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PREMIÈRE PARTIE : LES ROCHES MEULIÈRES

GRÈS ET CONGLOMÉRATS DU PALÉOCÈNE ET DE L’ÉOCÈNE INFÉRIEUR

6.9 Les grès quartzitiques dits « landéniens »

6.10.3 Carrières explorées

Côté anglais, deux carrières romaines sont identifiées dans le Hertfordshire Puddingstone au nord de Londres, à Colliers End et Great Gaddesden (Hertfordshire). Une autre est connue à Worms Heath (Surrey) dans les poudingues ferrugineux. Une succession de fosses y livre de nombreux déchets d’extraction vraisemblablement liés à la taille de meules329.

Côté français, les trois gisements cités plus haut ont pu être explorés pour vérifier les informations publiées depuis le XIXe siècle. Tous n’ont pas pu faire l’objet du même traitement selon les moyens disponibles au moment de l’opération. Ainsi, l’ouest de la forêt de La Londe-Rouvray a été par-couru à deux reprises en 2015 à l’occasion de prospections thématiques portant sur les occupations artisanales antiques dans cette partie de la forêt330. L’affleurement, non représenté sur la carte géo-logique, a été retrouvé fortuitement et relevé au GPS. Les sites de Vaucottes et de Saint-Saëns ont été parcourus en août 2013 pour un simple repérage et une identification des matériaux exploités, mais n’ont pas fait l’objet de relevé.

325 Kuntzet al. 1974, p. 11-12 ; Giotet al. 1974, p. 14-15

326 sanGnier 1968, p. 3-4 327 Bassetet al. (rapport en cours)

328 Feuilles de Fécamp, Bolbec et Doudeville (Seine-Maritime) 329 lovell, tuBB 2006 ; Greenet al. 2016

330 Bassetet al. (rapport en cours)

Figure 70 Conglomérat de rognons de silex observé dans d’anciennes carrières entre Veulettes-sur-Mer et Malleville-les-Grès (Seine-Maritime).

6.10.3.1 Saint-Léonard : le site de Vaucottes

Dans la Commune de Saint-Léonard (Seine-Maritime), dans le « Bois des Hogues », au lieu-dit « les Ferrières », une série d’excavations profondes de 5 à 10 m entourées de levées de débris d’extraction marquent le terrain. Selon M. Rémy-Watté, qui a réalisé un inventaire des meules et meulières connues en Seine-Maritime dans les années 1980331, ces excavations auraient constitué un « centre

d’extraction et de fabrication [de meules] quasi industriel ». Ce site, localisé sur terrain privé clos,

est difficilement accessible mais ses reliefs apparaissent sur le Modèle Numérique de Terrain RGE ALTI® fourni par l’IGN grâce à une acquisition réalisée au LiDAR aéroporté qui traverse le couvert forestier pour déceler les indices archéologiques (fig. 71).

Une autre exploitation est mentionnée dans la commune voisine, à Vattetot-sur-Mer, entre l’église de Vattetot et « le Fond de Vaucottes »332, mais n’a pas été vérifiée.

331 réMy-Watté 1983, p. 19 et 42. 332 roGeret 1997, p. 552. Les Ferrières Les Hogues Le Gros Chêne Vattetot-sur-Mer Le fond de Vaucottes Yport Criquebeuf-en-Caux Froberville Manche Bois de l a Vierge Bois de Cherfils Bois de s Ho g ues

Formations résiduelles à silex thanétiennes (d'après BRGM) Meulière identifiée 0 500 1000 m N Les Hogues 100 90 80 30 80 50 90 B o is d es H o gu es Bois de Cherfils Les Ferrières

Formations résiduelles à silex thanétiennes Carrières anciennes repérées sur MNT réalisé au LiDAR aéroporté (d’après IGN)

Formations à silex

Campanien/Santonien : craies blanches à silex Limons des plateaux

Limons des fonds de vallées sèches Formations géologiques (d’après BRGM) :

0 250 500 m

N

6.10.3.2 Saint-Saëns et la forêt d’Eawy À Saint-Saëns, C. Pinsard mentionne au XIXe siècle, dans le « Bois de l’Abbaye », « des fosses

et buttes très élevées où le poudingue abonde »,

et y remarque des ébauches de meules333. Ces fosses et meules ébauchées en poudingue étaient déjà mentionnées en 1862 par la

Com-mission départementale des Antiquités de la Seine Inférieure334, et en 1895 par la Société des

Antiquaires de Normandie, dont les membres

indiquent avoir prospecté les lieux-dits du « Lihut » (nord de Saint-Saëns), du « Bois de l’Abbaye  » (sud-est), «  ainsi que les plateaux

du Quesnay [sud-ouest de Saint-Saëns] et de Montcombre »335. Les mêmes fosses ont été ob-servées en 2013 mais aucune ébauche n’a pu être clairement identifiée parmi les blocs qui présentaient un module favorable, allant dans le sens d’une mise en forme des meules dans des ateliers situés à l’écart du site d’extraction du matériau.

