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Entre 25 et 20 Ma, une partie du domaine ALKAPECA se détache et se fragmente : les Kabylies dérivent vers le Sud à la faveur de l’ouverture du bassin Algérien (Rehault et al.,

I.2.3. Et les Atlas…

Le Haut Atlas marocain étant le thème central de ce manuscrit, il sera largement décrit par la suite, que ce soit du point de vue de sa structure profonde (chapitres II), de la déformation crustale (chapitres III), ou de la chronologie des événements qui ont conduit à sa formation (chapitre IV). On donnera donc ici un rapide aperçu du système Atlasique dans son ensemble, définissant la toponymie et présentant les questions encore non résolues au début de cette thèse. Le lecteur pourra se référer aux introductions des chapitres suivants pour de plus amples détails sur l’état des connaissances sur les différents points abordés.

Les chaînes des Atlas sont une caractéristique morphologique majeure de l’Afrique du

Nord (voir Fig. I.21.). Elles s’étendent le long d’une direction sensiblement Est-Ouest sur près de

2000 km, depuis la marge atlantique marocaine jusqu’à la Méditerranée en Tunisie, et

représentent les plus haut reliefs de toute l’Afrique de l’Ouest. Le Jbel Toubkal dans le Haut Atlas Marocain est le deuxième plus haut sommet africain après le Kilimandjaro, avec un sommet à 4165 m. Elles sont aussi le seul système orogénique africain lié à une convergence de plaques, bien qu’étant strictement des chaînes intracontinentales. De l’Est à l’Ouest, on distingue : l’Atlas tunisien, l’Atlas algérien et les Atlas marocains (Fig. I.21.).

Ces derniers sont subdivisés du Sud au Nord en trois unités (Fig. I.22.) :

- L’Anti-Atlas est situé à plus de 600 km de la limite de plaque Afrique -Eurasie, et s’étend selon une direction SW-NE sur 630 km de long pour une largeur de l’ordre de 130 km. Il est constitué essentiellement de séries Paléozoïques et Précambriennes, ces dernières affleurant dans des boutonnières (Fig. I.3.b.). La déformation de ces unités dans cette chaîne est liée essentiellement aux orogenèses Panafricaine et Hercynienne (voir Section I.1.1. et I.1.2.). Les indices de déformation Cénozoïque en surface sont presque totalement absents ; pourtant le relief atteint fréquemment 1500, voire 2000 m d’altitude.

- Le Haut Atlas est lui-même subdivisé en quatre zones (Fig. I.22.) : 1) à l’Est, le

Haut Atlas Saharien (aussi appelé Haut Atlas oriental, ou encore en anglais « Eastern High

Atlas ») est étroit (~60 km) et relativement peu élevé (rarement plus de 1500 m alors que ses bordures sont à des altitudes comprises entre 800 et 1000 m) ; 2) Le Haut Atlas Central est le plus large (jusqu’à 120 km). Le socle n’y affleure pas, mais les séries mésozoïques

Fig. I.21. Carte du relief du Magrheb (Données GTOPO30) et principaux domaines structuraux.

(essentiellement Jurassiques) y sont très bien représentées ; 3) Le Haut Atlas de Marrakech (encore appelé « massif ancien ») présente les plus hauts sommets Nord-Africain, avec plusieurs sommets dépassant les 4000m. La couverture Méso-Cénozoique y est presque totalement absente, et les séries Précambriennes et Paléozoïques sont à l’affleurement ; 4) Enfin, le Haut

Atlas occidental s’étend vers l’Ouest jusqu’à la côte Atlantique, et est recouvert par les séries du

Trias au Crétacé. Ces deux derniers massifs sont parfois regroupés sous le terme « Western High Atlas ».

- Le Moyen Atlas est une chaîne d’orientation similaire à celle de l’Anti-Atlas, SW-NE. Le relief y est important avec des altitudes dépassant les 2200 m, soit plus élevée encore que la chaîne du Rif située juste au Nord et qui matérialise pourtant la limite de plaques. Les séries Mésozoïques affleurent bien et sont relativement peu déformées avec moins de 5 km de raccourcissement (Gomez et al., 1998). Une caractéristique de cette chaîne est la présence d’un abondant volcanisme essentiellement d’âge Quaternaire.

Fig. I. 22. (a) Carte topographique du Nord marocain (données GEBCO).

(b) Grands domaines géologiques du Maroc et toponymie utilisée dans ce manuscrit. On remarquera les altitudes particulièrement élevées des chaînes Atlasiques par rapport au Rif qui constitue pourtant la limite entre les plaques Afrique et Eurasie, ainsi que la position « perchée » des bassins d’Ouarzazate, Missour, et de la Haute Moulouya.

On notera que l’ensemble de ces chaînes, à l’exception de l’Anti-Atlas, est localisé sur le site des anciens grabens hérités du rifting Triasico-Liasique (voir Fig. I.12.).

