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2. SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE

2.3. LA QUALITE DE LA VIANDE

2.3.1. Caractéristiques du tissu musculaire

Les fibres musculaires sont constituées de protéines contractiles, d‟enzymes requises pour l‟utilisation ou le stockage de l‟énergie (glucides, lipides), ainsi que d‟enzymes protéolytiques, notamment celles responsables du catabolisme des protéines au cours de la maturation de la viande (Ouali et al., 2005).

L‟activité métabolique des fibres dépend de celle des enzymes caractéristiques des différentes voies empruntées par les nutriments du muscle comme le glucose, ou les acides gras. Ainsi, deux grandes voies métaboliques peuvent être distinguées: la voie glycolytique anaérobie qui conduit soit à la formation de lactate à partir du glycogène ou du glucose, soit au stockage du glucose sous forme de glycogène et la voie oxydative aérobie qui donne lieu soit à l‟oxydation du glucose ou des lipides dans les mitochondries, soit au stockage des triglycérides dans les fibres musculaires (en particulier dans les adipocytes intramusculaires). De ce fait, deux types principaux de fibres musculaires (Figure 3) ayant une importance sur la qualité de la viande ont été décrits (Picard et al., 2003):

- les fibres de type I sont très riches en myoglobine (d'où leur coloration rouge) et en enzymes oxydatives, avec une faible activité myofibrillaire ATPasique.

- les fibres de type II sont moins riches en myoglobine (donc blanches) et en enzymes oxydatives.

Bien que le nombre de fibres musculaires soit relativement fixé à la naissance, la proportion des différents types de fibres observées n‟est pas constante. Durant la première partie de la vie (de la naissance à la puberté), chez le bovin une réduction graduelle de la proportion des fibres II aboutit à une augmentation de l‟activité glycolytique. Ensuite, cette évolution se ralentit puis s‟inverse progressivement, l‟activité oxydative se développe alors que le nombre de fibres à contraction lente (type I) semble rester constant (Geay and Renand, 1994).

Le pourcentage et le typage de fibres présentes dans un muscle influencent sa tendreté (Listrat et al., 2001). Chez les mâles, les androgènes augmentent la taille de toutes les fibres musculaires et ralentissent à même âge la conversion des fibres II. La proportion de fibres rouges à métabolisme oxydatif est donc plus importante chez les mâles entiers (Oury et al., 2006). Les femelles auraient en outre moins de fibres de type I et un pourcentage plus élevé de fibres glycolytiques (Oury et al., 2006).

2.3.1.2. Les lipides musculaires

Alors que la teneur en protéines des viandes est relativement constante, celle en graisses peut varier considérablement. En effet, les lipides de la viande représentent une fraction beaucoup plus variable en quantité et en composition (Biesalski, 2005). Les lipides du muscle sont constitués en autre des phospholipides qui sont les molécules les plus réactives en raison de leur richesse en acides gras poly insaturés et de leur caractère amphiphile. Leur teneur varie de 0.5 à 1.0 % du poids frais des muscles (Renerre, 2002).

D‟une espèce à l‟autre, si la composition chimique des muscles est assez constante, la teneur en lipides, elle, est variable (Figure 4).

Type de fibres Nomenclature

Brooke et Kaiser (1970) I IIA IIB

Ashmore et Doerr (1971) R R W

Physiologie

Unité motrice Slow Fatigue Fast

Fatigue

Fast Fatigable

Contraction Lente Rapide Rapide

Résistance à la fatigue +++ ++ +

Morphologie

Surface plaque motrice + +++ +++

Réticulum sarcoplasmique + +++ +++

Tubules transverses + +++ +++

Couleur Rouge Rouge Blanche

Myoglobine +++ +++ + Densité capillaire +++ ++ + Nombre de mitochondries +++ +++ + Epaisseur de la strie Z +++ ++ + Richesse en collagène +++ ++ ++ Aire de section + +++ +++ Métabolisme énergétique Teneur en Glycogène + +++ +++ Teneur en Lipides +++ +++ + ATPase myofibrillaire + +++ +++ Hexokinase +++ ++ + Phosphorylase + ++ +++ Enzymes glycolytiques + ++ +++ Enzymes mitochondriales +++ ++ +