La dernière localité mentionnée correspond probablement au Maucomble actuel, sur le plateau surplombant Saint-Saëns à l’est, mais aucun affleurement de poudingue n’est visible à cet endroit sur la carte géologique. Il faut probablement conclure à la présence à cet en-droit de l’un de ces ateliers de taille périphé-riques aux carrières et où les meules sont

ache-vées avant leur commercialisation. Ce site serait alors à rapprocher de la ferme du « Pucheuil »336, et de celle de la « Plaine de la Bucaille » à Cottévrard337, sur le plateau au sud-ouest de Saint-Saëns, qui ont toutes deux livré des ébauches de meules dans des structures datées de La Tène finale et du Haut-Empire. La situation de ces trois établissements ruraux périphériques aux carrières, en dehors des affleurements, n’est pas sans rappeler celle de la ferme augustéenne du « Clos des Forges » à Avrilly (Eure), qui a dévoilé une activité spécialisée dans la production de meules manuelles à partir d’une brèche extraite à proximité338.

Tout un pan de l’économie locale semble donc surgir de cet ensemble de constats. Comme cela a pu être mis en évidence à Saint-Quentin-la-Poterie (Gard), dans le sud de la Gaule339, ou encore

333 Pinsard, Ms 1341E, p. 222 ; réMy-Watté 1983, p. 42. 334 cochet 1867, p. 202.

335 coutil 1896, p. 8.

336 Fouille A29 : rouGier 1994 ; diagnostic ZAC du Pucheuil : Breton 2016 ; fouille ZAC du Pucheuil : D. Breton, rapport en cours. 337 Blancquaert 1995 338 Guillieret al. 2005 339 lonGePierre 2012 170 90 160 180 200 190 180

Formations argilo-sableuses à silex

Carrières abandonnées figurées sur la carte topographique (d’après IGN)

Zones de carrières anciennes repérées en prospection Ébauches de meules signalées à l’écart des affleurements

Limons indifférenciés et limons à silex

Yprésien de faciès « sparnacien » : Poudingues fossilifères Coniacien (Sénonien) : craie blanche à silex

Turonien : craie gris blanchâtre à rares silex Colluvions de vallon sec

Alluvions holocènes

Formations géologiques (d’après BRGM) :

Bois de l’Abbaye Bois de l’Hospice Saint-Saëns La Varenne Plai ne d e M auco mbl e Plaine du Pucheuil Plaine de la Bucaille

ForêtDomaniale d’Eawy

Le Lihut

la Houssaie

0 500 1000 m

N

Figure 72 Carrières d’extraction de poudingue de Saint-Saëns et localisation des ébauches de meules sur les établisse-ments périphériques.

aux alentours de Mayen en Germanie340, plusieurs établissements ruraux graviteraient autour des carrières et en transformeraient la production avant de la distribuer. À Saint-Quentin-la-Poterie, cette organisation semble aller de pair avec un système de concessions dans les carrières, système que l’on pourrait imaginer correspondre aux différents sites d’extraction répartis autour de Saint-Saëns. 6.10.3.3 Extrémité ouest de la forêt de La Londe-Rouvray

Constatant la présence de meules en poudingue sur l’oppidum d’Orival (Seine-Maritime) d’une part, et la mention d’affleurements de poudingue dans la forêt de La Londe-Rouvray d’autre part341, une visite des parcelles 378, 384 et 385 de la forêt domaniale a été engagée en mars et juin 2015 au lieu-dit « le Mesnil ».

L’objectif était double :

- Tenter de comprendre la position géologique des poudingues tertiaires entre les niveaux secondaires et quaternaires indiqués par la carte géologique, avec le concours des géologues J. Ta-bouelle (Fabrique des Savoirs d’Elbeuf) et J.-C. Staigre (Société d’Études des Sciences Naturelles d’Elbeuf et Centre Normand d’Étude du Karst).

