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Chapitre 7. Biodiversité et adaptation

7.1 Changement climatique et biodiversité : enjeux reliés

7.1.2 La biodiversité à l’ordre du jour

Nous avons noté que les considérations de biodiversité urbaine étaient aussi importantes pour comprendre comment s’opère le verdissement à Montréal. Lorsque questionnés à propos des tenants et aboutissants du verdissement et de l’ACC, quatre des huit acteurs rencontrés (acteurs 3-4-6-8) ont abordé le thème de la biodiversité. Selon eux, il s’agit d’un enjeu important qui interfère dans les questions d’ACC et de verdissement.

Engagée dans la cause du maintien de la biodiversité urbaine, Montréal participe au projet « Action locale pour la biodiversité » (en anglais : LAB – Local action for Biodiversity) qui favorise une réflexion approfondie sur l’état de la biodiversité en milieu urbain, la mobilisation des parties prenantes, l’échange sur les meilleures pratiques et la mise en place d’initiatives concrètes. Cette démarche se décline en cinq étapes qui sont les suivantes :

1. Élaboration d’un rapport sur la biodiversité et ses modalités de gestion; 2. Signature de l’Engagement de Durban;

3. Élaboration d’une stratégie et d’un plan d’action en faveur de la biodiversité; 4. Engagement de la collectivité à la mise en œuvre de la stratégie et du plan

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5. Mise en œuvre de trois actions concrètes.

Pour l’instant, seules les deux premières étapes sont réalisées. On nous a renseigné que l’élaboration de la stratégie était dans les cartons, mais que pour l’instant, les ressources humaines manquaient pour pouvoir mettre le processus en branle (acteur 8). En ratifiant l’Engagement de Durban en 2011, la Ville signifiait, entre autres, son intention de prendre en compte la biodiversité dans tous les aspects de la planification locale. L’appareil municipal a publié un rapport sur la biodiversité récemment témoignant de l’actualité de l’enjeu (Ville de Montréal, 2013).

7.1.2.1 Les services écosystémiques du Grand Montréal

Une étude produite conjointement par la Fondation David Suzuki et Nature-Action Québec, intitulée Le capital écologique du Grand Montréal, illustre comment la question des services écosystémiques et de la biodiversité est importante dans le contexte montréalais. L’étude « […] propose un regard économique sur la valeur des services rendus par les écosystèmes dans la grande région de Montréal, […] identifie certains biens et services qu’ils procurent et leurs impacts sur la qualité de vie des habitants de ce territoire. » (FDS et NAQ, 2013, p.11). On dénombre huit services écosystémiques dont on évalue la valeur : régulation du climat, loisirs, tourisme, habitat pour la biodiversité, régulation des crues, contrôle de l’érosion, pollinisation et approvisionnement en eau. Elle conclut que la valeur du capital naturel de la Ceinture verte du Grand Montréal atteint, sur 20 ans, la coquette somme de 64 milliards de dollars.

Il ne nous est pas possible d’attester de la pertinence ou de la fiabilité de la méthodologie retenue dans le cadre de l’étude de la Fondation David Suzuki pour l’évaluation de la valeur du capital naturel de la Ceinture verte. Toutefois, l’étude fournit quand même un argument convaincant quant à l’importance des enjeux de biodiversité. La protection de la biodiversité a une valeur inhérente (dont on ne tient pas compte dans l’économie marchande), car elle passe par la protection des milieux naturels qui fournissent des services écosystémiques de grande valeur. Parmi ces services, il y a des services de régulation du climat et des crues, deux des principaux problèmes à appréhender à cause du changement climatique. La biodiversité est un faire-valoir supplémentaire en faveur du verdissement et de l’ACC.

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7.1.2.2 La biodiversité dans l’action publique

Comment la question de la biodiversité est-elle intégrée au fonctionnement de l’organisation municipale? Le rapport sur la biodiversité dit que « [… ça] se fait principalement à travers la définition et la mise en œuvre d’outils englobants tels le Schéma d’aménagement et de développement et le Plan d’urbanisme, ainsi que d’outils plus spécifiques comme le Programme de suivi du milieu aquatique, le Programme de gestion des écosystèmes, le Règlement sur l’utilisation des pesticides, la Politique de protection et de mise en valeur des milieux naturels, la Politique de l’arbre et les Plans de développement durable (collectif et corporatif) » (Ville de Montréal, 2013, p. 38). Le document mentionne aussi le Plan d’action

canopée, le Plan d’action montréalais de lutte contre l’agrile du frêne 2012-2015 et la Stratégie montréalaise de l’eau 2011-2020 comme des plans et programmes comprenant des

actions favorables à la biodiversité. L’action en matière de biodiversité semble donc aussi passer par l’inclusion de mesures favorisant la biodiversité dans les plans et documents existants, à l’instar de ce qui se fait en matière d’ACC. En regardant le tableau à l’annexe 2, on réalise que ce sont essentiellement les mêmes plans et documents qui abordent les questions, d’une part, de verdissement et, d’autre part, de biodiversité et d’ACC. S’il y a une telle concordance, c’est peut-être parce que nous sommes en train d’assister à une prise en compte de la biodiversité, au même titre que l’ACC, dans la politique publique de verdissement, et ce, étant donné les liens forts qui les unissent.

7.1.2.3 Biodiversité : verdissement et aires protégées

En ce qui concerne le verdissement à proprement parler, nous avons noté que l’importance accordée à la biodiversité pourrait servir d’argument pour la renaturalisation de certains espaces urbains. C’est rendu possible grâce au fait que le PMAD propose comme objectif la protection de 17 % du territoire établie du Grand Montréal (ce qui inclut aussi les cours d’eau). L’agglomération montréalaise s’est plutôt fixé comme objectif la protection de 17 % du territoire terrestre. L’acteur 8 soulignait qu’il y a plusieurs catégories de territoire protégé. En fonction des caractéristiques biologiques des milieux, on peut en déterminer sept classes, définies par l’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN). Même si un milieu n’est pas « naturel » dans le sens strict du terme, il peut être classé comme territoire protégé. C’est le cas notamment d’une portion du territoire de l’île Bizard, dans l’ouest de l’agglomération, reconnu comme un paysage humanisé protégé par le gouvernement québécois (catégorie V dans la classification de l’IUCN). L’objectif de protéger 17 % du territoire terrestre d’une agglomération fortement urbanisée est ambitieux et suppose que des

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milieux artificialisés pourraient éventuellement être renaturalisés à divers degrés dans le but d’être désignés comme territoire protégé, ce qui contribuerait en même temps au verdissement et à l’ACC. Il existe donc des liens clairs entre les enjeux de verdissement urbain et de biodiversité urbaine. D’ailleurs, certaines parties prenantes de la politique de verdissement s’y impliquent davantage par souci de préservation de la biodiversité que par souci du verdissement lui-même, comme la Fondation des Cowboys Fringants qui le mentionne sur son site internet que l’ « objectif premier de la Fondation est de protéger les territoires à risque tant au niveau des habitats que des espèces fauniques et floristiques menacées » (Fondation des Cowboys Fringants, s.d.). Si l’enjeu de la biodiversité peut servir le verdissement, la relation inverse est tout aussi vraie, en ce que le verdissement, la lutte aux ICU et une meilleure GEP peuvent servir la cause de la biodiversité urbaine.

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