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respiratoire chez les nouveau-nés de la cohorte PARIS

avant 1 mois entre 1 et 3 mois entre 3 et 6 mois entre 6 et 9 mois entre 9 et 12 mois

V.4 Réflexion méthodologique pour la prise en compte des don nées manquantes en épidémiologie environnementale

V.5.2 Association entre l’exposition domestique à des polluants chimiques de l’air intérieur et la morbidité respiratoire

Les niveaux d’exposition domestique au cours de la première année sont estimés pour les enfants de la cohorte PARIS. Ces niveaux annuels permettent de comparer l’exposition de nos enfants aux différentes VGAI proposées par les différents organismes sanitaires nationaux et internationaux. Plus de 97 % des enfants sont exposés l’ensemble de leur première année à des niveaux domestiques supérieurs à la VGAI proposée par l’Anses (10 µg.m-3pour une exposition annuelle), trois enfants

ont des niveaux en NO2supérieurs à la valeur proposée par l’OMS (40 µg.m-3). Enfin, aucun enfant

n’a des niveaux supérieurs aux valeurs proposées pour le toluène par l’OMS ou Santé Canada. Le lien de ces niveaux d’exposition peut donc être soulevé.

L’exposition au cours de la première année, ici considérée, est souvent décrite comme une fenêtre d’exposition déterminante sur le devenir respiratoire de l’enfant, en raison de l’immaturité de son système respiratoire. L’impact de ces trois polluants (formaldéhyde, toluène, NO2), connus

pour être des irritants des voies respiratoires, est évalué dans la cohorte PARIS en considérant la survenue des infections des voies respiratoires basses, événement prévalent chez le petit enfant et des symptômes respiratoires (toux sèche nocturne, problèmes de nez). Nos résultats suggèrent qu’il n’existe pas de relation entre les niveaux domestiques modélisés pour le toluène, le NO2 et la

survenue des symptômes respiratoires mais qu’un effet de l’exposition domestique au formaldéhyde existe. Ces associations sont à mettre en relation avec la fenêtre d’exposition considérée, les niveaux estimés, la réactivité des composés chimiques, les sources et les activités réalisées dans le logement.

Concernant le toluène, aucune association n’est retrouvée pour les infections des voies res- piratoires basses, la toux et les problèmes de nez. À notre connaissance, seules deux études épidémiologiques ont évalué l’impact de ce polluant chez les jeunes enfants. L’étude australienne cas-témoins, recrutant des enfants âgés entre 6 mois et 3 ans, estime un risque d’asthme de 1,84 (IC95 %: 1,41-2,41) pour chaque incrément de 10 µg.m-3du polluant. Dans une étude française,

comparant les niveaux domestiques en COV en milieu rural et urbain, une association est éga- lement retrouvée ; le risque d’asthme étant multiplié par deux pour des niveaux supérieurs au niveau médian. Une interaction significative est retrouvée avec la localisation (rural ou urbain) et la saison ; associations plus élevées d’une part pour les mesures réalisées en saison hivernale et d’autre part pour celles réalisées en milieu rural. Le point commun entre ces deux études est l’étendue assez large des niveaux de toluène, les niveaux dépassant les 100 µg.m-3[139]dans l’étude

australienne et, pouvant atteindre 253,7 µg.m-3dans l’étude française[120]. Dans notre étude, les

niveaux maximums annuels sont de 44,5 µg.m-3, bien inférieurs aux niveaux retrouvés dans les

études où une association a été rapportée.

Tout comme le toluène, aucune relation n’est identifiée avec le NO2. Parmi les trois polluants

considérés, le NO2 est le composé pour lequel, les données toxicologiques et épidémiologiques

sont abondantes. Même si en 1992, une méta-analyse documente une augmentation des infections des voies respiratoires chez le jeune enfant en relation avec les niveaux de NO2[332], nos résultats

semblent être en accord avec des études plus récentes[181,245]qui ne retrouvent pas d’association.