- Appréhender d’un point de vue archéologique (C. Basset, Université Paris X ; P. Picavet, Université Lille 3) l’organisation de l’exploitation des poudingues et si possible faire le lien avec la production de meules rotatives à La Tène finale et/ou à l’époque romaine.

Il a pour cela été décidé de relever les excavations au GPS, de manière à dresser un plan du site et le localiser sur la carte géologique. L’arpentage a permis par la même occasion de mener des ob-servations dans le fond des excavations, dans leurs parois et à leurs abords. Enfin, une observation des coupes stratigraphiques offertes par les chemins d’exploitation forestière (coupe 1), les chablis (coupe 2) et les ornières de tracteur (coupe 3) nous a aidés à comprendre la disposition des couches géologiques et archéologiques.

6.10.3.3.1 Environnement géologique

La carte géologique n’indique à cet endroit aucune formation tertiaire entre les craies du Santonien/ Campanien (Crétacé supérieur : niveaux C5-6 de la carte géologique342) et les formations super-ficielles quaternaires à silex anguleux (biefs à silex, niveaux Rs de la carte géologique). De rares niveaux de « sables, grès et poudingues éocènes » (Tertiaire : niveaux e de la carte géologique) sont signalés sur certains versants et buttes à différents endroits de la forêt, mais aucune extraction de poudingue n’y est visible.

Par ailleurs, les argiles pliocènes de « la Terre à Pots » (niveaux P1-2 de la carte géologique) ont été anciennement exploitées à l’ouest de la forêt, dans le versant sud du vallon du chemin forestier du

Pré Bourdonne. Les étangs de « la Terre à Pots » en sont les principaux vestiges paysagers (fig. 73). 6.10.3.3.2 La carrière de poudingue

• Les séries d’excavations

Une coupe forestière récente sur la parcelle 385 a attiré l’attention des agents de l’ONF sur de pro-fondes excavations qui entaillent le versant est d’un petit vallon sec descendant en pente douce vers

340 Wenzel 2012 ;Wenzel, zerl 2014

341 réMy-Watté 1983, p. 40 ; roGeret 1997, p. 397. 342 sanGnier 1968

le plus grand vallon où serpente le chemin forestier du Pré Bourdonne (fig. 73).

Les excavations, de forme conique et d’un diamètre approximatif de 5 à 10 m, sont profondes d’autant. Elles sont entourées de talus de déchets d’extraction de 1 à 2 m de haut colonisés par la végétation (fig. 75).

Au nord, le chemin forestier est-ouest marquant la séparation entre les parcelles 377 et 385 subis-sait auparavant un détournement imposé par la présence de l’un de ces cratères (visible sur la carte IGN). Ce détournement est maintenant évité par le percement du talus qui entoure le cratère, et qui nous offre en même temps une longue coupe stratigraphique dans ce talus (fig. 74). Celui-ci est constitué à cet endroit (dans les 2 m supérieurs) d’un mélange de « sables de Lozère » grossiers et rouges, de galets de silex libres centimétriques à pluri-centimétriques, et de fragments et d’éclats de poudingue. Il semble être le fruit du dégagement des niveaux géologiques supérieurs pour la mise à nu de la formation de poudingue. Les fragments et éclats de débitage qu’il renferme attestent la recherche et la mise en œuvre du matériau.

Vingt-et-un cratères répartis en deux ensembles perpendiculaires ont été relevés et s’échelonnent entre les courbes de niveaux 120 et 90 m. Chaque fosse livre des blocs et fragments de poudingue, ainsi que les mêmes galets de silex mélangés à du sable rouge et non liés dans une matrice.

385 386 377 378 379 384 387 383 382 380 125 125 120 115 110 105 100 90 100 110 120 SEINE MARITIME EURE la Pierre Tournante le Mesnil la Terre à Pots PréBourdon ne Chemin forestier du Pont du Ruissel Maison forestière de Bosgouet Bois de Malmain 4 3 2 1 5 21 6 7 8 10 11 12 13 16 14 15 18 17 19 20 9 Ferme du Mesnil Formations à silex Pliocène : argiles

Extension supposée du poudingue thanétien (non représenté sur la carte géologique) Campanien/Santonien : craies blanches à silex

Limons des plateaux

Limons des fonds de vallées sèches

Formations géologiques (d’après BRGM) : Fosses d’extraction entourées de talus et contenant des fragments de poudingue. Relevé effectué au GPS Bloc ou ébauche de meule en Poudingue Parcelles forestières

0 250 500 m

N

Figure 73 Plan des excavations relevées au GPS et replacées sur la carte géologique et topographique de l’ouest de la forêt de La Londe-Rouvray, d’après BRGM et IGN.

