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Santa Catarina

1. LE CADRE GÉOGRAPHIQUE

a) Le clivage entre la région littorale et les hautes plaines

Le Paraná est un État de la région Sud du Brésil, elle-même formée de l’État du Paraná, de l’État de Santa Catarina et, plus au sud encore, du Rio Grande do Sul. Le Paraná, qui ne possède qu’une toute petite bande côtière (une centaine de kilomètres environ)1, se déploie largement vers l’ouest, en direction de l’intérieur du continent, pour rejoindre, sur ses confins, les frontières de l’Argentine et du Paraguay. Au nord, il est limitrophe de l’État de São Paulo – pôle métropolitain et économique du pays –; et au sud, de celui de Santa Catarina, État qui du point de vue économique, comme le Paraná, s'articule autour de secteurs diversifiés tant agricoles qu'industriels (textile, agro-industrie).

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Figure 2 : Les principales villes du Paraná. Le relief du Paraná : les différents plateaux. Source : site Internet : www.educacional.com.br

Le Paraná se situe entre le 23° et le 26° parallèle sud. Il est donc traversé dans sa partie nord par le Tropique du Capricorne, à hauteur de la ville de Maringá. Le climat est de type subtropical sur les trois quarts du territoire et tropical essentiellement sur le littoral. Le territoire du Paraná couvre approximativement 199.323,9 Km2, soit 2,34 % de la superficie du Brésil.

L’espace ainsi délimité se partage en cinq unités géomorphologiques qui se succèdent d’Est en Ouest : le littoral ; la Serra do Mar ; le Premier Plateau ou plateau de Curitiba, le Second Plateau ou plateau de Ponta Grossa ; et le Troisième Plateau ou plateau de Guarapuava (MAACK, 1981).

Ces cinq unités géomorphologiques se caractérisent ainsi :

- La rupture la plus marquée est introduite par la Serra do Mar, chaîne de montagne qui s’étend le long de la côte brésilienne depuis l’Etat de l’Espírito Santo (au nord de Rio) jusqu’au sud de l’État de Santa Catarina au sud, mais qui, dans sa traversée du Paraná, présente la caractéristique de se rapprocher de la côte et de s’élever à des altitudes élevées (le point culminant du sud du Brésil se trouve au Paraná : Pic du Paraná à 1877 mètres2), constituant une barrière aux pentes escarpées entre le littoral et les terres de l’intérieur.

- La frange qui sépare la Serra de la côte est constituée d’une plaine basse dont la largeur oscille entre 10 et 20 kilomètres. Dans la partie nord du littoral, la chaîne montagneuse se déploie en demi-cercle, dessinant une vaste baie où viennent se jeter différents cours d’eaux qui dévalent des versants (Rio Guaraqueçaba, Serra Negra, Tagaçaba, Açungui, Cachoeira). Les agglomérations urbaines les plus importantes se concentrent le long du rivage de la baie, développant une activité portuaire de pêche et de transport (voir plus loin). L’occupation humaine rurale – villages, hameaux – remonte sur les contreforts de la Serra : le long des vallées et tant que la pente ne fait pas obstacle aux activités agricoles.

- Le premier plateau commence à partir de la Serra do Mar et s’étend à l’ouest jusqu’à un escarpement qui initie le second plateau. Il englobe la ville de Curitiba – capitale de l’État - qui se situe aux environs de 900 mètres au-dessus du niveau de la mer.

- Le second plateau s’élève jusqu’à 1200 mètres après l’escarpement qui le sépare du précédent. On l’appelle aussi le plateau des Campos Gerais.

- Un dernier escarpement détermine le troisième plateau, qui s’étend à l’ouest et couvre les deux tiers de la superficie de l’État. Il abrite les sources des grands fleuves du Paraná : le Rio Iguaçu, le Paranapanema, le Paraná, le Tibagi, le Piquiri, l’Ivai. Le relief de ce plateau est très marqué, allant de 250 mètres d’altitude aux abords des fleuves à 1200 mètres sur les parties hautes du plateau.

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Le point culminant de la Serra do Mar, dans son ensemble, se trouvant dans l'État de Rio de Janeiro, le Pic des Aiguilles Noires (Pico das Agulhas Negras), à 2787m d'altitude.

La figure 3 présente de manière schématique le découpage de ces aires successives.

