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Un accompagnement de l’usager à la fois en ligne et en présence

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Des plateformes d’un usage difficile, ce qui remet au centre l’accompagnement par les

bibliothécaires

Au plan de l’ergonomie, certaines plateformes se révèlent d’un usage peu convivial, elles ne sont

compréhensibles que par des usagers aguerris ou très cultivés, ce qui a pour conséquence de limiter l’ouverture à de nouveaux usagers, à l’encontre des objectifs des plateformes dématérialisées. Sur une plateforme étudiée, les ressources sont assez mal valorisées, l’ergonomie du maniement est faible (affichage, navigation, onglets…), seule une recherche dans le catalogue est possible… Cette plateforme est décrite par un responsable comme « difficile d’accès sans médiation. Pour faire une recherche dans le catalogue cinéma, il faut un documentaliste ! S’il n’y a pas de médiation, l’utilisateur, soit se débrouille, soit abandonne. »

Dans ces conditions, l’information sur les services offerts ne suffit pas et les bibliothécaires sont en première ligne pour faire entrer leur utilisation dans les usages. Or, surtout s’ils sont bénévoles, cette tâche s’avère difficile au plan technique comme au plan de l’aide à la navigation.

« J’essaie d’inciter les usagers mais j’avoue que je n’ai pas trop utilisé moi-même cette plateforme. Les

gens n’arrivent pas à se connecter et, une fois qu’ils sont connectés, ils ne savent pas comment chercher l’information. Pour les jeunes, il faudrait faire le nécessaire au niveau information-communication car s’il

faut aller en bibliothèque pour savoir que cette plateforme existe, c’est un peu léger, il y a des progrès à faire au niveau de la communication. Il y a des flyers pour informer mais j’ai l’impression que ça ne marche pas trop. Les gens, il faut parfois les prendre par la main et leur expliquer, s’ils galèrent, ils ne vont pas insister. » (Responsable bénévole d’une bibliothèque rurale, département A.)

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500 bibliothécaires répondent en moins de 72 heures aux questions des internautes. Il existe une application mobile d’Eurêkoi (www.eurekoi.org/).

Dans le cas d’une des plateformes départementales étudiées, certains bibliothécaires voient dans cette centralisation à une échelle trop grande un risque d’éloigner l’usager de sa bibliothèque de

proximité, ce qui a pour effet de limiter à la fois l’usage et l’intervention du bibliothécaire.

« Nos lecteurs ne se disent pas que c’est leur médiathèque qui leur permet d’accéder alors que c’est censé avoir des actualités de leur médiathèque. C’est un problème technique, on ne peut pas localiser l’information en fonction de la provenance du lecteur. […] On a une administration de gestion de nos lecteurs mais on n’a pas la main, il y a un super administrateur. » (Bibliothécaire, responsable numérique, département A.)

Une étude menée à Grenoble sur le fonctionnement d’une plateforme numérique de prêt (Doga, Zerbib, 2017) met en évidence « des dispositifs numériques qui se situent dans le prolongement des services pensés pour des supports physiques ». Situation qui laisse finalement peu de marge de

manœuvre aux bibliothécaires et aux usagers et amène à une conclusion du même ordre : « Les

dispositifs sociotechniques de la plateforme de prêt de livres numériques sont encore largement inscrits dans des conventions d’offres et d’usages en vigueur pour le livre imprimé ou les autres supports (CD, DVD…).[…] Dernier maillon de la chaîne du livre, les bibliothécaires et leurs usagers voient leurs capacités à innover fortement contraintes par des formats, des normes et des conventions (définies en amont par les échanges entre auteurs, éditeurs, distributeurs, libraires…) que leurs actions peinent encore à redéfinir. » (Doga, Zerbib, 2017.)

Mais, en dépit de toutes ces contraintes, on voit bien ici que le rôle des bibliothécaires est clairement

réaffirmé dans sa dimension de médiation numérique. Certains professionnels rencontrés non

seulement mettent en œuvre une communication sur et autour de ces plateformes, mais en outre organisent des formations d’usagers à leur maniement.

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De la lecture à l’écriture sur le web avec des collégiens

Une médiathèque, par exemple, met en œuvre un parcours d’accompagnement du livre au web avec des collégiens, autour de pratiques de lecture, d’argumentation et d’écriture, étant ce faisant cohérente avec ses missions premières.

