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2.2 Activités biologiques des calixarènes

2.2.6 Calixarènes et pouvoir microbicide

Le macrocyclon

L'exemple le plus ancien résulte d'une étude datant de 1955 sur un composé, issu de la condensation de formaldéhyde et d'unités phénoliques porteuses de groupements polyoxyéthyléniques, à une époque où les calixarènes ne sont pas encore caractérisés. Ces molécules se sont montrées inactives sur Mycobacterium tuberculosis lors d'étude in vitro dans un milieu de culture ne comportant pas de cellules. Cependant, les résultats étaient complètement différents lors d'études in vivo par infection expérimentale de souris. Ainsi, selon les longueurs des chaînes polyoxyéthyléniques, les composés pouvaient avoir soit une activité antituberculeuse, soit aucun effet sur la tuberculose soit encore, pour les chaînes plus longues, un effet "protuberculeux" où l'évolution de la maladie était accélérée. Ainsi, se sont dégagés de ces travaux, le Macrocyclon, avec une moyenne de 12,5 unités polyoxyéthyléniques (effet antituberculeux) et le HOC-60 avec 60 unités polyoxyéthyléniques (effet "protuberculeux"). De plus, après l'injection parentérale de certains de ces composés, le métabolisme lipidique était perturbé (Cornforth J.W. et al., 1955). Des effets similaires ont été observés avec les produits de condensation du cholestérol et de l'oxyde d'éthylène (Cornforth J.W. et al., 1973).

Des travaux plus récents ont montré l'inhibition de la croissance de Mycobacterium tuberculosis dans les macrophages par le Macrocyclon alors que cette même croissance était stimulée par le HOC-60. De plus, l'activité de la lipase était inhibée par le Macrocyclon et activée par le HOC-60. Ces résultats mettaient en évidence l'implication des lipides et de leur métabolisme, en particulier au niveau des macrophages, dans l'activité de ces molécules lors des expériences menées in vivo (Hart P.D. et al., 1996). Ces travaux restent toujours d'actualité de part un mécanisme d'action particulier, notamment par l'implication de la NO synthase au niveau des macrophages, et l'existence de nombreuses souches de Mycobacterium tuberculosis résistantes aux traitements classiques (Colston M.J. et al., 2004).

Activité antibactérienne

D'autres essais avec des calixarènes porteurs sur la couronne haute d'acides aminés ont été menés dans le but de mimer la vancomycine, antibiotique de la classe des glycopeptides. Le mécanisme d'action des glycopeptides s'explique par la reconnaissance d'un motif D-Alanyl-D-Alanine dans la structure peptidique d'un précurseur de la paroi bactérienne, le peptidoglycane. Ils empêchent ainsi la synthèse de la paroi des bactéries à Gram positif, majoritairement constituée de peptidoglycane. La vancomycine est particulièrement utilisée dans le traitement des infections à SARM. Cependant,

2. Les calixarènes 2.2 Activités biologiques des calixarènes

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des souches résistantes à la vancomycine sont apparues depuis la fin des années 1980, notamment chez les entérocoques. Cette résistance est maintenant connue pour être inductible, transférable et portée par un plasmide. L'utilisation extensive de la vancomycine a donc créé une pression de sélection sur les souches résistantes. Un effort de recherche a alors été mené dans la synthèse de nouvelles molécules. Ces calixarènes porteurs d'acides aminés mimant l'action de la vancomycine présentaient ainsi des propriétés intéressantes puisque certains d'entre eux ont fait preuve d'une activité comparable à celle de la vancomycine, y compris sur les SARM (Casnati A. et al., 1996). Des études plus récentes ont montré l'intérêt de l'introduction de groupements guanidinium au sein de la structure calixarénique dans l'acquisition d'une activité antibactérienne, notamment sur les bactéries résistantes (Grare M. et al., 2010a, Mourer M. et al., 2009).

