• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE II. IDENTITÉ D’UNE DESTINATION, TYPICITÉ /

2.3. Typicité locale et authenticité

2.3.2. Authenticité

2.3.2.2. Typologie de l’authenticité

2.3.2.2.1. Authenticité du produit / authenticité objective

L’authenticité du produit ou l’authenticité objective a été abordée dans les recherches antérieures dans le domaine des produits locaux comme les produits alimentaires, les produits de terroir (Camus, 2004 ; Lenglet & Giannelloni, 2015 ; Sims, 2009), des souvenirs (Asplet & Cooper, 2000 ; Littrell, Anderson, & Brown, 1993 ; Paraskevaidis & Andriotis, 2015 ; Trinh, Ryan, & Cave, 2014 ; Xie, Wu, & Hsieh, 2012) ou des objets culturels (Zhou, Zhang, & Edelheim, 2013). Elle renvoie généralement à l’authenticité objective qui concerne les objets (Wang, 1999). Selon la classification de Wang, l’authenticité objective est définie comme « l'authenticité des originaux ». Cette forme d’authenticité est associée au processus cognitif du touriste qui peut vérifier objectivement si les objets consommés sont réels ou authentiques.

vêtement ou un rituel (Reisinger & Steiner, 2006). L'authenticité des objets, qui peut être à la fois une construction sociale et une source de preuves, se subdivise en deux types d’authenticité, iconique et indexique (Grayson & Martinec, 2004), l'authenticité pouvant être indiquée par des attributs physiques (indexés) et/ou par l'essence de la marque (iconique). Dans l’authenticité indexique,,les objets (ou les lieux) sont décrits comme « authentiques » lorsque leur manifestation physique renvoie à quelque chose d'authentiquement indexé grâce aux indices de vérification issus de l’expérience personnelle des consommateurs (Grayson & Martinec, 2004). L’authenticité iconique renvoie en revanche à un modèle mental (en lien avec le passé, l'histoire, la fiction) ou à une «image composite» qui permettent d’évaluer l’objet (ou le lieu) est similaire à quelque chose qui est indexiquement authentique (Ram, Björk, & Weidenfeld, 2016). Il s’agit alors d’une apparence proche de la réalité, ou fidèle à l’original, toujours fondée sur les connaissances ou des attentes préexistantes des percepteurs.

Quand on parle de l’authenticité d’un produit, on parle de celle des marchandises produites (Camus, 2004). Un objet ne devient un produit qu’avec le processus de marchandisation, donc « relève de dimensions particulièrement subjectives, contente une

quête identitaire et a trait aux valeurs individuelles et sociales perdues ». Ainsi, l’authenticité

d’un produit de consommation est définie « comme une caractéristique de produit qui le

rattache à une origine, qui le distingue du fait qu’il comble un manque, une insatisfaction, et qui est renforcée dès lors que le produit représente une part de l’identité du consommateur »

(Camus, 2004 : 41). En effet, le caractère authentique d’un produit renforce son attractivité pour les consommateurs (Cova & Cova, 2001) et lui ajoute une valeur incontestable. Pour qu'un produit soit authentique, il doit par exemple être traditionnel, dans son processus de production (producteurs locaux, matériaux et méthodes traditionnels) et/ou à travers son usage local / traditionnel, non destiné au marché touristique (Cohen, 1988). Camus (2004) a essayé de donner une échelle de mesure pour identifier les produits qui paraissent authentiques aux yeux des consommateurs. Celle-ci peut être mesurée par trois dimensions : origine, projection et singularité ou unicité.

L’origine du produit renvoie à sa provenance, au lieu où il est élaboré avec ses propres conditions, mode et processus de production. Cette caractéristique est toujours considérée comme importante dans le tourisme car les touristes aspirent toujours à quelque chose de vrai et fait sur place. Dans une société standardisée où la peur de perte de repères et d’identité ramène les gens à la quête d’authenticité, un produit authentique, par opposition à l’inauthentique, doit donc révéler une origine identifiée et avérée (Camus, 2004). Dans ce sens, l’origine géographique qui représente un ancrage local, notamment dans le terroir, qui le rattache aux symboles d'un lieu et d'une culture (Sims, 2009), devient un critère important pour qu’un touriste perçoive si un produit, un objet ou un fait est, du fait de sa provenance, authentique ou pas.

La dimension de projection fait référence à l'authenticité conçue comme la manière dont les gens se voient – se projettent – par rapport aux objets (Reisinger & Steiner, 2006). Elle est illustrée par le fait que, au sein d’une même catégorie de visiteurs, chacun cherche la même chose : la recherche de soi s’opère dans la réflexion de l'expérience de l'autre (Galani- Moutafi, 2000). L’authenticité peut être le résultat de la projection de rêves, d’images stéréotypées, ou d’attentes vis-à-vis des objets consommés (Reisinger & Steiner, 2006) ; on peut parler dans ce cas d’authenticité symbolique (Leigh et al., 2006), voire même iconique (Grayson & Martinec, 2004) (cf. plus haut).

La singularité ou « l’unicité fait partie des caractéristiques majeures de l’authenticité au sens strict du terme » puisque « l’authenticité du produit est liée à sa personnalisation et sa différenciation » (Camus, 2004 : 43). L'unicité est une composante existentielle de

l'authenticité (Kolar & Zabkar, 2010) et semble souvent prédominer (Littrell et al., 1993). L’idée selon laquelle l’authentique correspond à l’original provient du domaine artistique parce que l’œuvre authentique est la pièce d’origine inimitable, et par conséquent unique (Wang, 1999). Ce qui fait autorité est ce qui est unique. Ainsi, la singularité est devenue une caractéristique importante de l’authenticité (Cravatte, 2009).

La plupart de ces approches s’appliquent aisément aux phénomènes et à la consommation touristique. Ainsi, après avoir examiné le paradoxe traditionnel / moderne Sharpley (2005), identifie deux significations pour l’authenticité en matière de tourisme, retrouvant en cela la distinction entre authenticités objective et subjective :

(a) Il s'agit d’une part d'une description de la qualité tangible de quelque chose (par exemple, un artefact, un métal, un festival, un bâtiment) associée à des méthodes de production ou à des fondements culturels perçus comme pré-modernes ou traditionnels.

(b) Il peut aussi s'agir d'une perception intangible, socialement construite, des sociétés et cultures de la destination, des formes de voyage ou des expériences touristiques globales qui semblent être pré-modernes ou traditionnelles.

Ainsi, l’authenticité objective est une composante importante de l’authenticité des expériences touristiques par rapport à une destination. Cette forme d’authenticité a été critérisée afin de donner un système de références non seulement à la perception des touristes mais également aux opérateurs touristiques pour une exploitation plus effective des ressources territoriales. Cependant, avec les enjeux économiques comme le phénomène « made in china », les produits « dits » locaux sont-ils toujours authentiques ? Par exemple, la lavande provençale, face à la concurrence de celle venant des autres sources11. Puisque l’authenticité est associée à la perception, il est donc nécessaire de comparer les points de vue entre l’offre (ce qui est in situ) et la demande (ce qui est à l’extérieur) en ce qui concerne l’authenticité pour trouver les bons critères et mieux comprendre cette forme d’authenticité. Car en réalité, les touristes font plus que consommer des produits au cours de leur voyage. Ils participent à bien d’autres activités pour pouvoir expérimenter la destination. Donc, l'authenticité ne devrait pas être limitée aux originaux ou à l'authenticité objective (Wang, 1999), il faut aussi découvrir l’authenticité construite et existentielle.