Un autre type de carte est mis en service. Il s’agit d’une carte de suivi de la stabilité de
certains paramètres au cours d’une journée d’utilisation du montage expérimental. Cette
carte ne possède pas de limites de surveillance ni de contrôle et deux mesures par jour sont
effectuées (avant et après utilisation). C’est une carte de suivi technique non conventionnelle
mais qui pourra devenir par la suite une carte de contrôle à part entière.
Les paramètres d’intérêt sont la température ambiante de la salle d’expérience et la
pression du spectromètre VUV (Figure 39). En effet, une variation de température importante
dans le laboratoire a une influence directe sur les performances de la source laser, celle-ci
devenant instable (déréglage de la tension du cristal 4ω) avec une perte d’énergie plus ou
moins significative. Les pompes à vide sont une source de chaleur conséquente lorsqu’elles
sont toutes en fonctionnement, c’est pourquoi la salle d’expérience est climatisée. La carte
de suivi permet de régler la consigne de température du climatiseur de façon à avoir une
température ambiante stable comprise entre 21°C et 24°C.
Le suivi de la pression du spectromètre VUV permet de savoir à quel moment la
pression est stable après une remise à l’air de l’équipement mais aussi de détecter
d’éventuelles fuites surtout au niveau de la fenêtre en MgF2 située entre le spectromètre
VUV et l’enceinte d’analyse (points situés autour de la date du 06/04/2014).
Cette carte pourra aussi servir à discriminer ces deux paramètres en cas de problème
détecté avec les deux cartes de contrôle : "signal LIBS-VUV" et "énergie du laser".
0
2
4
6
8
10
12
14
16
18
4,3E+6 1,4E+7 2,4E+7 3,4E+7 4,4E+7 5,4E+7 6,4E+7 7,4E+7
Ene
rgie
pa
r
im
pu
ls
io
n
(m
J
)
Nombre de tirs
Moyenne
LS
LC
102
Figure 39 :Carte de suivi de la pression du spectromètre VUV (points bleus) et de la température ambiante de la
salle (points rouges).
Conclusion
Le montage expérimental mis en place pendant ces travaux de thèse est relativement
simple mais imposant. Par rapport à un montage LIBS classique, ce montage nécessite de
travailler avec une enceinte et un spectromètre optique adaptés au vide pour permettre une
utilisation dans le domaine Vacuum UltraViolet. Le point critique de cet ensemble
expérimental est le réglage du miroir de collecte du signal lumineux issu du plasma car il
influe directement sur la zone du plasma observée par le système de détection et sur la
quantité de photons envoyés vers le spectromètre VUV, et donc sur l’intensité du signal. De
plus ce réglage ne semble pas très robuste. Le pilotage des différents équipements est en
partie assuré par un programme LabView en plus des logiciels des fournisseurs.
Une analyse de risques et un dossier de sécurité ont été réalisés au cours de la
conception et du montage de l’expérience LIBS-VUV.
Une démarche qualité est également intégrée à l’utilisation du montage LIBS-VUV
notamment au travers de cartes de contrôle et de suivi. Ces cartes permettent de s’assurer
du fonctionnement nominal du montage expérimental et de détecter les anomalies
éventuelles. Ces défaillances peuvent ensuite être éliminées par des actions préventives et
correctives.
Après la conception vient normalement l’optimisation et la détermination des
performances du montage expérimental pour l’analyse de matériaux nucléaires solides. Mais
avant d’analyser ce type de matériau, il est d’abord préférable de travailler sur des matériaux
de substitution. Le chapitre suivant est donc dédié à la détermination de matériaux simulant
les matériaux nucléaires pour la LIBS-VUV.