(1) Viande caprine, cuite, rôtie

(2) Viande de boeuf, coupes de détail, gras rogné à 1/8 po., toutes catégories, cuite (3) Viande de porc, frais, coupes de détail (fesse, longe, épaule et « sparerib ») cuite (4) Viande d‟agneau, coupes de détail, gras rogné à 1/8 po. catégorie de choix, cuite (5) Viande de poulet, grillée ou frite, viande et peau, cuite, rôtie

Figure 4 : Valeurs nutritives de quelques viandes sur 100g (USDA, Agricultural Research Service Nutrient Data Laboratory, 2000).

D‟une façon générale, chez le ruminant, la quantité et la nature des lipides déposés dans les muscles (Hocquette et al., 2000) dépendent en grande partie des apports alimentaires et de la digestion (Sauvant and Bas, 2001). En effet, après le sevrage, une forte proportion des acides gras insaturés de la ration alimentaire est hydrogénée dans le rumen (Sauvant and Bas, 2001). Les lipides des muscles sont constitués de 50 % d‟acides gras saturés, essentiellement localisés dans le tissu adipeux externe et de 50 % d‟acides gras insaturés, le dominant étant l‟acide oléique (Geay et al., 2002). Les différents acides gras de la viande ainsi que leurs facteurs de variation seront développés plus tard dans le paragraphe consacré à la qualité diététique de la viande de ruminant.

Concernant le cholestérol, c‟est un composant structurel important des membranes des cellules de l‟organisme. Les viandes en contiennent de 50 à 100 mg/100g

(http://www..esavital.fr). Tout comme la teneur en graisses, le taux de cholestérol de la viande

est souvent surestimé. Chez le caprin, la concentration totale en cholestérol varie d‟un muscle à l‟autre mais reste en deçà des 90 mg/100g (Pratiwi et al., 2006).

Espèces Poids (g) Eau (g) Calories (kcal) Prot. (g) Gras (mg) Ca (mg) Fe (mg) Gras saturés (g) Chèvre (1) 100 68.2 143 27.1 3.0 17.0 3.7 0.9 Bœuf (2) 100 52.8 291 26.4 19.7 9.0 2.7 7.8 Agneau (4) 100 55.8 271 25.5 18.0 16.0 1.9 7.5 Porc (3) 100 54.6 273 27.6 17.2 25.0 1.1 6.2 Poulet (5) 100 59.5 239 27.3 13.6 15.0 1.3 3.8

2.3.1.3. Le glycogène

L‟arrêt de la circulation sanguine qui accompagne l‟abattage prive les cellules et les tissus de nutriments et d‟oxygène. Le maintien de l‟homéostasie musculaire nécessite alors la synthèse de composés riches en énergie. Après l‟abattage des animaux, le muscle va d‟abord utiliser ses réserves énergétiques (ATP) puis ensuite, la principale source énergétique sera le glycogène (Hocquette et al., 2000). A ce stade, la synthèse de l‟ATP est assurée par la glycogénolyse (conversion du glycogène en acide lactique) et glycolyse anaérobie (conversion du glucose en glycogène). Ce processus demeure tant que les enzymes impliquées ne sont pas inhibées par le pH. En effet, l‟hydrolyse de l‟ATP s‟accompagne de la libération de protons qui contribuent à la diminution du pH (Hocquette et al., 2000). Ainsi, le pHu dépend de la teneur en glycogène du muscle (Fergusson et al., 2008a), qui elle-même dépend du statut nutritionnel de l‟animal avant son arrivée pour l‟abattoir, de l‟activité physique et des conditions de stress auxquelles l‟animal est soumis de la ferme jusqu‟à l‟abattoir (Kadim et al., 2006). L‟épuisement complet du glycogène de réserve du muscle et sa transformation en acide lactique a été observée jusqu‟à 15 jours de vieillissement de la viande de chevreau (Patil et al., 2003).