Un trait caractéristique des Atlas marocains est leur altitude très élevée, alors que le raccourcissement est lui relativement limité. Les premiers travaux de sismique profonde ont montré qu’il n’existe pas de racines crustales développées sous ces chaînes : le Moho est situé dans le Haut Atlas de Marrakech entre 35 et 39 km au maximum (Makris et al., 1985 ; Tadili et al., 1986 ; Wigger et al., 1992 ; Ramdani, 1998). La croûte de l’Anti-Atlas ne présente aucun épaississement. Dès lors, un autre mécanisme se surimposant au raccourcissement crustal doit être invoqué pour expliquer une telle topographie. Lorsque j’ai débuté cette thèse, les travaux récents montraient que ce mécanisme était probablement un fort amincissement de la lithosphère (Frizon de Lamotte et al., 2004). Cependant, aucune quantification de son effet sur le relief des Atlas n’avait été proposée. De plus, sa géométrie était encore énigmatique. Ces points feront l’objet du chapitre II.

Nous verrons que si cet amincissement de la lithosphère explique une partie du relief marocain, il ne le justifie pas intégralement, et le raccourcissement crustal joue un rôle significatif. Ce raccourcissement a déjà fait l’objet de nombreuses études (voir par ex. Beauchamp et al., 1999 ; Frizon de Lamotte et al., 2000 ; Benammi, 2002 ; Teixell et al., 2003 ; Arboleya, 2004), en particulier dans le Haut Atlas Central, le Moyen Atlas, le Haut Atlas Occidental, et sur la marge Atlantique, c'est-à-dire dans les zones où la couverture Mésozoïque affleure bien et/ou des données de subsurface sont disponibles. Le Haut Atlas de Marrakech,

où affleure essentiellement le socle Panafricain/Paléozoique a lui été très peu étudié, à

l’exception de ses bordures (Fraissinnet, 1989 ; Zouine, 1993). Cette absence de travaux sur le comportement du socle a conduit les auteurs travaillant dans les autres chaînes marocaines à des interprétations de la structure profonde totalement opposées. On pourra par exemple consulter les coupes proposés par Teixell et al. (2003) ou Arboleya et al. (2004) et Beauchamp et al. (1999) et reproduites dans le chapitre III.1.. Les premiers proposent un plissement souple des séries anté-Mésozoiques, sans découplage mécanique avec la couverture. Les seconds proposent une

associées. Ceci nous a permis de souligner le rôle de l’héritage tectono-sédimentaire. Ce travail fait l’objet du chapitre III.

Une autre singularité de ces chaînes est le faible développement des bassins

d’avant-pays (Fig. I.22.). Seuls le Haouz, au Nord du Haut Atlas occidental et du Haut Atlas de

Marrakech, et le Souss, au Sud du Haut Atlas Occidental, sont relativement bien développés (altitudes comprises entre 0 et 600 m, remplissage Méso-Cénozoique supérieur au kilomètre, subsidence encore active). Au Sud du Haut Atlas de Marrakech et du Haut Atlas Central, le bassin de Ouarzazate est perché à plus de 1300 m et est soumis à l’érosion. Il est séparé du bassin du Souss par un haut de socle faisant face aux plus haut sommets de la chaîne : le plateau

du Siroua, constitué de socle précambrien et supportant un important volcan Mio-Pliocène, le

Siroua s.s., culminant à plus de 3300 m. A l’Est du Moyen Atlas, les bassins de la Haute Moulouya et de Missour sont dans la même situation que le bassin de Ouarzazate. Pour comprendre le faible développement de ces bassins et leurs altitudes élevées, nous avons focalisé notre étude sur le versant Sud du Haut Atlas (Plateau du Siroua, bassin de Ouarzazate, bassin du Souss ; Fig. I.22.). Le problème de l’altitude anormalement élevée du plateau du Siroua n’avait pas été abordé depuis le travail de G. Choubert en 1942, et nous avons souhaité proposer une nouvelle interprétation combinant nos acquis sur la structure lithosphérique et sur le raccourcissement dans la croûte. Elle fait l’objet de la première partie du chapitre IV.

Enfin, un point crucial était l’objet de vifs débats au début de cette thèse : la chronologie

de la déformation n’était pas établie avec certitude, et variait considérablement selon les

auteurs. On pourra prendre l’exemple de la chronologie proposée par Beauchamp et al. (1999), pour qui la déformation commence dès le Crétacé et est à son paroxysme pendant l’Oligocène

(entre 20 et 30 Ma). Totalement à l’opposé, Frizon de Lamotte (2000), propose une chronologie

en deux phases, l’une Eocène supérieur, l’autre Pléistocène à Quaternaire. La principale difficulté pour contraindre le scénario de la déformation au Maroc est le manque de données : en effet, comme on l’a vu, les bassins d’avant pays sont très peu développés. Par conséquent, l’enregistrement sédimentaire fréquemment utilisé pour déduire les phases orogéniques est très délicat à interpréter. Ce travail est d’autant plus compliqué que les faciès sont en grande partie continentaux et donc difficiles à dater. Nous avons cherché à contraindre cette chronologie en réalisant les premières analyses par traces de fission dans le Haut Atlas de Marrakech. Aucune donnée n’était alors publiée sur l’ensemble des Atlas. Même si le nombre d’échantillons exploitables s’est révélé très limité, plusieurs âges ont été obtenus et combinés avec ceux d’Omar

Saddiqi (Université de Casablanca). L’interprétation a été réalisée en tenant compte des arguments géologiques, et a permis de mieux contraindre l’âge des processus à l’origine du relief. Ce travail fait l’objet de la deuxième partie du chapitre IV de cette thèse.

II. Une composante lithosphérique dans la topographie des