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C. Le glioblastome : le gliome le plus agressif et fréquent

1. Les caractéristiques du glioblastome

a) Les caractéristiques anatomiques et morphologiques des glioblastomes

Les GBM primaires n’ont pas de localisation anatomique précise (Reni et al., 2017). L'organisation des tumeurs de GBM en 3 zones, observées en imagerie IRM telles que décrite

dans la section I.B.1. (Figure 4), est liée à l'agressivité et l'invasivité de la tumeur :

 Une zone de nécrose centrale, dont la formation est induite majoritairement par l'hypoxie et l'appauvrissement nutritif de cette zone tumorale en raison d'une

croissance trop rapide de la tumeur.

 Un front prolifératif dans lequel l'angiogenèse est importante.

 Une zone d'œdème vasogénique dans laquelle des cellules tumorales invasives se trouvent.

b) Les caractéristiques moléculaires des glioblastomes

Comme décrit précédemment, les GBM sont caractérisés par une faible fréquence de

mutation des gènes IDH, une absence de codélétion des bras chromosomiques 1p/19q et de la

perte d’expression de la protéine ATRX. Selon cette classification, les GBM sont classés selon

3 sous-types :

 les GBM NOS pour "not otherwise specified" qui regroupent les GBM pour lesquels les données génotypiques n’ont pas pu être acquises. Ils sont très rares.  les GBM pour lesquels les gènes codant les protéines IDH sont mutés qui

 les GBM pour lesquels les gènes codant les protéines IDH sont non mutés qui représentent environ 90% des GBM.

Contrairement aux GBM secondaires, qui dérivent de gliomes de bas grade, les GBM

primaires, ou de novo, sont pour la majorité non mutés pour les gènes IDH. Ces derniers, plus fréquents, ont fait l’objet de ce projet de thèse.

Les altérations présentes le plus fréquemment dans les GBM sont pour certaines des

marqueurs diagnostiques, ou des altérations classiques des cancers. L’ensemble de ces

altérations touche différentes voies de signalisations importantes dans la différenciation, l’apoptose et la prolifération cellulaire.

i. Les altérations chromosomiques

D’un point de vue génétique, on observe souvent un gain du chromosome 7, et une monosomie du chromosome 10 (Figure 11) (Bigner et al., 1988; Crespo et al., 2011). Ces

altérations chromosomiques sont associées à l’amplification des gènes tels que EGFR ou à la

Figure 11 : Le profil chromosomique mesuré par CGH array d’un GBM.

Cette méthode permet de visualiser les amplifications et délétions (modification du nombre de copies des régions chromosomiques) sur l'ensemble du génome. L’amplification du chromosome 7 (encadré rouge) et la délétion d'un chromosome 10 (encadré vert) sont très fréquentes dans le GBM, et sont observables sur ce profil, contribuant à établir ce diagnostic.

ii. Les altérations des voies de signalisation des récepteurs à activité tyrosine kinase RTK/RAS/PI-3K

La voie des récepteurs à activité tyrosine kinase (RTK)/RAS/PI-3K est altérée dans 88%

des GBM (Figure 12a). En plus d’une amplification et surexpression du gène codant pour l’EGFR présente dans 45% des GBM, l’expression du variant EGFRvIII est détectée dans 40% des cas (Knobbe and Reifenberger, 2003; Reni et al., 2017; Wikstrand et al., 1997). Celui-ci est associé à la présence d’ADN double minutes qui sont de petits fragments d’ADN circulaires amplifiés en très grand nombre (Ludwig and Kornblum, 2017). Les amplifications des RTK

PDGFRA et de MET, et la mutation activatrice de ERBB2 sont aussi des altérations majeures

activant cette voie de signalisation (Bello et al., 1994; Fischer et al., 1995; Knobbe and

peuvent également être altérés. Parmi ces derniers, les protéines RAS et PI-3K peuvent

présenter des mutations activatrices dans les GBM (Knobbe and Reifenberger, 2003; Knobbe

et al., 2004). Ces deux effecteurs sont normalement inhibés respectivement par NF-1 et PTEN,

dont la délétion ou la mutation inactivatrice lèvent ce frein dans des GBM. La transduction du

signal par cette voie de signalisation induit l’expression de gènes impliqués dans la

prolifération, la survie cellulaire et la traduction permettant une production plus efficace de

matériel protéique impliqué dans la croissance tumorale.

iii. Les altérations de la voie de signalisation de p53

La voie de signalisation de p53 est aussi altérée dans 87% de GBM (Figure 12b). p53

est une protéine majeure impliquée dans la tumorigénèse. Dans des cellules saines, son activation en réponse à des anomalies dans l’ADN et du cycle cellulaire induit la senescence et/ou l’apoptose. La perte de fonction (i.e. mutation ou la délétion) du gène de p53 est présente dans 35% des GBM. Les amplifications de MDM2 et MDM4, protéines inhibitrices de p53, sont

impliquées dans 14% et 7% des GBM respectivement. La délétion ou la mutation de CDKN2A,

protéine inhibitrice de MDM2, est quant à elle très fréquente avec une prévalence de 49% dans

les GBM (Yin and Van Meir, 2009).

