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Les bibliothèques, des espaces multifonctionnels reliés à d’autres espaces ?

Sous l’effet du numérique, qui déplace ou supprime les frontières physiques et symboliques entre les espaces et entre le dedans et le dehors, mais aussi sous l’effet d’autres évolutions (dans les modes de mobilité, dans les services publics de proximité, dans l’éducation…), les bibliothèques sont amenées à repenser à la fois leurs espaces et leur intégration spatiale dans un ou des territoire(s).

Nombre de sites visités cherchent à décloisonner les espaces, à désenclaver les activités numériques, (par exemple, en faisant cohabiter jeux vidéo et jeux de société), et à mieux les intégrer dans la chaîne de l’accueil (par exemple, en rapprochant physiquement d’un guichet d’accueil une activité de fabrication ou une bibliobox). Les circulations des personnes dans ces espaces leur permettent ainsi d’expérimenter de façon fluide les différentes sortes de « réalités ». Cette tendance devrait s’accentuer avec la progression des technologies d’immersion et de réalité virtuelle.

Nous avons vu que, de plus en plus, que ce soit en territoire rural ou urbain, les bibliothèques jouent un rôle d’animation du territoire. Dans certains cas, on leur attribue clairement une « fonction socioculturelle », qui fait que leurs espaces accueillent toutes sortes d’activités et d’évènements du quartier ou de la commune, qui ont parfois peu à voir avec les activités traditionnelles d’une bibliothèque, mais qui font venir d’autres personnes que les usagers habituels et introduisent de nouvelles relations entre professionnels et usagers (ateliers de cuisine, de couture, fablab, lieu associatif, cafétéria…). Cela redessine aussi en profondeur l’organisation de l’espace de la bibliothèque et de ses abords et suppose que cet espace soit mis en cohérence et en lien avec d’autres espaces du territoire qui sont pertinents pour les mêmes populations.

Pistes 1

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Pour une fluidité des parcours

- Travailler la continuité entre les services physiques et numériques, à la fois dans les transactions (prêt-retour), dans les animations culturelles et dans l’accompagnement. Cette continuité peut et doit être différente selon les publics, les moments, les thématiques. Cela suppose, afin d’améliorer les interfaces, d’intégrer davantage d’usagers dans les phases de développement en amont des phases bêta de mise en place des outils (la tendance souvent est de ne travailler qu’avec des habitués…), et d’exiger des prestataires une vraie expertise dans le domaine et dans la conception collaborative de ces interfaces. L’UX design donne des pistes, à condition qu’il relève d’une conception « holistique » de

l’usager, c'est-à-dire prenant en compte à la fois ses pratiques et ses contraintes, et qu’il s’appuie sur une définition claire des missions dans un territoire donné.

- La question des espaces : pour mener à bien cette articulation entre le physique et le numérique, de nombreux professionnels souhaitent une gestion plus souple des espaces en bibliothèque, avec des espaces modulables, un mobilier facile à déplacer. Sur cet axe, une réflexion plus transversale serait à mener sur le rôle du wi-fi en bibliothèque, qui réinterroge l’organisation spatiale. Souvent perçu comme un moyen d’attirer les jeunes en bibliothèque, il représente aussi un outil pour travailler le lien avec les ressources physiques de la bibliothèque.

- Les éléments ci-dessus impliquent également une réflexion stratégique d’ensemble sur le BYOD : ses supports, ses finalités, ses règles, ses différentes applications. On voit bien ici que la continuité des sphères physique et numérique passe à la fois par les usages (leur connaissance fine, le suivi au quotidien des changements…), par les outils (les analyser, les sélectionner, les approprier, les visibiliser) et par un rapport en ligne/hors ligne harmonisé (au plan de la communication, au plan du design de sites, de blogs, de réseaux sociaux, au plan du parcours d’emprunt…).

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Pour de nouvelles interactions

- Travailler à la conception ou à l’évolution des sites, blogs, réseaux sociaux en concertation avec

des usagers : lisibilité, attractivité, pertinence, cohérence entre les outils… On trouvera en annexe de ce

rapport une proposition de grille d’analyse, réalisée à partir des résultats de cette étude (et illustrée d’exemples anonymisés), à adapter selon les contextes et qui peut évoluer au fur et à mesure qu’apparaissent de nouveaux outils et de nouvelles formes d’organisation.

- Rechercher une cohérence de sens mais aussi visuelle et graphique entre, d’une part, les contenus et la sémantique des sites, blogs ou comptes de réseaux sociaux et, d’autre part, leur présentation dans le lieu physique de la bibliothèque, afin de faciliter le repérage par les usagers et leur perception des complémentarités et synergies proposées.

- Renforcer les compétences relationnelles en ligne. Cela implique par exemple, de visibiliser et de promouvoir davantage des services tels que Eurêkoi54 qui sont adaptés aux pratiques en ligne/hors ligne des usagers, même si cela revient à « plateformiser » (un peu) les relations entre bibliothécaires et usagers. Tout en étant un service à distance, Eurêkoi a aussi l’avantage de susciter « une proximité de réseau entre les professionnels ». Dans certains cas, il y a lieu de renforcer et de mettre en réseau la culture numérique de professionnels et des bénévoles, pour optimiser par exemple les réseaux sociaux et les outils collaboratifs afin de mieux interagir avec les jeunes et de favoriser leur expression. Dans d’autres cas, ces compétences sont déjà présentes et il s’agit de les légitimer davantage et de les inscrire dans les objectifs et les missions des équipements. Le public jeune fréquente davantage les bibliothèques aujourd'hui, cela doit pouvoir perdurer et la relation s’enrichir.

- S’appuyer sur les compétences présentes en proximité et tenir une veille stratégique et partagée

des acteurs les détenant sur le territoire ou qui sont mobilisables à distance.

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- Mener des actions de sensibilisation et/ou de formation sur les pratiques culturelles et

numériques des adolescents d’aujourd’hui, tout d’abord au niveau des bibliothécaires mais aussi dans

le cadre de formations conjointes avec d’autres acteurs de la jeunesse, de l’éducatif, du social, de l’urbanisme, présents sur le territoire. Cela faciliterait un travail partenarial qui se fait parfois assez difficilement du fait des différentes cultures professionnelles. Des sensibilisations plus régulières sont à réaliser aussi auprès d’élus et de décideurs et, là aussi, le partage de méthodologies et d’argumentaires peut faciliter la démarche.

- Accompagner la transformation de la bibliothèque en un lieu culturel plus global (et, le cas

échéant, un lieu social et un point nodal de différents réseaux). Cela représente dans certains

territoires un état de fait qui n’est pas encore toujours bien accepté et qui peut être difficile à assumer pour les bibliothécaires. Ce qui rend plus essentiel encore l’intensification du partenariat avec les acteurs de proximité de toute nature. Une meilleure inscription dans le contexte local est recherchée, ce qui demande des moyens et, bien entendu, un appui des tutelles.

2. Pratiques culturelles et numériques du public adolescent

et missions des bibliothèques