0
5
10
15
20
25
30
1,0E-05
1,0E-04
1,0E-03
1,0E-02
1,0E-01
1,0E+00
15/02/2014 06/04/2014 26/05/2014 15/07/2014 03/09/2014 23/10/2014
Te
m
pé
ratu
re
de
la
s
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ll
e
(
°C)
Pres
s
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n
s
pe
c
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è
tre
(m
ba
r)
103
Chapitre IV
Détermination de matériaux simulant des
matériaux nucléaires pour la LIBS-VUV
Introduction
La démarche mise en place pour l’analyse quantitative de matériaux nucléaires débute
avec la détermination des matériaux simulant les matrices nucléaires d’intérêt, l’uranium et le
plutonium. En effet, il est très contraignant de faire le travail de développement directement
sur de tels matériaux en raison du nécessaire confinement des échantillons. La solution
consiste donc à employer des matériaux de substitution.
Habituellement, c’est le cérium, qui fait partie de la série des lanthanides, qui est choisi
pour simuler chimiquement le plutonium et l’uranium. Ce choix est dû à ses états d’oxydation
et donc à son comportement chimique en présence des autres éléments.
Cependant, la LIBS repose sur l’interaction laser-matière plutôt que sur le comportement
chimique du matériau. Il est donc plus judicieux de trouver des matériaux de substitution
ayant un comportement similaire aux matériaux nucléaires du point de vue de l’ablation
laser.
C’est l’objectif de ce chapitre, qui décrit dans un premier temps la caractérisation
complète de l’ablation laser d’un échantillon métallique de cuivre pur, celle-ci comprenant
une étude de la morphologie des cratères d’ablation et une étude de l’influence du nombre
de tirs laser et de l’énergie par impulsion sur les caractéristiques des cratères. Les résultats
obtenus lors de ces études permettent ainsi de définir l’efficacité d’ablation du métal. Celle-ci
est alors mesurée pour différents métaux, puis un modèle est proposé pour la détermination
de matériaux de substitution.
Influence de la température du plasma et de la masse ablatée sur
le signal analytique
Selon l’équation de Boltzmann (Eq. 3) présentée au Chapitre II, pour une raie d’émission
donnée, le signal LIBS est proportionnel à la population d’atomes dans le niveau d’énergie
supérieur. Ce signal analytique dépend de deux paramètres fondamentaux : le nombre
104
d’atomes libres dans le plasma, supposé être proportionnel au nombre d’atomes ablatés, et
la température du plasma [159, 99].
Le premier paramètre est lié à l’échantillonnage du matériau par ablation laser tandis
que le second est lié à l’excitation de la matière ablatée. La particularité de la technique LIBS
est que ces deux processus sont simultanés et antagonistes. En effet, une certaine quantité
d’énergie est utilisée pour l’ablation laser et la vaporisation de la matière ablatée. L’énergie
restante est quant à elle utilisée pour chauffer le plasma par Bremsstrahlung inverse. Le
transfert d’énergie par collisions électrons-atomes entraîne l’excitation et l’ionisation des
atomes du plasma. Par conséquent, la proportion d’énergie utilisée pour l’ablation n’est pas
disponible pour le chauffage du plasma et vice versa. De plus, la répartition de l’énergie
entre ces deux phénomènes dépend d’une manière complexe des caractéristiques du
faisceau laser à la surface du matériau (longueur d’onde, éclairement, ouverture numérique
ou distribution spatiale de l’intensité) [160, 161] et des propriétés physico-chimiques et
thermo-physiques du matériau [162, 163, 164, 165], incluant aussi les propriétés de surface
(rugosité, porosité, gradient de concentration).
La répartition de l’énergie a été étudiée de façon théorique par différents auteurs. Ainsi,
dans le cas de l’ablation nanoseconde du cuivre, Bleiner et al. ont trouvé une absorption de
l’énergie laser par le plasma de 48 %, pour un éclairement de 1 GW.cm-2 à 266 nm [166].
Clair et al. ont quant à eux trouvé une absorption d’environ 75 % à ≈ 2 GW.cm-2 et à 532 nm
[167]. Finalement, dans une étude récente, Autrique et al. ont estimé à 70 % l’absorption par
le plasma, pour un laser à 532 nm et un éclairement de 1,7 GW.cm-2. Les résultats
expérimentaux obtenus dans les mêmes conditions confirment la validité de leur modèle
[168].
