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IV. Méthodes

IV.3. c.i Simulations de Dynamique Moléculaire (DM)

La simulation par dynamique moléculaire (DM) est une méthode déterministe consistant à intégrer les équations du mouvement de Newton – qui sont classiques et non- relativistes (i.e. pour des particules « lourdes » et se déplaçant « lentement ») – et plus particulièrement à résoudre l’équation différentielle dérivée de la seconde loi de Newton (équation IV.19) pour tous les atomes contenus dans une boîte de simulation. De plus, comme la force interatomique est conservative, elle dérive d’une énergie potentielle (équation IV.20).

Dans ces équations, ri et vi sont la position et la vitesse de l'atome i, mi sa masse, ai son

accélération et fi est la force totale agissant sur cet atome. U est l'énergie potentielle totale du

système, par exemple dans le cas d'une simulation IGAR (lors de la trempe simulée) il s'agit de la somme de UREBOII et de UHRTEM.

Ainsi, connaissant la configuration initiale, i.e. l'ensemble des vecteurs positions et des vecteurs vitesses {ri,vi} des atomes du système, on peut calculer aisément son énergie potentielle et donc la force agissant sur chaque atome (équation IV.20). Puis, par intégration numérique de l'équation IV.19, il est possible de déterminer la trajectoire (évolution des positions et des vitesses atomiques) au cours du temps.

(équation IV.19)

f

i

= m

i

a

i

, avec a

i

= =

dv

i

dt

d

2

r

i

dt

2

(équation IV.20)

f

i

= -

dU

dr

i

Il existe de nombreuses manières d'intégrer l'équation (IV.19) [Allen 1987], nous présentons ici l'algorithme de « Verlet vitesse » [Swope 1982] utilisé dans ce travail. Dans cet algorithme, les positions au temps t+Δt sont obtenues à partir des positions, vitesses et accélérations au temps t de la manière suivante :

r

i

(t+Δt) = r

i

(t) + v

i

(t)Δt + (1/2) a

i

(t)Δt

2

(équation IV.21)

Les vitesses au temps t+Δt sont quant à elles obtenues à partir des vitesses au temps t et des accélérations aux temps t et t+Δt :

v

i

(t+Δt) = v

i

(t) + (1/2) [a

i

(t)+ a

i

(t+Δt)] Δt (équation IV.22)

On note que l'intégration des vitesses (équation IV.22) doit se faire en deux étapes puisque les accélérations (donc les forces) aux temps t et t+Δt sont nécessaires. En pratique, connaissant ri(t), vi(t) et ai(t), on commence par déterminer les positions à t+Δt en appliquant

l'équation IV.21, et on commence l'intégration des vitesses selon v'i(t+Δt) = vi(t) + (1/2) ai(t)

Δt. On peut ensuite déterminer l'énergie et les forces à t+Δt puis terminer l'intégration des

vitesses : vi(t+Δt) = v'i(t+Δt) + (1/2) ai(t+Δt) Δt. Cet algorithme peut se résumer sous la forme du pseudo-code suivant (figure IV.13) :

Figure IV.13. Pseudo-code d’un programme de dynamique moléculaire utilisant l'algorithme de « Verlet vitesse ». Programme MD : call initial do step = 1, nstep call verlet_a call potentiel call verlet_b end do end

Calculs initiaux des positions, vitesses et forces Boucle MD

Intégration des équations du mouvement (partie A) Calcul des Potentiels et des Forces

Intégration des équations du mouvement (partie B)

subroutine verlet_a : do i=1,Nat ri=ri+vi*Dt+0.5*fi*Dt**2 vi=vi+0.5*fi*Dt end do subroutine potentiel : do i=1,Nat-1 do j=i+1,Nat rij=rj-ri U=U+U(rij) fij=fij(rij) fi=fi+fij fj=fj-fij end do end do subroutine verlet_b : do i=1,Nat vi=vi+0.5*fi*Dt end do

