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1. GENERALITES

1.1 Précarité, pauvreté, grande pauvreté

1.1.5 Santé et grande pauvreté

1.1.5.2 Le contexte : état des lieux de l‘accès aux soins

1.1.5.2.2 Avancées législatives de l‘accès aux droits

La déclaration universelle des droits de l‘homme affirme que « le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde est la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables »(32). En parallèle, Joseph Wresinsky dans son rapport « grande pauvreté et précarité économique et sociale » insiste sur la nécessité d‘une grande loi générale de lutte contre l‘exclusion (3).

La loi sur le revenu minimum d‘insertion, adoptée par l‘assemblée nationale le 1 er décembre 1988 apporte une réponse essentielle en matière de garantie de ressources minimales d‘existence (33).

Elle est suivie par la loi relative à la lutte contre la pauvreté et l‘exclusion sociale et professionnelle du 29 juillet 1992, qui veut garantir sur l‘ensemble du territoire l‘accès effectif de tous aux droits fondamentaux dans les domaines de l‘emploi, du logement, de la protection de la santé, de la justice, de l‘éducation, de la formation et de la culture, de la protection de la famille et de l‘enfance. Ce texte prévoit ainsi des conditions d‘affiliation simplifiées à l‘aide médicale, en supprimant la condition de besoin de soins et le passage par une commission. L‘aide médicale est

En 1994, le Haut Comité de Santé Publique souligne deux points fondamentaux : la situation économique des personnes en grande pauvreté est l‘un des principaux déterminants ayant un impact sur la santé, et les inégalités en matière d‘accès aux soins sont importantes.

Suite à ces constatations, un rapport est présenté au conseil économique et social en juillet 1995 par Geneviève de Gaulle-Anthonioz, alors présidente du Mouvement ATD Quart Monde. Il s‘agit d‘une évaluation des politiques publiques de lutte contre la grande pauvreté (35). Ce rapport met en évidence un problème d‘inadéquation ce n‘est pas parce qu‘on a une couverture sociale partielle ou totale que l‘on se soigne , la méconnaissance des droits par les usagers, et une inadaptation du système de santé dont les moyens sont orientés en priorité vers les réponses techniques au détriment du soutien des familles dans leurs propres capacités (36).

La loi d‘orientation du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions (37) marque une grande avancée vers des réponses de droit commun touchant tous les domaines de la vie, notamment l‘emploi, la santé, le logement, la justice, l‘éducation, etc. Cette loi « considère que le problème des personnes en difficulté n‘est pas de disposer de nouveaux droits mais d‘avoir effectivement accès aux droits fondamentaux existants. L‘essentiel des dispositions vise donc à créer les conditions et les procédures par lesquelles cet accès aux droits sera mieux garanti dans chacun des domaines de vie pour les personnes les plus fragilisées par les mutations de la société ». (38)Dans le domaine de la santé, plusieurs mesures sont instaurées : établissement pour chaque région d‘un Programme Régional pour l‘Accès à la Prévention et aux Soins des personnes les plus démunies (PRAPS) (art. 71), création des Permanences d‘Accès aux Soins et à la Santé PASS , lieux d‘accueil, d‘information, de prévention, d‘orientation et de soins art.76 , création d‘un Observatoire national de la pauvreté et de l‘exclusion sociale chargé de recueillir les données relatives aux situations de précarité et de mener des travaux d‘études, de recherche et d‘évaluation art.153 .

La loi du 27 juillet 1999 sur la création d‘une couverture maladie universelle (CMU) (39) garantit à tous une prise en charge des soins par un régime d‘assurance

protection « assurance » complémentaire et à la dispense d‘avance de frais. L‘attribution de la CMU et de la CMU complémentaire se fait sous condition de ressources avec un plafond qui varie selon la composition du foyer et le nombre de personne à charge.

La loi de santé publique du 9 août 2004(40) inscrit comme objectifs premiers la lutte contre les inégalités sociales ou territoriales de santé et également l‘accès à la prévention et aux soins des populations fragilisées ainsi que la prise en compte de ces populations par tous les programmes de santé publique, plan régional de santé publique (PRSP) et groupement régional de santé publique.

La loi du 13 août 2004 (41) relative à l‘assurance maladie est un lit de réforme ayant pour objectif de réaliser des économies dans le domaine de la santé pour parvenir à un équilibre des comptes de la sécurité sociale. Elle instaure la création d‘une franchise médicale, la mise en place d‘un dossier médical personnel, le développement du parcours de soins, la création d‘une Haute autorité de santé se prononçant sur l‘efficacité thérapeutique des produits, des actes et des protocoles de soins. Cette loi instaure également le système d‘aide à l‘acquisition d‘une complémentaire santé, d‘abord nommé crédit d‘impôt, qui vise à atténuer l‘effet seuil de la CMU complémentaire. Il s‘agit d‘une aide financière pour les personnes dont les revenus sont situés entre le plafond leur permettant de bénéficier de la CMU-C et ce même plafond majoré de 15%. Le plafond sera par la suite régulièrement réévalué et il correspond aujourd‘hui au plafond de ressources de la CMU-C majoré de 35%.

