entre les résidus de cystéine 11–91, 44–49, 97–301 et 177–209, deux ions Ca2+ et 8 chaines latérales carbohydratées attachées au niveau des résidus d’asparginine 13, 57, 158, 186, 198, 214, 255 et 268. Les substrats aromatiques de l’enzyme se lient au niveau de la face exposée de l’hème entre les carbones 18 et 20 et non pas à l’atome de fer et y sont oxydés (Figure 24)58

Figure 25 :Représentation en trois dimensions de la structure isoenzyme C de la peroxydase de raifort. Le groupe hème (rouge) est situé entre les domaines distaux et proximaux qui contiennent chacun un atome de calcium (sphères bleues).

30 Le Tableau 1 reprend le rôle de quelques acides aminés essentiels à l’activité de la peroxydase de raifort.

Rôle

Arg 38 Joue un rôle essentiel dans la formation et la stabilisation du composé I et au niveau de la liaison et de la stabilisation des ligands et des substrats aromatiques

Phe 41 Empêche l’accès du substrat au groupe oxoferryl du composé I

His 42 Accepte les protons de H2O2 et joue également un rôle au niveau de la liaison et de la stabilisation des ligands et des substrats aromatiques

Asn 70 Maintient la basicité de His 42 grâce à la formation d’un pont hydrogène entre l’oxygène de la fonction amide de l’asparginine (Asn 70) et l’azote de la fonction imidazole de l’histidine (His 42)

Pro 139-Ala 140-Pro 141 Motif présent dans toutes les peroxydases végétales

His 170 Liée de manière covalente à l’hème (lien de coordination avec l’atome de fer)

Tableau 1 : Rôle de quelques résidus acides aminés au niveau de l’HRP59

Les ions calcium sont indispensables pour maintenir la structure tertiaire de l’enzyme, la perte d’un des deux ions entraine une diminution de 40 % de l’activité enzymatique. Le calcium distal forme un lien hydrogène avec la Glu 64 qui est liée également par un pont hydrogène à Ans 70, ce qui le connecte à la poche hémique59.

En 1990, Smith et ses collaborateurs, ont réussi à produire de l’HRP C non glycosylée recombinante. En effet, un gène synthétique codant pour HRP C a été exprimé dans Escherichia coli. Ils ont également démontré que la glycosylation n’est pas essentielle à l’activité de l’enzyme60

. Enfin, la structure tertiaire de HRP C a été résolue avec une précision de 2,15 Angstroms par cristallographie en 1997 par Gajhede et son équipe61.

Figure 26 : Schéma du cycle catalytique de HRP : oxydation en une étape de HRP natif par H2O2 en composé I et réduction en deux phases du composé I en présence d’un donneur d’hydrogène (phénol) adapté de 43,59

Figure 27 : A : Processus de l’amplification enzymatique impliquant l’hydroquinone (H2Q), l’HRP et H2O2. B : voltampérométrie cyclique de l’hydroquinone (2 x 10-4 M) en bleu en l’absence de H2O2 et d’HRP : séquence de potentiel

0  800  -200  0 mV. En rose : en présence de H2O2 (20 mM) et d’HRP (5 x 10-7 M) : séquence de potentiel 0  400

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2.5.2.1 Electrocatalyse enzymatique

La peroxydase (Fe III) se combine au peroxyde d’hydrogène qui oxyde le groupe hémique en composé I (Fe IV sous forme d’oxoferryl, radical cation porphyrique [FeIV=O].+). En l’absence de donneur d’électrons convenable ou en présence de trop faibles concentrations en peroxyde, le composé I se décompose lentement. En présence d’un donneur d’électrons, le composé I est réduit au stade initial par transfert de deux électrons en étapes successives: la première conduit au composé II (Fe IV sous forme d’oxoferryl (FeIV=O)) et le radical libre résultant de l’oxydation du donneur, la seconde régénère l’enzyme native (FeIII

) et à nouveau un radical libre. Donc, l’état original est restauré en deux étapes de réduction du composé I par un donneur d’hydrogène (Figure 26). Une couleur rouge ou verte (composés III et IV, respectivement) apparaît s’il y a un excès de substrat. Les composés III et IV sont des formes inactives. Un excès de peroxyde d’hydrogène inactive également l’enzyme. Il est donc important d’utiliser des concentrations optimales de substrat et de peroxyde d’hydrogène57. La stratégie de détection ampérométrique de HRP se base sur le fait que HRP va oxyder son substrat et que ce substrat oxydé peut être réduit par l’électrode de travail, reprendre sa forme initiale et à nouveau être oxydé par HRP et ainsi de suite. Ce mode de détection implique que le substrat n’est jamais épuisé et que la surface de l’électrode ne l’est jamais en produit oxydé.

Une voltampérométrie cyclique d’une solution d’hydroquinone (HQ) et d’HRP, à une faible vitesse de balayage (10 mV/s), pour laisser le temps à la réaction enzymatique de se faire, réalisée en présence et en absence de H2O2, permet de visualiser cette amplification.

Le voltampérogramme cyclique de l’HQ seule possède une allure classique avec un pic d’oxydation suivi d’une diminution du courant due à l’épuisement de la surface de l’électrode en HQ suivi d’un pic de réduction des molécules oxydées se trouvant au voisinage de l’électrode de travail. Par contre l’allure du voltampérogramme de l’HQ en présence de HRP activée par son cofacteur est totalement différente. En effet, aucun courant d’oxydation n’est enregistré ce qui peut facilement s’expliquer par le fait que l’hydroquinone est oxydée par l’enzyme plutôt que par l’électrode. Le pic de réduction prend l’allure d’une vague caractéristique d’un processus catalytique c’est-à-dire un processus où la surface de l’électrode n’a pas l’occasion d’être épuisée en espèces quinones grâce à sa production continue par HRP62. Au fur et à mesure que l’hydroquinone est oxydée en quinone par HRP, la quinone est réduite en hydroquinone par l’électrode et peut de nouveau être oxydée par HRP et ainsi de suite (Figure 27).

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