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Des cartes bicolores aux mobiles

4.3 La bijection de Bouttier, Di Francesco, et Guitter

4.3.1 Des cartes bicolores aux mobiles

n + τ

n

face blanche face noire

τ∈ [0, ∞)

n τ

n− 1

n

face blanche face noire

n+

Fig. 4.2 – La construction de Bouttier–Di Francesco–Guitter.

Comme dans le cas des quadrangulations [38], il est plus simple, du point de vue de l’´enum´eration, de pr´esenter la bijection pour des cartes qui sont `a la fois enracin´ees et point´ees. Soit donc m une carte bicolore enracin´ee de genre g, portant un sommet point´e (ce sommet point´e ´etant choisi ind´ependamment de la racine, et pouvant ´eventuellement co¨ıncider avec elle). Puisque les noms de Bouttier, Di Francesco, et Guitter seront sou- vent cit´es dans ce chapitre, nous prendrons la libert´e de les abr´eger par leurs initiales « BDFG ».

3Dans le cas planaire, une carte est bicolore si et seulement si tous ses sommets ont degr´e pair, ce

qui ´equivaut `a dire que son graphe sous-jacent est Eul´erien. C’est pourquoi l’article [27] utilise le terme carte Eul´erienne. Dans notre cas, les deux notions diff`erent, et ce sont bien les cartes bicolores que nous consid´erons.

4.3 - La bijection de Bouttier, Di Francesco, et Guitter 75

La construction BDFG :

(1). orientation et ´etiquetage des sommets. Tout d’abord, on oriente chaque arˆete de m pour qu’elle ait une face noire `a sa droite. Ensuite, on ´etiquette chaque sommet de m par le nombre minimal d’arˆetes orient´ees qu’il est n´ecessaire d’emprunter pour l’atteindre depuis le sommet point´e. Remarquons que le long d’une arˆete orient´ee, l’´etiquette peut soit augmenter de 1, soit rester constante, soit d´ecroˆıtre d’une valeur arbitraire.

(2). construction locale. `A l’int´erieur de chaque face de m, on ajoute un nouveau sommet de la couleur de la face. Ensuite, pour chaque face blanche F de m, et pour chaque arˆete e incidente `a F , on effectue la construction suivante (figure 4.2) : – si l’´etiquette augmente de 1 le long de e, on ajoute une nouvelle arˆete entre

le nouveau sommet blanc au centre de F , et l’extr´emit´e de e de plus grande ´etiquette.

– si l’´etiquette d´ecroˆıt de τ ≥ 0 le long de e, on ajoute une nouvelle arˆete entre les deux sommets pr´esents dans chacune des faces incidentes `a e. De plus, on at- tache `a chaque cˆot´e de cette arˆete un drapeau, qui porte l’´etiquette de l’extr´emit´e correspondante de e, comme sur la figure 4.2. Nous dirons que e est une arˆete drap´ee.

(3). effacement de la carte originale. On appelle ¯m la carte obtenue en effa¸cant les arˆetes originales de la carte m, et le sommet point´e v0 (c’est-`a-dire que l’on ne garde

que les nouvelles arˆetes, les nouveaux sommets, et les sommets de la carte originale qui ne sont pas le sommet point´e).

(4). enracinement et translation des ´etiquettes. L’arˆete racine de m est d´efinie comme l’arˆete de m associ´ee `a l’arˆete racine de m `a l’´etape (2) ; en d´ecidant que le sommet racine est un sommet blanc non ´etiquet´e, cela suffit `a enraciner m. Si l’arˆete racine est incidente `a un sommet ´etiquet´e, on d´efinit l’´etiquette racine comme l’´etiquette de ce sommet ; sinon, l’´etiquette racine est l’´etiquette du drapeau situ´e `a gauche de l’arˆete racine. On soustrait alors l’´etiquette racine `a toutes les ´etiquettes de la carte m, de sorte que la nouvelle ´etiquette racine soit 0. La carte obtenue de cette fa¸con est not´ee Mob(m), et appel´ee le mobile associ´e `a m. Un exemple planaire est repr´esent´e sur la figure 4.3.

Tout l’int´erˆet de la construction repose dans le lemme suivant :

Lemme 39. Mob(m) est une carte bien d´efinie, de genre g, et n’a qu’une seule face. D´emonstration. Notre d´emonstration est conceptuellement diff´erente de celle de [27], qui utilise la planarit´e. Par contre, elle suit d’assez pr`es les arguments de [37], pour le cas quadrangulaire.

