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Partie 1 : Les soins de support et leur prise en charge à l’officine

3. Les affections cutanéo-muqueuses

3.6. Autres affections bucco-dentaires

3.6.1. Définition

Lors d’un traitement par chimiothérapie, radiothérapie ou encore biphosphonates, les dents et les gencives sont souvent fragilisées par modification de trois types de tissus. Les traitements altèrent les dents et les gencives qui sont fragilisées et plus sensibles aux inflammations, les glandes salivaires qui produisent moins de salive et l’os des mâchoires qui est moins irrigué et donc fragilisé. La sphère buccale est donc sujette à de nombreuses pathologies comme des caries, des mucites ou une ostéonécrose. [7]

3.6.2. Signes cliniques et évolution

3.6.2.1. La carie

Les caries sont dues à une déminéralisation de l’émail. Les traitements anticancéreux vont diminuer la quantité de salive, augmenter son acidité et donc, favoriser le développement bactérien par diminution des défenses de l’organisme. Ces modifications vont favoriser la déminéralisation et augmenter le risque d’apparition des caries. De plus, les dents sont hypersensibles et le collet, fragilisé, se dénude plus facilement. Les caries apparaissent donc le plus souvent à ce niveau et finissent par détruire la couronne. [57]

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3.6.2.2. L’ostéoradionécrose

L’ostéoradionécrose correspond à une nécrose du tissu osseux. Son incidence est faible. Elle est le plus souvent liée à une irradiation et apparaît le plus souvent 6 mois à 5 ans après celle-ci. Un traitement par biphosphonates (oral ou IV) ou par bevacizumab (Avastin®) peut également provoquer ces lésions, le mécanisme n’étant pas clairement élucidé. L’ostéoradionécrose mandibulaire est donc le plus fréquemment liée à une sclérose post-radique des branches terminales de l’artère dentaire inférieure qui vascularise, à elle seule, la mandibule, sans réseau de suppléance. Une dose d’irradiation supérieure à 60 grays, des caries dentaires, une dénudation gingivale ou encore une extraction dentaire compliquée d’une infection sont des facteurs favorisants la survenue de l’ostéoradionécrose. Cliniquement, elle se manifeste initialement par des douleurs localisées. La déminéralisation est hétérogène et d’extension progressive. [57]

3.6.3. Traitements

3.6.3.1. Prévention

3.6.3.1.1. Les soins dentaires

Une visite chez le dentiste, avant les traitements anticancéreux, pour un bilan dentaire et des soins, si nécessaire, permet d’éviter les infections dentaires et osseuses. Une prise en charge dentaire est fortement recommandée avant un traitement par biphosphonates ou bevacizumab, une prevantion absolue restant impossible. [57]

3.6.3.1.2. La gouttière fluorée

L’outil préventif le plus efficace des caries post-radiothérapiques et de l’ostéonécrose est la

gouttière fluorée, empreinte sur mesure de la dentition du patient. Son port est recommandé

quelques minutes tous les jours.

Son utilisation est simple. Le patient doit tout d’abord se brosser les dents soigneusement. Il va ensuite placer une quantité suffisante de gel dans la gouttière et l’incérer dans la bouche en s’assurant que les dents soient bien recouvertes de gel.

Déminéralisation de la dentine Dévitalisation de la dent Destruction de la couronne Déminéralisation de l’émail et collet dénudé plus facilement Carie Figure 35 : Schématisation du développement des caries [57]

Figure 36 : Photo de caries en post-radiothérapie [57]

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Figure 38 : Port d’une gouttière fluorée [57]

Pour éliminer le gel en excès, le patient peut se rincer légèrement la bouche. La gouttière doit être appliquée au moins 5 minutes avant d’être retirée et rincée.

La gouttière est utilisée pendant la période de radiothérapie voire indéfiniment pour que les dents restent en parfait état. L’émail est ainsi bien protégé face au risque cariogène. Auparavant, on utilisait le Fluogel® (gel fluoré remboursé par la sécurité social) mais le laboratoire ne le fabrique plus. On le substituera donc avec du Fluodontyl® plus cher et non remboursé. [57]

Figure 37 : Photographie d'une gouttière fluorée [57] 3.6.3.1.3. La protection plombée

Le port d’une protection plombée de la mandibule est indispensable durant la radiothérapie ou la curiethérapie. En effet, le risque d’ostéonécrose est minimisé par l’interposition d’un écran plombé entre les fils radioactifs et la mandibule. [44]