La loi d‘orientation du 29 juillet 1998 (37) a permis la mise en place des PASS, permanences d‘accès aux soins de santé, qui n‘étaient pas prévus à l‘origine dans les établissements de santé. Ce dispositif médico-social vise à accueillir en urgence les patients en situation de précarité et à les accompagner dans les démarches d‘ouverture de leurs droits sociaux. Il existe différents modèles :

 La PASS « dédiée » ou PASS « centralisée » consiste en une consultation identifiée et dispose de personnel dédié (médecins, infirmières, travailleurs sociaux.), d‘une consultation de médecine polyvalente et d‘une consultation sociale. Il est possible de s‘y

 La PASS « transversale » fonctionne sans local ni personnel spécifique. Les assistants socio-éducatifs exerçant au sein de l‘établissement de santé effectuent une partie de leur temps de travail dans le cadre de l‘activité PASS. Ces professionnels sont amenés à valider l‘entrée d‘un malade dans le dispositif afin de lui ouvrir l‘accès aux différentes consultations proposées par l‘établissement. La coexistence des deux dispositifs apparaît comme l‘organisation optimale.

 Des PASS spécialisées : PASS bucco-dentaires, PASS psychiatrie, PASS dermatologie

Lors des premières journées nationales des PASS à Paris en Juin 2010, des constats émergent :

o la faiblesse des effectifs médicaux,

o la loi prévoyait d‘arriver à 530 PASS en 2010 mais d‘après l‘enquête de la direction de l‘hospitalisation et de l‘offre de soins (DHOS), réalisée en 2008 288 PASS ont été recensées ;

o la prise en charge des soins dits primaires (douleur, infection). Le traitement de la douleur est réalisé mais ce n‘est pas une prise en charge globale.

A l‘heure du débat sur la future stratégie nationale de santé, la FHF, Fédération Hospitalière de France et Médecins du Monde souhaitent réaffirmer haut et fort la nécessité d‘une mobilisation de tous. La situation sanitaire des plus fragiles impose de passer à l‘action pour durablement améliorer l‘accès aux soins de toute la population. C‘est pourquoi aujourd‘hui ils s‘engagent et énoncent plusieurs propositions pour améliorer la prise en charge des personnes vulnérables :

o Inclure pleinement les dispositifs au droit commun

Des droits à la protection sociale et complémentaire existent et ont été renforcés notamment avec les nouvelles mesures permettant à chaque français de bénéficier d‘une complémentaire santé.

Différentes structures de soutien particulier de droits spécifiques existent aussi pour accueillir et offrir des soins aux personnes en situation de précarité, notamment des Lits halte soins santé (LHSS), des Lits d‘accueil médicalisés LAM et les

Les professionnels, en plus des soins, doivent prendre en compte les questions de soutien psychologique, de logement ou encore, plus largement, de réinsertion sociale. La question de l‘accessibilité et de la visibilité de ces dispositifs doit également être posée. La trop grande méconnaissance par les acteurs qui accompagnent les personnes vulnérables, par les professionnels de santé et par les patients eux-mêmes, de l‘existence de cette offre de soins rend difficile l‘orientation des personnes vers les structures adaptées. Il apparait donc comme indispensable de redéfinir et clarifier la place des PASS au sein des hôpitaux. Chaque PASS doit être pour le patient une porte d‘entrée de droit commun et non plus une filière de prise en charge à part. Ceci passe également par la revalorisation des PASS, il s‘agit de donner envie et les moyens aux professionnels de santé de s‘y impliquer, les amener à travailler de façon pluridisciplinaire.

o S‘engager aux côtés des professionnels hospitaliers

Les soutenir, notamment en matière d‘approche éthique et les former à la prise en charge de la précarité. Médecins du monde et la FHF proposent ainsi la mise en place d‘équipes mobiles pluridisciplinaires permanentes comprenant au moins une assistante sociale et des personnels soignants et médicaux, l‘amélioration de la communication sur l‘existence des budgets consacrés à l‘interprétariat et la création de ceux-ci dans les établissements où ils n‘existent pas et la facilitation à l‘accès des interprètes professionnels.

o Une action territorialisée et décloisonnée pour l‘accès aux soins et à la prévention des plus vulnérables

L‘enjeu est de renforcer l‘ancrage territorial des hôpitaux et de développer de nouvelles coopérations. Il s‘agit donc de renforcer les liens et collaborations entre les hôpitaux et les autres acteurs sanitaires, sociaux, médico-sociaux du territoire, en s‘appuyant notamment sur les réseaux déjà constituées par les PASS.

o Garantir l‘accès aux droits à l‘assurance et à la complémentaire maladie à l‘hôpital

De trop nombreuses personnes sont aujourd‘hui exclues des soins du fait du non recours ou de la difficulté à ouvrir leurs droits en matière de protection sociale. La complexité des démarches, le manque d‘accès à l‘information ou le défaut d‘accompagnement sont autant de facteurs qui expliquent le non recours aux droits d‘assurance et de couverture maladie.

Les conséquences du non recours aux droits sont désastreuses tant au plan de la santé des personnes qu‘au plan des charges que cela entraîne pour le système de protection social et pour les établissements de santé. Afin de faciliter l‘accès aux droits à l‘assurance et à la complémentaire maladie par tous, Médecins du Monde et la FHF préconisent de simplifier les procédures et de rapprocher les lieux d‘ouverture de ces droits des lieux de prise en charge.

o Donner aux usagers précaires l‘occasion d‘être acteurs

Expérimenter des programmes de médiation au sein des établissements de santé, mettre en place des formations coréalisées par des usagers à destination des professionnels.

o Faire de l‘épidémiologie sociale un véritable domaine d‘études

Il est primordial dès aujourd‘hui de développer des programmes et une méthodologie de recherche pour les questions de santé et de précarité et d‘intégrer ces questions à la formation de l‘ensemble des professionnels hospitaliers.

En conclusion, ce rapport met l‘accent sur le fait que la prise en charge des personnes les plus vulnérables est une mission sur laquelle il est nécessaire de s‘interroger afin de l‘adapter aux évolutions de notre société.