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III.3 Conversion du bruit d’amplitude optique vers le bruit de phase électrique

III.3.3 Asservissement du coefficient de conversion

Lorsque le photodétecteur est ajusté passivement sur un zéro de CAP, dans notre cas, les diverses fluctuations des paramètres operationnels (principalement la température, la tension de polarisation et la puissance moyenne du laser), ne permettent pas d’obtenir en pratique un rejet du RIN du laser supérieur à 40 dB (et dans les meilleurs conditions). Si un rejet supé-rieur est désiré, par exemple dans le cas d’un peigne de fréquences optiques présentant un RIN particulièrement élevé que l’on veut utiliser pour générer des micro-ondes bas bruit, il est donc nécessaire de verrouiller activement le processus de photodétection sur un zéro de CAP. Quelle que soit l’origine des fluctuations causant la variation du coefficient de CAP, nous choisissons une rétroaction sur la puissance moyenne au moyen du même AOM utilisé pour la modulation de l’intensité du laser. D’autres actuateurs ont été envisagés, comme le courant de pompe de l’amplificateur principal ou un atténuateur basé sur un microsystème électromécanique (MEMS en Anglais) mais ils ne se sont pas révélés satisfaisants car introduisant trop de perturbations parasites (des sauts de modes des diodes de pompes de l’amplificateur principal pour le premier

0 2 4 6 8 10 12 14 16 18

DC photocurrent (mA)

50 40 30 20 10 0

RIN rejection (dB)

Figure III.20 – Validation de la mesure du coefficient de CAP. Le coefficient est mesuré par le système de démodulation utilisant l’USRP d’une part (courbe en pointillés) et, d’autre part, par un système totalement différent, en appréciant la hauteur du pic de modulation dans la densité spectrale de bruit de phase (points rouges). Les deux mesures sont en bon accord à part pour les faibles photocourants et au niveau exact du zéro.

actuateur et du RIN supplémentaire pour le second).22

Le cœur de la boucle de rétroaction est digital et le coefficient de CAP est calculé et utilisé comme signal d’erreur après passage dans un filtre numérique. Le gain est optimisé manuelle-ment afin d’obtenir le comportemanuelle-ment le plus stable et le coefficient le plus petit. On peut voir sur la figure III.21, l’évolution du coefficient de CAP lorsque l’asservissement est désactivé (en bleu) et activé (en rouge). Un gros plan sur les fluctuations à court terme est ajouté afin de réfuter l’impression fausse que la variance du signal en rouge est plus large que celle du signal en bleu (cela est en fait un effet visuel dû au grand nombre de points, la fréquence d’échantillonnage étant de 200 échantillons par seconde, combiné à la largeur finie du trait). L’extension des fluc-tuations du coefficient de CAP est réduite de 11 mrad à environ 4 mrad, valeur qui se trouve en fait être la résolution de la mesure de phase. La mesure de phase en elle-même est limitée par la référence de phase à 12.005 GHz utilisée pour la première étape de la démodulation hétérodyne. En pratique l’asservissement permet donc de gagner près de 9 dB de rejet de bruit d’amplitude par rapport à une stabilisation passive sur le zéro de CAP. Si ceci paraît un gain modeste, pour certaines applications comme les radars, une amélioration de 9 dB est loin d’être négligeable. On peut aussi voir sur la figure III.21, la variance glissante à deux échantillons « d’Allan » du coefficient de CAP. On voit nettement que l’asservissement annule la dérive commençant à en-viron 50 ms, le coefficient retrouve un comportement de bruit blanc de fréquence quelque soit le temps d’intégration (mis à part la bosse intrinsèque à l’asservissement). Les mesures repré-sentées à la figure III.21 ne constituent bien sûr que des vérifications « dans la boucle » et il est nécessaire d’observer l’impact pratique de l’asservissement sur le bruit de phase final mesuré indépendamment par un analyseur de bruit de phase.

Les résultats obtenus à la figure III.22 constituent une validation « hors-de-la-boucle » du

22. Notons que l’AOM introduit lui aussi du RIN supplémentaire qui dépend du niveau de puissance RF l’alimentant. Le bruit rajouté reste cependant restreint car nous n’avons pas besoin de l’alimenter avec beaucoup de puissance, étant donné qu’on ne veut atténuer que partiellement le niveau de puissance optique, et que l’AOM est couplé sur l’ordre 0.

Figure III.21 – Effet de l’asservissement du coefficient de CAP. En haut : variation temporelle du coefficient de CAP lorsqu’on place le photodétecteur à un zéro sans stabilisation active (bleu) et avec boucle de stabilisation par rétroaction sur la puissance optique via l’AOM (rouge). En bas : écart-type glissant à deux échantillons (« overlapping » Allan deviation) des séries temporelles présentées au-dessus.

système d’asservissement du coefficient de CAP. On peut voir que le RIN est fortement rejeté car on atteint des niveaux de bruit de phase micro-onde proche de -170 dBc/Hz à une fréquence de Fourier de 10 kHz et de -120 dBc/Hz à une fréquence de Fourier de 1 Hz. En particulier le pic de modulation à 1.23 kHz dû à l’AOM et servant à l’asservissement est clairement rejeté de plus de 50 dB. Ajoutons que sur ce graphique c’est le bruit de phase résiduel lié à la division de fréquence optique et non le bruit de phase absolu du signal micro-onde généré (obtenir comme ici -120 dBc à 1 Hz nécessiterait des cavités ultra-stables significativement meilleures que celles actuellement disponibles au SYRTE). En contrepartie, l’asservissement introduit quelques bruits parasites, principalement sous forme d’harmoniques dans le spectre de phase. Ceci est attribué à deux effets combinés, le signal généré par l’USRP est loin d’être une sinusoïde pure, comme on peut d’ailleurs le voir sur le RIN et l’AOM peut introduire une certaine dose de bruit de phase du fait de la variation d’indice du cristal avec l’amplitude RF [168,169]. Ceci pourrait expliquer la présence étonnante du pic à 2,46 kHz dans le RIN et dans le bruit de phase avec un rejet apparent de ∼13 dB, incohérent avec les niveaux « naturels » de RIN et de bruit de phase obtenus autour du pic.

Comme on peut le voir dans le tableau III.23, le niveau de rejet de RIN et le niveau de bruit de phase résiduel obtenus sont parmi les meilleurs jamais rapportés dans la littérature, que ce soit dans le cadre d’une photodétection « directe » (comme dans l’expérience présentée ici) ou dans le cas d’une photodétection « équilibrée » (plus de détail sur cette méthode peuvent être trouvés dans l’article pionnier de Jungwon Kim et al. [135]). Notons que dans toutes les références evoquées, les niveaux de rejet de RIN (mis à part dans [170] et [139]) sont évalués approximativement a posteriori à partir de l’intégralité de la courbe de bruit de phase.

100 101 102 103 104 105 106

Fréquence (Hz)

200 180 160 140 120 100 80 60

DS

P B

LU

(d

Bc

.H

z

-1

)

Figure III.22 – Effet de l’asservissement de la CAP dans le bruit de phase micro-onde (en rouge). Le RIN (en vert) est nettement rejeté et faiblement converti en tant que bruit de phase résiduel micro-onde. Le pic de modulation à 1,23 kHz servant à l’asservissement est rejetée de plus de 50 dB. La courbe en noir correspond à la projection du bruit de phase induit par le RIN lorsque l’on prend en compte le coefficient de CAP de 4 mrad mesuré plus haut.