3.6.3.2. Traitement

3.6.3.2.1. Après irradiation de la sphère ORL

Une fluoration tous les jours et une surveillance stricte de la denture plusieurs fois par an s’imposent à vie. [56], [57]

3.6.3.2.2. Traitement des caries

Les soins sont à faire le plus rapidement possible. Les petites caries nécessitent simplement des obturations, appelées aussi plombages. Il s’agit, d’abord, du nettoyage de la cavité dentaire à la fraise. Puis, le dentiste procède à l’obturation, en utilisant un produit de restauration tel qu’un composite (plombage blanc). Lorsque la carie atteint la pulpe dentaire, la dent doit être dévitalisée avant son obstruction.[56], [57]

3.6.3.2.3. Traitement de l’ostéoradionécrose

Lorsque qu’une ostéoradionécrose apparaît, un traitement de longue durée, parfois sur plusieurs années, associe antalgiques, anti-inflammatoires, antibiotiques et pour certains l’oxygénothérapie hyperbare. En effet, l’inhalation répétée d’oxygène stimule l’angiogenèse locale, favorisant ainsi la ré-oxygénation tissulaire et donc la cicatrisation. Un geste chirurgical peut s’avérer nécessaire pour éliminer un fragment osseux nécrosé. [56], [57]

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3.6.3.3.Conseils pour l’administration des médicaments par sonde

Peu d’informations sont disponibles concernant l’administration des médicaments par sonde entérale lorsque le patient est incapable de prendre son traitement par voie orale. Cette administration nécessite des compétences dans le domaine pharmaceutique et en particulier sur les formes pharmaceutiques existant sur le marché :

S’il existe d’autres voies d’administration, celles-ci doivent être privilégiées (suppositoires, timbres transdermiques).

Il est important de préférer les médicaments liquides tels que gouttes, solutions buvables, granulés dissous, comprimés effervescents aux formes solides.

• Selon la forme galénique, le pharmacien doit savoir si le médicament peut être écrasé et/ou injecté dans la sonde. Chaque médicament doit être évalué individuellement en fonction de ses caractéristiques galéniques mais de grands groupes se distinguent :

- Les formes pharmaceutiques solides à libération non modifiée

Les comprimés non enrobés, pelliculés, filmés ou avec un enrobage gastro-solubles peuvent être écrasés.

Les capsules molles ne doivent être ni ouvertes ni écrasées.

Les gélules peuvent être ouvertes si elles ne sont pas à libération prolongée,

Les comprimés effervescents peuvent être administrés par sonde si il n y pas d’autre alternative, il est alors nécessaire de bien remuer le médicament afin d’enlever le gaz carbonique et d’éviter les reflux.

Les formes orodispersibles peuvent être dissoutes dans un volume de liquide et être administrées par sonde.

Les comprimés sublinguaux ne peuvent pas être administrés par sonde, en effet, leur efficacité ne serait que partielle.

- Les formes pharmaceutiques solides à libération modifiée

Les formes galéniques à libération modifiée ou prolongée ne doivent pas être écrasées, sont inclus les gélules contenant des microgranules enrobées à libération modifiée. - Les formes pharmaceutiques liquides

Il est important de vérifier la teneur en sucre qui augmente l’osmolarité. Si cette dernière est trop élevée, il est nécessaire de diluer le liquide avant son administration par sonde afin d’atteindre des valeurs de 500-600 mosm/l.

Pour les formes buvables sans sucre, le sorbitol peut provoquer un inconfort abdominal (flatulences, crampes) et des diarrhées à fortes doses.

• Les formes pharmaceutiques ne sont pas conçues pour être utilisées via les sondes d’alimentation entérale. L’addition directe du médicament à la formule entérale n’est pas recommandée, en effet, il existe des incompatibilités physiques et un risque de diminuer l’effet thérapeutique du médicament.

• Chaque médicament doit être administré séparément.

• Si le médicament peut être réduit en poudre (formes galéniques adaptées, non cytotoxiques et ne contenant pas de principes actifs toxiques), la préparation doit se faire dans un mortier et un pilon avec le port de gants et d’un masque. La poudre obtenue doit être mélangée à 10 à 15 ml d’eau avant d’être prélevée par la seringue.

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• La nutrition entérale doit être arrêtée et la tubulure rincée avant et après l’administration du traitement afin d’éviter les dépôts sur les parois. Se laver les mains impérativement avant toutes manipulations.