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Calcul des fonctions de corr´elation dynamiques

Nous allons maintenant ´evoquer en quelques mots le calcul des fonctions de corr´ela- tion dynamiques par Monte-Carlo Quantique. Il est relativement difficile de les obtenir. En effet, la transform´ee de Fourier temporelle des fonctions de corr´elation G(τ ) que l’on peut facilement ´evaluer conduit `a des fr´equences imaginaires (il ne faut pas oublier que le temps utilis´e est lui-mˆeme imaginaire). Il est donc n´ecessaire de r´ealiser une continuation analytique de la fonction sur l’axe r´eel. Cela n’est pas ais´e car on a affaire non `a une fonction continue et bien d´efinie mais `a un ensemble discret de points avec des fluctuations statistiques. Ainsi, de nombreuses solutions peuvent ˆetre trouv´ees et une toute petite diff´erence sur les donn´ees change notablement le spectre. La m´ethode la plus utilis´ee est la technique d’entropie maximale [142, 143, 144]. Typiquement, elle consiste `a calculer, pour obtenir une fonction spectrale A(ω) positive (dans le cas des fermions) et norm´ee, la fonction de corr´elation en temps imaginaire et `a passer en temps r´eel tout en maximisant une quantit´e S naturellement appel´ee entropie :

S = X i µ A(ωi)− m(ωi)− A(ωi) ln A(ωi) m(ωi) ¶ , (III.26)

o`u m(ω) est appel´e (( mod`ele par d´efaut )), c’est-`a-dire est une premi`ere estimation (r´eguli`ere) de A(ω). En fait, la densit´e spectrale A(ω) est interpr´et´ee, vu ses propri´et´es, comme une densit´e de probabilit´e et ce qui est en g´en´eral extrait des donn´ees est la densit´e spectrale la plus probable. Souvent, comme on ne connaˆıt pas la forme de la solution (sinon il ne serait pas utile de faire un traitement num´erique), m(ω) est choisie plate avec une amplitude satisfaisant la r`egle de somme.

Chapitre IV

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Etude de syst`emes de chaˆınes de

fermions coupl´ees

Apr`es avoir d´ecrit d’un point de vue th´eorique la physique unidimensionnelle, nous passons maintenant `a l’´etude de la transition dimensionnelle, afin de savoir si certaines des propri´et´es du liquide de Luttinger persistent en dimension plus ´elev´ee. Le syst`eme le plus simple est constitu´e de chaˆınes coupl´ees par un terme de saut t. Le premier effet d’un tel terme est de permettre la formation d’un ´etat ordonn´e `a longue port´ee. En effet, en une dimension, les corr´elations d´ecroissent en loi de puissance et le syst`eme est critique en accord avec le th´eor`eme de Mermin-Wagner [3]. Pour des chaˆınes coupl´ees, les corr´elations divergentes vont se propager dans la direction transverse. En outre, en fonction de la temp´erature, il peut exister un ordre tridimensionnel comme cela est observ´e exp´erimentalement.

Na¨ıvement, on s’attend `a ce que pour des temp´eratures kBT > t⊥, les excitations thermiques masquent la d´eformation de la surface de Fermi, si bien que le syst`eme se comporte comme si les chaˆınes ´etaient effectivement d´ecoupl´ees : c’est le r´egime de liquide de Luttinger. Par contre d`es que kBT < t⊥, les aspects bidimensionnels ou tridimensionnels de la surface de Fermi deviennent visibles et il devrait apparaˆıtre une coh´erence transverse. Nous ´etudierons en d´etail cette notion de coh´erence dans la premi`ere partie.

Ensuite, dans une deuxi`eme partie, nous rappellerons les diff´erentes propositions faites en particulier pour le syst`eme de deux chaˆınes, qui est le plus simple pour ´etudier l’effet de t. Mais, mˆeme si ce syst`eme reste suffisamment simple pour pouvoir appliquer certaines des m´ethodes que nous avons vu en une dimension, il est perti- nent pour des compos´es r´eels qui ont pour structure cristallographique des ´echelles faiblement coupl´ees et qui pr´esentent un diagramme de phase tr`es riche : on peut mentionner l’apparition d’une phase supraconductrice sous pression dans le compos´e Sr14−xCaxCu24O41 [145], l’existence d’un gap de spin dans le compos´e pur etc.

