• Aucun résultat trouvé

La phase lin´eaire de l’instabilit´e d’´ecoulement

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 198-0)

Pendant l’essentiel de la partie astrophysique de ce m´emoire, nous avons ´evoqu´e les cons´equences de la force de frottement qu’op´erait le gaz sur les solides, telle qu’exprim´ee par l’´equation (1.18). En vertu de la troisi`eme loi de Newton (principe de l’action et de la r´eaction), il existe corr´elativement une force de frottement du solide sur le gaz, dont l’expression par unit´e de volume est :

fdrag(p→g) = −ρp

mp

Fdrag(g →p) =ρǫvp−u

τ (6.3)

avec ǫ ≡ ρp/ρ, et o`u, rappelons-le, ρp d´esigne la densit´e des solides dans leur ensemble, mod´elis´es comme un fluide. Si, pour ǫ ∼ 102 donn´e par les abondances cosmiques, l’acc´el´eration du gaz est n´egligeable compar´ee `a celle des solides, il n’en est plus de mˆeme lorsque, dans le plan m´edian par exemple, ce rapport est de l’ordre de l’unit´e. Alors, on peut s’attendre `a une certaine collectivisation du mouvement des solides via leur in-teraction avec le gaz, et ce alors que les inin-teractions gravitationnelles directes entre les solides sont n´egligeables. Et de fait, Youdin et Goodman (2005) ont d´ecouvert analytique-ment que l’´equilibre gaz-poussi`ere calcul´e par Nakagawa et collab. (1986) ´etait instable, et pouvait favoriser la concentration de poussi`ere, ainsi que les simulations de Youdin et Johansen (2007), Johansen et Youdin (2007) et Bai et Stone (2010) l’ont confirm´e (voir aussi Fig. 6.1), et ce d’autant mieux que les solides approchaient St=1. C’est l’instabilit´e d’´ecoulement (streaming instability). Johansen et collab. (2007) ont v´erifi´e que les niveaux de concentration atteints ´etaient suffisants pour initier des effondrements gravitationnels.

Si ´etudi´ee que soit la saturation non lin´eaire de l’instabilit´e d’´ecoulement, l’interpr´etation de sa phase lin´eaire reste encore obscure. Youdin et Johansen (2007) ont mis en garde contre des toy models simples : par exemple, la variation de la vitesse de d´erive varie avec la densit´e totale (gaz et poussi`ere), si elle ´etait pertinente dans la phase non lin´eaire, ne donnait lieu dans la phase lin´eaire qu’`a des ondes stables. Chiang et Youdin (2010) ont propos´e que cette instabilit´e pouvait ˆetre comprise `a l’aide d’un mod`ele r´eduit uni-dimensionnel primitivement introduit par Goodman et Pindor (2000), o`u un fluide est soumis `a une force de friction (int´egr´ee verticalement) en −Σνd(Σ)v avec v la vitesse du fluide, Σ la densit´e de surface et νd un coefficient de frottement d´ependant de la masse.

Mais il n’est pas clair dans quelle mesure ce mod`ele r´eduit peut s’appliquer `a l’instabilit´e d’´ecoulement, qui est locale, et dont les temps de freinage de d´ependent pas de la densit´e de fluides frein´es dans les ´equations de base.

Fig. 6.1 – Simulations non stratifi´ees (sans composante verticale du champ gravitationnel solaire), bi-(gauche) et tri- (droite) dimensionnelles de l’instabilit´e d’´ecoulement `a partir d’une perturbation `a l’´equilibre (selon le vecteur propre “linA” de Youdin et Johansen 2007). Param`etres initiaux : ǫ= 3, St=0,1,ηvK/cs=0,05. Simulations tir´ees de mon stage de M1 `a l’universit´e de Princeton, sous la direction de James Stone.

Nous avons revisit´e cette instabilit´e lin´eaire pour contribuer `a son interpr´etation (Jac-quet et collab., 2011a)—article que nous avons ins´er´e `a la fin de cette section. Nous avons ´etabli, au moyen d’approximations successives, un mod`ele r´eduit, `a trois ´equations (´equations de continuit´e de la poussi`ere et du gaz, ´equation d’Euler pour la compo-sante verticale) qui continue de reproduire l’instabilit´e du syst`eme complet. Nous avons

´egalement montr´e qu’elle disparaissait en l’absence de rotation ou d’une d´erive initiale entre le gaz et la poussi`ere. Enfin nous avons montr´e que la croissance d’une perturbation ne pouvait se faire qu’en des maxima de pression (ou plus pr´ecis´ement, de maxima de perturbation `a la pression d’´equilibre, qui a un gradient radial).

Sur la base de ces r´esultats, notre interpr´etation est essentiellement la suivante : Sup-posons qu’il se cr´ee un maximum de pression en un lieu. Comme la vitesse de d´erive de la poussi`ere est orient´ee vers les pressions croissantes (voir ´equation (1.25)), ce maximum attire la poussi`ere. Cette poussi`ere entraine du gaz vers ce maximum qui s’en retrouve renforc´e. Et la boucle continue. L’instabilit´e d’´ecoulement n’existe pas en l’absence de rotation et/ou de d´erive de fonds entre gaz et poussi`ere en raison de la force de pression qui tend `a repousser le gaz et ansi `a s’opposer `a l’entrainement par la poussi`ere. L’im-portance de la force de Coriolis r´eside en le fait qu’elle peut faire d´evier les flots de gaz s’´echappant des maxima de pression et compenser la force de pression dans une sorte

d’´equilibre g´eostrophique analogue `a celui pr´esidant aux anticyclones terrestres. La d´erive gaz-poussi`ere, elle, permettrait aux maxima de balayer et capturer davantage de poussi`ere que dans une configuration statique. L’interpr´etation de Chiang et Youdin (2010) nous semble d`es lors devoir ˆetre r´evoqu´ee en doute.

Nous reproduisons ci-dessous notre article sur la question publi´e auxMonthly Notices of the Royal Astronomical Society en aoˆut 2011. Avertissons le lecteur que les notations utilis´ees dans cet article diff`erent quelque peu de celles du reste du m´emoire, mais y sont dˆument introduites dans la section de pr´esentation du mod`ele et de ses approximations successives menant `a un mod`ele r´eduit quadratique en le taux de croissance. Nous mon-trons ensuite (sans approximation) la stabilit´e du syst`eme en l’absence de rotation, avant de proposer notre interpr´etation dans une derni`ere partie.

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 198-0)