« On ne peut pas parler d'une pratique numérique, notre offre est toujours liée à la lecture, c'est un tout. Comme exemple d'activités autour du livre, on propose des ouvrages aux collèges, les jeunes doivent expliquer pourquoi c’est important que ces ouvrages soient à la médiathèque. Avec des élèves de 3e et de 4e, on travaille donc sur les thèmes : argumenter, écrire. Et une autre étape est de rédiger sur le web et on est là pour accompagner tout ça. » (Directrice de médiathèque, département A.)

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Accompagner des prolongements numériques d’ateliers en physique

Des ateliers numériques en bibliothèque se poursuivent sur des wikis publics ou par des vidéos postées sur le site de la bibliothèque ou encore par des publications en ligne, tous ces prolongements représentant en quelque sorte une déclinaison numérique d’activités se tenant en présentiel dans l’espace de la bibliothèque. Une des médiathèques étudiées a pour projet de produire avec les adolescents des tutoriels vidéo, qui seront ensuite postés sur le site de la médiathèque, en filmant les processus de création dans les ateliers en bibliothèque. « Cela ferait une sorte de continuité d’une

professionnels rencontrés ont en cours ou en projet la fabrication de vidéos de type booktubers, où les jeunes présentent les livres, CD ou films qu’ils ont aimés.

« On veut créer un club de lecture avec des adolescents. Chacun pourrait présenter son coup de cœur du mois. Idéalement on aimerait les interviewer et poster les interviews sur le Facebook de la médiathèque, c’est notre idée. » (Référente adolescents en médiathèque, département B.)

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L’outil collaboratif en ligne utilisé pour des réalisations en physique

Dans une autre forme de continuum numérique-physique, des professionnels utilisent des logiciels de

collaboration pour co-construire avec les usagers des évènements de la bibliothèque ou autour du livre. Car, comme le dit un expert interviewé, « on ne peut pas animer que des ressources, on doit

animer des pratiques et des savoirs faire ».

« Le logiciel Trello33 permet de constituer une équipe qui co-construit un événement, chacun peut nourrir en temps réel la réalisation des actions. On peut imaginer que la bibliothèque organise un événement, par exemple autour de Jack London, et constitue une page Facebook puis relie ça à un logiciel, l’ensemble des personnels a une visibilité de l’ensemble de ces actions. C’est ce que j’utilise actuellement dans le cadre d’un projet d’exposition. […] Rassembler des idées permet de rassembler par le numérique des objets qui

finissent par prendre vie dans un espace physique. » (Expert.)

Un autre exemple de ce type de démarche se trouve dans des initiatives de partages de livres associés

à une plateforme collaborative. La circulation de livres gratuits sur un territoire est ainsi potentialisée par

la dimension collaborative de l’outil numérique. On peut citer le cas de la plateforme de type Bookcrossing34 – sur laquelle on peut suivre le voyage physique des livres partagés et les commenter –, qui a été mise en œuvre dans une communauté de communes d’Île-de-France par des acteurs de la lecture publique. Dans le cadre de la manifestation « Livres en fête », les bibliothécaires ont organisé sur les lieux le « lâcher » de centaines de livres, choisis par les bibliothécaires. Dans chaque livre, une étiquette avec un identifiant proposait aux habitants de se connecter sur la plateforme créée à cet effet pour commenter leur lecture et indiquer l’endroit où ils avaient trouvé le livre et celui où il l’avaient « relâché ». Façon aussi de travailler la dimension du territoire en lecture publique.

« Grâce au numérique, on peut savoir qui a lâché le livre et connaître la chaîne des lecteurs et lire les commentaires des autres lecteurs. Ça fait vivre le livre, ça le fait sortir, ça crée une émulation autour du

livre. […] On peut lâcher les livres au pied des cages d’escalier, dans des maisons de retraite, on en avait

même lâché sur les sièges des élus au conseil municipal, dans un cabinet de médecins, dans les stations de RER, dans une PMI. » (Directrice adjointe de médiathèque, département A.)

Organiser les espaces pour une fluidité des parcours entre le physique