Activité antivirale

Des études sur l'activité antivirale des calixarènes ont fait l'objet de dépôts de brevets et de quelques publications mais ce versant de leurs propriétés n'a encore été que très modestement examiné. Hwang et coll. ont mis en évidence une activité anti-HIV et anti-HSV du C[4]S et de composés apparentés porteurs de groupements phényl, sulfonamide et/ou acide carboxylique. Les mécanismes d'action pourraient être liés à l'interaction des charges ioniques entre les calixarènes et l'enveloppe virale (Hwang K., et al., 1992, Hwang K.M. et al., 1994). Des résultats similaires sur le HSV ont également été démontré au sein de notre unité de recherche (Psychogios N., 2003). Un autre brevet déposé par Harris et coll. a aussi rapporté une activité anti-HIV de composés calixaréniques, mettant en jeu, dans ce cas, une inhibition de la fusion membranaire entre l'enveloppe virale et la cellule hôte (Harris S.J., 1995, Harris S.J., 2002). Plus récemment, Motornaya et coll. ont rapporté des activités antiherpétiques de certains calixarènes, les amino-amantadane-calixarènes (Motornaya A.E. et al., 2006). Finalement, Mourer et coll. ont évalué l'activité anti-HIV de neuf composés calixaréniques porteurs de diverses substitutions. Dans cette étude étaient inclus le C[4]S et le C[4]S-BTZ. Les activités antivirales ainsi que la cytotoxicité se sont avérées variables en fonction des substituants portés par la structure calixarénique, le C[4]S-BTZ ayant démontré la meilleure efficacité. Cependant, des études menées en parallèle montraient toutefois que la zidovudine restait plus efficace (Mourer M. et al., 2010).

Ainsi, comme nous avons pu le voir, ces molécules présentent non seulement une diversité remarquable mais aussi un fort potentiel qui se décline dans de nombreux champs d'application. Cependant, ces composés sont encore relativement peu étudiés dans le domaine pharmacologique

2. Les calixarènes 2.2 Activités biologiques des calixarènes

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comparativement à d'autres structures macrocycliques comme les cyclodextrines commercialisées dans pas moins de douze spécialités pharmaceutiques comme adjuvant de solubilisation et/ou vecteur de principes actifs.

3. Le modèle viral : Les Coronavirus 2.2 Activités biologiques des calixarènes

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3 Le modèle viral : Les Coronavirus

Les coronavirus sont des virus enveloppés, à ARN de polarité positive, non segmenté, dont le nom provient de leur aspect en forme de couronne (du latin "corona") en microscopie électronique. Ils sont largement représentés chez les mammifères et les oiseaux, provoquant maladies respiratoires et entériques, voire dans certains cas, neurologiques ou hépatiques. Considérés comme les agents du rhume banal avec les rhinovirus, les coronavirus sont longtemps restés un sujet marginal en médecine Humaine, malgré l'existence de travaux, peu nombreux à l'époque, les impliquant dans des pathologies plus sérieuses. La plupart des données sur les coronavirus acquises au cours du 20ème siècle étaient issues du domaine Vétérinaire, dans lequel les coronavirus sont à l'origine d'infections graves, surtout chez les volailles et les porcs, et donc à l'origine de lourdes conséquences économiques. Plus récemment et avec la découverte de nouveaux coronavirus infectant l'Homme, dont celui responsable de l'épidémie de SRAS en 2002-2003, les données ont été largement accrues. Ils ont depuis été impliqués dans des pathologies Humaines graves, notamment chez les personnes immunodéprimées ainsi que dans des ILS.

Ainsi, après un rappel historique sur la famille des Coronaviridae, nous aborderons leur classification et les remaniements récents. En effet, cette famille comprenant jusqu'en 2009 les genres Coronavirus et Torovirus et appartenant à l'ordre des Nidovirales, a largement été remaniée au cours de ces dernières années avec la découverte de nombreux nouveaux coronavirus et les avancées technologiques. Nous exposerons ensuite une de leurs caractéristiques principales : leur mode de réplication, qualifiée de "nichée" ainsi que leurs capacités évolutives et adaptatives. Enfin, après avoir détaillé leur potentiel pathogène, nous nous intéresserons à leurs capacités de survie dans différentes conditions environnementales et sous l'action des ATS-D. Des informations complémentaires sur la famille des Coronaviridae et leurs particularités seront apportées lors de mon DES de Pharmacie Spécialisée, portant sur l'apport de la bioinformatique dans le domaine de la Virologie et plus particulièrement dans l'avancement des connaissances sur cette famille de virus.

3. Le modèle viral : Les Coronavirus