Nous mentionnons ´egalement le cas d’un grand nombre de chaˆınes coupl´ees. Ce probl`eme a ´et´e abord´e depuis longtemps d´ej`a : d`es , Gorkov et Dzyaloshinski ont discut´e comment les propri´et´es du liquide de Luttinger pouvaient ˆetre d´etruites par un couplage transverse. Depuis, de nombreux auteurs ont abord´e ce point avec diverses m´ethodes. La difficult´e est que le syst`eme ´evolue vers un nouveau point fixe de couplage

Chapitre IV. ´Etude de syst`emes de chaˆınes de fermions coupl´ees

fort. Or, en l’absence d’alternatives en deux dimensions, les gens pensent qu’il s’agit d’un liquide de Fermi. R´ecemment, Anderson et coll. [146, 74] ont repris l’´etude de deux chaˆınes en arguant que ce syst`eme ´etait suffisant pour ´etudier la coh´erence du saut interchaˆıne et ils ont propos´e un nouveau type de m´etal susceptible de rendre compte des r´esultats exp´erimentaux troublants observ´es `a la fois dans les compos´es organiques quasi unidimensionnels et dans les mat´eriaux supraconducteurs `a haute temp´erature critique.

Nous montrerons alors comment des simulations num´eriques, faites `a partir d’un hamiltonien microscopique r´ealiste, montrent que le terme de saut effectif est fortement renormalis´e par les interactions, en accord avec les pr´edictions du groupe de renorma- lisation. Nous discuterons ´egalement l’importance des processus de sauts de paires qui sont dominants dans les r´egions de couplage fort et qui doivent ˆetre pris en compte. Nous ´etudierons avec soin les propri´et´es spectrales d’une ´echelle de fermions et nous discuterons dans ce cas les effets des degr´es de libert´e de spin. Puis, nous proposerons une g´eom´etrie particuli`ere dans laquelle l’´etude de la coh´erence du saut interchaˆıne est particuli`erement pertinente. Enfin, nous parlerons des propri´et´es de transport trans- verse qui restent mal comprises du point de vue exp´erimental.

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Probl´ematique

Comme nous allons le voir dans la suite, l’effet d’un couplage interchaˆıne a ´et´e ´etudi´e par de nombreuses m´ethodes au cours des derni`eres ann´ees. Cependant, il n’existe pas de solution exacte mˆeme au sens du groupe de renormalisation, et l’existence d’op´erateurs pertinents permet de prouver l’instabilit´e du liquide de Luttinger mais ne caract´erise en aucune mani`ere le nouveau point fixe. Ainsi, en l’absence d’alterna- tives, la croyance ´etait qu’un liquide de Fermi ´etait stabilis´e en deux dimensions.

Bourbonnais et Caron [147, 33] ont propos´e un sch´ema de renormalisation `a la

fois des interactions et de t qui inclut tous les processus possibles. Ils trouvent que le saut interchaˆıne `a une particule est pertinent si α < 1 et conduit `a une valeur effective renormalis´ee

t∗ = t (t/t)1/(1−α), (IV.1)

o`u α est l’exposant anormal du liquide de Luttinger. Cela se traduit par une temp´erature caract´eristique T1

x ' t∗⊥ qui donne l’´echelle d’´energie au-dessous de laquelle t⊥ donne des effets tels que la formation d’une surface de Fermi tridimensionnelle1.

Outre cette renormalisation, ces auteurs pr´edisent l’apparition de sauts de paires de particules pour une temp´erature T2

x telle que

Tx2 ∼ t (t/t)1/(1−K). (IV.2)

Mais, dans les ann´ees , Anderson a revisit´e ce mod`ele et a propos´e un nou- veau type de m´etal [146]. Il a soulign´e l’importance de la s´eparation spin-charge qui

1. Bien entendu, il ne s’agit pas d’une transition de phase mais d’un changement de r´egime ou crossover. ´Eventuellement, les interactions r´esiduelles peuvent conduire `a une phase de sym´etrie bris´ee `a plus basse temp´erature.

1. Probl´ematique 0 0.5 1 1.5 2 0 0.05 0.1 PSfrag replacements α T T1 x T2 x

Fig.IV.1 – Sch´ema de la variation des temp´eratures caract´eristiques d’instabilit´e `a une (T1

x) et deux (Tx2) particules (voir texte) en fonction de α (dans cet exemple, t⊥ = 0,1 et t = 1) (d’apr`es [34]).

existe en une dimension et a insist´e sur le fait que la proc´edure correcte consistait `a d’abord brancher les interactions sur les chaˆınes avant de consid´erer le couplage t. Il a alors sugg´er´e qu’un faible saut interchaˆıne ne modifiait pas la structure de bande

dans la direction transverse mˆeme dans le cas o`u ce saut ´etait pertinent au sens du

groupe de renormalisation, c’est-`a-dire α < 1. `A la place, il se produit un confinement par d´ecoh´erence et le syst`eme garde un caract`ere non-liquide de Fermi, le mouvement transverse des ´electrons ´etant seulement diffusif. Par contre, le saut de paires (couplage de type Josephson) peut exister et un tel m´etal peut se comporter comme un supra- conducteur anisotrope avec des propri´et´es de transport transverses proches de celles observ´ees exp´erimentalement dans les cuprates.

Nous allons discuter plus pr´ecis´ement ces id´ees de pertinence et de coh´erence du saut interchaˆıne.