Figure 3: Section Schématique de l’État du Paraná montrant la structure géologique du relief. PAR: Paranaguá; CTB: Curitiba; PGR: Ponta Grossa, GUA: Guarapuava; S.M.: Serra do Mar; P.C.: Planície Costeira. (MELO M., 2004).

b) Un climat contrasté

Le Paraná est situé dans la région de climat subtropical, pourtant le climat du territoire Paranaense est diversifié du fait de son relief très marqué et donc de la variabilité selon l’altitude. Trois types de climat se rencontrent au Paraná :

- Un climat tropical très humide sur le littoral, caractérisé par des températures moyennes de plus de 22°C pour le mois le plus chaud et de plus de 18°C pour le mois le plus froid, sans saison sèche et sans gelées.

- Un climat subtropical humide et superhumide dans les régions les plus hautes des plateaux et dans les zones de montagnes (principalement dans le Centre, le Sud et le Centre-Est aux altitudes supérieures à 850-900 m), avec des moyennes inférieures aux précédentes, des étés frais et des gelées hivernales fréquentes.

- Un climat subtropical dans le Nord, l’Ouest et le Sud-Ouest de l’État, où l'altitude ne dépasse pas 850-900 m, avec des moyennes supérieures à 22°C le mois le plus chaud et inférieures à 18°C le mois le plus froid, des gelées peu fréquentes et un été chaud. C’est dans cette catégorie que se situe la zone d’étude, localisée sur le versant côtier Nord de la Serra do Mar, à moins de 850 m d'altitude (ne faisant pas parti de la zone littorale à proprement parlé).

En conséquence, ces différentes zones géographiques et climatiques se distinguent par les possibilités qu'elles offrent aux activités agricoles. Ainsi, la partie initialement colonisée à savoir le littoral, marqué par un relief accidenté, a permis le développement d'une agriculture à petite échelle dès les premiers temps. Par la suite, la culture de la banane a contribué à un essor du littoral autour des années 1930 ; toutefois ultérieurement, par manque de voies d'accès et du fait de son relief peu propice au développement de l'agriculture, le littoral a perduré en marge de la "révolution verte" opérant sur le reste du territoire. Les zones de plateaux à l'Ouest et au Nord du territoire, quant à elles, ont été investies par les grandes cultures industrielles, à partir du XX° siècle et plus intensément à partir des années 1930. Ce sont les grands « cycles » de cultures, tour à tour le café, puis le soja qui ont prolongé le phénomène d'extension des terres agricoles. Le développement de l'agriculture à grande échelle au Nord et à l'Ouest du territoire a été concomitante à une phase d'exploitation forestière, centrée principalement sur deux essences naturelles : l'Araucaria angustifolia et l'Erva Mate (Ilex paraguaiensis), prisées sur le marché international dès le XIX° siècle mais surtout à la fin du siècle et durant la première moitié du XX° siècle. Le développement de l'agriculture au Nord-Est et sur le premier plateau de l'État a ainsi entraîné un défrichement intensif, qui s'est accentué au cours de la seconde moitié du XX° siècle.

c) Le vestige d’une forêt disparue

Jusqu’à une période récente, le territoire du Paraná comportait de vastes forêts caractérisées principalement par trois types de forêt. La plus importante était la forêt d'Araucaria (Araucaria angustifolia) à l'ouest, sur les parties les plus élevées du planalto; puis la forêt ombrophile dense dont la forêt atlantique appelée Mata Atlântica, sur le versant est de la Serra do Mar; et enfin la forêt subtropicale dans les parties les plus basses du troisième plateau – à l’extrême Ouest de l’État (autour des chutes d'Iguaçu).

La carte de l’évolution de la déforestation au Paraná au cours du XX° siècle (voir ci-dessous, Figure 4), nous montre clairement qu’en même temps que le développement humain et économique de l’État avait lieu, la forêt était progressivement mise à mal.

