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M (Metastasis) – Extension métastatique

I. 3 - Étapes de la carcinogenèse colique

I.3.1. c . L’adénocarcinome (ADK) et les métastases

L’adénocarcinome in situs’étend petit à petit en profondeur. Il franchit tout d’abord la lame basale, on parle alors d’ADK intra-muqueux in situpuis il devient invasif lorsqu’il atteint

la lamina propria et la musculaire de la muqueuse colique (Jass, 2007). D’un point de vue

Figure 7:Voie de signalisation Wnt/β-caténine.La voie WNT/β-caténine («Wingless Int») contrôle notamment la prolifération cellulaire. Une activation anormale de cette voie est observée dans la majorité des CCR. A. Quand la voie n’est pas activée (« OFF ») la protéine β-caténine est phosphorylée par un complexe mutiprotéique constitué par la protéine APC (adenomateous polyposis coli), GSK3 (glycogen synthase kinase 3), CK1 (casein kinase 1), DVL (Dishevelled) et AXIN. Cette phosphorylation va entrainer la dégradation de la β-caténine par le protéasome, elle n’effectue donc pas son rôle de facteur de transcription de gènes impliqués dans la prolifération cellulaire. B. A l’inverse quand la voie est activée (« ON ») après fixation de WNT sur son récepteur Frizzled, la β -caténine n’est plus phosphorylée par le complexe protéique et donc reste libre dans le cytosol cellulaire puis transloque dans le noyau et induit la transcription de gènes cibles tels que c-myc et cycline D1activant la prolifération cellulaire. Source : D’aprèsYu et al, 2014.

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tumorale variable. La majorité (70 à 75%) présentent une structure glandulaire similaire au tissu sain et sont donc bien différenciés (Tanaka, 2009).

Une fois que l’ADK franchit la lamina propria, les cellules tumorales sont en contact avec les vaisseaux sanguins et lymphatiques ce qui leur permet de métastaser au niveau ganglionnaire et viscéral. La plupart des métastases du côlon sont hépatiques (75 %) mais des métastases pulmonaires (15% des cas), osseuses (5% des cas) et cérébrales (5% des cas) peuvent également être observées (Scheele et al., 1990).

Les cellules épithéliales altérées sont en interaction permanente avec leur micro-environnement associé (TME : « Tumor MicroEnvironment »). Il est composé de types cellulaires variés (cellules stromales, cellules immunitaires, fibroblastes, cellules endothéliales)

mais aussi de composants de la matrice extracellulaire (collagène). L’importance d’acteurs

microbiens est également remarquable dans le CCR (Burns et al., 2018; Colangelo et al., 2017; Peddareddigari et al., 2010). Ce micro-environnement évolue tout le long de la « séquence adénome-cancer ». Un nombre croissant d’études montre notamment l’importance du micro -environnement microbien et immunitaire qui sera décrit plus tard (Boleij et al., 2015; Bonnet et al., 2014; Colangelo et al., 2017; Fletcher et al., 2018; Llosa et al., 2015; Mima et al., 2015, 2016a; Pagès et al., 2018; Tilg et al., 2018a; Viljoen et al., 2015; Villéger et al., 2018; Wei et al., 2016a).

I.3.2) La séquence adénome-cancer

Il est estimé qu’il faut au minimum environ 6 à 10 altérations génomiques au cours de

l’évolution de la cellule normale jusqu’à l’adénocarcinome (Fearon and Vogelstein, 1990). Ces altérations sont responsables de la dérégulation de plusieurs voies de signalisation qui régulent

la prolifération, la survie, la migration et l’invasion cellulaire (Del Vecchio et al., 2017; Han et al., 2013).

I.3.2.a. La voie WNT/β-Caténine

La voie de signalisation WNT/β-Caténine (Figure 7) est activée dans la majorité des CCR. Cette voie joue un rôle important au cours du développement embryonnaire et de la carcinogenèse en modulant l’expression de signaux intercellulaires qui contrôlent notamment

23 la prolifération cellulaire (Gregorieff et al., 2005; Reya and Clevers, 2005). Quand la voie WNT n’est pas stimulée (position « OFF ») (Figure 7.A), la β-caténine cytosolique libre est phosphorylée par un complexe multiprotéique constitué par la protéine APC codée par le gène suppresseur de tumeur apcadenomatous polyposis coli »), l’axine, et la GSK3β (glycogène synthase kinase 3β). Elle est alors adressée au protéasome pour dégradation par le système d’ubiquitination du protéasome. À l’inverse lorsque le ligand WNT se fixe sur ses récepteurs Fz (« Frizzled ») (position « ON ») (Figure 7.B), il entraine la phosphorylation de la protéine Dvl (« Dishevelled ») et induit le recrutement à la membrane de l’axine et de GSK3β qui ne phosphorylera plus la β-caténine. Celle-ci ne sera alors plus dégradée et va transloquer dans le noyau et activer la transcription de gènes impliqués dans la prolifération et la survie cellulaire (Reya and Clevers, 2005; Yu and Virshup, 2014).

Dans la carcinogenèse colique, la voie WNT est activée sans fixation du ligand aux récepteurs Fz. Ce mécanisme est induit le plus souvent par la synthèse d’une protéine APC tronquée suite à une mutation du gène apc. Ainsi, le complexe multiprotéique nécessaire à la dégradation de la β-caténine n’est pas formé et celle-ci s’accumule dans le cytoplasme puis transloque dans le noyau, activant une prolifération cellulaire non-contrôlée (Goss and Groden, 2000; Gregorieff et al., 2005; Reya and Clevers, 2005). De plus cette translocation nucléaire entraine un déséquilibre entre la β-caténine cytoplasmique et celle se fixant à l’E-cadhérine en faveur de celle présente dans le cytoplasme. Il en résulte une perte de l’adhésion intercellulaire qui favorise la migration des cellules tumorales (Goss and Groden, 2000; Gregorieff et al., 2005; Reya and Clevers, 2005).

L’altération de cette voie intervient à un stade précoce de la « séquence adénome-cancer ». En effet, les mutations du gène apc sont le premier évènement moléculaire de la séquence adénome-cancer. On dénombre actuellement 700 mutations du gène apc (Béroud and Soussi, 1996; Laurent-Puig et al., 1998; Powell et al., 1992). Dans la PAF, c’est une mutation germinale héréditaire d’un des allèles du gène apc qui est transmise (Half et al., 2009). S’il se produit une altération de l’autre allèle alors la voie WNT est activée de façon constitutive. Dans les CCR sporadiques avec une protéine APC fonctionnelle (15%), d’autres mutations géniques touchant les autres acteurs de la voie WNT sont responsables de sa sur-activation (Akisik et al., 2011).

Le modèle murin APCMin/+ (Min, multiple intestinal neoplasia), qui est un modèle de référence pour étudier le CCR possède une mutation du gène apc sur son codon 850 induisant

24 la formation d’un codon stop (Moser et al., 1990). Ces souris développent ainsi plusieurs centaines d’adénomes préférentiellement au niveau de l’intestin grêle. Les animaux plus âgés présentent des adénocarcinomes au niveau du côlon (Moser et al., 1990).