La mesure pendant deux semaines du NO2, dans le salon, n’est pas mis en relation avec la survenue

des infections des voies respiratoires basses au cours de la première année de vie des enfants participant à trois cohortes de naissances[245]. Rumchev et coll. qui ont mesuré à cinq reprises

ce polluant sur une année, trouvent une association entre le gaz et les symptômes respiratoires, cette association persiste après ajustement sur les niveaux en NO2mesurés dans la chambre. Le

maintien de l’association laisse suggérer que ce sont davantage les niveaux élevés atteints sur de courtes périodes qui seraient associés que les niveaux moyennés pendant une plus longue période. Une différence de susceptibilité de l’impact du NO2 a précédemment été relevée, l’association

n’est significative que chez les filles d’âge scolaire. Les auteurs avancent l’hypothèse que les filles passeraient plus de temps dans la cuisine avec leur mère que les garçons[186]. Le NO

2 est l’un des

polluants pour lequel une hétérogénéité des niveaux est observée au sein du logement, les niveaux étant généralement plus élevés dans la cuisine à proximité des sources de combustion. Du fait

V.5.2. Association entre l’exposition domestique à des polluants chimiques de l’air intérieur et la

morbidité respiratoire 137

de l’éloignement des sources directes d’émission et de la réactivité du polluant sur les surfaces (réactions hétérogènes de dépôt du NO2sur les surfaces, pour les panneaux de particules, la vitesse

de dépôt est estimée pour une température de 20◦C et une humidité de 65 % à 0,0124 cm.s-1[333]),

les niveaux sont certainement plus faibles dans la chambre de l’enfant. Néanmoins, les niveaux recueillis dans la chambre de l’enfant, au cours de ses premiers mois de vie sont certainement plus le reflet de son exposition personnelle, étant donné le temps qu’il passe dans sa chambre.

L’absence d’association avec le toluène et le NO2et les symptômes respiratoires sont néanmoins

à prendre avec prudence puisque dans notre étude, les erreurs de classement non différentiels ne peuvent être éliminées étant donné la mesure de l’exposition par modélisation.

À l’inverse de ces deux polluants dont les niveaux fluctuent au cours du temps, des associations sont retrouvées pour le formaldéhyde dont les niveaux sont plus conditionnés non pas par des sources discontinues mais continues.

Les associations retrouvées entre l’exposition domestique au formaldéhyde et la morbidité res- piratoire chez le nourrisson semblent robustes car, elles ne sont pas affectées par les variables d’ajustement et l’ajout des co-polluants (NO2et toluène) n’altère pas les associations.

L’exposition au formaldéhyde majore la survenue des infections des voies respiratoires basses. Krzyzanowski et coll. estiment aussi que l’incidence du diagnostic de bronchite est plus impor- tante chez des enfants exposés dans leurs logements à des niveaux de formaldéhyde supérieurs à 63 µg.m-3[161]. Par ailleurs, l’association que nous retrouvons est comparable à celle obtenue

dans la cohorte allemande LARS où un lien significatif entre l’exposition à des niveaux en styrène supérieurs à 2 µg.m-3est mise en relation avec la survenue des infections des voies respiratoires,

chez des jeunes enfants âgés de six semaines. Il convient de souligner que le styrène est un des composés organiques insaturés précurseur de la formation secondaire de formaldéhyde dans les logements, par réaction avec l’ozone. L’impact de polluants chimiques sur la santé respiratoire a déjà été mis en évidence dans la littérature avec l’ozone, le NO2 et la FTE[93,334,335]. Il a ainsi

été montré qu’une exposition antérieure au NO2, évaluée par des mesures personnalisés chez les

écoliers asthmatiques, augmentait la susceptibilité aux infections respiratoires[334].

Au cours de le première année, il est difficile de distinguer ces deux événements sanitaires : sifflement et infections, les infections virales étant souvent signalées avec des sifflements[336].

En effet, 84 % de nos siffleurs ont rapporté simultanément au moins une infection des voies respiratoires basses. Compte tenu de ce lien très étroit, certains auteurs ont distingué les infections non sifflantes des infections sifflantes en considérant ces sifflements comme un signe de sévérité des infections[209]. L’association que nous obtenons pour le formaldéhyde est légèrement plus élevée

pour les infections sifflantes.

Dans la cohorte PARIS, un effet de l’exposition au formaldéhyde sur la toux sèche nocturne est aussi mis en évidence, et cette association ne s’avère significative que chez les enfants sans antécédents parentaux d’allergie. Les deux groupes d’enfants avec ou sans antécédents parentaux d’allergie présentent des facteurs de risque environnementaux de toux distincts : les allergènes d’une part, comme le suggère l’association avec la présence de blattes et l’âge des matelas et la pollution chimique, d’autre part. En effet, les matelas sont connus pour être des réservoirs en allergènes, Zock et coll. ont ainsi montré que les matelas anciens ont des niveaux plus élevés en allergènes d’acariens. Une association avec les événements familiaux est également retrouvée, le rôle des facteurs psychosomatiques sur l’exacerbation des manifestations allergiques a déjà été documenté dans la littérature[337]. De plus, un score élevé de stress parental dans les premiers