La première série de dix-sept cratères (1 à 16 et 21) s’étend depuis le cœur de la parcelle 377 jusqu’au sud de la parcelle 385 en suivant une orientation nord-nord-ouest / sud-sud-est. Les cratères se succèdent depuis le haut du versant du plateau du Mesnil jusqu’à son flanc, en des-cendant à l’oblique le versant est du petit val-lon sec qui rejoint en pente douce le plus grand vallon du Pré Bourdonne. Au sein de cette suc-cession, les cratères semblent rassemblés en groupes de trois à neufs, ce qui pourrait révéler l’irrégularité de la formation géologique recher-chée. Un ensemble de petites excavations, non relevées, et qui entament à l’est la formation de

surface (biefs à silex) le long de cette première série, pourraient correspondre à de petits sondages destinés à vérifier la présence de poudingue dans le sous-sol. Leur petit format (2 à 3 m de diamètre, 1 m de profondeur maxi.) ainsi que l’absence de débris de poudingue à cet endroit confirmeraient cette interruption de la formation.

La dernière fosse de cette série (n°15) entame le bord du plateau au niveau de la cote 105 m avant qu’il ne plonge dans le vallon du Pré Bourdonne au sud. Elle n’a livré que des rognons de silex angu-leux et ne semble entamer que la formation à silex quaternaire qui constitue la couche de recouvre-ment du plateau crétacé. Les quelques petites fosses observées en contrebas, à flanc de versant (non relevées), semblent également avoir servi à l’extraction de silex car elles n’en livrent que des rognons anguleux.

La seconde série d’excavations, dont quatre cratères seulement contenaient du poudingue et ont été relevés (17 à 20), est perpendiculaire à la précédente, et suit un axe est-ouest en fond de vallon, le long du chemin forestier du Pré Bourdonne. Le sommet des talus atteint la cote des 100 m ; le fond des cratères passe en dessous des 90 m. Six autres excavations et tranchées se poursuivent vers l’ouest sur terrain privé (Bois de Malmain) et n’ont pas été relevées lors de ces campagnes ; elles ne livrent que des traces d’extraction de silex.

La présence de ces reliefs en bas de versant s’explique difficilement du fait de leur position en contrebas des premiers gisements, le long de la courbe de niveau des 90 m. Malgré leur apparente profondeur (altitude 84 m pour l’excav. 18), il n’est pas certain que les cinq accidents les plus orien-taux, qui fournissent encore des blocs et éclats de poudingue, soient réellement excavés. Ils peuvent n’être formés que par l’accumulation de talus de débris d’extraction ménageant des espaces creux Figure 74 Talus de déchets d’extraction coupé par un chemin d’exploitation forestière à l’ouest de la forêt de La Londe - Rouvray. Photo J.-C. Staigre ©.

au centre. Aucune coupe n’est toutefois accessible dans ce secteur pour nous aider à comprendre le phénomène. Des blocs et éclats de poudingue sont encore observés à cet endroit, montrant des traces anthropiques d’équarrissage.

Cette seconde série d’accidents de terrain ne fait que confirmer et trahir notre mécompréhension de la succession géologique environnant le vallon du Pré Bourdonne au nord de la Terre à Pots.

• Examen d’un échantillon de blocs et éclats de poudingue

À l’intérieur et autour des excavations du haut de versant, des chablis offrent un aperçu de la composition du sol et des talus. De nombreux débris d’extraction et/ou de taille de dimensions diverses sont observés, mêlés au sédiment et à de nombreux galets roulés non liés dans une matrice. Leur taille est variable, de quelques centimètres à plusieurs décimètres (fig. 76 à 78).

Exemples de dimensions des éclats :

Longueur (cm) largeur (cm) épaisseur (cm)

5,5 3,5 2

2,5 2 0,7

La massivité de la roche et sa composition en grande partie constituée de galets de silex, semblent provoquer au débitage les mêmes stigmates que sur rognons de silex. La morphologie des éclats Figure 76 (haut gauche) Blocs, éclats et galets mêlés dans un chablis.

Figure 77 (bas gauche) Éclats de Poudingue décimétriques dans la coupe du chemin forestier.

Figure 78 (droite) Bloc pluri-décimétrique découvert en fond de cratère.

rappelle donc celle des éclats de taille du silex, présentant talon, bulbe, nervures de détachement d’éclats, et ondulations sur les galets.

