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Ce projet de recherche vise à comprendre l’articulation de la chaîne de transposition didactique, c’est-à-dire le trajet que parcourent certains « savoirs à enseigner » en danse vers leur état de « savoirs enseignés » (Chevallard et Johsua, 1991). Ainsi, je cherche à analyser les savoirs sélectionnés en tant que référence curriculaire55 (la transposition externe) sous l’angle des pratiques d’enseignement

effectives en milieu scolaire (la transposition interne). Analyser le processus de transposition didactique interne implique de prendre en compte les phases de planification des apprentissages, d’interaction en classe et de régulation des enseignements. Ces phases constituent en quelque sorte les étapes du trajet que parcourent les « savoirs à enseigner » vers leur état de « savoirs enseignés ».

Au cœur même de cette recherche, la notion de transposition didactique, développée d’abord par Chevallard (1985), enrichie ultérieurement par celui-ci en collaboration avec Johsua (1991), reprise et contextualisée par plusieurs (Arnaud- Bestieu, 2011; Beaugé, 2004; Léziart, 2003; Musard, Robin, Nachon et al., 2008; Paun, 2006; Perrenoud, 1996, 1998) et critiquée par d’autres (Amade-Escot, 2005; Martinand, 1986, 2001; Raisky, 2001; Terrisse, 2001), sert d’assise conceptuelle

54 La dimension socioaffective de l’intervention éducative, quant à elle, a trait « au rapport à l’identité professionnelle, à la formation antérieure, à la motivation, aux options et visées personnelles. » (Maubant, 2011, p. 65)

55 Depuis l’examen général réalisé en 2010, je continue de penser que cette sélection de savoirs de danse est orientée par les choix didactiques et pédagogiques des enseignants qui participent à ma recherche, et ce, à la lumière du programme de danse au primaire en vigueur. Pour avoir accès à ces choix, j’ai eu recours à une première phase d’entretiens d’explicitation (Vermersch, 2006) visant à mettre au jour les « actions mentales » et les « savoir-faire » sous-jacents au processus de planification des situations d’apprentissage et d’évaluation (SAÉ) que vivent les enseignants interrogés.

principale pour éclairer la compréhension des modes de transmission des savoirs et des pratiques de danse privilégiés à l’école primaire. À ce titre, ce projet de recherche permet de soulever une première question globale, qui s’articule de la manière suivante :

Comment les savoirs prescrits dans le programme de danse au primaire sont-ils transposés dans les pratiques de planification des apprentissages et dans l’intervention en classe?

À cette première question de recherche se greffent deux autres questions plus précises visant à guider la description qu’on peut faire des processus de transformation des savoirs et des pratiques de référence en enseignement de la danse à l’aide de la chaîne de transposition didactique (Chevallard et Johsua, 1991) :

Comment les enseignants de danse au primaire prennent-ils en compte les savoirs essentiels dans la planification des apprentissages?

Dans l’intervention en classe, à quels dispositifs didactiques les enseignants de danse recourent-ils pour soutenir les apprentissages d’ordre artistique, esthétique et culturel de leurs élèves?

Au terme de ce premier chapitre consacré à la formulation de la problématique de recherche, le temps est venu de porter un regard attentif sur les pratiques de transposition didactique qui se manifestent en classe de danse au primaire56. Le modèle proposé par Chevallard mérite en ce sens d’être actualisé au regard du développement de compétences d’ordre artistique, esthétique et culturel qui exigent la mobilisation de savoirs multiples passant, dans le cas de la danse, par une appropriation « pratique » et « sensible ». Dans cette optique, ce modèle sera présenté

56 Les pratiques de transposition didactique constituent bel et bien l’objet d’étude qui me tient à cœur depuis plusieurs années, en fait, bien avant l’amorce de mes études doctorales en 2008, ayant fait mes débuts en enseignement de la didactique de la danse en milieu universitaire dix ans auparavant.

en tant que cadrage de la recherche pour approcher le terrain des pratiques de transposition didactique en danse, et non comme modèle utilisé à des fins de vérification théorique (Glaser et Strauss, 1967/2010; Paillé et Mucchielli, 2012).

DEUXIÈME CHAPITRE ASSISES CONCEPTUELLES

Le présent chapitre vise à définir la notion de transposition didactique (Chevallard et Joshua, 1991) et à retracer son évolution depuis sa première conceptualisation par le sociologue Michel Verret dans les années 1970. Cette réflexion conceptuelle exige également de se pencher sur les travaux des chercheurs en sociologie de l’éducation et en didactique qui l’ont empruntée, pour mieux comprendre, d’une part, les transformations que subissent les savoirs disciplinaires enseignés à l’école et, d’autre part, le type de rapport que les enseignants et les élèves entretiennent avec ces savoirs. Il s’agit des savoirs qui ont migré depuis l’environnement sociétal vers la classe, là où les interactions contribuent à donner un sens au système didactique.

Ce deuxième chapitre comporte cinq parties. La première permet de clarifier les assises conceptuelles de la notion de transposition didactique, en distinguant les enjeux des champs de recherche de la didactique et des didactiques ainsi qu’en précisant en quoi le concept de « rapport au savoir » et la notion de transposition didactique sont en forte résonance dans le processus d’enseignement-apprentissage. La deuxième vise à définir la notion de transposition didactique depuis sa conceptualisation en sociologie du travail (Verret, 1975) et son adaptation pour la didactique des mathématiques (Chevallard et Johsua, 1991). Cette partie soulève la question de la référence aux savoirs scolaires, qui se trouve au cœur même des critiques adressées au modèle de Chevallard. La troisième expose les modifications apportées au modèle de transposition didactique pour étudier les disciplines scolaires autres que « savantes ». La quatrième propose quelques considérations sur les recherches en didactique qui ont dû être prises en compte dans la réalisation de ce projet de recherche. Enfin, la cinquième partie donne l’occasion de formuler les objectifs de la recherche, auxquels s’ajoutent les choix qui délimitent le projet. Un

inventaire de référents interprétatifs et de repères théorisants est formulé en conclusion du chapitre.

1. CLARIFICATION AUTOUR DE LA NOTION DE TRANSPOSITION