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Matériel biologique : le Santal de Nouvelle-Calédonie

1.3. Caractéristiques biologiques et écologiques de Santalum austrocaledonicum

1.3.1. Caractéristiques botaniques

Espèce botanique : Santalum austrocaledonicum Nom commun : Santal

Famille : Santalaceae

Nom vernaculaire : Tepeka (Lifou), Ouaâta (Ouvéa), Tapakae ou Outchiken (Ile des Pins). C’est vraisemblablement Vieillard qui collecta, en 1855, le premier échantillon d’herbier de Santal en Nouvelle-Calédonie et le nomma Santalum austrocaledonicum.

Santalum austrocaledonicum (figure 1.6) est un petit arbre de taille moyenne comprise entre 2

et 10 m, dont le diamètre pris à 1,30 m au-dessus du sol peut atteindre 25 à 30 cm à maturité. Les feuilles (figure 1.7) sont opposées, décussées, à limbe ovale, vert brillant sur la face supérieure, glauque sur la face inférieure. Les variations de forme et de couleur semblent assez importantes selon le site, l’âge ou l’origine du sujet. Le feuillage est fin et assez touffu, vert clair et brillant.

Les rameaux sont brun-rouge, recouverts d’une légère fluescence blanche. La ramification sympodiale donne une structure très sinueuse caractéristique.

Les fleurs sont petites, blanches verdâtres, disposées en corymbe (figure 1.7). Les inflorescences sont terminales. La fleur est apétale avec quatre étamines opposées aux sépales (figure 1.8). L’ovaire est en position infère. Il y a vraisemblablement plusieurs périodes de floraison (étalées sur l’année). Le fruit est une drupe charnue verte, violette, puis noire à maturité, semblable à une petite cerise noire ovoïde (8 mm x 5 mm environ) terminée par une pointe contenue dans une cupule (figure 1.8 et 1.9).

Le semis et le jeune plant présentent un feuillage très différent de la plante adulte (forme de jeunesse très caractéristique), avec des feuilles longues et effilées (figure 1.10) alors que les feuilles d’arbres adultes sont plus courtes et plus larges (figure 1.7).

En fait, on remarque des variations assez sensibles sur des arbres adultes concernant le port de l’arbre, la forme et la taille des feuilles, la couleur et l’aspect de l’écorce et la couleur du bois.

Figure 1.7: feuilles et fleurs de Santalum austrocaledonicum, Maré

Figure 1.9 : fruits de Santalum austrocaledonicum, Maré

Des travaux ont été menés au CTFT (Centre Technique Forestier Tropical) associé au Muséum d’Histoire Naturelle pour distinguer des éventuelles espèces ou sous-espèces ou variétés. Une révision de la famille de Santalaceae a été entreprise par Hallé en 1988 dans le cadre de l’édition de la Flore de Nouvelle-Calédonie et Dépendances.

Trois variétés sont identifiées sur la base de critères morphologiques multiples (notamment la forme, la couleur, et la pilosité des feuilles adultes et juvéniles) que nous ne détaillerons pas ici. Les différentes variétés sont présentées en figure 1.11 :

- Santalum austrocaledonicum variété austrocaledonicum, la plus importante, s’étend

sur l’ensemble de la Nouvelle-Calédonie. Cette variété paraît s’accommoder de terrains divers, mais elle affectionne particulièrement les plateaux et terrasses calcaires à substrat madréporique ; elle est localisée de 5 à 150 m d’altitude.

- Santalum austrocaledonicum variété pilosulum, qui a été très récoltée aux environs de

Nouméa. Des récoltes anciennes tendent à trouver que celle-ci aurait pu s’étendre sur la chaîne centrale, les régions côtières du Sud Ouest et la plaine des Lacs (Sud de Grande Terre). Cette variété est très proche de la première sur le plan des fruits, du bois, et des caractères internes des fleurs.

- Santalum austrocaledonicum variété minutum, dérive de la précédente ; il paraît n’en

exister qu’un peuplement très localisé dans la presqu’île de Poum (Nord de Grande Terre). Dans notre étude, toutes les variétés ont été récoltées, mais minutum, récoltée dans la localité de Koumak, n’a pas été conservée pour l’analyse statistique du fait du nombre trop faible d’individus récoltés.

1.3.2. Hémiparasitisme

Bien que ce soit l’une des particularités les plus importantes du Santal, l’hémiparasitisme de ce genre a été peu étudié. Les recherches de Barber (1906, 1907) en Inde sur S. album ont permis cependant de dresser de premières conclusions :

• Une partie des racines du Santal est munie de suçoirs ou haustoria (figure 1.12) qui parasitent les racines des plantes voisines (appelées plantes-hôtes) afin d’y puiser tous les aliments qui leur manquent.

• Le parasitisme favorise significativement la croissance du Santal, mais toutes les plantes-hôtes ne conviennent pas et l’association Santal/plante-hôte est plus ou moins efficace selon les espèces de plantes-hôtes et les conditions du milieu

On a pu observer 250 plants associés à Santalum album dans son habitat naturel. Certaines associations se sont révélées très favorables à sa croissance.

Figure 1.8 : caractéristiques morphologiques des fleurs et fruits de Santalum austrocaledonicum Vieill. var. austrocaledonicum. Extrait de Hallé (1988.)