mois de vie majore le risque de sifflements chez les nourrissons à risque d’atopie[338,339]. Parmi ces

enfants avec antécédents parentaux d’allergie, aucune association avec l’exposition aux polluants chimiques n’est retrouvée. Il est à noter que l’équipe danoise de Raaschou-Nielsen et coll.[181]

n’a pas non plus mis en évidence d’association entre les niveaux domestiques de formaldéhyde et les symptômes évocateurs de sifflements chez des nouveau-nés de mères allergiques. À l’inverse chez les enfants sans antécédents parentaux d’allergie, l’exposition domestique au formaldéhyde apparaît associée à la toux dans cette sous-population. Ces résultats sont cohérents avec le suivi

138 Discussion

de cohorte sur 4 années, menée en milieu scolaire, par Smedje et coll.[177]. Un niveau élevé de

formaldéhyde dans les salles de classe était un facteur de risque de développer un asthme chez les enfants n’ayant pas d’antécédents parentaux atopiques, alors qu’aucun effet n’était observé chez les enfants ayant des antécédents parentaux atopiques[177]. En Chine, Zhao et coll.[246], pour des

niveaux faibles de formaldéhyde, ont également mis en évidence une association entre les niveaux extérieurs en formaldéhyde (niveau moyen : 5,8 (0,6) µg.m-3, ratio intérieur/extérieur égal à 0,38)

et les crises d’essoufflement le jour, ce lien étant significatif chez les enfants sans antécédents parentaux (p<0,001).

Bien que le formaldéhyde soit connu pour être un irritant des voies respiratoires supérieures, l’effet d’une exposition précoce au formaldéhyde sur les problèmes de nez tels que les symptômes évocateurs de rhinite sont peu étudiés comparé au risque de symptômes bronchiques. La difficulté d’approcher les problèmes de nez chez le jeune enfant est reflétée par la variabilité des prévalences rapportées dans la littérature. Les résultats des deux rares études épidémiologiques traitant des problèmes de nez sont divergents, certainement en raison des définitions employées. Chez des enfants âgés en moyenne de 10,4 (0,7) ans, les symptômes de rhinoconjonctivite dans les douze mois sont associés à des niveaux en formaldéhyde mesurés dans les salles de classe, supérieurs à 28,4 µg.m-3(troisième tercile de la distribution)[254]. Cependant, dans l’étude cas-témoins incluant

des enfants âgés entre 6 mois et 3 ans, Rumchev et coll. n’observent qu’une simple tendance pour les niveaux d’exposition entre les enfants ayant un nez qui coule ou un rhume des foins par rapport aux enfants ne présentant aucun symptôme (32,5 contre 26,8 µg.m-3)[138]. Dans notre

cohorte, aucune association n’est retrouvée avec les problèmes de nez à un an. Néanmoins, à l’âge de 18 mois et en combinant les problèmes de nez recueillis par questionnaire au cours du bilan de santé et les marqueurs de l’atopie, une association est retrouvée entre la présence d’une rhinite non allergique et la présence de panneaux de particules de moins d’un an, ces panneaux sont un « proxy » de l’évaluation de l’exposition domestique au formaldéhyde. Cette association renforce

l’idée selon laquelle le formaldéhyde agirait par un mécanisme irritatif[340].

Nos résultats concernant les infections des voies respiratoires basses sont biologiquement plausibles, le formaldéhyde par ses propriétés irritantes peut affecter l’épithélium bronchique. Cette action du formaldéhyde pourrait être d’autant plus importante chez les nourrissons, chez qui la muqueuse épithéliale est particulièrement irritable. Des études expérimentales in vivo et in

vitro ont montré que le formaldéhyde pouvait induire des lésions de l’épithélium, modifier l’activité

mucociliaire, le flux du mucus et conduire même à une mucostase et ciliastase. Le formaldéhyde pourrait inhiber la clairance mucociliaire, augmenter la perméabilité de l’épithélium respiratoire et faciliter la pénétration du virus. Quant à la toux, elle peut être induite mécaniquement ou chimiquement par des agents endogènes ou exogènes. Des études expérimentales ont ainsi montré l’existence d’une variété de récepteurs sensoriels pouvant être activés par des irritants. Il a été récemment démontré que le TRPA1 (transient receptor potential cation channel) pouvait être activé par les aldéhydes et déclencher une réponse tussive[341].

V.5.3 Comparaison de différentes approches pour l’estimation de l’associa-