En plus du choix de la fonction (champ de force) définissant la surface d'énergie potentielle U, il est également crucial de bien choisir la valeur du pas de temps Δt entre chaque itération. Le pas d'intégration doit être une fraction de la période du mouvement de plus haute fréquence. En particulier, pour des hydrocarbures aromatiques, les fréquences correspondantes aux modes d’élongation sont de ~ 3000 cm-1 entre les paires d’atomes CH et de ~ 1600 cm-1 entre les atomes de carbone, ce qui correspond à des périodes qui sont respectivement d’environ 10 et 20 fs par vibration. Cependant, plus Δt sera petit, plus la durée de calcul réelle sera grande pour un même temps simulé de la dynamique du système. L’augmentation de Δt engendre également des fluctuations de plus en plus importantes de l’énergie totale. Au-delà d’un certain point, ces fluctuations deviennent trop importantes et l’énergie du système n’est alors plus conservée. En conséquence, Δt doit être choisi le plus grand possible, sans toutefois que la conservation de l’énergie totale ne soit compromise. En pratique on utilise un intervalle de temps allant de 0,2 à 0,5 fs selon la température T à laquelle est effectué le calcul. En général plus T est élevée, plus Δt est faible. On utilise également un pas de temps légèrement plus faible si le système contient de l'hydrogène.

Les équations de la DM conservent l'énergie totale du système E = U + Ec, où Ec est

l'énergie cinétique, ainsi que le moment cinétique total du système P = i , où pi est la

quantité de mouvement de l'atome i (pi = mi vi). Dans le cas d'une simulation dite ergodique

(i.e. où toutes les configurations d'énergie E sont accessibles dynamiquement à partir de la configuration initiale), les configurations visitées le sont donc selon une distribution statistique micro-canonique (ensemble à N, V et E constants).

L’ensemble micro-canonique découle du postulat fondamental de la physique statistique introduit par Boltzmann selon lequel dans un système isolé, à l’équilibre thermodynamique (i.e. dont la fonction de distribution qui le décrit ne varie pas au cours du temps), tous les micro-états (ou configurations) ({ri, pi}, i=1,N) dont l’énergie E({rN,pN}) est

égale à l’énergie E du système sont équiprobables. La fonction de partition QNVE d’un système

micro-canonique à l’équilibre est alors uniforme et s’écrit :

Q

NVE

= C ∫

ΓωNVE(Γ)

dΓ, avec

ωNVE(Γ) =

δ(E(Γ)-E) et dΓ = dr

N

dp

N

(éq. IV.23)

où Γ (={rN, pN}=({ri, pi}, i=1,N)) est un point de l’espace des phases, ωNVE(Γ) est le poids statistique de la configuration Γ, δ représente la fonction de Dirac, et C est une constante de normalisation qui correspond au nombre de micro-états par unité de volume dans l’espace des

phases. Par exemple, pour un système de N particules sphériques indiscernables,

C = (N!

h

3N

)

-1, où h est la constante de Planck.

Soit A(Γ(t)) la valeur instantanée d’une grandeur (ou propriété) A. La valeur macroscopique observable expérimentalement Aobs est la moyenne temporelle de A(Γ(t)) :

A

obs

= <A(Γ(t))>

t

=

0

tobs

A(Γ(t)) dt (équation IV.24)

Notons que dans toute simulation de dynamique moléculaire, l’intégrale est remplacée par une sommation sur les événements successifs, avec un pas de temps suffisamment petit.

La notion de temps absente en thermodynamique classique n’est pas plus nécessaire en mécanique statistique et Gibbs a montré qu’à l’équilibre thermodynamique, on peut remplacer la notion de moyenne temporelle par celle de moyenne d’ensemble. Un ensemble est une collection de points Γ de l’espace des phases, associés à une densité de probabilité ρens(Γ). On

a alors :

A

obs

= <A>

ens

= ∫

Γ

A(Γ) ρ

ens

(Γ) dΓ, avec ρ

ens

(Γ) = C

(équation IV.25)

Par suite (équations IV.23 et IV.25), il vient :

<A>

ens

=

(équation IV.26)

Dans l’hypothèse ergodique où un système dynamique visitera chaque point de l’espace des phases avec une probabilité proportionnelle à son poids statistique, les moyennes d’ensemble (équation IV.24) et temporelle (équation IV.26) d’une propriété seront identiques. Par exemple, l’énergie cinétique Ec est la moyenne d’ensemble de la fonction énergie

cinétique Ec(pN). Le théorème d’équipartition de l’énergie énonce qu’à l’équilibre

thermodynamique, l’énergie cinétique d’un système de N particules vaut kBT (où kB est la

constante de Boltzmann) par degré de liberté du système, d’où :