iv. Les altérations de la voie de signalisation RB

La voie de signalisation RB est elle aussi altérée dans 77% des GBM (Figure 12c). L’inhibition de la progression du cycle cellulaire en phase G1/S impliquant cette voie est levée. La protéine RB1, effectrice de cette voie, est délétée ou mutée dans 11% des cas (Bello et al.,

1994). Les protéines qui inhibent RB1 sont aussi altérées, avec majoritairement une

amplification de CDK4 (Ichimura et al., 1996). Le gène de la cycline D CCND2, impliquée

dérégulation de ces deux partenaires entraine la levée de ce point de contrôle du cycle cellulaire

(Büschges et al., 1999). Ces protéines inhibitrices sont elles aussi inhibées par CDKN2A,

CDKN2B et CDKN2C, dont la délétion est fréquente dans les GBM (Ichimura et al., 1996;

Ueki et al., 1996).

Figure 12 : Les altération majeures du GBM impliquées dans leur tumorigénèse.

Parmi ces altérations majeures dans le GBM, trois voies sont principalement altérées : la voie des récepteurs à tyrosine kinase/RAS/PI-3K, la voie de p53 et la voie RB. Mut : mutation du gène. Amp : amplification du gène. Del : déletion du gène. HZ : hétérozygote. adapté de (Van Meir et al., 2010).

v. Les processus d’immortalisation des cellules par élongation des télomères : implication de TERT

Des mutations du promoteur du gène TERT sont présentes dans 80% des GBM, permettant l’activation de l’expression cette télomérase. Ces mutations sont mutuellement exclusives avec les mutations du gène ATRX. Ce processus permettant d’étendre les télomères participe à l’immortalisation des cellules tumorales (Killela et al., 2013).

c) La sous classification des glioblastomes

Selon les altérations présentes dans une cellule tumorale, celle-ci va acquérir des

caractéristiques différentes qui la rapprocheront phénotypiquement et génotypiquement de

cellules normales du SNC (Tableau 3). Ainsi, 4 sous-types de GBM se distinguent :

 Le sous-type « classique » inclue les GBM les plus prolifératifs.  Le sous-type mésenchymateux.

 Le sous-type pro-neural. Ce sous-type est prépondérant chez les jeunes patients.

 Le type neural est moins bien défini. Le profil d’expression de ce sous-type est proche de celui du cerveau normal, avec une expression de marqueur

neuronaux suggérant un phénotype différencié des cellules tumorales. Ces

tumeurs ont la particularité de montrer une faible infiltration de cellules

normales.

L’hypothèse a été émise que ces différents sous-types reflètent le type cellulaire duquel ils sont issus : lignage des astrocytes, neurones, oligodendrocytes et microglie (Van Meir et al.,

Sous-type Altérations communes

Classique Amplification du chromosome 7, déletion d'un chromosome 10 et déletion focale du locus 9p21.3 fréquents : Mutation/amplification/surexpression de EGFR (7)

Délétion/mutation de PTEN (10) Délétion de CDKN2A (9p21.3)

Peu d'altérations de p53, NF1 et PDGFRA

Surexpression des marqueurs des cellules souches neurales et précurseurs neuraux Activation des voies NOTCH et Sonic Hedgehog

Mésenchymateux Profil d'expression associé au mésenchyme et à l'angiogénèse : Surexpression des gènes CHI3L1/YKL40, MET Expression de marqueurs astrocytaires : CD44, MERTK

Expression des gènes de la super-famille du TNF associés à la voie de signalisation de NFκB Fréquence élevée d'inactivation de NF1, p53 et PTEN

Neural Profil d'expression génique proche du cerveau sain, avec l'expression de marqueurs neuraux (phénotype différencié des cellules tumorales) : NEFL, GABRA1, SYT1 et SLC12A5

Sous-type Altérations communes

Proneural Forte expression des gènes de développement oligodendrocytaire : PDGFRA, OLIG2,TCF3, NKX2-2 Forte expression des gènes du développement proneural : SOX, DCX, DLL3, ASCL1, TCF4

Amplification fréquente de PDGFRA Mutation d'IDH à 30%

Mutation fréquente de p53 et PIK3CA et PIK3R1

Amplification du chromosome 7 et déletion d'un chromosome 10 fréquente Activation fréquente des voies de signalisation de PI-3K et HIF

GBM secondaire (dérivé de gliomes de bas grade)

Tableau 3 : Les sous-type moléculaires de GBM.

Selon leur profil d'altérations, les GBM vont acquérir des caractéristiques différentes pouvant rappeler le profil moléculaire de différents types cellulaires du SNC. D'après ces altérations, les GBM peuvent alors être classés en différents sous-types. Adapté d'une figure de (Van Meir et al., 2010).