Ces différents résultats, issus de la modélisation, révèlent que l’absorption par le plasma
est déjà élevée pour un éclairement significativement plus faible que ceux généralement
utilisés en LIBS. Dès 1 GW.cm-2, il y a un très fort couplage entre l’ablation laser et le
chauffage du plasma. Pour un éclairement supérieur, l’absorption des photons laser peut
même atteindre 100 % : on parle alors d’écrantage de la surface par le plasma. Dans ces
conditions, le faisceau laser n’atteint plus l’échantillon. Il ne contribue plus à l’ablation mais
uniquement au chauffage du plasma.
De plus, pour une application donnée, l’optimisation des conditions expérimentales est
difficile car nous ne connaissons pas l’optimum entre ces deux phénomènes, ablation et
chauffage, d’un point de vue analytique. Toutefois, le signal LIBS est d’autant plus intense
que la masse ablatée et la température du plasma sont élevées. Cependant, l’épaisseur
optique du plasma dépend de sa densité et de sa distribution en température ce qui peut
induire un effet d’auto-absorption limitant la linéarité des courbes d’étalonnage (paragraphe
II.2.d.iv).
Plusieurs éléments nous amènent à étudier en priorité l’ablation laser plutôt que la
caractérisation du plasma. En effet, Chaléard et al. et Gornushkin et al. ont montré que les
effets de matrice sont très bien corrigés par normalisation du signal LIBS par la masse
ablatée [169, 170]. De la même manière, plusieurs études ont également révélé une
diminution significative des effets de matrice par normalisation du signal par l’intensité d’une
raie d’un élément majeur de la matrice, ce qui revient à une correction par la masse ablatée
[171, 172]. Finalement, d’autres études ont aussi montré que l’évolution du signal LIBS est
quasiment linéaire en fonction de l’énergie par impulsion (ou la fluence), au moins dans une
105
certaine gamme [162, 173, 174, 149]. Comme l’intensité de la raie d’émission dépend
linéairement de la masse ablatée et non linéairement de la température du plasma (équation
de Boltzmann), nous pouvons supposer que, dans une certaine gamme d’énergie, l’influence
des variations de la température est négligeable comparée à celle des variations de la
masse ablatée. Par conséquent, ces études suggèrent que le processus d’ablation laser joue
un rôle prédominant par rapport aux processus de chauffage du plasma dans les variations
du signal LIBS.
De plus, d’un point de vue pratique, l’utilisateur LIBS peut seulement imposer les
paramètres laser et de focalisation du faisceau pour contrôler la mesure analytique. En ce
qui concerne les paramètres de détection (porte et délai d’acquisition), ils sont plutôt dictés
par l’état initial du plasma et par sa dynamique, et ils sont couramment optimisés selon un
critère analytique, par exemple, le rapport signal sur fond. Ainsi, Cheung et al. ont montré au
cours de leur étude sur différents métaux que maximiser ce rapport signal sur fond revenait à
se ramener à une température du plasma d’environ 0,5 eV (~ 6000 K) [175]. D’autres
auteurs ont également obtenu une température du même ordre de grandeur après
optimisation des paramètres de détection [176, 177, 178]. Si nous utilisons toujours les
mêmes conditions optimales de détection, nous pouvons donc supposer que la température
du plasma varie peu d’un matériau à l’autre.
Il est donc justifié de chercher à contrôler l’ablation laser en tant que telle et de
considérer que l’influence de la température du plasma sur le signal est plutôt du deuxième
ordre.
Caractérisation expérimentale de l’ablation laser du cuivre
La caractérisation complète de l’ablation laser est réalisée sur le montage expérimental
LIBS-VUV sans utiliser le système de détection. Un échantillon de cuivre pur est choisi pour
cette étude car la littérature sur ce matériau est abondante et il sera donc possible de
comparer nos résultats avec ceux issus d’autres études. Les résultats présentés dans cette
section ont également fait l’objet d’une publication [146].
Dans le document
Développement de la LIBS pour l'analyse en ligne de produits uranifères ou plutonifères solides
(Page 102-106)