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Capacit´es sensorielles

1.4 Fondements de l’interaction directe absolue

1.4.1 Capacit´es sensorielles

Pour comprendre en quoi l’interaction tactile rel`eve du sens du toucher, adop- tons une approche physiologique du toucher. La somesth´esie d´esigne la sensi- bilit´e du corps `a lui-mˆeme et `a l’environnement ext´erieur au travers du corps, cette capacit´e sensorielle repose sur l’ensemble des organes ayant une fonction de perception introspective : comme la peau, les tendons, les articulations, les os, les muscles. La somesth´esie regroupe le toucher, les sens proprioceptifs et les sens int´eroceptifs. Le toucher, qui fait partie des cinq sens ext´eroceptifs (vue, ou¨ıe, odorat, goˆut, toucher), fournit des informations sur l’environne- ment ext´erieur. Les sens proprioceptifs per¸coivent la position, les mouvements et l’´etat du corps. Les sens int´eroceptifs sont en relation avec le fonctionnement interne des organes et de l’organisme. Nous ne nous attarderons pas sur cette cat´egorie sensorielle car elle sort du cadre de l’interaction homme-machine et concerne davantage la m´edecine (r´eflexe de d´eglutition, sati´et´e, informations vasculaires).

Le sens du toucher

Le toucher est une sensibilit´e de surface, qui est per¸cue par la peau sur l’en- semble du corps. Plusieurs types de capteurs r´epartis dans le derme (couche inf´erieure) de la peau compose l’information. Les d´eplacements, mouvements, compressions, ´etirements et vibrations de la partie superficielle de la peau sont int´egr´es pour ressentir l’´etat des g´eom´etries, textures et rugosit´es [41].

Les interfaces tactiles sont donc d’un point de vue biologique extrˆemement pauvres en informations tactiles : la surface plate et inerte du p´eriph´erique ne retourne qu’une information haptique passive. L’espace d’entr´ee pr´esente un ´etat de surface constant, une certaine rugosit´e et un niveau de friction d´eter- min´e, l`a o`u un bouton ou une touche de clavier d´elivrent un retour haptique quand on les presse. De multiples travaux ont ´et´e men´es pour rendre la richesse de l’exploration tactile : modification de g´eom´etrie de surface via des matrices de points ou de picots [70], ajustement de l’orientation de la surface pour si- muler des g´eom´etries macroscopiques [105], ou modulation du coefficient de friction par ´electro-vibration [5] ou par effet film d’air [2]. Ces travaux sortent de notre domaine d’´etude et font partie des interfaces haptiques.

1.4. Fondements de l’interaction directe absolue

L’int´erˆet des interfaces tactiles ne provient donc pas du toucher au sens pre- mier, mais elles tirent plutˆot profit du second aspect de la sensibilit´e somes- th´esique : la capacit´e `a situer ses membres dans l’espace et le rapport de coordination amen´e par un asservissement et une connaissance inconsciente du corps.

Les sens proprioceptifs

Les sens proprioceptifs regroupent le sens de l’´equilibre, la d´etection de la temp´erature corporelle, la sensibilit´e `a la douleur et la proprioception. La proprioception est compos´ee de la kinesth´esie qui rend compte de la dynamique et des mouvements des parties du corps, et la statesth´esie qui rend compte de la statique et de la position des membres. Ces informations sont capt´ees par les muscles, les tendons et les articulations. Les fuseaux neuro-musculaires captent la longueur du muscle, les organes tendineux de Golgi sont sensibles `a la tension du muscle et les r´ecepteurs articulaires reportent la position des articulations [75].

Ces informations permettent par exemple de pouvoir toucher notre nez avec notre index tout en fermant les yeux, mais ´egalement de situer notre main dans l’espace sans faire appel `a la vision lorsque quelqu’un la d´eplace. Le cortex c´er´ebral comprend deux aires d´edi´ees au contrˆole du corps : le cortex somesth´esique primaire et le cortex moteur(figure 1.7). Les capteurs somesth´e- siques sont projet´es dans le cerveau en fonction de leur densit´e. Ainsi les mains occupent une place plus importante que l’avant bras ou que la totalit´e du dos. Il en est de mˆeme pour le cortex moteur en fonction de l’importance et de la libert´e musculaire des diff´erentes parties du corps. La conjonction de ces deux aires apporte une dext´erit´e plus ou moins remarquable et le retour d’informa- tions continu des parties du corps contribue `a r´ealiser un asservissement qui permet un ajustement de la tension et de la force des muscles afin de r´ealiser pr´ecis´ement un mouvement. Cette variation du tonus musculaire s’appuie sur la sensibilit´e proprioceptive inconsciente. Nous ne modulons heureusement pas consciemment nos muscles agonistes et antagonistes pour r´ealiser le moindre mouvement et nous ne nous concentrons pas perp´etuellement sur la position de chacun de nos membres pour ajuster notre ´equilibre [72]. Par contre, nous pouvons prendre pleinement conscience du mouvement et de la position de nos membres.

Les membres ´etant compl`etement incarn´es par la proprioception, nous b´en´e- ficions d’une m´emoire musculaire, qui permet de r´ealiser des d´eplacements pr´ecis et mesur´es sans recourir `a la vision. Lorsque nous passons du clavier `a la souris pour la saisir sans la regarder, nous nous servons de notre m´emoire spatiale et de la proprioception. Lorsque nous entrons du texte au clavier sans regarder les touches, nous nous appuyons sur la m´emoire musculaire qui per- met d’automatiser des d´eplacements et d’atteindre facilement des positions r´ep´et´ees plusieurs fois.

Quand un utilisateur d´eplace un curseur au travers d’une fonction de transfert non-lin´eaire, c’est le retour d’informations visuelles qui fournit la plupart des

Figure1.7 – Aires somesth´esique (`a gauche) et motrice (`a droite) (issu de10

).

donn´ees n´ecessaires `a la coordination de la main et du bras. Cependant quand l’utilisateur contrˆole un syst`eme absolu co-localis´e ou s´epar´e, le haut niveau de similarit´e entre espace d’entr´ee et espace visuel ainsi que le couplage entre la position des doigts et des curseurs [66] font que les d´eplacements dans l’espace physique peuvent s’appuyer sur la m´emoire spatiale et musculaire.