Chez le mouton, cette perte en glycogène est due aux exercices de pré abattage et à l‟alimentation pré abattage. Dans le cas d‟un déficit en glycogène dans le muscle, macroscopiquement, les viandes sont à pH élevé et elles sont de couleur rouge foncé, dures et sèches (DFD pour dark, firm and dry); elles ont un fort pouvoir de rétention d‟eau d‟où l‟aspect sec. Mais elles ont la possibilité d‟adsorber de l‟eau extérieure, d‟où la sensation de viande «collante».

La fréquence élevée des carcasses DFD a été observée chez les caprins, particulièrement chez la race Boer (Augustini et al., 1999).

2.3.1.4. Le tissu conjonctif : le collagène

Le tissu conjonctif est la 2ème composante du tissu musculaire. Il est constitué de deux protéines fibreuses: le collagène et l'élastine qui sont impliquées directement dans le phénomène de tendreté de la viande. En effet, elles se partagent des propriétés de résistance et/ou élasticité dans les structures où elles apparaissent (Fraysse and Darré, 1990).

Le collagène est le composé le plus important du tissu conjonctif et représente environ 80 % de son poids. Cette protéine fibreuse comprend une séquence d‟acides aminés composée d'une unité tri-peptidique qui se répète. Cette séquence est du type Gly-X-Y (X et Y, acides aminés

lambda). Dans la composition du collagène, trois acides aminés prennent une part assez importante: la glycine (35 %), la proline (7 à 9 %) et l'hydroxyproline (12 à 14 %). Ainsi, l'hydroxyproline, peu commune aux autres tissus, peut être considérée comme un marqueur spécifique du tissu conjonctif (Fraysse and Darré, 1990).

La molécule de base de collagène est formée de trois chaînes polypeptidiques reliées par des liaisons covalentes et hydrogènes, afin de former une triple hélice. Il y a enroulement de multiples brins hélicoïdaux pour former une «super hélice». C'est justement le nombre et la nature des liaisons entre les fibres et les fibrilles qui permettent de définir le degré de réticulation du collagène et donc de déterminer la dureté de la viande: en effet, plus le degré de réticulation sera important, plus les fibres et fibrilles seront solidement ancrées les unes aux autres, plus la viande sera dure (Abouelkaram et al., 2002). La solidité des liens entre les chaînes de collagène s‟accroît avec l‟âge des animaux contribuant à augmenter la résistance mécanique du collagène (Abouelkaram et al., 2002).

Le collagène représente de 2 à 15 % de la matière sèche selon le muscle. Le taux de collagène d‟une carcasse varie fortement d‟un muscle à l‟autre. En effet, il a été observé chez le caprin que les concentrations en collagène était plus élevées pour le muscle semitendinosus (ST) que pour le muscle semimembranosus (SM) et medialis du muscle droit (RM) (Maiorano et al., 2001).

En dépit de cette variation inter muscles, l‟état du collagène à l‟abattage fixe la « dureté de base » de la viande c'est-à-dire une dureté propre à l‟animal abattu; elle n‟évolue guère lors de l‟état rigor mortis, de la réfrigération et de la maturation (Soltner, 1987). En effet, la dureté de base de la viande dépend de la trame conjonctive alors que sa maturation dépend des caractéristiques des fibres musculaires (type de fibres, surface, protéases) et du pH (McCormick, 1994).

Seuls les traitements particuliers comme l‟attendrissage, le hachage ou la cuisson humide permettent de modifier la dureté de base. L‟eau chaude à 80°C hydrolyse le collagène en gélatine et les fibres d‟élastine résistent à la cuisson et à l‟attaque des diastases digestives. Un travail de modélisation a permis de conclure que la contraction thermique du collagène dans la viande à 60°C diminuait avec la longueur de sarcomère et induisait des variations du module d'élasticité du collagène après chauffage. Ce travail a également mis l'accent sur l'interdépendance entre les propriétés mécaniques finales du collagène et celles des fibres musculaires (Grajales Lagunes and Gros, 1999). Ainsi, le taux de collagène d‟un muscle définit sa destination culinaire, de sorte que le prix de la viande est étroitement corrélé à la teneur en collagène.

2.3.2. Relation entre les caractéristiques musculaires et la qualité de la