Appelons m′ la carte form´ee de toutes les arˆetes originales de m, et des nouveaux

sommets et arˆetes ajout´es pendant la construction ; pour ´eviter les croisements d’arˆetes, chaque fois qu’une arˆete drap´ee de Mob(m) croise une arˆete de m, on coupe ces arˆetes en deux, et on consid`ere la paire de drapeaux pr´esente au milieu de ces arˆetes comme un sommet t´etravalent de m′, reli´e aux quatre demi-arˆetes cr´e´ees par le d´ecoupage.

Il est clair d’apr`es la construction que chaque sommet non ´etiquet´e de m′, noir ou

0 1 1 2 2 2 4 3 1 1 2 2 2 4 3 1 1 2 0 2 0 2 0 2 0 2 4 1 2 4 1 1 2 0 2 0 1 2 4 1 1 2 0 2 0 02 0 2 4 2 3 2 3 2 0 2 2 1 1 1 2 4 1 1 2 0 2 0 1 0 2 1 −1 0−2 0 00 −2 0 2 2 3 0 1 0 −2 2 0 1 −1 (1)-(2) (3) (4) −2

Fig. 4.3 – Une 3 constellation point´ee sur la sph`ere (repr´esent´ee comme une surface plong´ee dansR3), et son mobile associ´e.

genre g bien d´efinie. Dans l’esprit du chapitre pr´ec´edent, on peut voir Mob(m) comme une sous-carte de m′, induite par l’ensemble de toutes les arˆetes ajout´ees durant la construc-

tion. Soit alors t la sous-carte duale de Mob(m), c’est-`a-dire la sous-carte de la carte duale de m′ form´ee par les arˆetes duales des arˆetes originales4 de m. Nous allons maintenant

examiner les cycles de t.

Pour cela, orientons les arˆetes de t comme suit : si une arˆete apparaˆıt entre un sommet et un drapeau, on l’oriente de sorte qu’elle ait le drapeau `a sa gauche. Si elle apparaˆıt entre deux sommets, on l’oriente de sorte qu’elle ait le sommet de plus grande ´etiquette `a sa gauche. Alors, par les r`egles de construction (voir figure 4.4), on voit que chaque face de m′ porte une unique arˆete sortante de t. Par cons´equent, si t contenait un cycle

d’arˆetes, ce serait n´ecessairement un cycle orient´e. Or, en examinant les diff´erents cas de la figure 4.4, on voit que le long d’un cycle orient´e de t, l’´etiquette pr´esente `a la droite du cycle ne peut pas croˆıtre. Par cons´equent, cette ´etiquette est n´ecessairement constante le long du cycle et, en examinant `a nouveau les diff´erents cas de la figure 4.4, cela n’est possible que si le cycle encercle un unique sommet. Un tel sommet ne peut ˆetre incident, dans m, `a aucun sommet d’´etiquette inf´erieure (sinon, une arˆete de Mob(m) romprait le cycle), ce qui implique par d´efinition de l’´etiquetage par la distance que le sommet encercl´e est le sommet point´e v0.

4.3 - La bijection de Bouttier, Di Francesco, et Guitter 77 n n+ 1 ´ etiquettes ≥ n n+ 1 n n+ 1 n n+ 2 n+ 1 n

Fig. 4.4 – Une face noire typique, et les quatre types de faces blanches de m′. Lorsqu’un

cycle d’arˆetes de t traverse une face, l’´etiquette pr´esente `a sa droite ne peut pas croˆıtre. De plus, elle reste constante si et seulement si le cycle tourne autour d’un seul sommet.

On a donc d´emontr´e que t n’a pas d’autre cycle que celui encerclant le sommet v0. Si

l’on note ˜m′ (resp. ˜t) la carte obtenue `a partir de m′ (resp. t) en retirant l’int´erieur de

ce cycle, et en le contractant5, on a donc montr´e que ˜t est un arbre couvrant du dual de

˜

m′. Or, sa carte couvrante duale n’est autre que Mob(m). Ainsi, par la proposition 19 et

l’´equation (3.3) du chapitre pr´ec´edent, Mob(m) est une carte `a une face bien d´efinie de genre g.