Chapitre 1 : Etat de l’art
1.2.5 Apport des structures architecturées
Enfin, une étude très récente de Wang et al. [108] s’est penchée sur l’élaboration d’alliages de Ti-Nb.
Ils ne se sont pas intéressés de manière extensive à l’homogénéité de l’alliage mais plutôt à l’effet de
la proportion de niobium sur les phases en présence, sur les propriétés microstructurales et mécaniques
et sur la formation d’apatite in vitro. Globalement, cette étude soutient le concept de fabrication in situ
en démontrant que la technologie SLM peut être utilisée pour fabriquer des implants en Ti-Nb avec
des propriétés customisées par l’ajustement de la proportion de Nb.
L’ensemble de ces études montre qu’il est possible de réaliser des alliages en SLM à partir de poudres
élémentaires avec une méthode d’élaboration in situ. Cette méthode présente un fort potentiel : en plus
de pallier au manque de disponibilité des poudres, elle permet de jouer à l’infini sur les compositions
et ainsi de personnaliser les propriétés des matériaux.
1.2.5 Apport des structures architecturées
Pour réduire le module d’élasticité des dispositifs médicaux implantables, la recherche a d’abord été
concentrée sur la recherche de compositions et de traitements thermomécaniques. Toutefois, il existe
un second levier sur lequel il est possible d’agir : la porosité [109]. L’attrait pour les structures
poreuses ou architecturées s’est renforcé ces dernières années avec l’essor des procédés de fabrication
additifs. Ces derniers permettent de concevoir et fabriquer des structures, généralement constituées
d’une maille élémentaire ou de cellules unitaires répétées périodiquement, à taux de porosité contrôlés
précisément et de tailles et formes de pores maîtrisés. Les propriétés de cette cellule élémentaire
détermineront les propriétés du treillis complet.
Une structure treillis idéale doit restaurer les fonctions de l’os et favoriser la guérison des tissus
osseux. Elle doit pour cela être biocompatible et présenter des surfaces adaptées à la croissance et la
prolifération cellulaire pour permettre le développement des cellules osseuses dans les porosités [110].
L’article review de Karageorgiou et Kaplan [111] suggère que des tailles de pores supérieurs à 300 µm
sont recommandés pour supporter la vascularisation et l’ostéogénèse. Taniguchi et al. [112] ont étudié
Chapitre 1 : Etat de l’art _____________________________________________________________________
in vivo l’effet de la taille des pores sur la colonisation osseuse dans des implants poreux en titane. Des
implants cylindriques de porosité constante de 65 % et avec des tailles de pores de 300, 600, et 900
µm ont été posé dans des fémurs de lapin. Ils ont montré que la structure aux pores de 600 µm
favorisait une croissance osseuse plus rapide, un meilleur ancrage et était donc la plus adaptée pour la
fabrication d’implants orthopédiques.
La fabrication de structures offre la possibilité de créer un matériau au module d’élasticité très bas afin
d’imiter les propriétés de l’os et limiter le stress-shielding tout en améliorant l’ancrage mécanique de
l’implant dans l’os. Il faut toutefois prendre l’ensemble des éléments en compte lors de la conception
des structures, car si la porosité améliore les processus biologiques et réduit le module d’élasticité, elle
réduit également la résistance du matériau [109], [113]. En effet, l’augmentation du taux de porosité
réduit la surface qui supporte la charge et mène à une diminution logique des propriétés mécaniques.
Wauthle et al. [114] ont analysé les propriétés mécaniques statiques et
dynamiques de structures poreuses de type dodécaèdre en titane pur
(figure 19). Cette étude fait écho à deux études du même groupe de
recherche présentant une approche similaire avec des structures en
Ti-6Al-4V ELI (grade23 : Extra Low Interstitials) et en tantale [115],
[116]. Les structures peuvent être définies par la taille des poutres et la
taille de pore qui les composent.
Figure 19 : Cellule élémentaire
dodécaèdre [116]
Ils ont étudié 4 combinaisons et donc 4 taux de porosité différents. La figure 20 présente leurs résultats
et montre la présence de cet effet de réduction du module et des contraintes de compression avec la
porosité. Les mêmes constatations sont faites sur la tenue en fatigue du matériau (figure 21).
Figure 20 : Evolution en fonction de la porosité des contraintes de compression(σy : limite élastique et σpl : contrainte au
__________ 1.2 L’apport de la métallurgie et des procédés additifs pour les dispositifs médicaux implantables
Figure 21 : Propriétés mécaniques dynamiques des structures dodécaèdre : lois puissance pour les 4 structures Ti et
Ti-6Al-4V ELI (Taille de poutre-taille de pore) (a), résistance en fatigue à 106 cycles en fonction de la porosité (b)
Néanmoins, le taux de porosité n’est pas à prendre en compte seule [113]. L’architecture, la
morphologie des porosités est également à prendre en compte car à matériau et taux de porosité égal,
la géométrie de la cellule élémentaire peut influer sur les propriétés mécaniques de la structure. On
peut citer les travaux de Ahmadi et al. [117] qui ont étudié 6 types de structures : cubique (C), diamant
(D), cube tronqué (TC), cuboctaèdre tronqué (TCO), dodécaèdre rhombique (RD) et cuboctaèdre
rhombique (RCO). Leurs résultats (figure 22) montrent une différence entre les propriétés des
différentes cellules. La structure « cube tronqué » est la plus résistante mais présente aussi le plus haut
module de Young relatif, alors que la structure « diamant » présente la résistance la plus faible et le
module de Young relatif le plus bas.
Figure 22 : Structures étudiées par Ahmadi et al. [117] (a) et l’évolution en fonction de la densité relative du module
d’élasticité relatif (b), de la limite d’élasticité (c) et de la contrainte au plateau (moyenne des contraintes à 20 % et 40 % de déformation) (d)
Il est à noter qu’il existe de nombreuses méthodes pour concevoir des structures et les possibilités sont
pratiquement infinies. Wang et al. [110] ont classifiés les différentes méthodes en 4 grandes
catégories : le recours à un logiciel de CAO est la méthode la plus classique, le design basé sur des
images de tomographie ou d’imagerie à résonnance magnétique (IRM) permet de se placer au plus
Chapitre 1 : Etat de l’art _____________________________________________________________________
créer des formes, et l’optimisation topologique place la matière de manière à répondre aux contraintes
appliquées au système (figure 23). Nonobstant, il faudra toujours prendre en compte les contraintes de
fabrication lorsque l’on conçoit une structure [118].
(a)
(b) (c) (d)
Figure 23 : Design par la CAO [119], [120] (a), basé sur l’imagerie [121] (b), par surfaces mathématiques [122](c),par
optimisation topologique [123](d)