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Chapitre 1 : Etat de l’art

1.2.2 Biocompatibilité mécanique et cellulaire

1.2.2.2 Biocompatibilité mécanique

Les implants dentaires, les prothèses articulaires, les substituts osseux… ont pour objectif de

remplacer une partie endommagée d’un os. L’os étant un tissu vivant et dynamique, il est en constant

remodelage et en conséquence, il tend à s’adapter aux sollicitations, c’est-à-dire aux contraintes qu’il

subit. Avant de s’intéresser à proprement dit aux problèmes de biocompatibilité mécanique, il faut

comprendre les structures osseuses ainsi que les mécanismes de reconstruction osseuse. En effet, les

os remplissent à la fois une fonction mécanique de résistance aux contraintes, de soutien du corps et de

Chapitre 1 : Etat de l’art _____________________________________________________________________

1.2.2.2.1 Structure osseuse

Un os est constitué de deux principaux types de tissu : l’os cortical ou haversien compact, enveloppe

extérieure dure de l’os, et l’os trabéculaire ou haversien alvéolaire d’apparence spongieuse, à

l’intérieur de l’os. L’unité de base constituante de l’os cortical est l’ostéon aussi appelée système de

Havers. C’est une succession compacte de lamelles osseuses concentriques, disposées

longitudinalement à la manière de cylindres d’axes parallèles à celui de l’os. Cette structure contribue

à la résistance de l’os en résistant à la flexion. Des cellules appelées ostéocytes sont distribuées dans

des lacunes aux jonctions de chaque lamelle. Elles forment un réseau complexe qui contribue à

maintenir la viabilité et l’intégrité structurale de l’os. Au centre des ostéons se trouvent des canaux de

Havers. Ces canaux contiennent des vaisseaux sanguins et des nerfs qui facilitent les échanges entre

les ostéocytes et le sang. L’os trabéculaire est présent à l’intérieur des os et contribue à leur résistance

à la compression. Il a une structure spongieuse et alvéolaire, qui présente de petites cavités. Ainsi, il

agit comme un amortisseur grâce à la moelle présente dans les alvéoles. Cette structure contient

également des ostéocytes qui sont capables de détecter les changements de chargement et de

contrainte. Il est alors capable de s’adapter en aménageant des espaces et en orientant les alvéoles pour

mieux y résister.

1.2.2.2.2 Le remodelage osseux

L’os est un tissu qui est continuellement construit, détruit et reconstruit grâce au mécanisme du

remodelage osseux. Les cellules osseuses intervenant dans ce processus peuvent être séparées en trois

catégories principales : les ostéoformatrices qui correspondent aux ostéoblastes, les ostéocytes

mécano-senseur, et les ostéoclastes qui entraînent la résorption osseuse. Le remodelage osseux est

soumis à deux modes de régulation : une régulation hormonale et une régulation « mécanique ». La

première vise à maintenir la concentration de calcium dans le sang et détermine le moment de

démarrage du remodelage (l’attaque de l’os par les ostéoclastes libèrera les minéraux nécessaires). La

seconde dépend des efforts mécaniques qui agissent sur le squelette. Elle détermine l’endroit de l’os

auquel le remodelage sera effectué afin de s’adapter aux contraintes qu’il subit.

__________ 1.2 L’apport de la métallurgie et des procédés additifs pour les dispositifs médicaux implantables

Des études ont déterminé les différentes étapes du remodelage osseux (figure 11) : activation,

résorption, inversion, formation et latence [47]–[50].

Figure 11 : Représentation schématique du remodelage osseux

Pendant la phase d’activation les cellules vont être activées grâce à des stimuli. Ces signaux vont

permettre la différenciation de cellules du sang et de la moelle osseuse en cellules osseuses :

ostéoclastes et ostéoblastes. Durant la phase de résorption, les ostéoclastes viennent adhérer à la

surface de l’os pour créer un micro-environnement sous la cellule. Dans cette zone, les composants

minéraux de l’os sont dissous puis, les enzymes libérées par l’ostéoclaste retirent le collagène restant

pour compléter la résorption. Au cours de l’étape d’inversion, l’activité des cellules est inversée. Les

ostéoblastes prennent la place des ostéoclastes pour lancer la reformation de tissu osseux. Pendant la

phase de formation, les ostéoblastes sont « attirés » vers les surfaces résorbées. Ils les parcourent en y

déposant principalement du collagène. Des minéraux cristallisent autour de ce collagène pour former

de l’hydroxyapatite. Enfin, le tissu revient en phase de repos ou de latence. La structure est formée, les

ostéoclastes ainsi que certains ostéoblastes subissent l’apoptose tandis que les autres ostéoblastes sont