Au XIX° siècle, les activités telles que l'extraction de minerais, le tropeirisme (voir plus loin) et la cueillette d'Erva Mate, n'ont pas produit de grandes déforestations. La déforestation s'intensifie dans la région du Nord Pionnier (Norte Pioneiro) à partir de 1910, du Nouveau Nord (Norte Novo) à partir des années 1940 mais principalement dans les années 1950, et enfin du Nord Novissimo (Norte Novíssimo) à la fin des années 1950. Cette

progression de la déforestation s'est opérée en fonction du front pionnier de la culture du café. Enfin, dans les années 1950 et 1960, la déforestation des régions Ouest et Sud-Ouest est initiée mais encore peu expressive du fait d'une migration massive des agriculteurs de Santa Catarina et du Rio Grande do Sul. C'est l'expansion de la culture du soja qui va contribuer considérablement à la déforestation de l'Ouest de l'État dans les années 1970.

Ainsi, au milieu du XX° siècle, le mouvement rapide et spectaculaire de déforestation était le résultat tout d'abord d’une exploitation massive du bois et de l’extension extrêmement rapide de la culture intensive du café – deux activités qui ont été les moteurs de la prospérité du Paraná. C'est à partir des années 1950, que la culture du café connaît une forte expansion en corrélation avec l'occupation et l'expansion agricole du Nord de l'État. De telle sorte qu'entre la fin des années 1950 et le début des années 1960, le Paraná est devenu l'État le plus grand producteur de café du Brésil et le port de Paranaguá, le plus grand exportateur. En contre partie, c'est à partir de cette période que la forêt connaît une destruction brutale et massive, qui se poursuit avec l'expansion de la culture du soja.

La destruction du massif forestier a été quasi-totale. Seules sont demeurées quelques bandes de couvert forestier aux deux extrémités de l’État : Foz d’Iguaçu à l’Ouest et le Littoral Nord à l’Est (Cf. Figure 4-5). L’enjeu de la protection de ces deux zones résiduelles apparaît significatif à la lumière de ce changement radical. Dès la fin du XIX° siècle, en 1878 plus précisément, un mouvement d’opinion, animé par André Rebouças – s’inspirant du Parc National de Yellowstone créé en 1872 – a conduit à la création du Parc National d’Iguaçu en 1939 (DEAN, 1996 : 271). Beaucoup plus récemment – j'y reviendrai plus loin – c’est le thème de la protection de la Forêt Atlantique (Mata Atlântica) qui a occupé le devant de la scène. Cette formation végétale était caractéristique – bien qu’avec des faciès locaux diversifiés – d’une grande partie de la région côtière du Brésil : depuis l’État de Pernambouco jusqu’au Nord de l’État du Rio Grande do Sul sur une longueur de plus de 3500 kilomètres (Ibid : 24-25). Des plus d'un million de kilomètres carrés de forêts atlantiques côtières existantes lors de la découverte du Brésil, il ne resterait que 7 à 10 % aujourd’hui (selon les sources: Ibid : 361, 366; SOS MATA ATLANTICA, site Internet). Le développement des cultures industrielles – cacao, café, plus récemment canne à sucre – ainsi que le phénomène de concentration urbaine sur le littoral atlantique, ont conduit, presque partout, à sa complète disparition.

Figure 4 : Evolution de la couverture forestière naturelle du Paraná, de 1890 à 1980. Source : SANTOS, PEYRON, 1992 : 184.

Seuls quelques massifs isolés ont été épargnés. Les exemples les plus significatifs se situent sur le littoral Nord du Paraná et celui du sud de l’État de São Paulo. Ils y constituent l’essentiel de la couverture végétale du versant Est de la Serra do Mar. Le relief montagneux et l’histoire agraire locale – sur laquelle je vais revenir plus en détail – peuvent expliquer ce fait. Cette zone continue, jusqu’à aujourd’hui, à offrir une flore et une faune très diversifiée et qui compte de nombreuses espèces endémiques. Malgré les menaces qui ont pesé sur eux à plusieurs reprises, que j'exposerai par la suite, des pans relativement intacts de la Forêt Ombrophile Dense et des écosystèmes qui lui sont associés continuent à couvrir les versants les plus élevés de la Serra, tandis qu’ailleurs on rencontre une forêt secondaire encore très riche et diversifiée. Le littoral du Paraná combiné au sud du littoral pauliste, représente aujourd’hui le témoignage le plus important et le plus représentatif de ce qu’était autrefois la grande Mata Atlântica brésilienne (IPARDES, 2001).

Figure 5 : Forêts natives primaires de l’État du Paraná - 1998.

Source : Fondation Mata Atlântica/INPE, publié sur Internet par le IAP, Instituto Ambiental do Paraná, 2000. www.iap.pr.gov.br