Le fond des trous est jonché de fragments, éclats et blocs de poudingue qui paraissent parfois chauf-fés et en grande partie recouverts par la végétation.

Exemples de dimensions des blocs et gros éclats :

Longueur (cm) largeur (cm) épaisseur (cm)

31 29 8

46 33 13

6.10.3.3.3 La « Pierre tournante »

Un mégalithe dit la « Pierre Tournante », correspondant à un bloc massif de poudingue (fig. 68), repose à plat en haut de versant, de l’autre côté du vallon sec qui rejoint au sud le vallon principal du Pré Bourdonne, à l’extrémité est du Bois de Malmain (commune de Bosgouet, Eure). Géologi-quement, il pourrait se situer sur un niveau de poudingue comparable à celui qui a été décrit pré-cédemment sur le versant opposé. Aucun affleurement ni exploitation n’est toutefois visible de ce côté-ci. Le bloc, de forme grossièrement parallélépipédique, atteint 1,90 m sur son côté N-S, 1,83 sur le côté E-O, pour 0,46 m d’épaisseur visible.

Son contexte archéologique n’a pas fait l’objet de recherche récente, mais ce mégalithe présente l’intérêt de fournir un bloc de module important qui approche, plus que les résidus d’extraction, de la forme que peut prendre le poudingue à l’affleurement.

6.10.3.3.4 Résultats des prospections

Les observations réalisées sur les parcelles 377 et 385 de la forêt domaniale de La Londe-Rouvray ont permis d’avancer dans la compréhension du paysage, profondément bouleversé à cet endroit par l’exploitation du poudingue. Les traces d’extraction sont rassemblées en deux grands ensembles, l’un regroupant les cratères qui s’échelonnent en pente douce sur le flanc est d’un vallon sec rejoi-gnant au sud le vallon du Pré Bourdonne, l’autre constitué d’une succession d’accidents de terrain plus hétérogènes et perpendiculaire au premier ensemble, au fond du vallon du Pré Bourdonne. La première série rassemble les excavations au sens propre qui traversent la formation de surface à silex anguleux pour atteindre la formation de poudingue sous-jacente. Ces excavations sont en-tourées de talus de déchets d’extraction constitués de rognons de silex anguleux issus de la couche de surface, de blocs et éclats de poudingue, et de galets de silex roulés non liés par une matrice, le tout pêle-mêle dans une grande quantité de sables grossiers mélangés à une argile rouge. Ces talus semblent résulter d’une part du dégagement de la couche de surface à silex, d’autre part de l’extrac-tion du poudingue proprement dite.

Plusieurs blocs aux dimensions imposantes (40-50 cm) sont observés. L’un d’eux, relevé au sud de l’excavation 9, présente d’ailleurs certaines caractéristiques des ébauches de meules décrites sur l’atelier de taille de meules en brèche d’Avrilly (Eure), comme la délimitation d’un mamelon en partie supérieure. Toutefois, aucune trace d’outil n’est clairement identifiée ici et il est possible que cette forme soit fortuite. Comme à Vaucottes et à Saint-Saëns, aucune ébauche de meule n’est donc réellement attestée.

La seconde série d’accidents de terrain entame les limons quaternaires des fonds de vallées sèches qui recouvrent la craie blanche à silex du Secondaire. Ces anomalies sont alignées d’est en ouest en bas du versant nord du vallon du Pré Bourdonne. Elles rassemblent, à l’est une succession de talus qui semblent délimiter de nouveaux « cratères » (n° 17 et 18), mais il n’est pas certain que ces cra-tères soient excavés ; ils peuvent n’être formés que par l’amoncellement de débris et de sédiments en

talus circulaires. Le fond de ces « cratères » est jonché de fragments et d’éclats de poudingue. Plus à l’ouest, dans le Bois de Malmain, au moins deux de ces accidents recèlent encore des frag-ments de poudingue et ont été relevés (n° 19 et 20). On observe ensuite vers l’ouest une succes-sion de fosses et de tranchées ouvertes à l’extrémité sud, et qui livrent une quantité importante de rognons de silex anguleux. L’origine géologique de ces rognons de silex est difficile à comprendre, entre la craie à silex du secondaire et les biefs à silex anguleux quaternaires sus-jacents, mais ce type de tranchées est observé sous la même configuration dans le Bois de l’Abbaye à Saint-Saëns (Seine-Maritime). Là aussi sont associées une extraction de silex en tranchées et une exploitation du poudingue en fosses.