« piégés » dans la matrice osseuse et se transforment en ostéocytes. Le tissu reste alors « en veille »

jusqu’au prochain remodelage qui pourra être déclenché par différents facteurs, par exemple

mécaniques. En effet, les ostéocytes forment un système complexe dans l’os et sont capables de

ressentir les changements de chargement et d’y répondre en lançant le processus de différenciation. Ils

régulent alors l’activité des ostéoclastes et des ostéoblastes pour augmenter la densité osseuse d’un os

dont le chargement aurait augmenté ou pour supprimer les tissus sous-chargés. Ce phénomène a été

décrit par la loi de Wolff. Cette théorie stipule que l’os se remodèle en fonction du chargement

extérieur qui lui est appliqué. L’architecture de l’os spongieux subira des changements adaptatifs de

structure suivis par des modifications en épaisseur de l’os cortical. On comprend alors que lors de la

pose d’une prothèse ou d’un implant, le chargement sur l’os se trouvera grandement modifié et ceci

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1.2.2.2.3 Le stress-shielding

Le problème des prothèses est le comportement évolutif de l’os traité dans le temps. Du fait de la

grande différence de module d’élasticité entre l’implant et l’os, il y a une discontinuité des contraintes

entre les deux milieux. En effet, les mouvements du corps créent des charges qui s’appliquent sur les

articulations et, en configuration physiologique, c'est-à-dire pour un os sain sans prothèse, celles-ci

sont appliquées directement sur le fémur et les contraintes s’y répartissent d’une manière définie. La

morphologie de l’os et des travées osseuses se construit en conséquence (figure 12).

Figure 12 : Travées osseuses construites pour résister aux contraintes physiologiques

Lorsqu’un implant, de rigidité supérieure à celle de l’os, est inséré dans le canal médullaire, la charge

est appliquée sur l’implant articulaire qui encaisse une grande partie des contraintes et transmet le

reste à l’os. La répartition des contraintes dans l’os est ainsi modifiée et amoindrie, c’est le phénomène

de stress-shielding (déviation des contraintes) [51]. Conformément à la loi de Wolff [52], l’os va

tendre à s’adapter à cette nouvelle situation. Les contraintes jouant le rôle de stimulus pour le

remodelage osseux, la réduction des contraintes relative à la situation naturelle va conduire l’os à

s'adapter en réduisant sa masse, soit en devenant plus poreux soit en s’amincissant. En effet, la loi de

Wolff établit le lien entre la différence de stimulus

et la dérivée de la masse spécifique de

l’os en fonction du temps, S

ref

correspondant à une configuration physiologique et S à la configuration

modifiée au même endroit et pour un même chargement (équation 2). Cette règle de remodelage

conduit à la classification de trois états. Ces états de remodelage peuvent être représentés

graphiquement comme sur la figure 13.

__________ 1.2 L’apport de la métallurgie et des procédés additifs pour les dispositifs médicaux implantables

Figure 13 : Les trois états de remodelage osseux

La zone centrale horizontale correspond à une configuration physiologique de l’os. Les sollicitations

sont « habituelles », le remodelage est en état de veille. Dans la zone de gauche, les tissus osseux sont

sous-sollicités par rapport à la situation normale. L’os cherche à se résorber. Dans la partie de droite,

la sollicitation sur l’os est forte, il y a donc formation de tissu osseux. Dans les deux cas, il y a

stress-shielding. Ainsi, si , on observera une résorption osseuse et si , il y aura

densification osseuse. Les changements de morphologie osseuse après pose d’une prothèse totale de

hanche par exemple (figure 14) sont un effet du stress-shielding et du subséquent processus de

remodelage osseux [53]. L’objectif étant que l’os reste globalement identique après pose de la

prothèse, le stimulus souhaité peut être décrit par

.

Figure 14 : Les effets du stress-shielding sur la résorption osseuse après pose d’une prothèse totale de hanche après 1 mois,

3 ans, 5 ans et 11 ans [53]. Une densification peut être observée au niveau du bas de la tige fémorale (zone entourée en

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