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TROISIEME PARTIE Caractérisation de la recristallisation statique

B A NALYSE DES MICROSTRUCTURES DE RECUIT PAR EBSD

Dans le cas de cette expérience in situ, les mesures EBSD ont été réalisées avec un sys- tème TSL-EDAX. Les conditions d’acquisition de ces données ont été ajustées de manière à trouver un compromis entre la qualité des clichés de diffraction, la résolution spatiale et le temps d’acquisition. Le pas de mesure est de 2 µm pour une cartographie de 350 µm x 600 µm. Les cartographies ont ensuite été analysées avec le logiciel TSL OIM Data Analysis. Une désorientation minimale de 5° a été choisie pour définir les joints de grains et les pixels ayant une désorientation supérieure à 5° avec l’ensemble de leurs premiers voisins sont considérés comme mal indexés. Ces pixels ne seront pas pris en compte et apparaîtront en noir sur les cartographies EBSD, comme pour les points non indexés. Les grains recristallisés sont identifiés à partir de la méthode décrite dans l’annexe A8.

Le premier résultat que l’on obtient grâce au système de recuit in situ couplé à l’analyse EBSD est l’observation quasi directe de la progression de la recristallisation et de la croissance de grains pour une microstructure locale donnée (figure 3-15). Sur cette figure, les phénomènes de germination et croissance peuvent clairement être observés entre l’étape 1 et l’étape 5. Les quatre étapes suivantes montrent la croissance de grains après recristallisation totale de la microstructure. Les différents stades identifiés sur cette figure vont être analysés plus en détails dans la suite.

La surface analysée avec cette technique est petite en comparaison de surfaces néces- saires pour réaliser une analyse statistique de la recristallisation. Le comportement observé n’est donc pas représentatif du matériau en termes de taille de grains moyenne, de texture globale ou encore d’énergie stockée macroscopique. La technique de recuit in situ donne accès aux mécanismes locaux de recristallisation et de croissance de grains. Une cinétique de recris- tallisation représentative pourrait être mesurée uniquement si le nombre de grains était statis- tiquement représentatif du matériau dans la zone analysée.

0 200 400 600 800 1000 1200 0 100 200 300 400 500 600 Tem p ér at u re C) Temps (s) 2 5 5 5 10 20 60 120 180 (1) (2) (3) (4) (5 ) (6) (7) (8) (9)

Figure 3-15. Evolution de la microstructure pendant la séquence de traitement thermique (cartographies d’IQ [Image Quality] obtenues par l’analyse EBSD)

C.GERMINATION

La recristallisation statique discontinue est basée sur le processus de germina- tion/croissance. Cependant, une distinction claire entre ces deux stades est difficile (B. Hutchinson 1992). La germination est définie comme l’instant auquel un petit élément de vo- lume du matériau a atteint les conditions critiques pour croître dans la matrice déformée. Lorsqu’un nouveau grain recristallisé est identifié dans la microstructure, cela signifie qu’un germe a été « activé » et a crû. Cette phase transitoire qu’est la germination est ainsi indirec- tement observée par l’apparition de nouveaux grains dans la microstructure. Il est également bon de noter que cette analyse dépend également de la résolution spatiale de l’analyse EBSD. De nouveaux grains recristallisés pourront être détectés plus tôt si la résolution spatiale est plus élevée.

La germination va principalement être observée à l’étape 1 de la séquence de traite- ments thermiques (étape 1 – figure 3-15) mais de nouveaux grains recristallisés vont égale- ment apparaître de manière continue jusqu’au stade 5 (figure 3-16.a). A partir du nombre de nouveaux grains apparus par unité de surface et de temps, on peut estimer un taux de germi- nation par :

Equation 3.1

Avec N le nombre de nouveaux grains apparus sur la surface observée S (350 µm x 600 µm) pendant un traitement thermique de temps t. Les évolutions temporelles du nombre de grains recristallisés et du taux de germination sont présentées figure 3-16. Le taux de germina- tion la plus élevée correspond au premier traitement thermique réalisé à la plus haute tempé-

rature (1030°C) (figure 3-16.a). A ce stade, le taux de germination est de 2,3 x 108 m-2.s-1. Dans les étapes suivantes, la diminution de température ainsi que la réduction du nombre de sites de germination potentiels entraîne une diminution du taux de germination (figure 3-16.b). Il est important de préciser que certains des grains observés sur la surface pourraient provenir de la croissance de grains recristallisés apparus plus tôt à une certaine distance sous la surface libre. Ce biais ne peut être évité qu’en réalisant une expérience 3D.

Figure 3-16. (a) Evolution du nombre de grains recristallisés pendant la séquence de traitements thermiques (b) Taux de germination estimé pour les étapes 1, 2, 3 et 5

Pour être activé à une température donnée, un germe doit remplir 2 conditions :  Etre suffisamment désorienté cristallographiquement par rapport à son

voisinage direct,

 Avoir un bilan énergétique favorable entre l’énergie d’interface créée et l’énergie stockée dans le voisinage qui est libérée lors de la croissance du germe (i.-e. avoir une taille critique).

Lors du premier traitement thermique, les nouveaux grains sont apparus dans les zones présentant les plus fortes désorientations locales du réseau cristallin (figure 3-17). De fortes désorientations intragranulaires traduisent une forte énergie stockée et peuvent favori- ser la formation de joints à grand angle de désorientation, avec une mobilité suffisante.

Figure 3-17. Localisation des nouveaux grains recristallisés observés après un traitement thermique à 1030°C pendant 2 s. Les nouveaux grains (en blanc) sont repositionnés sur la cartographie des désorientations

intragranulaires de l'état initial.

1,00E+06 1,00E+07 1,00E+08 1,00E+09 0 5 10 15 20 25 30 Ta u x d e ger m in at io n (m -2.s -1) Temps (s) 0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 200 0 50 100 150 200 250 300 350 400 450 N om b re d e gr ai n s re cr is ta lli s Temps (s) (a) (b) 1 2 3 4 5 6 7 8 9 1 2 3 5

Lors de cette expérience de traitement thermique in situ, la germination apparaît comme continue. Ceci indique donc des temps d’incubation différents pour les différents germes (le temps d’incubation étant le temps nécessaire à un embryon pour atteindre les con- ditions critiques de croissance). La détermination d’une vraie cinétique de germination ne se- rait possible qu’en réalisant une séquence de traitements à température constante. Dans notre cas, la décroissance du nombre de germes activés au cours du temps n’est pas due uni- quement à la réduction du nombre de sites potentiels de germination mais également à la diminution de la température de recuit. Une cinétique de germination pourrait également être perturbée par les grains ayant crû sous la surface mais cet artefact est directement lié à l’observation d’une microstructure en 2D. Cet effet pourrait être quantifié en réalisant une simulation 3D à champ complet de la recristallisation (Bernacki et al. 2009; Bernacki et al. 2011) pour évaluer la quantité de grains venant de sous la surface. Dans les travaux cités, seul un petit nombre de germes a été introduit dans la microstructure déformée. Des développe- ments seraient nécessaires pour prendre en compte un nombre suffisant de grains recristalli- sés.