1 : bouton, diamètre 3 mm ; 2 : coupe transversale schématique du bouton ; 3 : fleur haute de 9 mm ; 4 : fleur, coupe longitudinale, style de 3.9mm ; 5, 6 : étamine recto et verso, large de 1 mm ; 7 :lobe distal face extérieure, haut de 1.3 mm ; 8 : style et stigmate, large de 0.2 mm ; 9, 10 : stigmates vus du dessus ; 11 : placenta triovulé long de 1.7 mm ; 12 : placenta biovulé, coupe transversale ; 13 : réceptacle de vieille fleur, diamètre de 2.3 mm ; 14 : réceptacle de fleur nouée ; 15 : fruit mûr, diamètre 14.5 mm et sa couronne ; 16, 17 : noyau, diamètre 8 mm ; 18 : embryon long de 4.2 mm

D'un point de vue pathologique, peu de membres du genre Santalum ont un impact négatif sur les plantes cultivées, en revanche, l’inverse est vrai, notamment pour S. album qui est très cultivé et pour qui par exemple Pyrularia pubera (Santalaceae) peut être une espèce pathogène (Nickrent et Musselman 2004).

Santalum austrocaledonicum n’avait quant à lui jamais fait l’objet d’études précises sur ce

point avant Quémin (1988). Ce dernier a tiré plusieurs conclusions de son étude par analyses racinaires dans un dispositif contrôlé :

• L’hémiparasitisme du Santal est identifié et repéré au niveau du suçoir de faible dimension (2 à 5 mm) et de couleur pouvant varier du brun au blanc.

• La prospection racinaire et parasitaire du Santal est étendue. Ex : sur un rayon de 3 m pour un arbre de 3.5 m de haut.

• L’émission de suçoirs semble se porter sur la plupart des espèces présentes dans le milieu y compris toutes les espèces herbacées.

• Le parasitisme a un effet significatif sur la croissance du Santal (une plante-hôte est même absolument indispensable à la croissance du jeune plant).

Comme on pourrait s’y attendre, le Santal semble privilégier les hôtes fixateurs d’azote (étude sur Santalum acuminatum de Pate, 2001).

L’hypothèse que le Santal puisse s’affranchir du parasitisme au terme d’un certain nombre d’années paraît aujourd’hui très peu probable.

Ce parasitisme engendre des désavantages dans les mises en place de plantations de Santal. En effet ces plantations requièrent de placer des plantes-hôtes significativement intéressantes pour la croissance du Santal (vigoureuses, suffisamment de racines), et de créer un dispositif de plantation régulièrement surveillé afin de maintenir l’équilibre Santal / plante-hôte de sorte à ce que l’un ne domine pas l’autre et ne l’épuise.

1.3.3. Croissance

Le rapport entre la taille d’un arbre et son âge reflète clairement la vigueur inhérente de l'arbre mais dépend aussi en grande partie des conditions environnementales sous lesquelles il se développe (Brack, 1997). Les facteurs environnementaux qui influencent la croissance incluent :

1. les facteurs climatiques, par exemple la température de l'air, l’humidité, l’énergie solaire, les précipitations, le vent ;

2. les facteurs de sol, notamment les propriétés physiques et chimiques, l’humidité et les micro-organismes du sol ;

Figure 1.11 : Appareil végétatif de Santalum austocaledonicum Vieill. Variété pilosulum Hallé : 1, rameaux feuillés ; variété austrocaledonicum : 2, 3 plantules, 4, rameaux feuillés ; variété minutum Hallé : 5, rameaux feuillés. (Hallé, 1988)

3. les facteurs topographiques, tels que la pente ou l’altitude ;

4. les facteurs de compétition : la présence d’autres espèces végétales, d’animaux herbivores, ou l’intervention de l’homme.

La croissance de Santalum austrocaledonicum n’avait jusqu’alors jamais été mesurée. Récemment, une campagne de mesures a donc été conduite sur des individus de différentes provenances, et en milieu contrôlé (l’essai Kaddour dont nous reparlerons au chapitre 3), permettant ainsi de s’affranchir des conditions environnementales différentes selon les sites. Les mesures ont été faites, par le personnel technique de l’Institut Agronomique Calédonien (IAC), à 18, 36, et 84 mois, qui correspondent à des périodes de maturation croissante des arbres. Les courbes de croissance en hauteur présentées en figure 1.13.a. montrent que les populations de Ouen Toro et de l’île des Pins ne suivent pas une sigmoïde comme attendu. Deux explications sont possibles et non exclusives : (i) le changement de méthode de mesure entre le 36ème et le 84ème mois a créé un biais dans les résultats, (ii) il y a eu un phénomène de « descente de cime », autrement dit les cimes des arbres se sont abaissées en raison d’un déséquilibre physiologique lié à la présence de parasites ou de mauvaises conditions environnementales dans l’essai. Devant ce résultat, seule la première partie de la courbe (entre 18 et 36 mois) est interprétable, et permet de déceler des différences de croissance entre provenances. On remarque en effet que les individus des Loyautés (Ouvéa, mais surtout Maré) ont une taille plus faible à 18 et 36 mois que la population de Grande Terre (Ouen Toro), et l’île des Pins. Les plantes du Vanuatu, qui avaient été incluses dans cette étude, montrent une courbe similaire à celle des Loyautés. Les mesures de circonférences au collet et à 1,30m ont été effectuées à 36 mois et 84 mois, sans changement de la méthode de mesure (figure 1.13.b). Elles montrent un résultat similaire à la hauteur, c’est-à-dire des troncs plus grands dans les Loyautés et au Vanuatu que sur Grande Terre et l’île des Pins. L’essai étant réalisé en milieu contrôlé, nous pouvons conclure que ces différences de croissance sont héritables.

1.3.4. Reproduction