E

c

= < E

c

(p

N

Dans cette équation, Nc est le nombre de contraintes indépendantes. Il peut être choisi

égal à 6, ce qui correspond à une invariance du système à la fois par translation dans une direction et par rotation autour d’un axe. Mais généralement, les trois rotations sont peuplées de kBT/2 chacune. Si le système ne translate pas (P = 0), alors Nc = 3, sinon Nc = 0. Notons

que pour un nombre d’atomes très grands, Nc est négligeable même si il n’est pas nul.

L’énergie cinétique instantanée Ec inst(pN) d’un système est donnée par :

E

c inst

(p

N

) =

(équation IV.28)

Dans une simulation ergodique, on peut alors définir la « température cinétique » instantanée du système comme :

T

inst

=

=

(équation IV.29)

dont la moyenne est égale à la température T du système.

La pression P du système, qui se décompose en un terme cinétique et un terme d’interaction, peut alors être définie par :

P =

+

, avec W(r

N

) =

(équation IV.30)

où W(rN) est le viriel pour un système dans des conditions périodiques.

Simulations à température imposée :

Nous présentons ici, la distribution canonique et les thermostats utilisés dans ce travail. Dans l’ensemble canonique (ensemble à N, V et T constants), l’énergie totale E peut fluctuer, et la fonction de partition QNVT du système à l’équilibre s’écrit :

Q

NVT

= C ∫

Γ

ω

NVT

(Γ) dΓ, avec ω

NVT

(Γ) = exp

et dΓ = dr

N

dp

N

(IV.31)

Dans une reconstruction IGAR, la température est contrôlée via un thermostat d’Andersen [Andersen 1980]. Un tel thermostat permet de fixer la température du système en ajustant périodiquement les vitesses selon une loi de distribution de Maxwell-Boltzmann

correspondant à la température désirée. Dans cette méthode, des particules sont donc échantillonnées aléatoirement à intervalles de temps réguliers et leur vitesse est réattribuée selon cette distribution :

ρ(v

) =

1/2

exp

(équation IV.32)

où ρ(viα) est la densité de probabilité pour les composantes vix, viy et viz.

L’avantage de ce thermostat est que, dans la limite d’une trajectoire infiniment longue, il génère un ensemble statistique rigoureusement défini (canonique). Cependant, son aspect stochastique implique que les fonctions qui sont dépendantes du temps sont affectées (en particulier aux temps courts).

Lors de simulations de MD hors équilibre, utilisées pour le calcul de conductivité thermique, la température est contrôlée via un thermostat de Berendsen. Le thermostat de Berendsen [Berendsen 1984] est une méthode homothétique basée sur l’approche de « recalage » des vitesses. Dans cette dernière, les vitesses sont recalculées périodiquement de sorte que l’énergie cinétique donne la température désirée :

= λ

, avec λ =

1/2

(équation IV.33)

où λ est le facteur de recalage des vitesses.

Le thermostat de Berendsen diffère de cette approche car il assigne une constante de temps pour la mise à jour des vitesses, au lieu de supposer qu’elles sont complètement ajustées à la température cible à chaque période de temps. Cette approche suppose que le système est faiblement couplé avec un bain thermique dont la constante de couplage, où la constante de temps de transfert thermique, est τ. La température cinétique instantanée suit une décroissance exponentielle contrôlée par ce temps de relaxation τ :

=

(T

bain

– T(t)) (équation IV.34)

λ

2

= 1 +

(équation IV.35)

Malheureusement, le thermostat de Berendsen ne génère pas un ensemble connu (seulement micro-canonique dans la limite de la constante de temps infinie, ce qui ne présente aucun intérêt). Par contre, ce thermostat permet d’éviter la dérive de l’énergie aux temps très longs des simulations dans l’ensemble NVE. Dans cette étude, il est utilisé pour le calcul de la conductivité thermique hors plan (voir la partie IV.5.b. « Calcul des propriétés thermiques » ci-après).